Petit mot de l'auteure : ce texte a été écrit pour la journée mondiale de la générosité, ainsi qu'un atelier contraintes surprises sur Bibliothèque de fictions (j'ai tiré les contraintes "tu peux répéter ?" et Votre personnage sauve quelqu'un)


Roberto n'avait jamais eu aussi froid.

Ce n'était pourtant la première fois qu'il se retrouvait sous une pluie battante, peu vêtu de surcroît. Mais à la météo capricieuse, s'ajoutait le souffle glacial de se savoir seul au monde. Avant, à chaque fois qu'il avait été surpris par un temps peu clément, il avait toujours pu rentrer chez lui se mettre à l'abri – ce qui n'était plus possible, vu que ses parents venaient de le mettre à la porte.

Il n'aurait pas dû être aussi étonné de cette réaction de leur part, ces derniers n'ayant jamais caché leurs opinions concernant les amours « contre natures » Tout de même, il n'aurait jamais imaginé que la découverte de sa bisexualité n'ait des conséquences aussi sérieuses que d'être livré à lui-même en pleine nuit, sous la pluie.

Rabattant son manteau – le seul qu'il avait pu enfiler avant d'être chassé – il marcha en retenant ses larmes. Où aller ? Il n'avait aucun ami dans la ville... Ce fut alors qu'il se souvint de cette annonce de colocation ; un certain Ben Lyk, qui n'habitait pas très loin, cherchait à partager son appartement. Roberto se mit alors en route, mû par un nouveau espoir.

Toutefois, quand il se retrouva devant la porte, il se figea.

Qu'était-il en train de faire ? Il allait vraiment taper chez un inconnu, pour lui demander de le prendre en colocataire, alors qu'il n'avait ni références, ni argent ? Qu'il avait l'air d'être un SDF sortit tout droit de l'enfer ? Pourtant, ce n'était pas comme si il avait vraiment le choix...

Avant de changer d'avis, il se décida à tenter cette dernière chance.

Quand Ben Lyk lui ouvrit, il faillit partir pour en courant. Pourtant, il se força à rester droit, expliquant ce qui l'amenait.

- Tu peux répéter ? Demanda alors le blond. Désolé mais je n'ai pas entendu.

- Je... je suis là pour la colocation.

- Ah !

Roberto vit alors son regard se poser sur lui, le scanner de la tête au pied. Il se sentit alors obligé de préciser l'évidence :

- Je n'ai pas de travail pour l'instant mais...

- C'est pas grave, le coupa Ben. J'ai assez d'argent pour payer un loyer pour deux. Je cherchais plutôt car je déprimais d'être seul. Je viens d'une famille nombreuse alors le passage à l'appartement est difficile. Enfin bref. T'es un serial killer ?

- Non.

- Bon. Bah ça devrait le faire alors. Bienvenue.

Il s'écarta alors pour le laisser entrer.

Roberto eut bien de la peine à comprendre que ce qui se passait était réel.

Ce Ben Lyk avait vu sa détresse et l'avait accueilli chez lui en invoquant un faux prétexte de solitude. Il était prêt à prendre des risques pour lui permettre de se réchauffer, avec dignité.

Roberto ne savait donc peut-être pas encore grand-chose de lui, si ce n'était qu'avec ce geste, il venait de lui sauver la vie.

Comme quoi, les âmes généreuses existaient encore. Et Ben Lyk était incontestablement l'une d'entre elles.