La Lance et le Marteau
Résumé
Aloy va aider Érend à retrouver sa soeur. Et si le fait de voyager en sa compagnie pendant un certain temps changeait un peu son point de vue ? Elle qui avait l'habitude de voyager seule se retrouve avec quelqu'un sur qui veiller... et surtout quelqu'un qui veille sur elle.
Notes
Et voici le douzième chapitre, qui correspond au jour 14 de l'Horizontober, avec "Hunter/Huntress".
Bonne lecture ^-^
XII – Rougemors
Hunter/Huntress (day 14)
Aloy ouvrit son sac et vérifia une nouvelle fois qu'elle avait tout ce qu'il fallait. Elle avait des potions, des réserves de nourritures et de munitions. Ses affaires devaient être prêtes pour ce soir, car elle quitterait Méridian le lendemain matin. Il lui faudrait passer par l'Avant-garde, pour prévenir Érend…
La Nora ferma son sac en fronçant les sourcils. Devait-elle vraiment prévenir le Capitaine ? Il semblait vouloir l'éviter ces derniers temps… et il ne le faisait pas de manière subtile, en plus… Mais bon, on ne peut pas dire que la subtilité soit la qualité principale d'Érend.
Cette pensée l'amusa un peu tandis qu'elle vérifiait le tranchant de sa lance. Si parfois l'Oseram pouvait faire preuve de douceur et de délicatesse - comme quand il avait séché ses larmes - il fonçait dans la mêlée la plupart du temps.
La Nora se trouvait à l'étage du Pavillon, se disant qu'elle n'allait pas tarder à aller dormir, hésitant entre dormir au Pavillon ou dans la maison d'Olin, qui lui appartenait maintenant.
C'est alors que du brouhaha à l'étage inférieur la tira de ses réflexions. Fronçant les sourcils, elle prit son sac sur son épaule et se dirigea vers les escaliers. Trop de bruit l'empêcherait de dormir, autant aller chez Olin… Elle descendit les escaliers et des brides de conversation lui parvinrent.
« Je suis désolé, mais vous ne pouvez entrer ici, » dit Ligan. « Il faut trois demi-soleils pour être admis au Pavillon. »
« Tu sais où tu peux te les foutre, tes demi-soleils ? »
Aloy ouvrit de grands yeux quand elle reconnut la voix d'Érend. Elle s'empressa de descendre les dernières marches pour rejoindre l'entrée, se frayant un chemin parmi la foule qui commençait à se rassembler.
« C'est la loi, » répliqua Ligan, imperturbable. « Vous ne pouvez entrer ici. Tout Capitaine de l'Avant-garde que vous soyez. »
« Faut-il vraiment que je défonce cette porte à coups de marteau ? » s'enquit Érend.
« Érend ? »
Aloy s'approcha et posa une main sur le bras de Ligan, pour qu'il la laisse passer. Elle vit Érend devant la porte. Il semblait un peu essoufflé et une légère odeur de bière s'élevait. Elle fronça légèrement les sourcils. Avait-il bu ?
« Aloy ! » Elle fut surprise de le voir si soulagé. Elle fit un signe de la tête à Ligan et sortit du Pavillon, son sac sur l'épaule. Ligan hocha la tête et une fois la Nora sortie, il ferma la porte derrière elle.
°o0o°
« Qu'est-ce que tu fais ici ? » s'étonna Aloy en regardant Érend qui semblait tout à coup à court de mots.
« Je… Tu… es encore là… » finit-il par souffler.
La Nora haussa un sourcil et mit une main sur sa hanche. « Tu ne croyais quand même pas que j'allais partir sans te prévenir ? » dit-elle, légèrement contrariée.
« Je… » Il se tut et se passa une main sur la nuque. Aloy soupira et secoua légèrement la tête.
« Tu n'étais pas là quand je suis passée par l'Avant-garde tout à l'heure. L'un de tes hommes a dit que tu serais là demain matin. Je pensais passer au moment de partir. » Elle lui lança un regard avec une petite moue. « Tu m'évitais ces derniers jours. » Ce n'était pas une question.
« Je… » Il se tut à nouveau. À quoi bon nier, alors que c'était la vérité. Mais pourrait-il lui avouer les raisons qui l'avaient poussé à l'éviter.
Non…
« Tu vas vraiment aller chasser un Gueule-d'orage… »
Elle pencha la tête sur le côté, légèrement, et hocha la tête. « Talanah a besoin d'aide et ce n'est pas sur Ahsis qu'elle pourra compter, » dit-elle. « Je pars demain matin. »
Il aurait voulu l'en dissuader, la mettre en garde contre le danger que représentait de telles machines, lui enjoindre de ne pas risquer sa vie, de revenir saine et sauve.
Mais il s'abstint. Aloy… était une chasseuse. Aloy n'était pas une jeune fille frêle, délicate et sans défense. Et Aloy allait partir à la recherche de Rougemors pour aider Talanah. Car Aloy aidait les autres. Elle l'avait aidé, lui. Elle aiderait Talanah… Il soupira doucement et laissa retomber son bras.
« Tu feras attention, pas vrai ? »
La Nora lui lança un regarda insondable, puis lui adressa un sourire en coin. « Je ne pars pas définitivement, Érend, » lui dit-elle d'un ton rassurant. « Je reviendrai. »
« Après ta chasse ? » s'enquit-il.
Elle hésita et fit une légère grimace. Elle décida de s'éloigner du Pavillon et fit signe à Érend de la suivre. Ils marchèrent un moment en silence jusqu'à ce qu'ils trouvent un banc sur lequel s'installer.
« Je ne vais pas revenir tout de suite, » dit Aloy, comme le craignait Érend. « J'ai des choses à découvrir… et je ne sais pas combien de temps ça va me prendre. »
« HADES. »
« Pas seulement HADES, » dit la rouquine. « Il y a… autre chose… »
Érend se tourna vers elle et la vit se mordre la lèvre. Elle semblait hésiter à se confier. L'Oseram ne dit rien. Elle parlerait quand elle serait prête. Se confierait si elle en avait envie. Et lui l'écouterait, quoi qu'il arrive.
« Tu te rappelles que je t'ai dit que j'étais une paria depuis ma naissance. »
« Comment oublier une telle chose ? » dit-il. « Je ne comprends toujours pas la raison d'une telle cruauté… »
Elle eut un demi-sourire. « La raison de mon bannissement est que… je suis une sans-mère… »
Érend ouvrit de grands yeux, essayant d'assimiler l'information.
« Tu… »
« Les Matriarches m'ont trouvée au cœur de la montagne. Je n'ai pas de mère… Et je veux découvrir les origines de ma naissance. Ai-je quand même une mère… ? Si oui, où est-elle… Pourquoi m'a-t-elle abandonnée… ? »
Érend sentit sa gorge se serrer. Elle se posait tellement de questions et il aurait tant aimé pouvoir y répondre sans qu'elle ait besoin d'aller risquer sa vie. Mais il était dans l'impossibilité de répondre.
Un silence s'abattit entre les deux jeunes gens et Érend réfléchit, les yeux perdus dans le vague. Il avait envie de l'accompagner, ne serait-ce que pour s'assurer qu'elle allait bien, qu'elle ne serait pas seule… Mais il savait qu'il resterait et qu'elle partirait seule… Car son devoir, à lui, était à Méridian.
« Je ne te demande qu'une chose, » dit-il avec sérieux. « Évite de te mettre en danger. »
Elle lui sourit et lui promit. Il dut se contenter de cette promesse et il la raccompagna jusqu'à la maison d'Olin.
« Tu as tout ce qu'il faut pour ton départ ? » demanda-t-il, avisant le sac qu'elle portait sur son épaule. « S'il te manque quelque chose, l'Avant-garde peut te le fournir. »
« J'ai tout ce qu'il faut, » dit-elle. « Mais merci pour la proposition. À demain. »
« À demain… »
Mais il n'avait pas envie d'être à demain…
°o0o°
Aloy avait déjà combattu des machines dangereuses, dont des Corrupteurs. Mais rien ne l'avait vraiment préparée à Rougemors.
Après avoir fait ses adieux à Érend, à Méridian, Aloy avait piraté un Galopeur et avait foncé plein sud, en direction de la localisation que Ligan lui avait fournie. Elle arriva à temps pour rattraper Talanah avant qu'elle n'entre dans le territoire de la machine. Et ensemble, elles assistèrent à la lutte entre Rougemors et Ahsis.
« Il se débrouille pas trop mal, » dut admettre Aloy, bien que ce soit une constatation amère. Mais elle fut coupée dans son élan quand le Gueule-d'orage l'envoya voler à l'autre bout du terrain. « Enfin… se débrouillait... » corrigea Aloy.
Avec Talanah, elles se mirent en place et la Nora scanna la machine avec son focus afin de repérer ses points faibles, puis commença à lui tirer des flèches sur lesdits points faibles.
La chose ne fut clairement pas facile. Talanah était une chasseuse douée et expérimentée, et Aloy l'était tout autant, mais le Gueule-d'orage était une machine vraiment redoutable. Elle était peut-être moins vicieuse que les Corrupteurs, mais sa taille et son poids en faisaient un adversaire à ne surtout pas prendre à la légère.
Un des lasers frôla le bras d'Aloy, la brûlant légèrement. Elle grimaça légèrement et jeta un coup d'œil à sa manche brûlée. Mais elle ne s'y attarda plus longtemps. Les soins attendraient, il fallait d'abord abattre Rougemors.
À force de persévérance et de flèches - beaucoup de flèches - Talanah et Aloy parvinrent à vaincre la machine. Après une dernière flèche d'Aloy, Talanah s'approcha de la machine affaiblie afin de lui porter le coup de grâce.
Les deux jeunes femmes se précipitèrent ensuite aux côtés d'Ahsis, pour assister à son dernier souffle empli d'amertume.
Aloy récupéra des pièces sur la carcasse du Gueule-d'orage, puis les deux jeunes femmes s'éloignèrent, avant que des Charognarde ou des Étincelles ne viennent faire leur travail. Talanah soigna sa Grive autour d'un feu de camp.
°o0o°
« Tu es sûre que tu ne veux pas rentrer à Méridian avant de poursuivre ta route ? » demanda Talanah. « J'aurais bien voulu présenter au Pavillon le nouveau Faucon que tu es devenue. »
« Je ne tiens pas à être Faucon, je n'aurais pas le temps nécessaire à consacrer à mon éventuelle Grive. »
Les deux chasseuses étaient sur le point de se séparer. Talanah en direction de Méridian et Aloy en direction de réponses - du moins l'espérait-elle.
« Il est vrai que tu as un emploi du temps qui fait peur… » dit la nouvelle Faucon-Soleil du Pavillon.
« Érend m'a dit la même chose, autrefois, » dit Aloy en souriant au souvenir. Son sourire ne s'effaça que quand elle croisa le regard amusé et le sourire entendu de Talanah. La Carja s'amusa de sa réaction, mais ne dit rien.
« Tu n'as besoin de rien ? » demanda-t-elle à la place, s'assurant que celle qui avait été sa Grive ne manque de rien.
« Non, j'ai tout ce qu'il faut. »
« Quand tu reviendras à Méridian, passe au Pavillon ! Tu seras à présent bien mieux accueillie que tu ne l'as été avec Ahsis. »
Aloy hocha la tête, promettant de le faire.
« Et si on me demande comment tu vas, que dois-je répondre ? » demanda innocemment Talanah.
« Qui te demanderait ça ? » s'étonna Aloy en chargeant son sac sur son dos.
« Celui qui s'inquiète de ton emploi du temps ? » s'amusa Talanah.
« Je pense qu'Érend a bien d'autres choses à gérer pour se tracasser de moi, » dit Aloy en haussant les épaules.
Un petit silence s'installa entre les deux jeunes femmes et les joues d'Aloy rosirent légèrement.
« Mais… S'il le demande… Dis-lui la vérité… Je vais bien. »
« Avec un bras blessé, » dit Talanah.
« Euh… non, ça, ne lui dit pas. Puis c'est juste une petite égratignure, ça va partir en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Contente-toi de lui dire que ça va. »
« D'accord, je ne dirai rien qui pourrait l'inquiéter ! »
Talanah fit un clin d'œil à Aloy puis toutes deux prirent des directions différentes. La Nora se demanda alors si vraiment, Érend s'inquièterait pour elle s'il apprenait qu'elle était blessée ? Elle avait demandé à Talanah de ne pas lui dire surtout pour ne pas paraître faible aux yeux des autres…
Aloy soupira et reprit sa route. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas voyagé en solitaire. Ou du moins, en avait-elle l'impression...
