La Lance et le Marteau

Résumé

Aloy va aider Érend à retrouver sa soeur. Et si le fait de voyager en sa compagnie pendant un certain temps changeait un peu son point de vue ? Elle qui avait l'habitude de voyager seule se retrouve avec quelqu'un sur qui veiller... et surtout quelqu'un qui veille sur elle.

Notes

Et voici pour le 20ème chapitre, qui correspond au jour 22 de l'Horizontober, avec le mot "Friend".

Ici, j'ai tenu compte du jeu, car les dialogues étaient vraiment tordants, ahah.

Bonne lecture ^-^


XX – Avant la dernière bataille

Friend (day 22)

Le coucher de soleil ramena Aloy à Méridian, au plus grand soulagement d'Érend. Et avec une bonne nouvelle : elle n'avait certes pas trouvé de Ravageurs à pirater, mais s'était rattrapée en piratant beaucoup de petites machines.

« J'ai deux Dents de scie, cinq Charognardes et une dizaine de Veilleurs. J'ai aussi quelques Galopeurs. Ce ne sont pas les meilleures combattantes, mais c'est déjà ça de pris. Oh et j'ai deux Piétineurs aussi. Je ne pensais pas trouver toutes ces machines si proches ! »

Érend hocha la tête. Si on lui demandait son avis, c'était surtout de savoir Aloy saine et sauve qui le rassurait plus que tout. Mais il tut ses pensées. Ce n'était surtout pas le moment de se laisser aller.

Il l'informa que les Noras n'avaient essuyé aucune perte et que de nouveaux pièges avaient été posés.

« Il faut maintenant se reposer, » dit-il. « Ils peuvent attaquer à tout moment, cette nuit comme demain. Il faut donc dormir dès qu'on le peut. »

« Mais… »

« Aloy, pas de discussion. Il y a assez d'hommes qui guettent leur arrivée. Crois-moi, si l'Éclipse arrive, tu le sauras. »

Elle s'avoua vaincue et retourna donc chez Olin. Lui-même resta à la caserne avec ses hommes. Ils dormaient quelques heures, chacun à leur tour, afin que tous puissent avoir un peu de repos.

°o0o°

Le lendemain matin, l'aube les trouva sans avoir essuyé d'attaque durant la nuit. Ce qui était un soulagement, mais aussi une inquiétude : quelle serait l'ampleur de la bataille à venir si la partie adverse se reposait ?

À l'Avant-garde, on lui apprit qu'Aloy avait passé la porte avec le but de pirater de nouvelles machines. Érend jura à ces mots. Elle veut vraiment que je meurs d'inquiétude pour elle, se dit-il en se retenant de se précipiter derrière elle.

Puis il se raisonna. Elle était forte, elle était une battante, une chasseuse. Elle allait s'en sortir comme à chaque fois. Mais juste, pour ses nerfs, il aurait préféré la savoir entre les murs de Méridian plutôt qu'à courir la nature dans le but de pirater des machines.

Je ne lui pardonne que si elle me dit qu'elle a réussi à ramener un Brise-Roc ou un Gueule-d'orage, décide-t-il en soupirant et en se renfrognant.

Mais quand elle revint, il ne la trouva pas en compagnie de machines – elle les avait laissées avec les autres, lui apprit-elle plus tard – mais avec un homme qui, d'après son accoutrement, était certainement Carja.

Un homme grand, athlétique, aussi peu protégé qu'Aloy lorsqu'elle portait son blason carja. Il portait un trop de couvre-chef couvert de plumes.

« Tu sais, Nil, » l'entendit-elle dire d'un ton las, « tu rends cela difficile d'être contente de te voir… »

Érend sentit alors quelque chose monter en lui. Un monstre de colère et de rage qui n'avait qu'une envie : qu'il mette son poing sur la figure de l'homme en face. Il fallut un moment à l'Oseram pour identifier ce sentiment : la jalousie.

Merde…

Aloy le vit enfin et se dirigea vers lui et Érend eut le déplaisir de voir l'homme la suivre, comme si cela était tout à fait normal.

« Tu es encore partie pirater des machines, » lui dit-il en guise de salut d'un ton qu'il espérait léger.

Elle haussa les épaules. « C'était nécessaire, » répondit-elle avec un sourire en coin. « Tu es fâché ? »

« Je ne le serai plus si tu me dis que tu as réussi à ramener un Gueule-d'orage ou un Brise-Roc, » dit-il d'un ton badin.

Elle rit et secoua la tête, faisant voleter sa chevelure de flammes. « Eh bien, je ne te savais pas si exigeant. Désolée, je ne ramène que quelques Piétineurs supplémentaires, ainsi qu'un Ravageur. J'aurais bien ramené une paire de Carapateurs si on ne m'avait pas interrompue. » Ce disant, elle jeta un coup d'œil à l'homme qui l'accompagnait. Érend avait bien senti que son regard ne l'avait pas quitté de tout son échange avec Aloy et cela lui déplaisait grandement.

« Bah, on saura qui pendre sur la place publique en cas d'échec, » plaisanta Érend.

« Charmant, » commenta l'homme tandis que l'Oseram et la Nora riaient légèrement.

« Oh, ne le prends pas mal, Nil, » dit Aloy. « C'est bien que tu sois là… même si tes raisons sont… euh… discutables… »

« Je ne vois pas en quoi elles sont discutables, » dit-il avec un sourire étrange sur les lèvres tout en haussant les épaules.

« Moi je vois très bien en quoi elles le sont, » répliqua Aloy. « Bon, si tu veux retrouver Lana… »

« Je ne cherche à retrouver personne, » l'interrompit calmement l'homme en haussant un sourcil. « Je suis ici car je vais pouvoir m'adonner à mon sport préféré sans craindre de conséquences. »

Aloy soupira et Érend se demanda un moment de quel sport il pouvait être question. Et son instinct lui soufflait qu'en vérité, il n'avait pas vraiment envie de savoir…

« Quoi qu'il en soit, la personne que tu ne cherches pas à trouver est certainement au Pavillon et va défendre la Crète, » reprit Aloy, l'air de rien. L'homme en face d'elle resta impassible et Érend remarqua que certains soldats Carjas lançaient des regards de biais vers ce Nil.

« C'était lui, non ? La bataille des Couards ? »

« Pas possible. Les Sables de Cinabre, c'était avant… et aucun survivant… »

« Eh bien, je n'aime pas me vanter, » dit Nil assez fort pour que les soldats sursautent et détalent rapidement.

Érend regarda l'homme avec circonspection. Aloy haussa un sourcil vers lui avant de soupirer.

« Je vais prendre congé, » dit Nil.

Il se détourna et commença à partir, mais Aloy, un sourire narquois aux lèvres, le rappela : « Nil, le Pavillon, c'est dans l'autre sens. »

Il l'ignora superbement, sans même prendre la peine de faire un signe disant qu'il l'avait entendue. Érend le regarda partir sans un mot puis se tourna vers la Nora.

« Ce type n'est pas tout net, pas vrai ? »

Elle haussa les épaules. « Il m'a aidée à vaincre les camps de bandits, » dit-elle. « C'est un bon combattant, il sera utile pour la bataille à venir. »

« Les camps de bandits ? » Mais il reprit rapidement, quand il la vit ouvrir la bouche. « Non, en fait, je pense que je préfère ne pas savoir comment tu occupais ton temps quand je ne t'avais pas sous les yeux. »

Elle rit un peu mais ne dit rien. Elle s'étira. « Je vais aller me reposer un peu, » dit-elle.

« Ok. L'Avant-garde sera à la Flèche, pour la protéger, » l'informa-t-il. « Et je pense que les Noras y sont aussi. »

« Je viendrai dès que possible, » dit Aloy en souriant.

Il hocha la tête et la regarda partir.

°o0o°

« C'est qui, les mecs contre lesquels on va se battre ? » demanda l'un des gardes de l'Avant-garde d'une voix ennuyée.

« Ils se font appeler l'Éclipse, » répondit un autre avant qu'Érend ait eu le temps de répondre.

« Mais qu'est-ce que ça veut dire ? »

« C'est quand la lune passe devant le soleil, idiot, » répondit Érend, qui n'était pas contre ce genre de conversation légère avant une bataille.

« C'est censé faire peur ? » s'enquit un autre, un peu incrédule.

« Chais pas, » dit un autre encore. « Ce sont des Carjas, toujours à piailler à propos du soleil et de l'ombre. »

« Bah, si ce sont des Carjas, ce ne sera pas une bataille difficile. »

« Ouais, ils s'habillent comme des piafs. Il suffit de les plumer. »

« Ne soyez pas arrogants, les gars, » avertit Érend. « Il ne faut pas confondre des Carjas avec des Carjas de l'Ombre. »

« Capitaine, votre copine Nora est arrivée, » dit celui à la droite d'Érend en lui donnant un petit coup de coude dans les côtes et en pointant un doigt.

Érend suivit la direction et vit en effet qu'Aloy était arrivée. Elle était en discussion avec de jeunes Noras. Des personnes de son âge… avec qui elle s'entendait apparemment bien…

Érend les regarda certainement trop longtemps, car il croisa le regard du Nora à qui Aloy parlait. Ils se regardèrent un moment avant que le garçon ne se penche vers Aloy pour lui parler. Celle-ci se tourna alors vers eux – vers lui – et fit un signe de tête. Elle prit ensuite congé des Noras et se dirigea vers eux.

« Ne me faites pas honte, les gars, » siffla Érend d'une voix basse mais suffisamment menaçante.

Elle arriva au moment où l'un des gardes ricana sous cape, sous le regard meurtrier de son capitaine.

« Te voilà Aloy. Comme tu peux le voir, nous sommes prêts à défendre la Flèche coûte que coûte. »

« Merci, Érend. Il faut vraiment éviter qu'HADES n'atteigne cette tour. Sans quoi, ce ne sera pas seulement Méridian qui tombera, mais tout le reste du monde… »

« Ça a l'air… énorme, » commenta l'un des gardes, soudainement sérieux.

« Mais nous n'allons pas nous défiler, » dit Érend. « Où est l'Avant-garde, les gars ? »

« En première ligne ! » répondirent les hommes d'une même voix.

« Et pourquoi ? »

« L'acier avant le fer ! »

« Et qu'allons-nous faire ? »

« Les frapper avec un marteau jusqu'à ce qu'ils ne se relèvent pas ! »

Il se tourna vers Aloy et la vit sourire légèrement. Avait-il réussi à la rassurer un peu ? « Tu entends ça ? Personne ne passera l'Avant-garde. Nous sommes ici pour Méridian. » Il s'interrompit un moment, avant de reprendre, d'une voix plus douce : « Et pour toi. »

« Merci Érend, » dit-elle, souriante. « Ersa serait fière. »

« Ah ! Seulement en cas de victoire ! » dit-il.

Et Érend espérait qu'ils gagneraient, peu importe que ce soit contre des machines ou des Carjas de l'Ombre.

« Par contre, j'ai cru comprendre qu'ils avaient des machines, » dit un des gardes. « Mais ils ont quoi comme machine ? »

Aloy ouvrit la bouche pour répondre, mais l'un de ses hommes prit les devants : « Des grosses qui font peur. Des temps anciens. »

« Des grosses qui font peur, comme ta mère, tu veux dire ? » dit un autre.

« Pire, » répliqua l'autre. « Comme ta femme. »

« Ça suffit ! » dit Érend alors que le petit rire d'Aloy lui parvenait aux oreilles. « Qu'est-ce qu'il ne faut pas supporter… »

« Bon, ça commence bientôt ? » demanda celui qui avait comparé les machines à la mère de son camarade. « J'ai la dalle. »

« T'as toujours la dalle. »

« C'est moi qui régale, » dit Érend. « Après la victoire. »

Cela sembla ravir les hommes. « Même la bière ? »

« Même la bière ! » confirma Érend.

« N'oublie pas que tu m'as fait une promesse similaire, » intervint Aloy en souriant.

« Ah, t'inquiète, je risque pas de l'oublier ! Mais on dirait que tu ne sais plus te passer de moi, hein ? »

« Là, je crois qu'elle vous aime bien, » dit l'un des gardes.

« Vous allez l'embrasser, Capitaine ? » demanda un autre.

« La ferme ! Maintenant, » dit Érend, gêné. Dire qu'il leur avait dit de ne pas lui faire honte. « Euh… » dit-il en se tournant vers Aloy. « Y a qu'à dire que c'est jamais arrivé. »

Elle fit une moue. « Il paraît, selon certaines coutumes carjas, qu'embrasser avant un événement important porte chance, » dit-elle.

« Euh… » dit Érend, à court de mot et rouge comme une tomate, tandis que ses hommes retenaient leur souffle, attendant impatiemment la suite. « Qu… qui t'a dit ça ? »

« Vanasha, » dit-elle. « En tout cas, c'est ce qu'elle a dit quand elle a embrassé Uthid. »

Érend connaissait un peu Vanasha. Il avait eu l'occasion de lui parler depuis qu'elle avait ramené Itamen et sa mère au Palais. Mais il ne savait pas qu'Aloy la connaissait aussi.

Et il savait aussi que la jeune femme n'était pas très subtile dans sa manière de flirter ouvertement avec cet Uthid… Et utiliser une fausse coutume pour arriver à ses fins à la veille d'une bataille importante… c'était tout elle, ça.

Aloy attendait toujours une réponse, apparemment. Il se racla la gorge avec l'intention de lui dire que c'était une fable que Vanasha inventée juste pour excuser son geste.

Mais la Nora ne lui laissa pas le temps de parler, car elle l'attira vers elle et, se mettant sur la pointe des pieds, posa ses lèvres sur les siennes. Ce n'était pas aussi brusque que la toute première fois, se dit-il alors qu'il entendait ses hommes siffler. C'était doux. C'était un baiser très chaste, mais c'était suffisant pour réchauffer tout son corps.

Au bout de quelques secondes, bien trop courtes pour Érend, elle le libéra et lui adressa un sourire mutin. « Même si cette coutume est fausse, autant mettre toutes les chances de notre côté, non ? » dit-elle.

« Euh… » fut tout ce qu'il parvint à dire, le visage en feu.

« Et t'as vu, c'était agréable cette fois, non ? »

Elle n'attendit pas de réponse et partit d'un pas guilleret avant de disparaître de son champ de vision en direction, devina-t-il, de la Crète.

« Comment ça, 'cette fois' ? » demanda l'un des hommes.

C'est vrai, ça… pensa Érend, abasourdi. Comment ça, 'cette fois' ?