La Lance et le Marteau
Résumé
Aloy va aider Érend à retrouver sa soeur. Et si le fait de voyager en sa compagnie pendant un certain temps changeait un peu son point de vue ? Elle qui avait l'habitude de voyager seule se retrouve avec quelqu'un sur qui veiller... et surtout quelqu'un qui veille sur elle.
Notes
Normalement, j'aurais dû poster les derniers chapitres ces derniers jours, mais les fêtes ont fait que cela n'a pas été possible. Mais elle sera terminée avant 2022, promis.
Et on est au jour 25 de l'Horizontober (j'ai passé le "Fruit"), avec "Blight". J'ai appris que cela voulait dire rouille. Et ça tombait juste bien pour ce chapitre.
Encore merci à Julia Lutecia pour sa review !
Je vous souhaite un Joyeux Noël ! ^-^
Bonne lecture.
XXII – Visite
Blight (day 25)
Comme l'avait promis Aloy, ses pas la ramenèrent à Méridian. La ville était encore en train de réparer les dégâts subis lors de la bataille et Érend et l'Avant-garde étaient sur tous les fronts. Cela l'aidait en plus à ne pas trop penser à Aloy.
C'est pourquoi il fut agréablement surpris quand, sur le chemin de retour le menant jusque chez lui, il vit devant lui une chevelure de feu. Il était tellement épuisé par sa journée qu'il lui fallut un moment pour comprendre.
« Aloy… ? » dit-il d'une voix à peine audible.
Mais ce fut suffisant pour qu'elle se tourne vers lui et lui adresse un grand sourire. Elle semblait… apaisée. Quelque chose dans son regard et dans son attitude lui dit qu'elle était parvenue à ses fins. Il lui adressa un sourire épuisé, mais un sourire qui venait du fond du cœur.
« Tu as l'air complètement épuisé, » dit-elle en guise de bonjour.
« Je dois avouer que tu n'as pas l'air la plus en forme non plus, » répliqua-t-il.
Car oui, même si elle semblait apaisée, elle n'en avait pas moins des cernes sous les yeux.
« Je me suis dépêchée… » dit-elle en haussant les épaules.
« Tu es rentrée depuis longtemps ? » s'enquit-il.
« À l'instant, » répondit-elle.
« Tu n'as pas encore eu le temps de manger, dans ce cas. Mon invitation tient toujours, tu sais. »
Il lui fit un petit clin d'œil charmeur et elle sourit, acceptant avec plaisir. Tout en l'escortant vers une taverne qui proposait les meilleurs plats de Méridian, Érend se demanda comment réagir avec elle. Pouvait-il lui prendre la main ? Serait-ce trop de la prendre dans ses bras ? De l'embrasser… ?
Il décida alors de la laisser faire le premier pas. Ce sera quand elle, elle le décidera, se dit-il.
°o0o°
Les semaines passèrent et se ressemblaient. Aloy avait décidé d'aider les Carjas et les Oserams à remettre Méridian debout. Les réparations prenaient du temps, mais avançaient. Et au sein de la ville se trouvaient à présent beaucoup d'étrangers, comme l'avait toujours souhaité Avad. Une ville ouverte à tous et à toutes, sans distinction.
Les soirs, les tavernes trouvèrent souvent Aloy et Érend en train de manger et de parler. Parfois, d'autres personnes se mêlaient à eux, comme Talanah, accompagnée d'autres Faucons, ou même les hommes d'Érend, qui taquinaient toujours leur Capitaine quand Aloy n'était pas dans les environs.
Mais les moments qu'Érend préférait étaient ceux où il était seul avec la jeune femme. Elle lui parlait alors de tout ce par quoi elle était passée avant la bataille. Certaines choses qu'elle n'avait pas eu le temps de lui raconter, comme son séjour parmi les Banuks. Elle lui dit aussi qu'il faudrait qu'elle lui présente une amie, ce qu'il accepta bien sûr avec plaisir quand il comprit que l'amie en question était une machine.
Enfin, elle lui parla d'Elisabet Sobeck. Elle lui raconta avoir retrouvé sa maison… et son corps. Elle lui montra également ce qu'elle avait retrouvé sur place, une espèce de médaillon en forme de terre. Un talisman qu'elle portait autour du cou, à côté du dernier cadeau de Rost. Érend l'écouta parler, heureux de la voir apaisée.
Un soir, alors qu'ils se promenaient près des remparts de la ville, Érend décida de lui poser une question.
« Aloy ? Es-tu… allé voir Rost… ? »
Elle ne dit rien, se contentant de secouer la tête. Elle prit une profonde inspiration et s'installa sur un banc qui se trouvait non loin. Il vint s'installer auprès d'elle.
« Pas encore, » finit-elle par dire. « En fait… je pensais… y aller bientôt… »
Était-elle en train de lui faire comprendre subtilement qu'elle allait bientôt partir ? Le Capitaine attendit la suite, qui ne vint pas.
« Et quand comptes-tu partir ? » demanda-t-il.
« Je… voulais attendre que les travaux de Méridian soient finis… car j'aurais aimé… »
Elle s'interrompit et Érend se tourna vers elle, surpris. Elle n'était pas du genre à avoir du mal à discuter. C'était d'ailleurs une des choses qu'il aimait chez elle : quand elle avait quelque chose à dire, elle n'y allait pas par quatre chemins. Mais là, étrangement, elle semblait hésitante.
« Aloy ? » dit-il, voyant qu'elle ne reprenait pas la parole.
« Oui, euh… Comme je disais, je voulais attendre la fin des travaux de Méridian… Car je sais que tu es occupé avec tout cela, en tant que Capitaine de l'Avant-garde. »
Il était en effet en train de s'occuper des réparations du pont et des portes de la ville, afin que la sécurité soit à nouveau opérationnelle.
« En effet, » dit-il.
« Et donc… je me demandais si… tu accepterais de m'accompagner, en fait. »
La demande le surprit un peu, mais lui fit également plaisir. Il avait cru qu'elle voulait de nouveau partir seule – ce qu'il aurait compris. Mais le fait qu'elle lui demande de l'accompagner lui donna un peu d'espoir. Car depuis qu'Aloy était revenu, rien de probant ne s'était réellement passé entre eux. Certes, ils passaient beaucoup de temps ensemble, mais rien de plus. Comme si le baiser qu'elle lui avait donné devant la Flèche, avant la dernière bataille, n'était réellement qu'un baiser de bonne chance.
Il dut mettre un peu trop longtemps à répondre, car Aloy reprit, d'une voix précipitée.
« Enfin… si tu as le temps et l'occasion… et envie. J'imagine que tu ne peux pas quitter Méridian comme ça. »
« En effet, » dit-il.
Il vit ses épaules s'affaisser un peu et continua rapidement : « Je ne peux pas quitter la ville tant qu'elle est dans cet état. Mais une fois les travaux terminés, bien sûr que je t'accompagnerai ! »
Elle lui sourit alors, comme rassurée. Et Érend comprit qu'en tant qu'ancienne paria, elle n'avait pas forcément eu l'habitude de demander ce genre de choses. Elle qui avait passé sa vie seule – ou presque – demander à quelqu'un de l'accompagner était un peu nouveau et contre-intuitif.
Pourtant, ce n'était pas la première fois qu'elle me demande de l'accompagner, se souvint-il.
Avait-ce été aussi difficile pour elle de lui demander, la première fois ?
°o0o°
C'est ainsi que, des semaines plus tard, Érend et Aloy étaient en route vers les Terres Sacrées des Noras.
Le voyage était plus calme que celui qu'ils avaient fait en direction des Belvédère ou du campement Banuk. Les machines qu'ils croisaient étaient bien plus craintives, au point qu'Aloy ne parvint pas à pirater de Galopeurs. Et cela arrangeait bien Érend qui n'était pas très à l'aise à l'idée de chevaucher des machines.
Bien sûr, certaines machines restaient plus dangereuses, celles qui avaient des instincts de prédateurs. Mais Aloy disait qu'étant donné qu'HADES n'était plus là et que les creusets avaient été neutralisés dans les environs, leur nombre devrait diminuer.
« Bonne nouvelle ! » avait-il commenté. « On se retrouve comme avant le Dysfonctionnement, on ne va pas s'en plaindre ! »
Arrivés aux frontières de terres noras, Érend crut qu'il ne passerait jamais, étant donné que les Noras étaient du genre à n'accepter que rarement les étrangers. Mais on le laissa passer sans rechigner car 'il accompagnait l'Élue'.
Quand ils furent assez loin pour ne pas être entendus des Noras qui les avaient laissé passer la frontière, le Capitaine décida d'assouvir sa curiosité.
« Le garçon avec qui nous nous sommes battus pour la Flèche… » dit-il.
« Varl ? »
« Euh… je suppose, » dit-il, se rendant compte qu'il ne s'était jamais intéressé au nom du Nora. « Lui aussi, il t'appelait 'l'Élue'. »
Aloy grimaça.
« C'est parce que je suis entrée dans la Montagne de la Toute-Mère, » expliqua-t-elle. « Elle m'a parlé. Depuis, je suis leur 'Élue'. » Elle eut un rire un peu sec et amer. « Ils m'ont bannie toute ma vie, mais pour peu que je rentre dans une montagne, me voilà leur élue. »
Elle secoua la tête, comme agacée par cette histoire. Il décida alors de ne pas la questionner plus. De toute façon, elle lui avait déjà dit tout ce qu'il avait besoin de savoir sur cette montagne et ce qu'elle avait découvert à l'intérieur. Il se demanda si d'autres personnes étaient au courant.
Presque tous les Noras qu'ils croisaient s'inclinaient devant elle et Érend comprit que cela l'énervait quand elle accéléra le pas. Il la suivit sans se plaindre. Lui-même serait agacé s'il avait été à sa place.
Enfin, ils traversèrent un fin pont et au bas d'une légère côté, Aloy s'arrêta et leva les yeux. Érend observa l'endroit et comprit alors qu'ils étaient arrivés à destination.
Un chemin menait à une maison et une barrière en bois l'entourait. La porte de ladite barrière était ouverte, cela dit. Et il pouvait voir des mannequins en forme de machine et il tenta d'imaginer une mini-Aloy en train de s'entraîner au tir à l'arc ou à la lance sur ces mannequins. Au-dessus de la côte trônait une maison tout en bois.
« Dire qu'il a fait tout ça… tout seul… » souffla-t-elle d'une voix émue.
Érend se tourna vers elle et vit ses yeux brillants. Il lui mit une main réconfortante sur l'épaule et ils avancèrent. Ils arrivèrent enfin devant ce qui devait être la tombe de Rost. Une pierre dressée avec ce qui semblait être des offrandes.
Aloy sembla hésiter, puis finit par s'agenouiller devant la tombe. Et tout à coup, elle eut l'air dépitée. Elle se passa une main nerveuse dans ses cheveux.
« Je… n'ai rien apporté… » souffla-t-elle. « Je n'ai rien… pour lui… »
Elle regardait les offrandes, désemparée. Érend s'agenouilla à côté d'elle et lui sourit.
« Ce n'est pas vrai, » dit-il. Et il se mit à fouiller dans son sac, sentant le regard interrogateur de la jeune femme sur lui. « Où est-ce que c'est… Ah ! Voilà ! Dans le fond… »
Et il sortit une statuette de métal rouillé. Il vit Aloy écarquiller les yeux en reconnaissant l'animal imposant. C'était la statuette de l'ours qu'elle avait trouvée il y avait une éternité de cela, quand ils étaient en route vers Belvédère.
« Tu… tu l'as gardé tout ce temps… » dit-elle, n'osant y croire.
« Bah, elle semblait te plaire, » dit-il en haussant les épaules et en lui tendant l'objet.
« Mais… ça pèse super lourd… »
Elle prit la statuette et la soupesa, comme ayant du mal à croire qu'il avait porté cela tout ce temps.
« Tu oublies que je suis un peu plus costaud que toi, » taquina-t-il. « Je pensais te la donner à un moment ou à un autre. Mais je me dis que peut-être, pour Rost… »
Elle hocha la tête, regarda la statuette un moment avant de la déposer sur la tombe. Ils restèrent un moment silencieux, puis Érend se leva.
« Je vais te laisser seule. J'imagine que tu as besoin d'un moment avec lui… »
Elle hocha la tête. « Tu peux… éventuellement voir si la maison… est habitable, » proposa-t-elle.
Il hocha la tête, se releva, reprit son sac de voyage et se dirigea vers la maison.
°o0o°
Aloy regarda Érend partir en direction de la maison qu'elle avait partagée avec Rost. Elle le vit ouvrir la porte et entrer. Elle ne détourna les yeux que quand il disparut à l'intérieur. Elle reporta alors son attention sur la tombe et prit une profonde inspiration.
Elle commença par retirer son focus, au cas où Sylens l'observerait encore, malgré la défaite d'HADES. Elle n'avait pas envie qu'il voie cela. Après avoir déposé son focus sur le sol à côté d'elle, elle posa une main sur la pierre de la tombe et commença à parler :
« Rost. Pardon d'avoir mis si longtemps pour venir te voir. Quand on s'est dit au revoir… j'ai dit que je te retrouverai. Où que tu ailles. Mais… finalement, tu as trouvé un… un endroit où je peux pas te suivre. »
Elle se mordit la lèvre. Tout le chagrin et toute la culpabilité qu'elle ressentait étaient sur le point de la submerger. Les souvenirs de l'Éclosion affluaient. Elle le revoyait combattant bravement Hélis pour la sauver.
« J'aurais dû me douter que tu regarderais l'Éclosion. Pour veiller sur moi. Que tu serais là quand les autres me lâcheraient. Comme toujours. Une dernière fois… »
Sa voix se brisa et elle dut papillonner des yeux pour ne pas pleurer. Pas tout de suite. Il fallait qu'elle lui dise que tout ce qu'il lui avait enseigné l'avait guidée jusqu'à présent et continuerait de le faire dans le futur.
« Je suis entrée dans la montagne, » dit-elle. « Tu te souviens, la veille de l'Éclosion ? La dernière leçon que tu m'as enseignée ? Tu m'as dit que je devais servir une cause qui me dépassait. Eh bien, je crois… Je crois que j'ai trouvé. Cette même cause qui animait Elisabet. Et GAÏA. Pour laquelle elles étaient prêtes à mourir… Voilà. J'ai trouvé. J'ai trouvé mon destin. Pour Elisabet. Et GAÏA. Et pour toi. »
Cette fois-ci, c'était les souvenirs de la bataille contre HADES qui emplissaient son esprit.
« J'ai réussi à planter le système de sécurité dans le crâne d'HADES. Enfin, si on peut appeler ça un crâne. La dernière bataille a eu lieu à Méridian. HADES voulait la Flèche. Ce ne fut pas une bataille facile… »
Ce disant, elle jeta un coup d'œil vers la maison et constata que de la fumée s'échappait de la cheminée. Elle sourit. Érend avait allumé un feu.
« Je sais comment Elisabet est morte, » dit-elle en regardant à nouveau al tombe. « Elle… s'est sacrifiée. Ça ne m'étonne pas. Elle a dit qu'elle voulait rentrer chez elle. Je suis allée la retrouver, comme un pèlerinage. Il fallait que je la retrouve, tu sais. Pour voir celle qui s'était tant battue pour la vie. »
Elle se demanda un moment si Rost serait fier d'elle, de ce qu'elle avait accompli depuis ce soir-là, où il avait tenté de lui enseigner une dernière leçon. En y réfléchissant bien, elle avait réagi et agi comme une enfant impulsive, à l'époque. Mais elle comprenait maintenant.
« Tu sais, la vie en tant que non-paria… ce n'était pas vraiment ce à quoi je m'attendais. C'est… bruyant… plein de gens. Enfin, tu me diras que c'est normal… Mais je n'ai pas encore l'habitude des… contacts humains… »
Elle rougit en repensant au baiser qu'elle avait échangé avec Érend, juste avant la dernière bataille. Il n'avait pas réagi et n'avait pas mentionné cet épisode depuis. Et Aloy ne savait pas si c'était bon signe ou au contraire…
« Je vais devoir poser quelques questions, tu ne crois pas ? Bref, je voulais te dire merci. Merci, Rost. Merci pour tout. Repose-toi bien, auprès de ta femme et d'Alana. »
Elle sourit à la tombe, la caressa du bout des doigts, puis se releva, son focus en main. Elle se dirigea alors vers la maison, la bonne odeur de feu de bois guidant ses pas.
°o0o°
Quand Érend était entré dans la maison, il s'était dit qu'il comprenait la réaction d'Aloy quand elle avait découvert la maison d'Olin. La maison qu'elle avait partagée avec Rost était… petite. Pas minuscule, chacun ayant une chambre pour plus d'intimité. Mais la pièce de vie était assez modeste, même par rapport à sa propre habitation, qu'il possédait à Méridian depuis qu'il était entré dans l'Avant-garde.
Il posa son sac dans l'entrée et entreprit d'allumer un feu, pour réchauffer un peu l'atmosphère. Aloy n'avait pas parlé de ses projets, mais il se doutait qu'ils passeraient au moins la nuit ici.
Il prit bien son temps pour allumer le feu et resta un moment devant le foyer, à regarder les bûches prendre. Il espéra tout à coup qu'aucun oiseau n'avait fait de nid au sommet de la cheminée.
Quel crétin, j'aurais dû vérifier avant, se morigéna-t-il.
Il se leva avec l'intention de sortir pour voir si tout allait bien, mais Aloy rentra à ce moment-là. Elle posa son sac près du sien, à côté de la porte et se passa une main dans les cheveux. Elle se racla la gorge, semblant hésiter.
« Est-ce que ça va ? » demanda-t-il.
« Oui, merci. Et… merci pour la statuette, » ajouta-t-elle. « Je… ne m'attendais pas à ce que tu l'aies prise, je te l'avoue. »
« Boh, elle avait l'air de te plaire. Je m'étais dit que je te la donnerai un jour comme cadeau d'anniversaire, » expliqua-t-il en haussant les épaules. « Mais il me semblait que le moment était mieux choisi. »
Ce à quoi Aloy hocha la tête. Elle resta un moment silencieuse et Érend commença à s'inquiéter. Quelque chose s'était-il passé pendant qu'il était à l'intérieur ? Il allait l'interroger à ce sujet, mais la jeune femme lui coupa l'herbe sous le pied.
« Érend, » dit-elle. « Est-ce que m'embrasser est si désagréable que ça ? »
Il en resta coi et il se douta qu'il devait avoir l'air un peu stupide, avec les yeux grands ouverts et la bouche bée. Mais qu'est-ce que c'était que cette question ? Il ne s'y attendait clairement pas.
Les joues d'Aloy rosirent légèrement et elle détourna le regard, comme intimidée. C'était la première fois qu'il la voyait ainsi.
« Bon, c'est vrai que la première fois, ça n'avait pas l'air génial, » dit-elle, le nez un peu plissé. « Mais je pensais que… la dernière fois… c'était mieux. »
Érend était toujours un peu perdu, ne comprenant pas très bien où voulait en venir Aloy. Puis, une question traversa ses lèvres avant qu'il ait eu le temps de la retenir : « Je pensais que tu ne te souvenais de rien… la première fois. »
Le rouge sur les joues d'Aloy s'intensifia. Elle se passa une main dans les cheveux. « Je ne m'en souviens pas, » dit-elle. « Mais… mon focus… a… Il a… »
« Enregistré ? » termina Érend qui ne savait pas s'il devait remercier ou maudire cet objet.
Aloy hocha la tête.
« Et comment en es-tu venue à penser que je trouvais ça désagréable ? » demanda-t-il, plus pour lui laisser le temps de rassembler ses idées que par réelle curiosité.
« Tu… n'as jamais tenté de renouveler l'expérience, » répondit-elle en le regardant dans les yeux sans ciller.
Il écarquilla encore plus les yeux, si cela était possible. Puis, il se mit à rire de façon incontrôlée, sous le regard plus que perplexe d'Aloy qui ne savait clairement pas si elle devait être vexée de sa réaction ou pas.
Alors, le Capitaine de l'Avant-garde arrêta de rire et réduisit la distance entre eux. Il la prit dans ses bras pour la serrer contre lui. Il enfouit son visage dans ses cheveux tandis qu'elle-même ne savait pas trop quoi faire. Il approcha ses lèvres de son oreille.
« Je voulais te laisser faire le premier pas, » expliqua-t-il. « J'ai conscience que tu as été une paria pendant longtemps… et je voulais te laisser faire à ton rythme… Ne pas te presser… Ne pas te faire peur… »
Il la sentit hocher la tête tandis qu'elle enroulait ses bras autour de lui. Il se sépara un peu d'elle, juste assez pour qu'il puisse glisser une main sous son menton et lui soulever le visage vers lui. Il fut fasciné par la façon dont ses taches de rousseur ressortaient sur la peau rougie de ses joues. Il se pencha et posa ses lèvres sur les siennes. Elle se laissa faire. Elle glissa même ses bras autour de son cou pour l'attirer au plus près d'elle et Érend fut plus qu'heureux de répondre à son étreinte.
Quand le baiser prit fin, ils restèrent dans les bras l'un de l'autre et Érend posa son front contre le sien, profitant de cette proximité dont il avait tant rêvé.
« Tu n'as pas idée du nombre de fois où j'ai voulu faire ça, je crois, » dit-il.
Elle lui adressa ce demi-sourire narquois dont elle avait le secret et qui le faisait fondre.
« Et sache que si la première fois, ce n'était certes pas le plus agréable des baisers, ça n'en reste pas moins un souvenir que je chérirai, » ajouta-t-il.
Elle grimaça. « Tu n'as pas plutôt envie de l'oublier ? » suggéra-t-elle. « Il avait l'air horrible… »
« Ahah, non, » dit-il avec un grand sourire.
Il lui embrassa le front tandis qu'elle faisait une petite moue adorable.
« Dis-moi, » demanda-t-il ensuite. « Tu as bien… gardé l'enregistrement ? »
Elle ne répondit pas, mais se mit à rougir. Ce fut une réponse suffisante. Il hocha la tête, satisfait.
« Bien, » dit-il. « Je pense que je vais bientôt t'emprunter ton bidule. »
« Je vais m'en débarrasser ! » dit-elle en fronçant les sourcils.
« Non, interdiction de faire ça ! » s'indigna Érend.
« C'est mon focus, je fais ce que je veux, » dit-elle en haussant un sourcil.
« Je vais te le confisquer, si tu oses faire ça, » répondit-il. « Je veux revoir cette scène encore et encore ! Le premier baiser qu'on a échangé et c'est toi qui me l'as donné. Un souvenir trop précieux pour être effacé ! »
« Mais… »
Il la fit taire d'un bref baiser sur les lèvres.
« Pas de mais, » dit-il avec un sourire amusé.
Ce à quoi elle répondit par une moue. Mais elle ne parla plus jamais de se débarrasser de cet enregistrement.
