Note
J'essaie de rationnaliser des trucs qui, de toute façon, ne sont pas rationnels. Mais bon, tant qu'eux ils s'y retrouvent, tout va bien…
Lorsqu'ils atteignirent la troisième porte, deux heures plus tard, Sasuke ne s'était pas même renfrogné. Ils avaient marché tranquillement, du pas d'un humain normal, dans le double but de se reposer et de recharger d'autres batteries nécessaires à la suite des événements.
« On sort le lit, cette fois ? demanda Naruto.
— Il y a pas besoin, c'est du sexe oral », déclara Sasuke en repliant la pile de traductions.
Naruto se stoppa un instant, puis il se tourna vers son ami pour formuler la question qui l'avait arrêté.
« Avec orgasme ou sans ? »
L'Uchiha tourna la tête vers lui, l'air de ne pas comprendre. L'air presque innocent.
« Parce que… la porte s'est ouverte après l'orgasme, tout à l'heure, et si c'est pareil pour toutes les autres, ben je me demande comment des gens normalement constitués peuvent faire ça en deux jours. Et d'où sortent les statistiques de Sakura. »
Sakura avait épluché le document, de telle sorte que son estimation était a priori plutôt large, d'après ce qu'elle avait laissé sous-entendre. Toutefois, Sasuke tomba d'accord avec son compagnon : douze orgasmes en quarante-huit heures, ce n'était pas à la portée de tout le monde.
Alors qu'ils s'interrogeaient, Sasuke émit un grognement.
« Tu sais quoi ? Je suis à peu près sûr que les imbéciles qui ont construit cet endroit n'ont pas pensé une seule seconde à adapter leur délire à deux hommes cis, même bi… »
Cette fois, Naruto le fixa, perplexe.
« J'ai cru comprendre qu'une personne avec un clitoris pouvait jouir de multiples fois sans pour autant… se vider. Puisqu'elle ne se vide pas littéralement, expliqua Sasuke, un peu mal à l'aise.
— Oh, non. Ça, j'avais capté. Enfin, je suppose que là-dessus, ils comptent sur l'orgasme clitoridien et sur les performances d'une espèce d'acteur porno, effectivement… »
Sasuke hocha la tête. Il serait bien incapable d'éjaculer autant de fois d'affilée. Naruto, lui, ne semblait pas choqué par l'idée, et cela le laissa à la fois démuni et plein de pensées salaces qu'il n'aurait pas dû avoir. Il allait, heureusement, percer ce mystère rapidement. Il ne serait pas déçu si ses fantasmes le restaient. Ce n'était pas une chose qu'il était censé attendre d'un partenaire. Mais que Naruto soit endurant était une norme, et que Naruto ne tienne pas les promesses que sa constitution hors du commun permettait d'envisager serait à ses yeux une minuscule trahison, comme si le blond, tout à coup, ne pouvait plus passer son temps à le dépasser.
« Non, Sasuke, t'as dit un truc, avant bi. Cisse ? C'est quoi ? »
Oh. Il avait dit ça sans y penser, comme une évidence, comme si tout le monde connaissait. Bien sûr, Naruto avait beau être queer, il ne maîtrisait pas forcément tout le spectre en question.
« C, i, s, épela-t-il. C'est pour parler d'une personne dont le genre correspond à celui qui lui a été assigné à la naissance. En d'autres termes, une personne non transgenre. »
Naruto dut consacrer plusieurs minutes à décortiquer les informations qu'on lui avait présentées. Sasuke en profita pour l'admirer sans aucune retenue, trop heureux que son coéquipier se plonge dans son cerveau atrophié pour le remarquer. Lorsque celui-ci le regarda de nouveau, il semblait avoir compris quelque chose. Sasuke ravala la bave qui lui montait aux lèvres.
Toutefois, le ninja blond ne paraissait ne pas avoir intégré la bonne idée.
« Oh. »
Naruto s'était concentré sur les notions présentées, mais, bien qu'il doutât avoir tout compris, le regard de son compagnon était trop perçant pour faire abstraction.
Il fit un pas vers lui, un peu chaloupé, et Sasuke ne put s'empêcher d'observer le pli gras que formait sa hanche lorsqu'il y posa son poids. Un autre pas, l'autre hanche. Le roulement des abdominaux vaguement dessinés sous le ventre moelleux ; les épaules épaisses, les bras aux muscles gonflés, les mains frôlant la ceinture de kunai et le pantalon détendu.
Lorsqu'il arriva à sa hauteur, Sasuke ne respirait plus.
« Je rêve ou tu me mates ? »
Sasuke déglutit. Les yeux de Naruto étaient dans les siens et, il avait beau être plus grand, il avait l'impression qu'il allait se faire dévorer vivant. Cela ne l'aurait pas gêné.
Ah, Naruto voulait jouer à ça ? Ah, il l'avait surpris et il pensait gagner en le provoquant ? Sur ce plan-là, Sasuke était toujours meilleur que lui.
« Je te mate. Ça te pose un problème ? »
Il entendit le bruit de déglutition dans la gorge de son vis-à-vis. Puis il sentit les mains rêches et calleuses sur sa taille, ses reins et enfin son dos. Il ne retint pas le frémissement qui le saisit. C'était chaud, cela accrochait un peu.
« Non, ça m'excite. »
Naruto n'aurait pas su faire plus court, plus osé et plus sec. Sasuke ne trouva rien à répondre. Avait-il perdu cette joute ?
« Je sentais tellement ton regard sur moi que j'ai pas pu réfléchir droit, quand même, hein. Où est passé ton flegme ? »
Où ? Hors de la grotte, dans des bois infestés d'ours qui avaient été témoins de leurs premiers ébats. Quand Naruto n'était pas encore un tel objet de fantasmes accessibles.
« N'essaie pas de justifier ta stupidité grâce à moi, crétin », siffla Sasuke, mais une main se posa sur son entrejambe et l'insulte fut noyée dans un soupir.
Naruto le massa quelques instants, juste assez pour que son érection devienne visible. Merde. Ils n'avaient pas même décidé de se lancer. Pourtant, c'était si naturel, lorsqu'ils savaient que c'était le bon moment. Si évident. Tellement évident que, porte ou non, mission ou non, Sasuke n'aurait pas résisté à ces avances. Il l'aurait laissé continuer, quel que soit le prétexte, parce que Naruto était désormais tout ce qu'il désirait.
« On commence par franchir cette porte et tu m'expliqueras après ? »
Sasuke répondit par un mouvement du bassin extatique, manquant fermer les yeux, mais les iris bleus étaient trop beaux, trop intéressés. Savoir qu'il fascinait à ce point Naruto était encore plus excitant que ses caresses. Lorsque celui-ci l'embrassa, il glissa ses doigts dans les cheveux blonds pour agripper le crâne, passant son autre main sur le pantalon avant de saisir une fesse. Avait-il déjà eu l'occasion de toucher cette partie-là ? Il ne se le rappelait pas. C'était ferme et confortable à la fois, épais, et cela se contracta dans le mouvement. Contre son membre tendu, il sentit le pénis de son camarade se manifester. Lorsque le baiser cessa, Sasuke ne put s'empêcher de vouloir retenir les lèvres pleines. Lorsque l'œillade hypnotisée fut de nouveau sur lui, il ne regretta pas la distance.
« Je peux tester un truc ? »
Tout ce que tu veux.
Mais cet aveu était encore trop intime pour le prononcer à voix haute. Sasuke hocha légèrement la tête, sans décrocher ses pupilles de celles de son amant, sans un mot. Il avait trop peur de ce qui pourrait sortir de sa bouche.
Naruto le dirigea contre la porte scellée, invitation à laquelle il répondit en trébuchant en arrière, trop vite pour ne pas avoir l'air pressé. Il la heurta durement, Naruto déséquilibré par son mouvement rapide.
« Oups. Ça va ?
— Ferme-la. »
Naruto fit une petite moue boudeuse, de celles qui annonçaient une remarque peu éclairée. Sasuke ne s'attendait cependant pas à celle-ci.
« Ouais, deux secondes, et j'aurai de quoi me la fermer. »
Bordel. Naruto comptait-il vraiment… ?
Lorsque le blond s'agenouilla devant lui, il n'eut plus aucun doute.
Merde. Merde. Merde. Merde.
Dire que ce simple mouvement faisait autant paniquer ses hormones. Naruto l'avait pénétré, pourtant ; lui-même l'avait gratifié d'une fellation. Il aurait dû être habitué, déjà, mieux préparé, moins pressé. Mais Naruto éveillait toujours en lui ce chaos de sentiments plus si contraires, composé d'excitation, de hâte, de réactions disproportionnées et d'un trop plein d'amour inexprimé.
Il aurait dû s'en douter : il était dingue de Naruto. Comment expliquer, sinon, l'effet que lui faisait cette seule image, cette seule idée ? Il aurait dû l'accepter depuis des années, mais avoir conscience de cet état de fait l'aurait-il préparé à cela ?
Il regarda les doigts défaire sa braguette, tétanisé. Ensuite, ceux-ci saisirent sa hampe. Naruto inspira. Enfin, la bouche brûlante s'empara de la verge dressée et Sasuke se demanda si ses jambes allaient tenir jusqu'au bout.
Complice de ses propres tentatives de déstabilisation, Naruto ne perdit pas de temps à titiller son gland. Ses lèvres humectées coulissèrent jusqu'à ce que son nez fourrage dans les poils bruns, où Sasuke sentit l'expiration du blond. Quelques mouvements encore, et Naruto avait pris le coup de main. Son imagination, ses modèles et son expérience suffisaient amplement. Comment avait-il pu croire une seconde qu'il ne serait pas à la hauteur ? Qu'il aurait la moindre difficulté ? Naruto, derrière son comportement compensatoire, souffrait-il tant du syndrome de l'imposteur ? Pourquoi pensait-il qu'il allait si mal faire ? Pourquoi avait-il besoin de tant de certitudes alors que faillir était son quotidien, se dépasser son credo ?
Songeant aux craintes de son coéquipier, Sasuke laissa échapper, volontairement, plusieurs râles de plaisir. Il n'était que peu vocal, mais il considérait qu'informer Naruto du bien qu'il lui faisait était plus important encore. Il aurait dû savoir que ce genre de validation était primordial. Naruto se battait à chaque heure du jour et de la nuit pour ne pas douter. Son comportement tout entier criait au manque de confiance en soi ; à chaque échec, il faisait semblant que ce n'était pas grave, mais Sasuke était conscient des blessures générées par ces manques, occultées derrière le rictus comique.
Le masque de Naruto était composé d'une joie crispée et d'yeux trop larmoyants pour être véritablement rieurs. La grimace était déformée par ses doigts, qui redressaient les commissures de ses lèvres et entre lesquels la langue tirée paraissait nonchalante. Mais si les phalanges forçaient ainsi la bouche, c'était parce que Naruto était incapable de sourire sans eux. C'était parce que l'expression puérile camouflait un faciès en pleurs dont les prunelles débordaient de désespoir et de rage. Un faciès qui ressemblait étrangement à ce que Sasuke voyait en lui-même.
Parfois, Sasuke considérait Naruto bien plus mystérieux que ce qu'on lui prêtait en tant qu'Uchiha. Il se cachait, oui. Mais il était si simple de faire semblant d'être insensible… Naruto avait adopté des couches différentes, assorties à sa peau et ses cheveux soleil. Personne ne savait qu'elles étaient là, éludant l'horreur de son quotidien et irradiant d'émotion. Où trouvait-il la force de transformer tant de souffrance en bonheur et en amour ? De faire croire que tout allait bien ? C'était une chose dont il était incapable.
Pourtant, lorsqu'il baissa la tête vers son pair, Naruto grimaçait pour de vrai. Ses lèvres et sa bouche déformées par le sexe, il levait les yeux vers lui, ceux-ci presque révulsés à cause de la posture. Et tout ce que Sasuke vit, dans cette expression-là, était l'envie de plaire. Le désir de donner. La volonté d'aimer.
Oh. Oui. Naruto aimait. C'était cela qui lui conférait tant de force.
Dans les iris ciel d'orage, dangereusement fascinés, Sasuke perçut cet affect, ce feu qu'il avait tant fui pour mieux s'y jeter à présent. Ce regard le brûlait sans lui faire mal. Et même s'il n'était pas digne de ce plaisir, Naruto lui donnait le droit de s'y complaire, car il le voulait ainsi. Sasuke avait le droit d'exister aux yeux de son pair. Il méritait sa place en ce monde. Que demander de plus ?
Naruto recula la tête avec délicatesse. Sasuke crut que c'était déjà fini, mais le blond avait feinté. À peine s'était-il retiré qu'il saisit le bout de la verge entre ses lèvres. Puis aspira. De toutes ses forces.
« Aaah ! »
La main pâle saisit les cheveux ébouriffés. Une lueur, dans le bleu, l'informa que Naruto avait cru un instant lui avoir fait mal. Sasuke gémit une seconde fois, moins surpris, lui faisant comprendre que c'était beaucoup trop bon. Son amant réitéra l'expérience. Sasuke sentit son gland attiré dans l'antre chaud, sans pour autant que le reste de la hampe y pénètre. Encore, et encore. Jusqu'à ce que Naruto fournisse un rythme intense de cette succion et que Sasuke doive se cramponner des deux mains à son crâne pour soutenir son corps tremblant.
Dans un coin de sa conscience, il réalisa que si pareil traitement le rendait fou, il ne l'amènerait jamais près de la jouissance. C'était un jeu, une énième provocation, une façon de le faire se tordre de plaisir. Il était impossible d'éjaculer ainsi. Cette étrangeté l'intrigua, mais Naruto choisit ce moment pour renfoncer le gland dans sa bouche. Il sentit les lippes serrer sa chair par à-coups. Il sentit même, une fois, la gorge déglutir autour de lui et le réflexe vomitif qui manqua submerger le blond. Son compagnon s'entêta sur quelques va-et-vient de plus, prenant sur lui pour refouler les toussotements.
Sasuke eut l'impression qu'il était capable de l'avaler. Naruto était un incube. Il l'avait vidé de ses forces, et allait maintenant le vider de son énergie vitale en aspirant son sperme. Il n'aurait pas été si concentré sur son plaisir qu'il en aurait ri, avant d'imaginer Naruto avec des cornes et un air machiavélique et de se demander si celui-ci aimait les jeux de rôle sexy. Il ne s'était jamais posé ce genre de question, pas plus qu'il n'avait jamais souhaité essayer. Cet homme lui faisait perdre la tête.
La succion s'arrêta. Le mouvement qui désolidarisa la bouche du phallus arracha à Sasuke un grognement de bien-être. Naruto s'essuya le menton et le fixa, attendant sans doute qu'il dise quelque chose plutôt que de souffler un « Ça va ? » et de se faire rembarrer.
Comme il ne répondait pas, trop plongé dans l'extase, le ninja eut le temps de trouver une autre formulation :
« C'était bien ? »
Sasuke hocha vigoureusement la tête.
« C'était pas ta première ? Où t'as appris à faire ça ? »
La question avait jailli, les masques de plâtre défaits ne pouvant la retenir. Le masque de Naruto était à terre, lui aussi : le blond ne cacha pas son rougissement. Ni son embarras, car il se gratta le crâne et ricana de son petit air stupide, mais ses yeux luisaient sereinement. Ni tristesse ni démon n'erraient dans l'azur. Sasuke admira la teinte, heureux que le compliment ait porté. Peut-être devrait-il fournir plus souvent ce type de commentaire ? Peut-être, s'il le faisait, Naruto n'aurait-il plus besoin de ce masque, et l'observerait-il toujours avec la même passion assumée dans ses prunelles ?
« Ben, j'ai lu et regardé du porno. Je me demandais si c'était pareil en vrai, alors j'ai essayé, pour voir. »
Sasuke émit un râle désabusé. Le porno n'était pas la meilleure école du monde, chacun savait cela. Naruto avait-il réussi à différencier le réalisable de la comédie préparée ? Jiraiya était peut-être très conscient de la valeur fictive de ce qu'il écrivait ; il en aurait informé son élève… Il ne posa pas la question, trop heureux que ce moment dure. Trop comblé par le plaisir et trop avide, à présent, d'en finir.
Mais Naruto semblait avoir saisi un fil de pensée loin de toute considération plaisante.
« Si la porte s'ouvre pas, il va falloir que tu jouisses, je suppose », commenta-t-il, sérieux.
Sasuke ressentit alors une frustration telle qu'il ne l'avait jamais vécu. Naruto comptait-il réellement le laisser dans cet état-là sans terminer ce qu'il avait commencé ? La colère le submergea à la même vitesse et il éructa :
« Oublie cette foutue porte et fais-moi venir, espèce de vide cosmique ambulant ! »
Le visage démasqué, à hauteur de sa hampe dressée, éclata de rire. Le rire aurait presque suffi à lui donner un orgasme s'il n'avait pas été précédé de ces merveilleuses sensations.
« C'était si bon que ça ? »
Sasuke s'énerva davantage.
« En plus d'être stupide, t'es aveugle et sourd ? Tu crois que je réagis comme ça quand je m'emmerde ? »
Naruto le fixa.
« Tu fais pas beaucoup de bruit, je trouve, en fait. C'est dur de savoir.
— Non, et c'est normal. On enregistre pas un film porno, justement.
— Oh. »
Son coéquipier n'avait pas appris cela avec Jiraiya. Un oubli, certainement. Il fallut à son esprit difficile quelques secondes pour digérer l'information, suffisamment pour que Sasuke s'impatiente.
« Si tu te dépêches pas, c'est moi qui le fais. »
La menace plana sur Naruto une brève seconde, le temps qu'il annule le premier fil de pensées au sujet des gémissements de Sasuke. Quand il intégra l'idée, et l'image, il baissa les yeux sur le sexe turgescent, couvert de salive, qui pulsait d'envie.
« Tu parlais de te branler ou de, euh… faire le mouvement dans ma bouche ? »
Sasuke parlait de se branler. Mais ce que Naruto venait d'envisager, c'était… C'était bien trop tentant pour ne pas donner une autre réponse.
« Tu voudrais essayer ? »
Le blond hocha vivement la tête.
« Pas en gorge profonde, hein. Je vais avoir besoin d'entraînement, pour ça. »
Il sait ce que c'est. Il compte y arriver un jour. Il veut continuer. Au futur. Au futur pas proche.
À ce constat, quelque chose dans l'esprit de Sasuke refusa de fonctionner. Puis un rouage, coincé, sauta carrément hors du mécanisme auquel il appartenait. Les autres, privés de mouvement, jaillirent dans tous les sens, incapables de supporter la torsion que les paroles de Naruto avaient généré. Des étincelles crépitèrent. Naruto sourit d'un air carnassier. Mince, il avait remarqué la débandade cognitive qu'il venait de déclencher.
Sans plus torturer l'âme déroutée de son compagnon, Naruto ouvrit la bouche et la referma à la base de la hampe, où son souffle caressa une nouvelle fois les poils bruns. Puis il recula légèrement, juste assez pour être à l'aise. Sasuke était occupé à encaisser le plaisir revenu lorsque son partenaire saisit sa main pour la caler de nouveau derrière sa tête. Son camarade lança un « huhum » lui signifiant qu'il pouvait y aller.
Sasuke ne se fit pas prier. Il se cramponna aux cheveux blonds et tâcha de retenir la limite que Naruto lui avait indiquée avant de ressortir doucement de sa bouche. Jusqu'au gland, qu'il laissa là. Puis il réitéra le mouvement en sens inverse, bien plus lentement, jusqu'à ce que Naruto émette une petite vibration de gorge annonçant la fin du parcours buccal. Sasuke s'ajusta, encore un peu, puis prit de l'assurance. Juste ce qu'il fallait. Juste assez pour se donner le temps de réaliser qu'il était en train de baiser la bouche de Naruto.
Le cri de jouissance jaillit, intense, incontrôlable. Naruto était beaucoup trop sexy et beaucoup trop avide de découvertes pour qu'il tienne un instant de plus. Lorsqu'il voulut s'écarter, une main retint sa hanche et les lippes érotiques rattrapèrent ce que Sasuke avait ôté. Les vagues qui suivirent furent telles un nuage électrique, un flou satisfaisant, au point où ses jambes manquèrent le lâcher.
Quand Sasuke rouvrit les yeux, Naruto était en train de se lécher les lèvres. Il n'avait entendu aucun bruit de crachat, mais il était incapable de parler assez distinctement pour poser la question. Alors, non pas pour en avoir le cœur net, mais pour montrer à Naruto toute sa gratitude, son émerveillement et son incommensurable reconnaissance envers ce partenaire qui, malgré la situation, ne s'était pas contenté de jouer aux acteurs pornos, mais avait aussi inséré dans l'acte toute cette innocence, cette bienveillance qui caractérisait la chaleur de son affection, Sasuke tira sur les cheveux pour faire remonter le visage démasqué.
Il était beau, cet homme au regard d'enfant et à l'âme de sage. Sasuke l'embrassa à pleine bouche, goûtant les relents de sexe sur la langue de son compagnon, forçant le faciès à rester contre le sien lorsqu'il entendit le « huhum » hésitant de son amant. Il n'y avait pas d'hésitation à avoir. Les pas que Naruto franchissait si spontanément, il voulait les suivre, les égaler, les seconder. Pas par rivalité, non – tout cela semblait si loin, désormais. Par respect.
Naruto lui rendit son étreinte, laissant ses épis se faire malmener, enfonçant ses ongles dans ses reins et glissant sa paume contre sa tempe, y retirant la mèche rebelle. Quand était-il devenu si naturel d'embrasser Naruto ? Quand allait-il s'en lasser ?
Oh ! jamais, il en était certain. Et dans un recoin moins sombre de sa psyché, celui qui se lovait contre la main chaude et si attentionnée, Sasuke conclut que le sentiment était réciproque. Naruto ne se passerait plus de ce contact, lui non plus. Naruto tenait à lui. S'il devait sombrer à nouveau, par il ne savait quel coup du destin, Naruto le sauverait. Naruto, quoi qu'il puisse faire, quoi qu'il puisse devenir, l'aimerait toujours. Naruto ne le laisserait plus jamais seul.
Tout à coup submergé de bonheur, chéri si sincèrement qu'il aurait voulu mourir ainsi, il retint un sanglot. Sa main tira davantage sur les cheveux ébouriffés pour empêcher son coéquipier de voir son expression. Il embrassa encore longtemps, assez pour que la minuscule couche de plâtre dont il avait besoin pour ne pas perdre totalement la face se reforme sur ses traits.
Naruto, quand ils se séparèrent, avait recouvré le fond de teint mat que les masques grimaçants avaient laissé derrière eux.
Un grondement retentit. Le blond pouffa. Cette fois, trop bien ancrés l'un à l'autre, ils ne tomberaient pas.
Note
J'aime toujours mélanger des choses drôles avec des choses très concrètes et d'autres très poétiques. Je ne sais pas si ça va toujours bien ensemble… J'espère que oui ! :)
