Note

Something Human de Muse a beaucoup inspiré la complicité entre les personnages ^^.


Le brun afficha son incompréhension sur son faciès dépourvu de masque. Naruto eut envie de se cacher derrière le sien, mais l'innocence, dans le lac sombre, l'encouragea.

« Physiquement, tout ça. T'as dit que j'étais à ton goût, mais… ça veut rien dire, tu vois ?

— Tu insinues que j'ai des goûts bizarres ? »

Sasuke l'attira à lui par sa verge et Naruto sentit son souffle contre son visage, son nez sur le sien et sa lèvre du haut frôler ses narines. Il avait l'air désemparé par la question, comme si elle possédait une réponse évidente.

Naruto eut le réflexe d'embrasser, en penchant la tête en arrière de deux minuscules centimètres. Son pair réagit délicatement au baiser. Lorsqu'ils se séparèrent, Naruto se trouvait démuni par tant d'attention.

« Ben… T'es un peu bizarre, Sasuke, alors… »

Il rougissait, et Sasuke semblait si excité, si malade de désir qu'il eut l'impression d'être en décalage avec le moment. On ne pouvait pas toujours être sur la même longueur d'onde…

« Attends, quoi ? »

Cette fois, son amant si esthétique le fixait, surpris.

Sasuke n'avait jamais l'air stupide. Même quand il faisait une tête étrange. Naruto était conscient qu'il avait tout le temps l'air stupide et que ses grimaces ne faisaient qu'accentuer le trait. Pourtant, son compagnon eut une réaction très différente de ce à quoi il s'attendait.

Au lieu d'essayer de le rassurer, de minimiser la catastrophe, il se mit en colère et siffla d'un ton mauvais :

« Mais qu'est-ce que tu croyais, en fait ? »

La fureur habitait tout son visage pâle, et il avait cessé ses caresses. Il semblait frustré. Son poing s'était contracté. Nu, excité et en sueur, toujours sous l'effet de l'aphrodisiaque, il était comme une bête blessée prête à sauter à la gorge d'un assaillant invisible. Le prédateur face à lui n'était pourtant pas Naruto. Ce n'était pas Naruto qu'il observait ainsi, le lac mystérieux, couvert de nuages de tempête, plongé dans la mer du sud aux reflets de soleil. C'étaient ses démons. C'étaient les requins mangeurs d'homme, les murènes et les horribles poissons des abîmes, imaginés là par quelque dieu cruel. Naruto, sous la surface idyllique, cachait un gouffre glacé par la profondeur, aussi sombre que les cendres dans l'âme de Sasuke, aussi inhospitalier que son cœur entouré de ronces.

Le blond fut si surpris par ce regard et cette plongée soudaine qu'il resta coi. Qu'y avait-il à répondre ? À développer ? La baudroie qu'il venait de cracher ne montrait-elle pas suffisamment l'état de ses entrailles ?

Alors, Sasuke eut une réaction peu adaptée à l'instant, mais qui, dans d'autres circonstances, était pourtant courante : il se plaqua la main sur le visage et poussa un lourd soupir au milieu duquel on perçut un juron.

« OK. Assieds-toi. »

Naruto imita son pair. Sasuke devait avoir pris une résolution et décidé d'une marche à suivre pour les sortir de là. Le jinchûriki regrettait d'avoir ouvert la bouche. Il ne pensait pas que répondre serait si compliqué pour l'Uchiha. Il était sûrement plus moche qu'il ne le croyait. Genre, pire que Lee. Et encore, Lee était carrément bien foutu, mais Naruto était conscient que son sens de l'esthétique était à revoir, et que ni ses sourcils, ni ses yeux, ni sa coupe de cheveux ne correspondaient aux normes de beauté de sa génération. Mais Lee n'avait pas l'air complexé par son corps. Son corps était un outil de combat, une lame bien affûtée qui avait survécu à toutes les épreuves, et son assurance l'avait même poussé à draguer Sakura, malgré tout ce qui était contre lui. Malgré Sasuke, tout de même. Le garçon ne s'était, de ce qu'il savait, jamais rendu compte que l'Uchiha n'était pas seulement plus fort que lui et que c'était surtout parce qu'il ne correspondait pas aux goûts de Sakura que celle-ci l'avait rejeté. Et puis, il avait un caractère un peu particulier.

N'empêche, Lee avait l'air d'être un grand romantique, aussi Naruto se prit-il à espérer qu'il trouve chaussure à son pied, un jour…

Pour l'instant, il s'apprêtait à parler de ses complexes avec Sasuke, tous deux nus, assis en tailleur sur des duvets froissés, le sexe en érection et son camarade en pleine crise existentielle, vu son expression. À quel point tout ceci pouvait-il devenir plus ridicule ? Et Sasuke suait toujours. Et c'était très érotique. Et il aurait préféré se consacrer au membre dressé de son vis-à-vis. Avec sa bouche. Pourquoi avait-il lâché cette question ?

Quel imbécile ! J'ai complètement cassé le moment ! C'est pas comme si j'avais pas envie de lui ! Pourquoi j'ai demandé ça ? On s'en fout !

Il ne s'en foutait pas, bien sûr. Il avait toujours posé le mec sûr de lui pour faire semblant, et il avait toujours prétendu être capable de séduire, grâce à… eh bien, il ignorait quoi. Comme il mentait, il n'avait jamais eu l'occasion de s'interroger sérieusement sur ce qui pouvait bien plaire chez lui. Les gens affirmaient que les yeux bleus étaient vecteurs de beauté. On pouvait être moche en ayant les iris clairs, pourtant, non ? Et puis, il avait ces stries, sur le visage, qui faisaient comme des moustaches, et même Kiba n'arborait pas autant de caractéristiques flagrantes de son lien avec son animal totem. Il portait sur ses joues les preuves de sa nature démoniaque. Qui n'aurait pas peur, en le voyant ? Il était un monstre, après tout.

Il se rendit compte qu'il avait baissé la tête. Il avait envie de pleurer. Sasuke allait-il, dans une mansuétude inédite, enjoliver les choses pour le rassurer ? Son ami n'était pas du genre à lui mentir, pourtant. Toutefois, il n'était pas non plus assez cruel, encore moins maintenant, pour lui annoncer qu'il était une bête difforme tout juste bonne à être chassée. Non. Il avait confiance. Sasuke ne le blesserait pas. Sasuke serait sincère. Il ferait la part des choses entre ses désirs, sa vision, et celle de la société. Il saurait lui répondre.

« Donc, tu ne sais pas à quel point tu es beau ? »

Il releva la tête, sidéré. Il aurait préféré qu'on lui dise qu'il n'avait rien de particulier, mais qu'il ne présentait rien de dégoûtant. Il était plus difficile de croire à un tel compliment que de se voir recalé à une norme, quand on était persuadé de sa propre horreur.

Mais Sasuke le regardait dans les yeux, avec un petit quelque chose proche de la pitié, entre deux remous du lac de légende, et Naruto sut qu'il pensait chacune de ses paroles.

« Et tu trouves que j'ai des goûts de merde ? » poursuivit son amant.

Celui-ci paraissait vexé, l'obscurité dans ses prunelles outrée et furieuse. Naruto déglutit. Il avait toujours envie de le sucer, de sucer la colère hors de lui, de lui faire comprendre que ce n'était pas grave, qu'il n'y avait pas de quoi réagir aussi fortement. Que c'était juste un caprice. Mais Sasuke prit les devants autrement – bordel, Sasuke était merveilleux, où cachait-il, depuis tout ce temps, autant d'empathie ? – : sa main s'éleva jusqu'à la tempe tannée et effleura à la fois les cheveux blonds, l'oreille, et la première des marques noires.

« J'ai pas des goûts de merde. Et même si j'avais des goûts de merde, Naruto… tu n'es même pas au courant que tu es ce qu'on appelle un ikemen ? »

Naruto, qui s'était laissé aller à la caresse, rouvrit les yeux.

« Euh. Genre, attends… J'ai vu ça, dans les tags, sur Henta… Enfin, bref. C'est un blanc qui correspond aux clichés de beauté de notre culture ? Avec les paupières doubles, les grands yeux clairs, et la peau pas trop mate ? »

Sasuke hocha la tête.

« J'ai l'impression que tu veux savoir si la plupart des gens te trouvent regardable, pas moi et mes goûts bizarres. C'est ça ? »

Il avait ponctué la réplique de guillemets, agacé qu'on puisse douter de sa perfection à tout égard – comme s'il était capable d'associer du jaune à autre chose que du bleu sans se rendre compte que le jaune était une couleur dégueulasse dès qu'on la sortait du contexte capillo-visuel de Naruto. Naruto savait pourtant qu'il était du genre à aimer les appartements design, bien rangés, les teintes sobres, les vêtements de marque… Comme tout le monde, non ?

« En fait, je connais même pas tes goûts en matière de mecs, répondit Naruto comme s'il avait lu en lui. Ça fait que deux jours que je sais que t'es gay, et pour l'instant, le seul avec qui je t'ai vu, c'est moi. Donc j'ai pas de référence, et t'as dit que je te plaisais, mais… on a pas que de l'attirance physique, tu vois ? Enfin, pour ma part, je sais que je suis attiré par toi parce que t'es beau, mais aussi parce que t'es toi. Je dirais pas non à ton sosie, mais ça serait clairement moins bien qu'avec toi. Je suis biaisé, quoi. Et… enfin… peut-être que toi aussi, un peu ? »

Oh. Sasuke avait déjà eu cette réflexion deux jours auparavant, lorsqu'il s'était rendu compte que son désir pour Naruto, s'il pouvait être exclusivement physique, venait chercher une tout autre partie de son anatomie qu'il n'était pas prêt à affronter. Naruto lui avait plus ou moins fait comprendre, par ses gestes et ses répliques maladroites, qu'il y avait aussi des sentiments de son côté. De toute façon, Naruto était incapable de ne pas insérer de sentiments dans ce qu'il entreprenait avec quelqu'un. Les trahisons les plus basses et les plus évidentes le faisaient souffrir, sa confiance bafouée par la nature vile des êtres.

Sasuke décida que son partenaire avait mis assez de son cœur prêt à être piétiné sous ses yeux – et sa verge – pour qu'il s'autorise à en faire autant.

« OK. Premièrement, même si je te connaissais pas, j'aurais envie de te baiser. »

Naruto fit un o avec sa bouche. Sasuke ne put s'empêcher de ricaner. C'était toujours drôle de choquer le blond.

« Deuxièmement, je pense avoir des goûts qui correspondent limite un peu trop à la norme. Mais comme on n'a peut-être pas la même vision de la norme, tu vas me donner quelques noms et je vais te dire s'ils me plaisent ou pas. »

Naruto se remettait encore du premièrement, mais il finit par hocher la tête et questionner :

« Des proches ou des acteurs ou autre ?

— Les deux ? C'est un peu subjectif avec les proches, mais je sais faire la différence entre mon attirance physique et le caractère des gens. »

Naruto se rasséréna. Sasuke était si sûr de lui… Même démasqué, il paraissait inébranlable dans ses convictions, incapable de tomber sur une colle, de se faire piéger par le doute. Cette époque-là était révolue. Sasuke savait ce qu'il valait. Il savait où regarder pour aller de l'avant. Naruto, lui, marchait toujours aussi laborieusement, traînant ses incertitudes avec lui comme autant de boulets au pied dont il lui était impossible de se débarrasser. Un peu comme les poids de Lee, au fond. Était-ce cela qui l'avait rendu si fort ? Il ne le vivait guère ainsi. Il se trouvait faible, en cet instant où Sasuke acceptait le rôle de psychologue amateur, à poil, dans une stupide grotte, en pleine mission, avec sa bite dressée entre ses cuisses. C'était ridicule. Il était ridicule. Il devait se reprendre. Ce n'était pas à Sasuke de le débarrasser de ces poids. Pas à lui de le soigner. Pourtant, un peu d'aide était la bienvenue, et le brun était là, à attendre ses questions, cette petite aura agacée flottant autour de lui comme s'il en voulait à il ne savait quoi d'avoir fait en sorte que Naruto se sente si mal dans sa peau.

Naruto proposa la première chose qui lui passa par la tête :

« Chris Hemsworth. »

Sasuke lui jeta un regard désespéré, auquel il répondit par une exclamation.

« Mais ! Thor, enfin ! Je vous ai montré ces films, ou bien ?

— J'ai pas retenu, il a un nom de merde !

— On s'en fout ! Est-ce que tu le baiserais ?

— Ouais, totalement !

— Parfait ! »

Naruto décida qu'il allait faire tous les Chris de sa génération, par acquis de conscience, ce qui énerva prodigieusement Sasuke. Puis il dévia sur quelques autres célébrités dont Sasuke n'avait, pour la moitié, jamais entendu parler. Il résulta tout de même de la conversation que les goûts de Sasuke correspondaient spectaculairement aux normes sociales, et que sa préférence allait aux blonds musclés. Naruto ne savait pas très bien quoi faire de cette dernière conclusion, car cela déclenchait moult rougissements incontrôlables, mais il fut rassuré par le test.

« Bon, est-ce que maintenant, si je dis que tu es beau, tu vas me croire ?

— Ça dépend, je suis plus beau que Chris Hemsworth ? plaisanta le jeune homme, qui avait récupéré ses entrailles, ses complexes, et soufflait dessus intérieurement comme pour les faire refroidir.

— Je te préfère à Chris Machin », concéda Sasuke.

Cette fois, Naruto le regarda comme s'il avait sorti une énormité – le fameux Chris avait été élu « Sexiest man alive », après tout. Sasuke éclata de rire par les yeux. Le blond ne le perçut qu'au feu d'artifice au-dessus du lac noir, puis l'explication suivit :

« Ça sert à rien qu'un mec soit beau si on peut pas coucher avec lui, abruti. Bon sang, tu veux pas savoir à quel point je suis content que tu sois bi… »

Naruto ravala sa fierté gonflée à bloc, sourit d'un air stupide à Sasuke en se grattant la tête tout aussi stupidement, et resta là, immobile, gêné, et trop heureux pour déterminer où il en était.

« Allez, Mister Univers, tu es toujours opérationnel pour t'occuper de mon problème ou je suis plus assez bien pour toi ? »

Naruto allait mettre un certain temps à intégrer autant d'informations, mais il décida que Sasuke avait fait assez d'efforts pour lui comme cela.

Pourtant, le brun n'avait pas changé depuis qu'ils étaient dans la grotte. Il agissait seulement différemment, comme si se défaire de tous ces masques protecteurs le rendait capable de s'exprimer et d'exprimer aux autres l'affection qu'il leur portait. Car Sasuke tenait à lui, sans quoi il n'aurait jamais pris la peine de le rassurer de la sorte. Sasuke était toujours ronchon, toujours acariâtre, toujours prêt à se chamailler avec lui. Sans les artifices, il se laissait juste aller. Il traitait les problèmes psychologiques de ses proches comme des choses à résoudre, qui le concernaient, et n'avait plus besoin pour ce faire de moyens tordus – dans d'autres circonstances, il se serait peut-être simplement jeté sur lui pour un flirt sauvage, histoire de bien lui montrer qu'il ne le dégoûtait pas. Tiens, c'est vrai, Sasuke était un être humain. Il l'oubliait si souvent… Il était déjà guéri de nombre souffrances, n'était-il pas normal que, dans ce cadre exceptionnel, il s'ouvre un peu ?

D'ordinaire, l'ouverture ne consistait pourtant pas à soutenir ses pairs de façon si directe, pas à les écouter, mais plutôt à laisser entrapercevoir les dégâts dans les steppes calcinées et le lac toxique. Le lac était sain, désormais. Les steppes, sous la cendre, commençaient à se régénérer et ce nouveau lien, entre eux, avait fait souffler le vent sur la lande, révélant le sol riche et les pousses vertes d'une future jungle luxuriante bien que dangereuse, infestée de créatures prédatrices et de plantes carnivores. Un écosystème effrayant, pour qui ne savait pas apprécier l'équilibre de la nature. Une esthétique parfaite, pour qui voyait la vie dans ce paysage inhospitalier.

La forêt était splendide, au fond du lac noir. La fausse perfection de Sasuke le rendait toujours aussi désirable, avec sa peau trop pâle, ses cheveux bruns secs, son épi gigantesque, ses iris sombres où erraient des fantômes à présent paisibles.

Naruto baissa les yeux sur le sexe turgescent qui semblait lui reprocher de prendre autant de temps à se pencher vers lui pour le saisir.

« Hé. C'est quoi, cette tête ? »

Maintenant, Sasuke lui demandait s'il allait bien. Pour le coup, le cerveau de Naruto aurait frit. Mais celui-ci, dont le regard était déjà attiré depuis dix minutes par la verge avide, ignora la pique et courba tout son tronc jusqu'à être plié en deux, le crâne entre les cuisses de son compagnon. Juste ce qu'il fallait pour saisir le gland entre ses lèvres et entamer une fellation. C'était loin d'être une position confortable, aussi Naruto finit-il à quatre pattes tandis que Sasuke poussait un soupir de contentement.

Il se demanda un instant si cet acte pouvait ressembler à une marque de reconnaissance pour les gentillesses que Sasuke venait de lui concéder. Son compagnon le prendrait-il ainsi ? Il ne voulait pas que son pair se méprenne, qu'il interprète de travers ses intentions ou ses sentiments. Jusqu'à présent, il avait vécu avec ces doutes, avec cette vague idée et toutes ces questions qu'il s'était empêché de formuler pour ne pas en souffrir. Il aurait pu faire avec encore longtemps. Il savait ce qu'il valait. Beau, laid, dans la norme, hors-norme, peu importait à ses yeux tant qu'il avait son rêve devant lui, si loin que se regarder dans une glace n'était pas un geste quotidien.

Pourtant, face à Sasuke, il se sentait si faible, si diminué, si pas à la hauteur, que n'importe quelle amélioration de son ego pouvait lui donner de l'assurance. Il était désiré. Il se débrouillait bien. Il était compatible. Il était beau. Pas de la même façon que l'Uchiha, mais ce qui ressortait de cette conversation était limpide : il plaisait à son partenaire parce que certaines personnes, dont ce dernier, pouvaient le considérer comme esthétique. Peut-être y avait-il des gens pour trouver Sasuke laid ? Était-ce seulement possible ? Tout le monde ne tombait pas instantanément amoureux du brun, après tout. Et tous ne souhaitaient pas le mettre dans leur lit au premier coup d'œil, malgré l'indéniable sex appeal de son camarade, en plus de son aura captivante et de sa belle gueule d'ange déchu.

Sasuke s'était détendu, sous lui, et cherchait à se déplier également, ankylosé par la pause. Quand il s'étala de tout son long sur le matelas, les jambes écartées, Naruto ne résista pas à fondre de nouveau sur le membre, léchant le gland, la base du sexe, goûtant la texture désagréable des poils sur les testicules. Une de ses mains se referma sur le pénis pour le masturber, tandis qu'il descendait vers l'anus, attiré par ses frémissements. Lorsqu'il donna un coup de langue puissant sur les chairs, Sasuke gémit et se raidit, mais avant qu'il n'ait le temps de recommencer, le brun se redressa, coupant l'accès.

« Mets pas ta langue là, OK ?

— C'est bon, pourtant, non ? interrogea Naruto, surpris.

— Oui, mais ça me gêne. Ça me paraît sale. »

Sasuke était du genre maniaque. Toutefois, Naruto ne put s'empêcher de faire remarquer qu'il appréciait la pénétration, doigts étrangers inclus.

« Je sais pas. C'est pas pareil. C'est une espèce de blocage, je présume ? »

Sasuke faisait des blocages sur quatre-vingt-dix pour cent des choses de la vie. Naruto aurait dû se douter qu'il y aurait bien, à un moment ou à un autre, un élément de ce style dans le sexe. Il ne s'attendait pourtant pas à celui-ci, aussi répondit-il naïvement :

« Si ça peut te rassurer, je suis pas scato. Et moi, j'aime bien ça, en fait ; je pensais pas que ça pouvait gêner une personne qui aime la pénétration anale… »

Sasuke, toujours sous l'effet de l'aphrodisiaque et enthousiasmé par les caresses buccales de Naruto, décida d'abréger la discussion en saisissant, dans les paroles de son camarade, ce qui lui permettrait de passer à la suite des opérations :

« Ça me dérange pas de le faire à mon partenaire, par contre. Tu veux ? »

Il n'avait pas daigné demander avec qui Naruto avait découvert cette pratique, ni comment, ni pourquoi. Les aventures de Naruto ne risquaient pas d'être composées exclusivement de vierges effarouchées. Naruto était le genre de type à attirer les cougars, en fait, et son ami avait forcément eu l'occasion de tester certaines choses. Le sexe anal n'était pas l'apanage des hommes, après tout.

Le blond avait hoché la tête vivement. Sasuke ne se fit pas prier pour le renverser dans l'autre sens.

Il prit le temps de l'embrasser longuement lorsqu'il se plaça au-dessus de lui. Puis il se redressa et recula pour l'observer, ce beau blond musclé au tronc large de partout – pas du tout comme Chris Machin –, avec son pénis dressé, ses poils dorés aussi en désordre que ses cheveux, et ses fesses écartées, parfaitement accessibles, entre ses cuisses puissantes. L'élastique du caleçon avait laissé des traces sur les hanches. La zone en dessous, presque jusqu'aux genoux, était délimitée par une pâleur plus marquée.

Ensuite, seulement, après avoir profité de cette vision, de l'aura que Naruto dégageait par tous les pores de sa peau, de cette sensation de danger imminent et maîtrisé, Sasuke se consacra au phallus gonflé et à ses sous-attributs. Sentir le corps se contracter et frissonner sous les assauts de sa langue l'excita davantage encore. Bientôt, il couvrait le membre d'un préservatif avant de l'enduire de lubrifiant. Il continua de lécher l'entrecuisse de Naruto tout en se préparant méthodiquement, empêchant le blond de regarder ses reins tant celui-ci se tordait de bien-être sous sa bouche. Dire qu'il appréciait cette pratique était un euphémisme, vu ses réactions.

Enfin, Sasuke put se placer sur lui, ses chairs déjà écartées par le phallus bandé. Naruto marmonna à quel point tout cela était à se rouler par terre. Sasuke ricana – ils étaient techniquement, en effet, en train de se rouler par terre –, mais acquiesça. Puis il s'affaissa doucement et entama quelques mouvements de hanches, lents et chaloupés, sans franchement ressortir. Quel besoin y avait-il de donner des coups de reins lorsqu'il suffisait d'onduler pour stimuler rapidement la prostate ?

Naruto grimaça sous lui, sifflant :

« La vache ! Ça serre, comme ça… Je tiendrai pas longtemps. »

Sasuke sourit. Son but était de faire jouir Naruto, et seulement lui, afin de voir si la porte s'ouvrait. Cependant, il ne se priva aucunement de son plaisir. La plénitude était là, la chaleur, l'impression que tout était à sa place et que l'orgasme pouvait monter à chaque instant. Les ondes addictives parcouraient son bas-ventre.

Soudain, une main mate se referma sur son sexe et commença à le masturber fermement. Naruto voulait donc le faire jouir en premier ? Ça n'allait pas se passer comme ça. Et puis, il était censé s'économiser, lui. Il ne trichait pas, lui. Il n'avait pas de stéroïdes Kyûbiesques dans le corps pour lui donner des capacités inhumaines et des couilles de tanuki. Réflexion faite, Naruto avait des couilles normales, pour ce qu'il avait vu. Bref. C'était une image, et Naruto n'allait pas l'avoir comme ça. Alors, Sasuke serra les dents et continua ses mouvements dans un sens qui ne laisserait pas le choix à son partenaire.

« Hmm ! »

Il allait perdre, c'était sûr. La deuxième main avait saisi ses bourses et les massait, tandis que l'autre continuait de suivre le rythme de ses reins sur sa verge et que les hanches se mouvaient doucement, tentant de correspondre à son tempo.

« Putain, Naruto, qu'est-ce que tu fous ? Il faut pas que je vienne, si on veut tester cette porte ! »

Naruto s'arrêta net, douché par le rappel, mais il était trop tard. Le geste avait suffi à stimuler son partenaire de toutes parts et celui-ci se répandit à peine sa phrase terminée. Au même instant, l'imbécile grimaçait, jurait et bloquait tous les muscles de son corps, les sourcils froncés.

« Merde ! Viens pas, viens pas, viens pas… répéta-t-il comme un mantra, jusqu'à ce que le brun sur lui se soit décontracté et ait cessé tout mouvement, essoufflé.

— Naruto… »

Le ton était menaçant. Le blond déglutit.

« Tu avais oublié, avoue ? »

L'esprit de Sasuke était déjà opérationnel. Il était grillé.

« Complètement. Désolé… »

Il se gratta la tête d'un air contrit et cela donna à Sasuke l'envie de le faire jouir – pour lui arracher cette expression ahurie de la figure, pas parce que ce geste si familier incarnait toutes les couches de la personnalité de Naruto et aurait été capable de le refaire bander sur-le-champ. Sasuke refoula ses désirs puérils et attendit placidement. Quelque chose. Un bruit. Le grondement désormais coutumier de la stupide porte rose. Rien.

Ils écoutèrent encore, mais le fuchsia ne s'estompait pas. L'entrée restait scellée.

« Bon, OK, on a compris, putain », s'impatienta Sasuke.

Il reprit ses mouvements, lentement, de façon à ne pas trop stimuler son propre corps malmené. Puis, il décida que les techniques de Naruto pouvaient tout à fait se retourner contre lui, et il passa sa main dans son dos pour saisir ses testicules tout en continuant ses confortables coups de reins. La victime s'exclama, geignit, grogna, s'affala de tout son long sur le duvet et poussa de longs râles aigus lorsqu'elle laissa le plaisir l'envahir totalement.

Cette fois, il ne fallut que quelques secondes à la porte pour se mettre en branle. Sasuke s'énerva, marmonnant des insanités au sujet des clichés ridicules liés au sexe, assurant que baiser dans les règles n'était pas forcément synonyme d'orgasme et que même un organe de type vaginal, validé par les hétérocentristes à la con – sans mauvais jeu de mots –, pouvait risquer douleurs, brûlures et autres joyeusetés s'il fallait absolument le pénétrer à tout bout de champ. Ah, mais oui, bien sûr, le vagin aussi devait être de compétition et capable d'inonder la grotte au moindre effleurement de téton, hein ? Bande de nuls.

« D'ailleurs, tu es sensible des tétons, toi ? » interrogea-t-il soudain tandis que Naruto rangeait leurs affaires, tentant de se faire le plus petit possible, car il se sentait en partie responsable de l'ire de son ami – leur test lui était complètement sorti de l'esprit parce que Sasuke était trop sexy pour lui, il avait fait traîner les choses parce que Sasuke était beaucoup trop sexy par rapport à lui, et peut-être aurait-il mieux valu qu'il n'accepte pas cette mission, en fait, même s'il avait très envie de coucher avec son coéquipier, parce qu'il n'était pas certain qu'ils s'en tireraient vivants ; soit Sasuke allait le tuer parce qu'il avait fait foirer son quota d'orgasmes à la journée – et donc la mission, soit Sasuke allait faire un ulcère, à s'énerver comme ça contre des normes certes crétines, mais si tabous que personne ne parvenait à accéder à leur remise en question.

Il répondit à l'interrogation, indécis :

« J'en sais rien, ni moi ni personne n'avons jamais essayé en contexte.

— OK. Mets ça sur ta liste de trucs à tester, on aura forcément l'occasion. »

Naruto l'observa ramasser son pantalon et son boxer, continuer à pester, et ne put s'empêcher de glousser. Sasuke était mignon, parfois.


Lorsqu'ils arrivèrent à la sixième porte, ils avaient passé la petite heure de marche à se chamailler au sujet de leurs célébrités préférées. Naruto n'en revenait toujours pas que Sasuke trouve Johnny Depp « dégueu » et « rabougri » ; Sasuke arguait que Naruto, lui, avait des goûts de merde et qu'il devait apprendre à faire la différence entre charisme et esthétique, parce que non, ni Gary Oldman ni R.D.J. n'étaient foncièrement beaux, et quel était son problème avec les acteurs qui jouaient des rôles de dérangés du ciboulot ?

« Ils me font penser à toi, avait rétorqué le blond, dans toute sa candeur provocatrice, alors que le mur se distinguait devant eux.

— Je t'emmerde », grogna son compagnon en constatant lui-même ses points communs avec lesdits dérangés.

Ils marquèrent une pause devant ce qui leur barrait la route, puis le rose se mit à luire. Ils pouffèrent tandis que Sasuke jetait leur torche dans un coin. Naruto en fit autant avec le matériel. Ensuite, il étala les duvets, sortit leurs nouveaux outils de travail, et extirpa de sa sacoche la pile de feuilles cornées qui déciderait de leur destin.

« Et merde. »

Entendant son partenaire jurer, le brun s'approcha.

« Ils se foutent de nous, hein ? »

Naruto hocha la tête, puis se gratta le menton.

« Bon, tu veux qu'on échange ?

— Pardon ? »

Ils n'avaient pas encore pris le temps d'enlever leurs pantalons, mais ils étaient proches et la lumière rose jaillissait, intense, à cause de leur excitation conditionnée. Dans d'autres circonstances, ils se seraient moqués de la teinte rougissante que leur conférait l'aura de mauvais goût.

« Ben, je sais qu'il y a une question de production de sperme, mais j'ai cru comprendre que c'était pas très recommandé de se faire écarter l'anus à répétition comme ça… T'as pas peur des hémorroïdes, fissures, ou quoi ? Ça fait pas mal, à force ? »

Sasuke avait déjà un peu mal. D'abord, parce qu'il avait fait le con. Ensuite, parce qu'il n'était pas habitué à tant de pénétrations d'affilée. Il n'avait jamais eu de problème jusqu'alors, et le préservatif et le lubrifiant garantissaient une sécurité presque totale. La fissure, il fallait être franchement malchanceux. Les hémorroïdes, c'était a priori impossible. Le sexe anal se contentait de faire saigner ceux déjà existants. Il ignorait si enchaîner les circlusions pouvait créer de micro coupures ou déchirures. Peut-être. Surtout si on y allait comme une brute. Mais il ne fallait plus y aller comme une brute, point. Et tant pis pour sa frustration. Cependant, rien de tout cela n'était important à cet instant, car Naruto avait proposé quelque chose d'inédit, et le rose de la porte aurait dû pouvoir se faire plus fuchsia encore.

« Attends, tu veux essayer ? »

Naruto fixa son expression surprise.

« Ben, pourquoi pas ?

— J'aurais cru que tu étais seme, pas versatile. »

Cette fois, son coéquipier comprit d'où venait son étonnement.

« Ben, j'en sais rien. Enfin, je présume que je corresponds à peu près à "seme", mais j'ai jamais essayé. Et tu donnes envie, en fait. Ça a l'air grave bien », développa Naruto afin d'éclaircir ses propres pensées autant que celles de Sasuke.

— Je suis une exception. »

Comme toujours. Rester calme. Arrêter de le percevoir comme un type inatteignable à qui tout réussit.

« Comment ça ? »

C'est bien. Poser une question simple l'air de rien. Ne pas lui montrer ma jalousie. Je devrais pas être jaloux. C'est débile… Putain. Je suis un gros nul.

Sasuke se fendit d'une de ces petites explications dont il avait le secret, la commissure moqueuse de sa lèvre s'agitant naturellement au rythme des mots. Naruto avait envie de l'embrasser, en fait. Pas pour le faire taire, juste à cause de ce pli érotique qui incarnait si bien sa personnalité.

« La plupart des hommes gay ne pratiquent pas tant que ça la pénétration. C'est compliqué, et on est peu à arriver à avoir du plaisir par la prostate au point de jouir. Les mecs que j'ai fréquentés étaient souvent agréablement surpris. »

Cette fois, Naruto ne put retenir la pique qui jaillit de sa bouche :

« Tss, encore un truc qui te place sur une espèce de piédestal de la rareté.

— Je t'emmerde, imbécile pervers.

— Faux seme, va », trancha Naruto, horripilé par la perfection de Sasuke.

Il ne lui était pas venu à l'esprit que, si lui-même aimait jouer le rôle de pénétrant, il avait intérêt à ce que son ou sa partenaire apprécie également la pratique correspondante. Sasuke interrompit toute chance de réflexion allant de ce côté :

« Attends, tu croyais que j'étais seme ?

— Ben… Sasuke, tu te rends compte de ton comportement, sérieux ?

— Non. C'est naturel.

— Ben, j'ai peut-être des préjugés sur ce qu'est un uke, mais tu fais pas du tout uke. Enfin, de mon point de vue, hésita le blond en se grattant le menton.

— Tu fais un peu uke… »

Le ton était distant. La lèvre était retroussée et le pli saillait. Sasuke cherchait à le taquiner.

« C'est parce que tu me connais trop bien. Et non, je me vexerai pas ! Je suis pas censé me vexer, si c'est ça que t'essayais de faire !

— Merde, t'es plus intelligent que je le pensais.

— Je t'emmerde, glaçon fondu.

— Faux uke.

— T'en sais toujours rien ! »

Naruto s'était redressé et tendait son poing vers Sasuke, menaçant et prêt à tout. C'était l'atmosphère parfaite pour tenter le coup. Il n'aurait pas envie de se défiler, il serait serein, poussé par sa quête de performance et la certitude que Sasuke, lui non plus, n'avait pas de préjugé sur leur échange. Le brun posa sa main sur son épaule, soudain sérieux.

« OK. Je te préviens, ça risque d'être pas super agréable. Tu veux pas t'habituer à la sensation avec les doigts pour cette fois, simplement ? »

Naruto réfléchit rapidement à la question, puis décida qu'il ferait mieux de prononcer tout haut l'inavouable :

« Je préférerais que tu puisses en profiter avec ta bite, en fait. Pas avec tes doigts. Que tu kiffes autant que moi je kiffe te prendre… »

La porte rose allait finir par imploser, s'ils continuaient ainsi à la titiller. Peut-être cela leur éviterait-il une énième séance pro-mission et physiquement laborieuse. Sauf que Sasuke se moquait éperdument de la porte. Sasuke, à présent que son compagnon lui avait présenté cette possibilité, avait très, très envie de la réaliser. Naruto était encore plus beau lorsqu'il donnait. Donner était dans sa nature. Le sentir en soi en train de s'inquiéter et de tenter de plaire, de toucher les parties sensibles, le voir imaginer toutes sortes de plaisirs annexes pour un cumul délicieux, était déjà une panacée incroyable. Si son coéquipier devait « recevoir » à son tour, il serait tout aussi actif, tout aussi attentionné, et Sasuke décida que le prendre devait être au moins aussi bon que d'être pris par lui.

Comme le masque de Naruto avait également disparu depuis longtemps, Sasuke s'exprima avec une facilité qui le déconcerta lui-même :

« Merde. C'est excitant, en fait. »

Il poussa un soupir, puis ajouta, dans un enthousiasme qui aurait pu paraître effrayant à tout autre :

« OK, imbécile pervers. Tu vas voir ce que tu vas prendre. »

Alors, Naruto rougit.

« Sasuke… Je crois que j'aime ça, quand tu me dis des choses sales. »

L'interpellé baissa les yeux sur lui, rougit à son tour. Naruto le trouva absolument craquant et eut de nouveau envie de l'embrasser. Sasuke manifesta ses propres désirs à voix haute :

« Naruto. Là, j'aimerais te prendre, justement. »

La porte sembla vibrer à ces mots, prête pour l'action, impatiente d'être elle-même écartée pour les laisser passer. Le jinchûriki frissonna et se débarrassa du peu de vêtements qu'il avait remis pour le trajet. Il allait définitivement faire la suite à poil.

« Ben vas-y, on s'y remet, alors ! »


Note

Encore une fois, j'ai vachement dévié. Et après, je m'étonne que mes textes soient trois fois plus longs que prévu xD. Mais c'était amusant, donc je ne regrette rien ! Qu'en pensez-vous ? :)