« Dis, il fallait pas que j'aille aux toilettes avant, par hasard ? »
Sasuke releva la tête.
« Surtout pas. »
À peine Naruto s'était-il allongé qu'il l'avait suivi au sol, l'avait embrassé passionnément, puis s'était placé à quatre pattes entre ses cuisses avant de les surélever à l'aide de ses mains. L'anus sensible de son compagnon l'attirait depuis leur dernier échange, et qu'y avait-il de plus idéal, pour le faire s'accoutumer à la future sensation de pénétration, que de le lécher en tous sens ? Il était remonté de temps à autre sur les bourses et la base du phallus ; Naruto avait gémi, tenté de saisir, sans succès, ses cheveux, et s'était résigné en attrapant les draps. Quand son partenaire avait cessé ses caresses buccales, le blond s'était rappelé avec angoisse que l'étape suivante allait sans doute lui donner envie d'aller aux toilettes – une ex lui avait dit que c'était souvent le cas lorsqu'on n'était pas habitué.
« Ah ouais ? C'est que j'ai un peu peur de me chier dessus, là. »
Sasuke l'observa, contrarié que ses inquiétudes aient stoppé le processus.
« Ça n'a rien de gênant ni d'étonnant. Ça peut arriver, c'est comme ça. Faut en avoir conscience et pas en faire toute une histoire. »
Naruto fixa son partenaire, surpris de son pragmatisme. Sasuke était du genre maniaque, aussi aurait-il cru que cela l'énerverait. Mais après tout, Sasuke pratiquait la pénétration anale, et cela ne le dérangeait pas de lécher cette partie du corps, voire d'y mettre la langue, avait-il senti – est-ce que ce type d'activité était sans risque si on avait fait des tests ? L'anus, c'était l'endroit par lequel le caca sortait. C'était normal que ça sente mauvais, normal qu'il y ait des accidents, normal qu'ils soient préparés à cette possibilité et qu'ils apprennent à ne pas en être choqués.
« Si tu voulais te prévaloir un minimum de cette situation, il fallait aller te soulager quelques heures plus tôt. Tout de suite, ça sert à rien, si t'as un système digestif en bon état, que tu manges assez de fibres, ce genre de chose… Y a des muscles qui retiennent tes selles assez loin pour qu'un pénis moyen ne les atteigne pas, de ce que je sais. Donc si tu chies juste avant, tu vas mettre de la merde à un endroit où, naturellement, il devrait pas y en avoir. Pareil si tu utilises une poire pour te nettoyer. »
Naruto était encore surpris de la capacité de Sasuke à donner ce genre d'information sans sourciller. Son amant n'avait pas cessé ses caresses et, ne pouvant user de sa bouche pour autre chose que parler, il avait commencé à le masturber doucement. Naruto n'avait plus trop d'idées reçues sur les relations sexuelles. Il savait que l'aspect aseptisé de la fiction était un leurre. En vrai, il y avait tous ces petits éléments logistiques, tous ces moments un peu bêtes, toutes ces étapes intermédiaires où l'on commu-niquait. Mince. Ça, c'était une belle formulation, en fait. Il découvrait soudain une autre raison pour laquelle il appréciait tant ces partages avec Sasuke : ils communiaient physiquement, n'hésitant pas à s'arrêter pour se comprendre, à ralentir leurs gestes pour respirer ou laisser respirer leur partenaire, ils échangeaient des banalités ou des déclarations gravissimes tout en pratiquant les plaisirs de la chair, et c'était ce mélange qui rendait l'activité si jouissive. C'était la façon dont Sasuke l'écoutait, dont ils se dévoilaient dans leurs complexes avant de les résoudre ou de les éloigner un peu, le temps de plonger en l'autre pour y caresser des terreurs en miroir, des idées noires aux nuances de pierre précieuse, des reflets de bonheur prenant la teinte des astres dans le regard de leur pair.
Dans leur amitié, leur amour, leur combat, leur luxure, ils fixaient en leur semblable ce qui faisait d'eux des êtres entiers.
« Ouais, je crois pas avoir la meilleure nutrition du monde… »
C'était tout ce qu'il avait trouvé à dire pour échapper aux émotions brutes que ce constat avait déclenché. Ce n'était pas le moment, il n'avait pas envie de ça. Pas maintenant. Il avait envie de Sasuke et de son désir. Il aviserait plus tard pour trier toutes ces sensations et les ranger dans son cœur et son esprit. Peut-être n'aurait-il jamais l'occasion de les partager avec son compagnon, mais il avait l'impression que Sasuke vivait la même chose, aussi conclut-il, pour se rasséréner, que celui-ci comprenait déjà. Cette fois, il n'y avait pas besoin de mots. Pas quand il voyait, dans le lac de légende, les reflets dorés de sa volonté jouant avec le clapotis placide. Pas quand il voyait, dans la jungle au fond du lac, des explorateurs à la tignasse blonde errer librement, sans qu'aucun animal sauvage les agresse ou les évite, comme si ces étrangers faisaient partie du décor. Comme s'ils étaient nés là. Oui, une part de Naruto était née en Sasuke, bien sûr, car Sasuke l'avait en partie fait. Naruto avait grandi avec le poids de Sasuke sur les épaules. Toutefois, il doutait toujours de la présence de ses avatars dans le cœur de son partenaire. Sasuke avait fui, lui. Sasuke s'était écarté suffisamment longtemps pour se débarrasser de tout espoir, de tout désir de survivre à sa vengeance, de toute envie d'être heureux. Lors de son éloignement, il avait fait chuter Naruto de ses épaules et, bien qu'ayant grandi par lui également, il avait renié leur lien. Dans le lac, Naruto percevait sa présence sans parvenir à y croire. Pourtant Sasuke était là, à ses côtés, et le laissait pénétrer en lui. Sasuke n'était peut-être pas encore capable d'espérer, mais il avait survécu, et il était indubitablement heureux. Plus que jamais, depuis leur entrée dans cette grotte.
Si le brun semblait vouloir se débarrasser au plus vite de la tâche, Naruto était terrifié par le moment où ils ressortiraient. Sasuke n'allait-il pas remettre son masque, se cacher derrière et jeter dans son gouffre intérieur ces instants de plénitude ? Comment allaient-ils faire pour communier de nouveau hors de cette mission si son ami se trouvait incapable de se défaire de son maquillage blanc ? Naruto préférait encore les couches intermédiaires, grimaçantes, à cette façade insensible.
« Mais ça va mieux depuis que je suis en paix avec Kurama. »
La réplique tira au visage démasqué une petite moue boudeuse. Naruto la trouva adorable. Comment avait-il pu rater autant de nuances dans les expressions de son amant ?
Sasuke conclut en réponse que Naruto n'avait donc pas à s'inquiéter. Avec un peu de chance, le Kyûbi avait peut-être même assez d'aval sur son corps pour retenir les déjections lorsque ce n'était pas le moment.
« C'est pas le cerveau, qui influence ces trucs-là ? interrogea le blond alors que son partenaire se saisissait du lubrifiant.
— C'est bien pour ça que t'as besoin d'aide. »
Le Kyûbi, attiré par une conversation qui tournait autour de sa personne, éclata de rire, dans l'esprit troublé de son hôte.
« Il dit que ton cerveau de pois chiche est trop petit pour y arriver tout seul, morveux. »
Naruto, perturbé par l'excitation, le trac, le doute, et la main gauche de Sasuke qui continuait de le masturber lentement, mit quelques secondes à comprendre la pique. Sasuke eut le temps de le héler deux fois avant qu'il ne sursaute.
« Hé, ça va ? Je peux ? »
Il donna une claque mentale au renard pour le chasser de la scène et se concentra sur le corps de Sasuke et la vision de son pénis bandé. Puis il se rappela la sensation de la langue entre ses fesses et hocha la tête devant les doigts dressés qui attendaient son accord.
« Tu me dis, si ça te perturbe que je te vanne pendant le sexe, OK ? » lança soudain son compagnon alors qu'il frottait le liquide poisseux contre son anus contracté.
Naruto réfléchit sérieusement à la question, admira le flegme dont Sasuke faisait preuve eut égard à sa mauvaise humeur ordinaire – qui devait être restée plantée dans un ours – puis souffla doucement :
« Non, non. C'est bien comme ça… »
C'était même rassurant que Sasuke campe le faux connard arrogant dans ces moments-là. Cela faisait partie de lui, de son petit jeu, son caractère, masque ou non. C'était précisément cela qui excitait le blond : que Sasuke soit si lui-même. Après tout, c'était cette version-là de son ami qu'il désirait et à laquelle il voulait rendre son plaisir.
Naruto frissonna. La lotion était encore plus froide que d'habitude, à cet endroit du corps. Sasuke le fixait attentivement, comme s'il avait peur de le casser. Il se serait vexé si cette inquiétude, chez le brun, n'avait pas semblé si sincèrement respectueuse.
Il expira longuement dans le but de se détendre, inspira, sourit à son vis-à-vis. Il tenta de transmettre d'un regard toute la confiance qu'il avait en lui. Le lac noir s'agita, troublé, flatté, en pleine rébellion, comme si Sasuke était toujours persuadé qu'il ne méritait pas un tel honneur. Il aurait dû le savoir, non ? Que Naruto lui confierait sa vie à tout moment ? Qu'il croyait en lui ?
Naruto se rappela les doutes qu'il avait lui-même émis, la façon dont Sasuke lui avait répondu et la façon dont il le voyait protester quand il portait son masque. Alors, enlacer Sasuke lui parut évident.
Il se redressa tandis que son pair s'enhardissait et enfonçait délicatement une phalange en lui. Sentant le mouvement, celui-ci s'apprêta à retirer sa main. Naruto la retint. Reposant sur la puissance de ses abdominaux afin que ses fesses ne roulent pas vers l'avant et n'obstruent l'accès à son compagnon, le blond saisit à deux mains le crâne brun et l'attira lentement à lui, se rallongeant, jambes écartées. Sasuke l'accompagna dans sa chute contrôlée. Lorsque les lèvres sèches furent au-dessus de son menton, il inclina la tête pour les embrasser. Doucement. Longuement. Avec amour. Sous ses doigts, Sasuke eut un frisson qui ressemblait à un sanglot. Au même instant, il sentait l'appendice dans son corps s'enfoncer distraitement.
Cela n'avait rien d'agréable, mais le baiser que Sasuke lui rendit dans un autre hoquet lui fit oublier le malaise. Il agita sa langue, aussi délicatement que possible, tentant de ne pas perturber la tendresse soudain palpable entre eux et qui faisait tant trembler son pair. Sur sa cuisse, parfois, le sexe frottait, brûlant, avide. Un dernier soubresaut saisit son amant, se répandant jusqu'au bout de ses bras, si bien que Naruto le sentit dans ses nerfs.
Sasuke ne se décolla de lui qu'au moment où il choisit d'enfoncer un deuxième doigt, après avoir détendu patiemment les chairs en faisant des cercles avec le premier. Lorsque Naruto put enfin observer le visage concentré de son camarade, il découvrit ses joues roses, réapprivoisa le petit pli rieur au coin de sa bouche, apprécia l'esthétique nez un peu retroussé. Puis il vit l'humidité dans l'obsidienne, et lui-même, sans bien savoir pourquoi, sentit ses yeux s'humecter.
Oh, Sasuke…
Il était incapable de deviner ce que traversait son pair ou ce qui avait pu déclencher une aussi fascinante réaction, mais il reprit ses caresses dans les cheveux, se jeta sur les lèvres comme pour les dévorer, et donna un léger coup de reins pour que les doigts ne s'arrêtent pas.
Ce n'était toujours pas bon, et il commençait à comprendre que cette première expérience ne pourrait jamais correspondre au plaisir que son coéquipier semblait ressentir dans cette position. Il commençait même à douter de pouvoir jamais s'y faire, tout du moins de pouvoir jamais profiter de ce bien-être comme le faisait son compagnon. Tout le monde n'était pas fait pour ça. Sasuke était une exception, là-haut, sur son piédestal de tous les possibles, avec ses capacités innées hors norme et sa suprématie jamais questionnée. Non, il ne fallait pas prendre ce chemin-là. Il allait tenter d'apprécier comme il le pouvait, avec son corps à lui, ses limites à lui, et c'était très bien ainsi. Il n'avait pas besoin de ressembler à Sasuke ni d'être Sasuke. Il n'avait pas besoin de faire comme lui pour lui rendre son plaisir. Il devait juste rester lui-même, et user de sa curiosité naturelle et de son amour impitoyable pour retrouver leur équilibre. Sasuke ne cherchait pas en lui la perfection. Il le cherchait, lui. Ce tressaillement intime le lui avait prouvé.
« On dirait que c'est bon ? »
Il hocha la tête. Il n'allait pas davantage apprécier l'étape suivante dans son concept, mais son anatomie était prête.
« Il faut pas que je me retourne, plutôt ? lança-t-il soudain alors qu'il calculait où Sasuke était censé stimuler ses entrailles. C'est pas mieux pour sentir, la première fois ?
— Non, je préfère gérer l'orientation de ton corps. Dans l'autre sens, ça te demande plus d'investissement, et comme tu connais pas ton angle idéal… »
Naruto acquiesça. Il avait compris.
Sasuke le fixa alors qu'il se redressait. Être regardé par Sasuke avait quelque chose de profondément érotique qui empêcha Naruto de penser à la sensation d'une excrétion incontrôlée, quand les doigts quittèrent son intimité. Le brun, lui, s'emplissait de l'image sereine sous ses yeux. Son coéquipier était à l'aise, détendu, comme si tout ce qui se passait était parfaitement normal. Comme si cette tentative n'était pas vouée à l'échec de par sa nature même.
Il se souvenait vaguement de ses premiers essais. Ils n'étaient pas glorieux. Il avait eu l'opportunité de tester la majorité de ces pratiques seul, lors de séances de masturbation où il avait pu découvrir des aspérités inconnues de son corps, apprendre à les contrôler, à les stimuler assez pour en ressentir de l'agrément. Il avait été surpris de l'intensité de celui-ci et n'avait eu de cesse, depuis, de le rechercher auprès de partenaires. Naruto avait peu de chances d'être comme lui. Surtout dès la première fois. Il espérait tout de même que cette nouveauté lui procurerait un minimum de plaisir, sans quoi son ami conclurait sans doute qu'il était un bien piètre amant – ou, peut-être, un bien piètre seme –, auquel cas, il se résignerait avec délectation au rôle auquel il excellait et laisserait Naruto, à l'avenir, se charger du reste du travail.
Cette pensée l'amusa suffisamment pour le sortir de l'état second dans lequel le baiser affectueux de son compagnon l'avait plongé. Il aurait payé cher pour que les statuts soient inversés, pour n'avoir qu'à attendre la sensation unique et se contenter de distribuer des ordres bilieux. Il n'avait jamais été un bon leader. Il était tyrannique, poussait les gens – pas exclusivement Naruto – à se rebeller contre lui, et était incapable de supporter la pression que représentaient les vies confiées durant une mission. Naruto, seul, alors même qu'il le défiait, était en mesure de le suivre, le seconder, le supplanter. Certainement parce que Naruto était plus fort que lui. Parce que Naruto savait marcher à ses côtés. Parce qu'il protestait sans pour autant douter de lui.
Le torse se soulevait régulièrement, avec une lenteur presque exaspérante. Les cheveux blonds collaient encore au visage couvert de sueur. La puissance de Naruto perçait toujours par tous les pores humides de sa peau, et la férocité de ce corps l'attira plus près. Il voulut qu'on le morde, que cette entité si accueillante révèle sa part de sauvagerie. Il ignorait comment obtenir ce résultat, aussi approcha-t-il son sexe protégé de l'antre de l'être humain fantasmé bête. À quel point était-il malsain de percevoir Naruto par le prisme de son empire démoniaque ? Si, à ce moment précis, les crocs du blond remplaçaient ses dents jaunes bien alignées, serait-il moins excité ? Oserait-il aller jusqu'au bout ?
Oui, seulement si Naruto lui assurait qu'il était là, lui-même, qu'il le voulait toujours. Seulement si c'était une réaction spontanée sans conséquence, ou que le jinchûriki gardait le contrôle. C'était ce contrôle qui rendait le pouvoir de Naruto si fascinant. C'était un danger factice, une menace latente dont l'issue ne pouvait être qu'agréable. Érotique.
Lorsqu'il fit passer son gland à travers l'anneau contracté, il sentit son partenaire inspirer et expirer et le vit grimacer. Le faciès reprit son expression neutre, attentif aux sensations, dès que la tête fut engloutie. Le plus dur était derrière eux. Sasuke s'enfonça davantage et surprit un ricanement, au milieu des soupirs de son compagnon.
J'ai vraiment l'impression d'avoir un gros caca coincé entre les fesses.
La lueur malicieuse, dans le ciel d'orage aux percées aquamarine, avait suffi à lui transmettre la pensée du blond. Il ne put s'empêcher de pouffer en réponse, et cette réaction sembla exciter Naruto, qui se mit à gigoter pour aller à sa rencontre, alors que sa verge, paisiblement baissée après un trop long manque de stimulation, se soulevait.
Ta gueule, Naruto, songea Sasuke, ce qui déclencha un rire goguenard du côté de son amant.
Les hanches, contre lui, rétorquèrent qu'il n'avait qu'à commencer à bouger. Il s'exécuta. Son camarade ne risquait pas de jouir par ce biais, pourtant, ce n'était pas une raison pour ne pas s'essayer au plaisir. C'était cela qui comptait, après tout. Il n'y avait que pour les concepteurs de cette stupide grotte que l'orgasme faisait foi.
Les chairs brûlantes autour de son phallus se contractèrent lorsque Naruto tenta de se redresser. Depuis combien de temps n'avait-il pas été pénétrant ? C'était bon, tout de même, bien que ce plaisir, sans être moins extatique, fusse différent de son favori ordinaire. Il répondit au mouvement en saisissant le bassin. Certaines de ses phalanges s'enfoncèrent dans le gras moelleux au-dessus des reins. Ses pouces tirèrent vers lui, plaquant les larges cuisses contre sa taille et les fesses rebondies contre son bas-ventre. Il poussa un gémissement et ferma les yeux. Merde. C'était vraiment bon.
Lorsqu'il souleva les paupières, Naruto le regardait, dressé sur ses coudes. Cette fois, son souffle saccadé ne laissait pas place au doute : il avait apprécié le mouvement.
Sasuke se retira légèrement avant de reprendre l'anus d'assaut. Un « Hmm » sonore retentit. Naruto le fixait toujours, les pupilles dilatées, un sourire heureux flottant sur ses lèvres sensuelles. Il se demanda un instant si le blond simulait, mais ce dernier ondula du bassin, puis émit un petit « Ooh » satisfait.
Bordel. Naruto était-il seulement capable de simuler ?
« Tu le fais exprès ou quoi ? »
Le jinchûriki pencha la tête et réitéra le mouvement. Sasuke y réagit et raffermit sa prise sur le corps indiscipliné. Un autre râle l'encouragea à continuer, suivi d'une réplique railleuse.
« C'est presque agréable, mais un peu, ouais. Ça a l'air de te faire de l'effet : je t'ai senti durcir, non ? »
Sasuke répondit en donnant un coup, déclenchant un hoquet. Puis il fit onduler ses reins, espérant augmenter le plaisir généré par sa présence dans l'antre brûlant. Les gémissements de Naruto reprirent, plus doux, plus modulés, et Sasuke réalisa que c'était un moyen pour lui de déterminer certains niveaux de bien-être afin de mieux percevoir leur origine. Il souleva davantage son compagnon, recevant un autre râle en récompense. Merde, Naruto était doué pour soutenir les délices du corps par ceux de l'esprit. Les jambes puissantes se resserrèrent autour de lui en même temps que les chairs humides. Il geignit à son tour. Puis Naruto commença à onduler avec lui et Sasuke répondit à ses gestes et à ses petits cris, emporté par son enthousiasme et sa volonté de plaire.
En fait, Naruto était doué tout court. Son imagination compensait ce qui manquait à son savoir, son empathie générait des initiatives extatiques, le confort de leur relation démasquée le rendait curieux sans complexes, avide sans violence, parfait sans effort.
Sasuke se sentit faiblir tout à coup, alors que le blond persistait à aller à la rencontre de ses mouvements et à faire résonner les échos des frissons qui parcouraient désormais sa peau. Sasuke remarqua ses tétons dressés et eut envie de les toucher, mais la position l'en empêchait. Au même instant, Naruto redécouvrait la capacité musculaire de son anus et étouffait son membre au rythme de leurs reins. Une contraction, deux, quatre. Sasuke perçut son orgasme monter sans prévenir, emporté par la voix érotique de Naruto et son corps trop compatible. Il continua ses va-et-vient un moment, s'assurant que son coéquipier puisse profiter de la sensation jusqu'au bout, s'il y trouvait au moins un peu son compte.
Le blond poussa un soupir de satisfaction lorsqu'il se retira. Le préservatif atterrit sur le sol.
« Waouh. Je comprends pas comment ça peut te faire autant d'effet, mais j'ai aimé te voir comme ça, Sasuke ! »
Naruto était tellement sincère et tellement adorable… Quand bien même il ne ressentait pas le même plaisir, la même plénitude, il était prêt à jouer le jeu pour son partenaire, à se complaire dans les impressions de l'autre. Naruto était incroyable.
Sasuke ne voulait pas lui laisser le moindre répit après pareille scène. Il se jeta sur son ami, l'embrassa à pleine bouche et chevaucha sa cuisse droite tout en saisissant sa hampe d'une main. Cette fois, Naruto s'étouffa et gémit sincèrement. Il pouffa dans leur étreinte. Son compagnon tenta de le dévorer plus encore. Sasuke claqua des dents. Naruto poussa un cri, puis un autre. Il réitéra ses gestes, manifestant son envie de mordre et de se faire mordre, pour de faux. Simulant leur éternel combat solidaire.
Il agrippa une touffe de cheveux blonds pour orienter la mâchoire dans l'angle qu'il souhaitait, bloquant Naruto au sol, ravageant sa bouche. Au moment où celui-ci tentait de se dégager de son emprise et échouait sous sa pression, il entendit le son rauque de la jouissance passer ses lèvres malmenées. Son poing serra, marquant une cadence plus soutenue, toujours régulière. Les tremblements suivirent, l'éjaculation leur succédant.
Quand Naruto eut cessé de se débattre, Sasuke le lâcha enfin et s'effondra sur lui.
« Merde. »
À bout de souffle, son compagnon dut attendre quelques secondes avant de haleter :
« Merde aussi. T'es… trop doué… enfoiré. »
Il avait toujours paru étrange à Sasuke de recevoir un compliment de la part de son meilleur rival. Pourtant, l'attention que lui portait Naruto, derrière le peu de ronchonnements qu'il lui adressait encore, montrait clairement son admiration. À travers ses gestes et ses paroles perçait cette envie de le flatter l'air de rien, par un réflexe défiant construit durant l'enfance.
Il n'était plus vraiment question de jalousie, toutefois, et Sasuke aussi se sentait prêt à caresser Naruto dans le sens du poil. C'était déjà fait, à plusieurs reprises. Il ignorait si les événements allaient le pousser à se conformer à cette nouvelle coutume, mais il se plaisait bien, dans ce cocon de sincérité. Il voulait y rester, continuer à recevoir les répliques honnêtes de son compagnon et à y répondre par autant de… bienveillance. Il ne le faisait pas exprès, pourtant. Il était toujours lui-même, avec son ton sec et son humeur acariâtre. Ce tempérament ne l'empêchait simplement plus d'exprimer ses pensées, qui jaillissaient, agréablement brutes, au rythme de leurs pas.
Ils s'étaient baignés longuement et il avait dû réveiller Naruto, qui ronflait allègrement, d'un coup de coude dans les côtes. Son partenaire n'avait miraculeusement mal nulle part. En revanche, il avait insisté pour poursuivre la marche en caleçon, fatigué de devoir remettre des vêtements qu'il était voué à enlever pour la dixième fois de la journée. Cela perturbait beaucoup son camarade, qui ne pouvait s'empêcher de se figurer régulièrement le mouvement des fesses et du sexe ballottant de son coéquipier. Naruto allait finir par le surprendre, si cela continuait ainsi. Et se foutre de lui. Ou se jeter sur lui avant la septième porte, ce qui était hors de question. Sauf s'ils se payaient du bon temps à flirter et se tripoter et prenaient bien garde à ne pas éjaculer. Enfin, pour sa part. Naruto pouvait éjaculer autant qu'il le voulait. L'enfoiré.
Il ricana à cette pensée. Naruto se retourna vers lui, l'air interrogatif. Sasuke répondit évidemment par une provocation acerbe et dépourvue d'efficacité.
« Comment tu as pu croire que tu étais moche avec un cul pareil ? »
Naruto fit une étrange grimace, mélange d'embarras, d'agacement et de joie. C'était si drôle et si touchant…
« Attends… tu me matais le cul ou c'était une réminiscence de tout à l'heure ? »
Sasuke le fixa d'un air de défi.
« Les deux, beau gosse imbécile. »
Occupé à faire la carpe, Naruto se prit soudain en pleine figure une surface sombre que la torche n'avait pas encore eu le temps d'éclairer, trop accaparée par le fessier rebondi qui faisait saliver son porteur. Sasuke ricana de plus belle, mais il s'approcha et tendit la main au malheureux.
Son ami lui adressa un petit sourire contrit, de ceux qui s'excusaient pour sa maladresse tout en espérant l'indulgence de ses pairs. Il l'avait. Sasuke trouvait la maladresse de Naruto aussi divertissante et attendrissante que le reste de sa personne. Il ne l'aurait pas aimé autrement.
« Bon, c'est quoi, cette fois ? »
Ils examinèrent leur pile de feuilles comme si une note explosive, cachée entre deux pages, allait leur sauter au visage.
« Oral. »
Leurs têtes se relevèrent lentement avant de se tourner l'une vers l'autre. Lorsque leurs regards se croisèrent, le même soupir en jaillit par étincelles fourbues : Ouf.
« On fait ça tout de suite et on s'arrête là pour la journée ? » proposa Naruto qui, malgré son endurance, commençait à trouver tout ce processus obligatoire fatigant.
Il était du genre spontané. Il aimait les surprises, les soifs soudaines et inexpliquées, la façon dont Sasuke l'observait, qui lui donnait envie de l'enlacer pendant des heures, et tant pis pour le sexe. Ce système de portes, d'idées préconçues et de guide de la baise lui déplaisait autant qu'à son pair, bien qu'il s'y résignât avec plus de facilité.
Il avait trouvé cela drôle un moment, durant la période où Sasuke râlait et où il avait l'impression qu'ils avaient de quoi s'amuser, sans penser au lendemain. Et voilà que c'était le dernier jour avant le départ.
Oui, bien sûr, ils en avaient encore pour un moment, ils avaient de quoi partager sans inquiétude, mais le coucher du soleil sonnerait la fin du séjour. La fin de cet épisode incroyable dont il doutait qu'il puisse se répéter hors de la grotte.
Et puis, il se sentait vidé de ses forces. C'était peut-être la fatigue psychologique qui prenait le dessus sur sa volonté ? Il avait envie de s'étaler sur le duvet et de s'endormir là, bercé par le son de l'eau et la chaleur étouffante des lieux. À ses côtés, Sasuke serait déjà tombé de sommeil.
« Naruto, hé ! »
Il sursauta. Merde, il avait fermé les paupières sans s'en rendre compte.
« Je suis crevé, moi aussi. Faut qu'on se bouge avant ça. »
Le blond installa un campement sommaire, plaça quelques pièges pour faire plaisir à la paranoïa de Sasuke – qui pourrait avoir l'idée saugrenue de venir les chercher dans cet endroit ? –, et laissa son compagnon dépaqueter les mets du soir. Comme convenu, Sasuke se chargea de mettre du poisson à griller. Ensuite, seulement, ils se tournèrent l'un vers l'autre.
Le brun défit nonchalamment sa braguette, ses yeux plongés dans ceux de Naruto. Ce dernier ne put que constater à quel point ce geste, pourtant si familier, lui faisait de l'effet, désormais. Était-il temps de parler de ces impressions ? Non… Il n'était pas en état, Sasuke non plus. Et puis, ils auraient tout le chemin du retour, le lendemain ou le jour suivant, pour cela. Et Sasuke était en train de s'approcher de lui avec son petit air de ne pas y toucher qui lui faisait complètement perdre la tête.
Ils s'embrassèrent et se caressèrent longuement, comme si l'épuisement les empêchait de faire des mouvements trop brusques. Ils profitèrent de l'instant, juste assez pour devoir retirer les poissons du feu. Ils étaient brûlants, autant finir ce qu'ils avaient commencé avant le repas. Ils étaient affamés, aussi décidèrent-ils d'en lancer une deuxième fournée.
Naruto jouit le premier, encouragé par la langue prédatrice de son amant et le lac de légende aux reflets fascinés qui le fixait sans ciller. C'était beau à voir. Il n'en demandait pas plus. Sasuke, lui, mit un temps considérable à venir. Ce n'était pas faute d'essayer, bien sûr, mais le brun était plus mal en point qu'il n'y paraissait. Il fallut des efforts et la concurrence de ses propres mains, habituées, pour qu'il atteigne l'orgasme.
Lorsque la porte s'ouvrit dans un vacarme ordinaire, ils s'étaient déjà tous deux jetés sur leur pitance. Naruto apprécia le repas, malgré l'absence de râmen, puis, après avoir soigneusement éteint le feu, il alla s'affaisser de tout son long sur les duvets. Sasuke lui tomba presque dessus et ils s'endormirent immédiatement, tandis que les ronflements du jinchûriki laissaient place aux tribulations du renard. Naruto ne put s'empêcher de sourire en l'entendant remarquer que sa main enserrait le poignet blanc de son compagnon. Et que Sasuke, qui l'aurait senti même dans un état second, ne l'avait pas rejeté.
Note
Je trouvais ça intéressant, et naturel, pour quelqu'un comme Naruto, de parler de choses qui sont d'ordinaire tabou dans le sexe. Je pense que ça permet une meilleure immersion, vu que ça ancre le propos dans la réalité. Qu'en pensez-vous ? :)
