Petit mot de l'auteure : texte écrit pour un atelier surprise de Bibliothèque de fictions, il fallait écrire sur trois contraintes piochées au hasard :
- un chat
- il pleut
- votre personnage a une canne
Contexte : post livre 2
Le chat était rentré par la fenêtre.
Normalement, il aurait pas dû pouvoir s'y engouffrer – les rares fois où il aérait sa chambre, Kaz veillait à ne l'entrouvrir que très légèrement pour éviter les intrus. Et encore, il gardait toujours plusieurs loquets pour que celle-ci se referme au moindre mouvement détecté.
Et pourtant, cette idiot de chat avait réussi à sauter sur son bureau. Kaz avait alors fulminé ; non seulement cette saleté de félin avait pénétré son espace intime, mais en plus il salissait ses papiers. La pluie s'était en effet invitée sur Ketterdam depuis une bonne heure et le chat était trempé. Il allait donc faire déguerpir le malotrus à coups de canne, quand la fenêtre c'était ouverte à nouveau.
Cette fois-ci, Kaz connaissait le visiteur indélicat : c'était Inej, qui rentrait de mission.
Quand elle vit le chat, maintenant installé sur la chaise du bureau, elle haussa les sourcils.
- Tu as un nouvel ami ?
- Pour avoir un nouvel ami, il faudrait déjà que j'en ai eu par le passé. Ce qui n'est pas le cas. Donc cette créature de malheur va partir, et vite.
Bien évidemment, sitôt qu'il s'approcha pour déloger l'imprudent chat, celui-ci s'échappa pour aller se loger au-dessus de son armoire. Kaz se sentit alors bien dépassé ; avec sa mauvaise jambe, l'endroit lui était difficile d'accès. Inej se racla alors la gorge :
- Tu sais... il pleut vraiment fort dehors. Tu devrai peut-être lui offrir le gîte pour cette nuit. Je te promets de t'aider à le faire sortir demain.
Le compromis étant acceptable, Kaz hocha la tête.
Le lendemain, Inej tint sa promesse et il put oublier le mécréant.
Pendant un mois.
Kaz avait en effet ouvert de nouveau sa fenêtre et, quand il leva les yeux de ses livres, eut la fâcheuse surprise de constater que le chat était revenu. Voilà ce qu'il en coûtait d'avoir écouté Inej : maintenant cet idiot pensait qu'il était une sorte de refuge pour peu que ses murs soient un tant soit peu ouverts.
Il se leva donc, claudiquant, bien déterminé à attraper le félin.
Au bout de dix minutes d'une course-poursuite acharnée, il mit enfin la main sur le chat.
- Et maintenant, dehors !
Pourtant, au moment d'ouvrir en grand la fenêtre pour le rendre aux toits environnants, il se retrouva à faire l'inverse : il referma la fenêtre, s'asseya sur sa chaise, garda le chat dans ses bras.
C'était idiot.
Inej n'était même plus là pour essayer de le convaincre de lui offrir l'hospice.
Mais peut-être était-ce là le problème.
Inej n'était plus là.
Elle était sur les mers, à l'autre bout du monde, en train de chasser les pirates.
Et lui... il se languissait d'elle.
Et même si c'était idiot de voir son amie dans ce petit chat trop habile, qui avait réussi plus d'une fois à s'inviter dans son lieu le plus intime... A ce moment-là, l'idée de le laisser partir lui était insurmontable.
Alors il garda le félin contre lui et ne chercha plus jamais à le faire partir.
