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Voilà le fameux chapitre avec une particularité, car il n'est pas de mon cru, vu que c'est une reprise d'un flashback du chapitre n°11 du premier tome, La voie de la destruction.


Chapitre n°5 :
Un avant-goût de dernière fois

[An 1 027 après J.C. / -1 008 avant Yavin]


- Tu me rends malade, lui cracha son père. Regarde tout ce que tu bouffes ! T'es pire qu'un satané porc zucca !

Dess tenta de l'ignorer. Il se ramassa sur son siège, et se concentra sur la nourriture dans son assiette en l'enfournant lentement dans sa bouche.

- Tu m'as entendu, fils ? lui lança son père d'un ton brusque. Tu crois que cette bouffe devant toi est gratuite ? Je paye pour cette bouffe, tu sais ! J'ai travaillé chaque jour de cette foutue semaine et je dois encore plus à la compagnie qu'au début de cette saloperie de mois !

Comme à l'accoutumée, Hurst était ivre. Ses yeux étaient vitreux, et il empestait l'humidité et la crasse des mines : il ne s'était même pas soucié de prendre une douche avant de s'emparer de la bouteille qu'il conservait sous les couvertures de sa couchette.

- Tu veux que je travaille deux fois plus pour te nourrir, fils ?! lui cria-t-il.

Sans lever la tête de son assiette, Dess lui marmonna :

- Je travaille tout autant que toi.

- Hein ? lui lança Hurst, sa voix prenant un ton menaçant. Qu'est-ce que tu viens de me dire ?!

Au lieu de se mordre les lèvres, Dess releva la tête et plongea son regard dans les yeux rouges et troubles de son père.

- Je viens de dire que je travaillais tout autant que toi. Et j'ai seulement dix-huit ans.

Hurst se leva de table en repoussant son siège derrière lui.

- Dix-huit ans, mais encore trop stupide pour savoir quand la fermer !

Il secoua la tête d'un côté vers l'autre pour exagérer son mécontentement.

- Tu es vraiment la malédiction de ma chienne de vie ! reprit-il. Un fléau !

Dess jeta sa fourchette dans son assiette et se leva lui aussi brutalement. Il était plus grand que son père, et son corps se musclait chaque jour davantage en raison du travail dans les mines.

- Tu vas encore me battre ? cracha-t-il à son père. Tu vas me donner une bonne leçon ?

- Qu'est-ce qui ne va pas chez toi, fils ? lui demanda Hurst, les yeux écarquillés.

- J'en ai marre de tout ça, répliqua Dess d'un ton brusque. Tu m'accuses de tous les maux, mais c'est toi qui dépenses tous nos crédits en alcool. Si tu buvais moins, on pourrait peut-être quitter cette satanée planète ?

- Espèce de sale gamin impoli et grande gueule ! beugla Hurst en soulevant la table pour la projeter contre le mur.

Il bondit sur Dess et le saisit aux poignets, son étreinte aussi puissante qu'une paire de menottes en duracier. Le jeune homme tenta de se libérer, mais son père faisait vingt kilos de plus que lui, dont la moitié en muscles.

Voyant que son action était vaine, Dess cessa de gigoter après quelques secondes. Mais il n'allait pas se mettre à trembler et à pleurer. Pas cette fois.

- Si tu me bats ce soir, lui lança-t-il, sache que ce sera peut-être la dernière fois, vieil homme. Tu ferais bien de m'étendre pour de bon.

Et Hurst l'écouta. Il frappa son fils avec toute la sauvagerie d'un homme désespéré et amer. Il lui cassa le nez, tabassa son visage, et lui fit deux yeux au beurre noir. Il lui cassa également deux dents, lui fendit la lèvre et lui fractura deux côtes. Dess ne prononça toutefois aucune parole et ne versa aucune larme.

Cette nuit-là, Dess s'étendit sur sa couchette, le corps trop contusionné et gonflé pour parvenir à dormir, une seule pensée occupant son esprit comme bien trop souvent et étouffant les ronflements avinés de son père.

Je veux te voir mort... mort... mort.

Il n'avait jamais détesté son père autant qu'en cet instant. Il imaginait une main géante serrer le cœur cruel de Hurst.

J'espère que tu vas mourir, mourir, mourir.

Il ne pensait qu'à cela, et se le répétait sans cesse comme si sa seule volonté pouvait exaucer son vœu.

J'espère que tu vas mourir... mourir... mourir...

Les larmes qu'il avait retenues pendant que son père le rossait finirent par couler, des larmes chaudes inondant son visage violacé et gonflé.

J'espère que tu vas mourir... mourir... mourir...