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Encore un chapitre garanti « Bane-free », parce que la conclusion de l'histoire de Githany méritait d'être étalée sur deux chapitres.


Chapitre n°68 :

Cérémonie sacrilège


L'incantation était simple. Après l'avoir prononcée une seule fois, les autres membres de la Confrérie joignirent leurs voix à celle de leur chef. Ils récitèrent ce catéchisme inconnu sur un rythme régulier et continu. Leurs voix se répercutèrent sur les parois de la vaste caverne, et leur écho entama un canon à deux voix.

Githany commença à sentir le pouvoir se canaliser au milieu du cercle, en un violent tourbillon de plus en plus rapide. Elle prit conscience de l'attirance qu'exerçait le vortex sur ses pensées, son esprit et même son identité. La fraîcheur de la caverne s'évanouit, comme l'écho de leurs voix. Elle ne sentait plus la moisissure des champignons présents dans les coins sombres de la caverne, ni la pression qu'exerçaient des mains amies sur les siennes. Puis, l'éclat des cristaux et la faible lumière des bâtonnets lumineux se mêlèrent, eux aussi.

- Nous ne faisons qu'un.

C'était la voix de Kaan, mais également la sienne.

- Nous sommes le Côté Obscur. Le Côté Obscur, c'est nous.

Même si elle n'entendait plus leur psalmodie, elle pouvait la ressentir, tandis que son esprit se laissait de plus en plus absorber par le vortex. Réalisant subitement qu'elle allait bientôt perdre à la fois la capacité et la volonté de se libérer l'emprise de Kaan, elle tenta autant que faire se peut de se délivrer de cette ascendance.

C'était comme nager à contre-courant en plein milieu d'un océan. Elle sentait que les paroles de leur psalmodie commençaient à se matérialiser. Ces mots enveloppèrent leur volonté commune pour l'emprisonner, la façonner et la fusionner en une nouvelle forme.

- Ressentez la puissance du Côté Obscur. Abandonnez-vous. Abandonnez-vous à cette union unique, et nous ne ferons plus qu'un.

Githany invoqua au plus profond d'elle-même ses dernières ressources pour résister à cette appel. Elles furent heureusement suffisantes pour qu'elle parvienne à arracher son esprit à cette assemblée impie.

Bouche bée, elle recula en titubant. Elle revenait progressivement à elle. Githany recouvra la vue, l'ouïe, l'odorat et le toucher en même temps, ces quatre sens submergeant son esprit affolé. La lueur des bâtonnets lumineux avait également diminué, comme si elle aussi était absorbée par le rituel. L'incantation continuait de résonner, si bruyamment qu'elle en ressentit même une douleur au niveau des oreilles. La température était tombée si brusquement que de petites volutes d'air froid s'échappaient de sa bouche en respirant, et des petits cristaux de glace s'étaient formés sur les stalactites et au bord des flaques d'eau.

Elle réalisa soudain que ni Kaan ni l'autre Sith ne lui serraient plus les mains. Ils se tenaient tous en cercle, les bras levés vers le centre, leurs esprits complètement fermés au monde extérieur. Ils semblaient agripper le vide, mais en s'habituant à l'obscurité, elle aperçut une étrange distorsion dans l'air.

Githany ne put supporter de la regarder plus d'une fraction de seconde. Une chose redoutable, contre-nature, imprégnait cet espace d'un voile vacillant. Elle s'en détourna avec horreur.

Bane avait raison, comprit-elle. Kaan nous a menés à la ruine !

Elle sentit une légère tension dans son esprit. Cette dernière se fit de plus en plus forte, et menaçait de l'attirer de nouveau vers les autres. Elle s'éloigna de cette cérémonie sacrilège et de ses adeptes maudits en titubant, et plissa les yeux pour se repérer et éviter de tomber sur le sol irrégulier de la caverne.

Bane a tenté de m'avertir, mais je ne l'ai pas écouté.

Elle éprouvait un mélange de regret, de désespoir et de peur. Une partie de son esprit la réprimandait pour ses erreurs, une autre la forçait à fuir devant l'abomination que la Confrérie était en train de faire naître.

Elle heurta l'une des parois de la caverne, et la suivit en espérant trouver une sortie. L'appel de l'incantation grandissait encore. Elle le sentait l'inviter à se joindre aux autres pour partager leur destinée.

Elle n'avait aucune idée de ce qu'elle devait faire, aucun objectif. Elle devait simplement s'enfuir, courir, s'échapper de ce lieu. Quitter cet endroit avant de reprendre sa place parmi les fidèle. Un petit espace s'ouvrit le long de la paroi : l'entrée d'un étroit tunnel dans lequel elle pourrait se faufiler. Elle pénétra dans la faille, la pierre déchirant ses vêtements et des chairs.

La douleur ne représentait rien pour elle. Le monde physique lui échappait de nouveau. Désespérément, Githany plongea au sol et avança en rampant dans le tunnel en s'agitant frénétiquement.

Partir. Elle devait partir. S'éloigner du rituel. S'éloigner de Kaan. S'éloigner de la bombe psychique avant qu'il ne soit trop tard.

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~oOo~

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La bombe psychique explosa.

Toutes les personnes présentes à l'intérieur de la caverne moururent en l'espace d'un instant. Les vêtements, la chair et les os furent réduits en poussière. Les stalactites, les stalagmites et les grosses colonnes de pierre se désagrégèrent. L'écho de l'explosion se répercuta dans chaque tunnel, crevasse et fissure du réseau souterrain, la vague d'énergie destructrice commença à se répandre.

Githany était prisonnière du dédale du tunnels. En fuyant le rituel de Kaan, elle avait perdu tout sens de l'orientation, et elle errait maintenant comme une âme en peine dans les souterrains, à la recherche d'une sortie vers la surface.

À la faible lueur de son bâtonnet lumineux, elle vit une petite ouverture sur la gauche, et se dirigea vers elle jusqu'à tomber dans un cul-de-sac. Elle lança un juron et revint sur ses pas.

Elle était furieuse. Furieuse contre Kaan, pour avoir mené la Confrérie au bord de la destruction. Furieuse contre elle-même pour l'avoir suivi jusqu'ici. Furieuse contre Bane – il ne faisait aucun doute pour elle qu'il avait dû orchestrer tout cela. Il avait manipulé Kaan et le reste de la Confrérie, afin de les pousser à l'anéantissement. Ce n'était pas cependant pas cette trahison qui la rendait la plus furieuse. Bane l'avait délaissée. Il l'avait rejetée comme les autres, et abandonnée à son funeste sort pendant qu'il allait faire renaître les Sith.

Le tunnel se sépara en deux devant elle. Elle s'arrêta et invoqua la Force afin d'accroître ses sens et de découvrir quel tunnel il lui fallait emprunter. Elle ne perçut rien dans un premier temps, puis elle détecta une légère brise dans le tunnel de gauche. L'air semblait frais et pur : ce tunnel menait à la surface !

Tandis qu'elle se pressait dans le passage, sa frustration et sa rage se dissipèrent. Elle allait survivre ! Le sol irrégulier commença à monter en pente raide, et elle aperçut de la lumière au loin. Elle redoubla d'efforts, et ses pensées se focalisèrent sur la manière dont elle allait se venger.

Elle devrait se montrer subtile et fourbe. Elle avait sous-estimé Bane de trop nombreuses fois dans le passé. Cette fois-ci, elle devrait être patiente et agir uniquement le moment venu.

La première étape était de le retrouver et de lui proposer de devenir son apprentie. Elle ne doutait pas un instant qu'il accepterait. Il avait besoin de quelqu'un pour le servir, car telle était la nature du Côté Obscur. Elle apprendrait auprès de lui et se soumettrait complètement. Cela prendrait peut-être des années, voire des décennies, mais avec le temps, il lui transmettrait tout son savoir, et elle se retournerait contre lui une fois qu'elle aurait percé à jour tous ses secrets. Elle deviendrait le Maître et choisirait alors son propre apprenti.

La sortie se trouvait à moins de cinquante mètres, lorsque Githany sentit les premiers effets de la bombe psychique. Cela débuta avec une secousse sismique. Elle craignit tout d'abord un tremblement de terre ou un éboulement qui l'aurait emprisonnée sous des tonnes de pierres et de poussière, la surface seulement à quelques pas devant elle. Mais lorsqu'elle sentit le pouvoir du Côté Obscur remonter précipitamment le passage dans sa direction, elle comprit qu'elle allait subir un sort encore plus atroce. Les personnes qui se trouvaient à l'épicentre de l'explosion avaient été soufflées et complètement anéanties. Githany n'eut pas autant de chance en se retrouvant à la périphérie du rayon d'action de la bombe psychique. L'onde d'énergie la balaya un instant plus tard, elle la souffla à l'instar d'un vent violent et absorba l'énergie vitale de son corps en s'accaparant son esprit. Ses chairs se flétrirent et se rétrécirent, puis ses traits splendides se momifièrent avant même qu'elle puisse émettre le moindre cri. L'onde d'énergie s'évanouit aussi rapidement qu'elle était venue.

L'espace d'une seconde, son corps sans vie demeura immobile, avant de tomber au sol et de se transformer en poussière.