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Zannah ne va pas être en reste de surprises...


Chapitre n°74 :

Des chemins séparés


Bane réduisit la vitesse du motojet quand ils approchèrent de la petite clairière servant de terrain d'atterrissage au Valcyn. Il s'arrêta finalement à vingt mètres du vaisseau. Zannah lâcha sa taille et sauta à terre. Elle regarda fixement le vaisseau.

Bane ne lui accorda aucune attention. Depuis dix minutes, il avait les plus grandes difficultés à se concentrer sur autre chose que la douleur qui fouaillait son crâne. Il avait espéré que son exploration de la sphère scintillante laissée par la bombe psychique soulagerait cette migraine atroce, mais il semblait qu'elle s'était encore accrue depuis leur visite dans la caverne.

Au moins avait-il eu confirmation de la mort de Kaan. Ce fait lui permit de ne pas s'étonner lorsque la silhouette fantomatique se matérialisa à l'autre extrémité de la clairière. Pâle dans le soleil de cette fin d'après-midi, c'était indéniablement l'image de l'homme qui avait fondé la Confrérie.

Bane savait qu'il ne s'agissait que d'une hallucination, pourtant, il y avait quelque chose de fascinant à voir le spectre traverser l'espace découvert pour s'arrêter à un mètre environ du vaisseau. L'apparition le fixa d'un regard calme, puis leva un bras pour lui faire signe de venir le rejoindre.

- Il est magnifique, souffla Zannah.

Surpris, Bane tourna vivement la tête vers elle, mais c'était le Valcyn que son apprentie contemplait avec émerveillement. Lorsqu'il reporta son attention sur l'endroit où s'était tenu Kaan, celui-ci avait disparu de nouveau.

- Jamais je n'aurais cru quitter Ruusan dans un tel appareil, déclara Zannah.

- Et cela ne se produira pas, en effet, fit Bane en descendant du motojet.

Il ne pouvait rien faire au sujet de ces hallucinations, sinon se comporter comme si elles n'existaient pas. La jeune fille leva vers lui un regard dérouté.

- Nous ne prenons pas votre vaisseau ?

- Moi, si, répliqua le Maître. Mais toi, tu dois trouver ton propre moyen pour quitter ce monde.

Zannah mit un temps avant de comprendre le sens exact de ces paroles, et son expression fut alors celle de la stupéfaction la plus totale.

- Je... je ne peux pas venir avec vous ?

Son Maître secoua négativement la tête. Aiguillonné par la découverte du manuscrit au campement, il avait échafaudé un nouveau plan. Il allait se rendre sur Dxun, la lune géante d'Onderon, afin de trouver le tombeau de Freedon Nadd. Pour son apprentie, il avait d'autres projets.

- Mais... pourquoi ? Qu'est-ce que j'ai fait ? hoqueta la fillette, visiblement au bord des larmes. Pourquoi me laisser ici ?

- Cela fait partie de ta formation, expliqua Bane. Afin de comprendre ce qu'est le Côté Obscur, il faut souffrir à travers les épreuves et les combats.

- Vous n'avez pas besoin de m'abandonner pour me faire souffrir, rétorqua-t-elle. Emmenez-moi avec vous.

- La force du Côté Obscur réside dans le pouvoir de chaque individu, lui rappela-t-il. La Force vient de l'intérieur. Tu dois apprendre à la tirer de toi-même. Je ne serai pas toujours là pour te former.

- Mais vous avez dit qu'il y avait toujours deux personnes ! insista Zannah.

Elle apprenait vite, et Bane était satisfait de constater qu'elle avait déjà mémorisé un aussi grand nombre de ses leçons, mais le fait de réciter des mots ne signifiait rien si elle ne comprenait pas la réalité de ce qu'ils décrivaient.

- Pourquoi me suis-tu ? demanda-t-il, afin de la mener sur la voie de la sagesse.

Zannah réfléchit à la question de longues secondes, en étudiant avec soin tout ce qu'il lui avait déjà enseigné.

- Pour un jour maîtriser tout mon potentiel, répondit-elle enfin. Pour apprendre les voies du Côté Obscur.

- Bien. Et quand je n'aurai plus rien à t'enseigner ? Que se passera-t-il ?

Son front juvénile se rida sous l'effet de la concentration, mais cette fois, aucune réponse ne lui vint.

- Je ne sais pas, dut-elle admettre.

- Viendra un jour où ta formation s'achèvera, lui dit-il. Quand tu auras appris et compris toutes les leçons, quand toute ma connaissance du Côté Obscur sera tienne, ce jour-là, tu me défieras pour me ravir le titre de Maître, et un seul de nous survivra à ce duel.

La fillette écarquilla les yeux, puis elle les plissa tandis qu'elle analysait tout ce qu'impliquait cette révélation.

- Tu as le potentiel pour me surpasser, continua-t-il. Si tu le réalises pleinement, je cesserai de t'être utile. Tu auras alors besoin de trouver d'autres sources de savoir, et tu chercheras un nouveau disciple, afin de lui transmettre à ton tour les secrets de l'Ordre Sith. Et quand ton pouvoir éclipsera le mien, je ne serai plus indispensable. Telle est la Règle des Deux. Lorsque tu seras prête à réclamer le titre de Seigneur Sith, tu ne l'obtiendras qu'en m'éliminant. La confrontation est inévitable, conclut-il. C'est la seule manière pour les Sith de survivre. C'est la voie du Côté Obscur.

Zannah ne fit aucun commentaire, ne posa aucune question. À son expression, Bane vit qu'elle luttait pour comprendre pourquoi son Maître la formait, sachant qu'elle finirait par le trahir – mais elle n'avait pas besoin de comprendre, pas encore. Pour l'instant, elle devait se contenter de lui obéir.

- Rends-toi sur Onderon, lui ordonna-t-il. Je t'y rejoindrai dans dix jours standard, après avoir trouvé le tombeau de Nadd sur Dxun.

- Et comment suis-je supposée me rendre là-bas ? protesta-t-elle.

- Tu es l'élue, la future dépositaire de l'héritage de notre Ordre. Tu trouveras un moyen.

- Et si je n'en trouve pas ?

- Alors, tu auras prouvé que tu n'es pas digne de me succéder, et je chercherai un autre disciple.

Il n'y avait rien à ajouter. Bane lui tourna le dos et marcha vers le vaisseau. Zannah le regarda alors qu'il s'éloignait, sans rien dire. Il sentit la colère monter en elle, et se transformer en un brasier rugissant de haine lorsqu'il grimpa dans le poste de pilotage. Il eut un sourire dur, et alluma les moteurs.

Le Valcyn décolla, laissant Zannah au sol, petite silhouette à la surface de la planète qui suivait le vaisseau du regard, aussi immobile que si elle avait été sculptée dans la pierre froide et dure.


C'est mesquin, Bane, même de ta part. Tu abandonnes une gamine qui a déjà une profonde peur de l'abandon... J'ai envie de gifler ce Sith, mais c'est pas comme si j'allais arriver à faire mal à cette montagne xD