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Réponse ?


Chapitre n°104 :

Revenu parmi les vivants


Bane ouvrit lentement les yeux. Ses paupières lui semblaient terriblement lourdes, comme doublées de métal. Il les sentait qui effleuraient ses pupilles, pareilles à du papier de verre lorsqu'il cligna sous la lumière crue qui tombait sur lui. Il garda les yeux presque fermés contre cette clarté aveuglante lorsqu'il essaya de s'asseoir.

Son corps refusa d'obéir. Ses jambes, ses bras et son torse ignorèrent les impulsions envoyées par son cerveau. Sa tête elle-même ne voulait pas bouger. Néanmoins, il pouvait dire qu'il gisait sur le dos, et il sentait sur sa peau le grain rude d'une toile à sac ou d'un linge grossier, mais il était paralysé, incapable du moindre mouvement.

Il battit des paupières de nouveau, et l'éblouissement commença à s'atténuer à mesure que ses pupilles se contractaient. Il regarda un plafond bas et curieusement incliné, en bois. Un rai de soleil filtrait par une mince fissure et tombait directement sur son visage.

En grognant, il réussit à tourner la tête de côté, de sorte que la lumière ne l'aveuglait plus. Ce changement d'angle lui offrit une meilleure vue de la pièce où il se trouvait : petite, rustique, et étrangement familière. Avant qu'il puisse accorder cet environnement à ses souvenirs, une silhouette apparut dans son champ de vision.

Du fait qu'il regardait directement une paire de bottes au cuir fatigué, Bane en déduisit qu'il était allongé au niveau du sol. La silhouette resta debout un moment, puis s'accroupit pour le regarder dans les yeux.

Le visage – plus âgé de dix ans, mais reconnaissable entre tous – rafraîchit la mémoire du Seigneur Sith. Il s'était trouvé étendu sur ce même sol, plus de dix ans auparavant, entre la vie et la mort, tout comme aujourd'hui.

Caleb, voulut-il articuler, mais le seul son qu'il produisit fut un grognement bas. De même que le reste de son corps, ses lèvres, sa langue et ses mâchoires refusaient de bouger. Il tenta d'en appeler au pouvoir du Côté Obscur pour reprendre un peu de forces, mais sa volonté était aussi faible que le reste de sa personne.

- Il est réveillé, fit Caleb d'une voix forte, sans quitter des yeux son patient.

Du dehors, parvint le bruit de pas qui approchaient. Il essaya encore de parler, et mit toutes ses forces dans ce seul mot :

- Caleb.

Sa voix n'était qu'un murmure anémié, mais cette fois, le mot était clair. Le guérisseur ne prit même pas la peine de répondre. Il se redressa, laissant de nouveau à Bane le spectacle de ses vieilles bottes. Le Sith perçut le son assourdi d'une course dans le sable, puis le claquement sec de talons sur le plancher de la cabane.

- Laissez-moi le voir !

Il reconnut la voix de son apprentie, et son esprit mit lentement en place les pièces qui constituaient l'enchaînement des événements. Il se souvenait du combat contre les Jedi, sur Tython, et de la tempête d'éclairs qu'il avait lâchée sur le dernier de ses ennemis. Il revoyait le maudit écran sphérique que le Maître Ithorien agonisant avait créé autour de lui. Ensuite, rien qu'une douleur intolérable.

L'orbe protecteur du Jedi l'avait piégé au cœur de la tempête du Côté Obscur. L'électricité l'avait enveloppé, et des millions d'arcs crépitants s'étaient infiltrés dans son corps, avaient grillé ses chairs de l'intérieur, et provoqué une succession interminable de spasmes musculaires déchirants.

L'énergie avait traversé les orbalisks incrustés dans son corps. Les créatures avaient absorbé cette puissance, l'avaient dévorée jusqu'à s'en gorger tellement que la chair molle de leur ventre s'était mise à enfler. Pressés de plus en plus contre la chitine rigide de leur carapace, les crustacés avaient commencé à s'enfoncer plus profondément en Bane. Il se souvenait de milliers de dents minuscules qui tailladaient ses tissus sous-cutanés et s'attaquaient aux muscles, aux tendons et même aux os.

Mais, dans le même temps, les orbalisks avaient continué d'absorber gloutonnement l'électricité qui fusait dans le corps de Bane. Ils avaient enflé de plus en plus, puis certains s'étaient mis à exploser comme des ballons trop tendus coincés dans leurs carapaces.

Pendant toute cette torture, il était resté conscient de l'électricité qui le grillait vif et de l'atroce douleur des dents s'enfonçant dans ses chairs – mais la souffrance indescriptible induite par les produits chimiques que les orbalisks libéraient en explosant, et qui dissolvaient son corps au niveau cellulaire, avait fini par lui faire perdre connaissance... et il s'était réveillé ici.

Deux bottes s'arrêtèrent à côté de celles de Caleb, plus petites que les premières. Celles d'une femme – Zannah, très certainement.

- Il essaie de parler, expliqua Caleb loin au-dessus du champ de vision de Bane.

Il voulut tourner la tête, et cette fois, il réussit à voir les deux qui se tenaient debout à côté de lui. Zannah s'accroupit pour lui soulever la tête et les épaules. Elle glissa un oreiller de fortune, confectionné avec sa cape roulée, sous sa nuque. Il sentit le contact des longs doigts fins de la jeune femme sur le haut de son dos.

La sensation déclencha une constatation stupéfiante chez lui – les orbalisks n'étaient plus là ! C'était pourquoi il sentait les couvertures rêches frotter contre sa peau nue !

- Orbalisks ? parvint-il à chuchoter.

- Nous avons dû les ôter, lui annonça son apprentie. Ils étaient en train de vous tuer.

Bane sentit que le monde recommençait à s'assombrir. Les efforts pour prononcer deux mots l'avaient exténué. Avant de sombrer, il crut sentir les doigts de Zannah contre sa joue, et éprouva également du regret pour ce qu'il avait perdu.


Pas encore tout à fait la réponse u.u'