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Chapitre n°139 :

Accomplissement


Zannah observa Bane qui se ramassait sur lui-même, et frappait follement autour de lui les fantômes de son passé avec son sabre-laser, mais elle ne laissa pas sa concentration faiblir. L'esprit du Maître était puissant. Si elle relâchait la pression un seul instant, il risquait de se libérer du piège.

Un instant, elle crut qu'elle avait gagné lorsqu'il poussa un cri aigu, mais l'explosion d'énergie qui suivit la força à reculer en titubant.

Elle se reprit et vit qu'il s'était redressé de toute sa taille. Elle comprit qu'il avait résisté au sort, mais elle avait encore une surprise pour son Maître.

De nouveau, elle s'ouvrit au Côté Obscur, mais cette fois elle n'attaqua pas Bane directement. Elle laissa le flot ténébreux s'écouler en elle, le tirant du sol même d'Ambria. Elle en appela au pouvoir enseveli depuis des siècles et le fit remonter à la surface, sous la forme de vrilles de fumée noire qui sortirent du sable tels des serpents.

Ces fines volutes rampèrent à la surface, se rejoignirent et se mêlèrent pour constituer des tentacules de plusieurs mètres de long.

Alors, en réponse à son ordre muet, ils se redressèrent et bondirent vers leur proie.

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Bane vit l'étrange brume se densifier et glisser vers lui, et il sut qu'il ne s'agissait pas d'une autre illusion. Zannah avait réussi à donner une substance physique au Côté Obscur, qu'elle avait transformé en cette dizaine de serpents sombres. Subitement, tous ces tentacules s'élancèrent vers lui. Il frappa avec son sabre-laser pour trancher en deux le plus proche, mais sa lame traversa la brume sans autre effet. Il se jeta sur le côté une fraction de seconde trop tard, et la tête de la chose effleura son épaule gauche.

Ses vêtements se désagrégèrent comme si on les avait arrosés avec de l'acide. La chair sous eux se liquéfia, et Bane hurla de douleur.

Si les orbalisks, en s'unissant à son corps avec un composé chimique provoquant des douleurs si intenses qu'il avait failli en devenir fou ou en tombant lorsque les chairs de Bane avaient été littéralement cuites par l'explosion concentrée de son propre éclair violet, ou bien encore, la drogue injectée par Serra lui avait donné l'impression d'être dévoré vif de l'intérieur, cela n'était en rien comparable avec la douleur atroce qu'il sentit au simple contact du tentacule brumeux.

La blessure ne mettait pas sa vie en péril, mais elle faillit le paralyser. Il chuta lourdement au sol, la bouche mollement ouverte et les yeux révulsés. Son esprit était chaviré. La douleur incendiait chaque nerf de son corps, mais ce qu'il ressentait allait bien au-delà d'une simple sensation physique. Ce n'était pas la chaleur brûlante du Côté Obscur, mais plutôt le froid glacé du néant lui-même qui se répandait en lui. Il touchait chaque synapse de son cerveau, et déchirait les tréfonds de son esprit. À cet instant, Bane eut un aperçu de ce qu'était l'annihilation totale, et il connut l'horreur du vide absolu.

Il parvint pourtant à rester conscient, et lorsqu'un autre tentacule roula vers lui, il fut capable de se relever et de s'écarter à temps.

Une douleur sourde transperçait toujours son épaule, mais les ténèbres infinies qui avaient menacé de l'engloutir s'étaient dissipées, et il put ignorer la souffrance.

Les serpents de fumée se regroupaient pour un autre assaut, et ils se mouvaient plus rapidement, à mesure que Zannah les alimentait d'un flot régulier. Bane lança des éclairs violets du bout des doigts, mais lorsque les décharges frappèrent les formes brumeuses, elles furent absorbées sans dommages apparents. Ces choses étaient constituées de l'énergie pure du Côté Obscur, et il n'avait aucun moyen de les atteindre.

Il ne lui restait qu'une solution : tuer Zannah avant que les tentacules ne le tuent.

Il projeta un autre éclair, cette fois-ci en direction de son apprentie. Elle saisit la décharge avec la lame de son sabre-laser, mais sa réaction fut légèrement plus lente qu'à l'accoutumée, et il comprit que ce n'était pas uniquement à cause de ses côtes cassées. L'effort qu'elle fournissait pour animer les vrilles ténébreuses poussait à ses limites son aptitude à puiser dans la Force, ce qui la rendait vulnérable dans d'autres domaines.

Le sabre-laser brandi, Bane se précipita sur elle. Les serpents de brume bondirent pour l'intercepter, mais il se baissa, sauta, fit des écarts et réussit à passer dessous, dessus ou à côté sans être touché. Il arriva devant Zannah.

Elle leva son arme pour stopper son attaque, mais sans la pleine puissance de la Force, ses mouvements étaient imprécis, maladroits. Elle para le premier coup sans enchaîner assez vite, et il se baissa pour lui faucher les pieds d'un balayage de la jambe. Alors qu'elle s'écroulait, il décrivit un moulinet avec sa lame et lui arracha la sienne de la main. Le sabre-laser retomba plus loin dans le campement.

Son adversaire était désarmée et étendue sur le sol à ses pieds, et Bane abattit sa lame pour porter le coup de grâce. À mi-course, un tentacule du Côté Obscur bloqua son bras en s'enroulant autour de son coude. Peau, muscles et tendons s'évaporèrent instantanément, et son avant-bras sectionné roula au sol. Le sabre-laser s'éteignit lorsque la poignée échappa aux doigts que toute force avait déserté.

Cette fois, le Seigneur Noir ne hurla pas. La douleur atteignait un tel paroxysme qu'elle le laissa muet, et il s'effondra sans un bruit.

Tout devint noir. Aveugle et isolé, il sentit le néant se refermer sur lui. Dans un geste désespéré, il tendit la main gauche et saisit le poignet de Zannah, toujours étendue auprès de lui. Il fit appel à ce qui lui restait de pouvoir, et invoqua le rituel du transfert d'essence.

Son esprit se connecta sur les courants de la Force, happa le pouvoir du Côté Obscur, et plongea dans les circonvolutions complexes qu'il avait arrachées à l'Holocron d'Andeddu.

Les ténèbres glacées qui avaient commencé à l'avaler se dissipèrent, remplacées par une explosion brûlante de lumière écarlate lorsque le pouvoir du rituel se déploya. Bane sentit la chaleur inimaginables qui consumait ses chairs en un millième de seconde, mais déjà, il ne faisait plus partie de son propre corps. Son esprit l'avait rejeté comme une vieille coquille, pour en investir un nouveau.

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~oOo~

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Il eut soudain pleinement conscience de son environnement physique. Il voyait par les yeux de Zannah, il entendait avec ses oreilles. Il sentait le brasier du rituel et son éclat écarlate à travers la peau de la jeune femme – mais Zannah était toujours présente. Elle se rendit compte de son assaut. Il éprouva sa terreur et sa confusion comme si elles étaient siennes, et lorsqu'elle hurla d'horreur, il hurla à l'unisson.

Les tentacules ténébreux s'évanouirent dès que la concentration de Zannah se brisa, et disparurent comme de la fumée dans le vent. D'instinct, elle lutta pour repousser l'envahisseur. Bane la sentait qui bloquait ses efforts, et le rejetait alors même qu'il tentait de la chasser de son propre corps.

L'affrontement devint un duel entre deux volontés, leurs deux identités luttant dans l'esprit de Zannah pour la possession du corps de la jeune femme. Ils vacillèrent au bord du néant, Bane cherchant à effacer toute trace de l'identité de l'apprentie, tandis que celle-ci luttait pour le précipiter dans les ténèbres.

Un moment, ils parurent se neutraliser parfaitement, sans que l'un des deux ne gagne ou ne cède du terrain.

Et soudain, tout fut terminé.


MAIS TOUT FUT TERMINÉ COMMEEEEEEEENNNNNT ? Arrrrghhh. (Ceci est une transcription de l'état de mes nerfs lors de la toute première lecture.)