Hey :-) Merci pour vos reviews ça fait plaisir ! Voici le chapitre 9 en version corrigé. Bonne lecture.


Chapitre mis à jour le 11/12/2020 : Merci à Cassiopeia Von Black 's d'avoir consacré son temps à me relire et à me corriger. Vraiment, je salue ta rapidité et ton investissement.


Disclaimer : La plupart des personnages appartiennent à J.K Rowing sauf Benoît, les agresseurs de Draco, qui je rappelle sont Nilya Bryan et Jimmy, et ses ex-copines.


Chapitre 9 :

Nous étions le 21 février. Deux jours après l'intervention des Aurors à la planque des trois agresseurs qui avaient pris Draco en otage. C'était le début de l'après-midi le soleil ne brillait pas fort en ce jour d'hiver mais ses minces rayons illuminaient l'assemblée silencieuse campée en face d'une tombe récemment installée.

La grand-mère de Neville, Augusta, était au premier rang, accompagnée par l'une de ses aide-médicomages de la maison de retraite où elle vivait encore. La famille Weasley au complet était présente, ainsi que plusieurs Aurors dont Théodore et bien entendu Harry, encadré par ses deux meilleurs amis, Hermione et Ronald. Derrière eux se trouvaient quelques professeurs de Poudlard qui, le visage triste et fermé, rendaient un dernier hommage à leur ancien élève. Non loin d'eux se tenait Luna, sa main dans celle de Ginny, versant des larmes intarissables, tandis que Draco et Narcissa observaient la scène de loin, à l'écart de cette réunion déchirante.

Doucement, chacun vint déposer des pétales ou des fleurs auprès du cercueil prêt à s'engouffrer dans les profondeurs de la terre. Une file s'était naturellement formée, alors que les croque-morts, vêtus de leurs costumes noirs, soutenaient les membres de cette assemblée en deuil par des regards compatissants.

Après un moment, quelques personnes décidèrent de repartir, tandis que d'autres restaient encore quelques instants, non loin des recueillants dont le nombre s'amenuisait peu à peu. Les Malfoy quittèrent silencieusement le cimetière avant de transplaner en un léger bruit, en face des portes noires. Bill et Charlie Weasley transplanèrent à leur tour avec leurs compagnes et leurs jeunes enfants, tandis que Percy et George avertissaient leurs parents de leur départ.

Théodore fut le suivant, préférant quitter rapidement les lieux de peur de laisser ses larmes le trahir, et il disparut, tremblant légèrement, sous le regard discret d'Harry, qui n'avait rien raté de la scène. Celui-ci était auprès de Luna, qui avait laissé Ginny repartir vers Ron et ses parents, à quelques mètres de là. Depuis qu'Harry avait révélé son attirance envers les hommes, Ginny n'avait pu se résoudre à lui refaire confiance, et Harry comprenait son comportement. Après tout, ils avaient été en couple depuis Poudlard, et il avait annoncé du jour au lendemain préférer la compagnie des hommes à la sienne. Mais si elle en avait été bouleversée, c'était également son amitié avec Ron qui en avait pâti. Ils étaient encore amis, songea-t-il, mais leur complicité n'avait plus rien à voir avec avant. Ils n'avaient plus ces moments de partage, de rires adolescents et encore moins ces sorties entre potes qu'ils avaient l'habitude de faire après la guerre. Ron était devenu bien distant envers son meilleur ami, et Harry ne pouvait s'empêcher de se demander si ce titre était encore d'actualité. Malgré tout, le brun le considérait toujours comme tel et ne souhaitait en rien qu'une autre personne le remplace. Il espérait au fond de lui que Ron arriverait un jour à accepter son homosexualité. Peut-être était-il encore furieux qu'il ait fait souffrir Ginny malgré lui. C'était plus que probable, connaissant le rouquin…

D'un commun accord, ils transplanèrent tous en même temps vers le Terrier, laissant un silence amer s'abattre sur le cimetière, où la tombe de Neville était à présent garnie de divers bouquets de fleurs et de mots d'adieu.

OOO

Devant le feu crépitant de la cheminée du salon, Draco était confortablement installé dans un des fauteuils à observer les petites flammes jaune orangé danser. Il était à présent quatorze heures trente, et Draco songeait encore à l'enterrement auquel il avait assisté avec sa mère une heure auparavant.

Il était sorti de l'hôpital ce matin, chargé de recommandations par les médicomages, qui l'avaient averti de faire très attention à sa santé. Il devrait revenir les prochains jours pour une consultation à Saint-Mangouste. La visite de Théodore, le matin même, était encore fraîchement gravée dans son esprit.

Le jeune homme était apparu arborant un visage impassible qui, il le savait bien, cachait une immense tristesse : la perte de son coéquipier et ami. Il connaissait bien son ami et savait pertinemment la sensibilité dont il pouvait faire preuve lorsque l'occasion se présentait. Draco avait été étonné d'être convié à l'enterrement et avait longuement hésité à la pensée de subir les foudres des éventuels membres de la famille Weasley qui sans aucun état d'âme lui ordonneraient de ficher le camp. Cependant, lorsque Théodore lui avait révélé que le grand Harry Potter et la grand-mère de Neville acceptaient sa présence, il avait cédé, rassuré. Au fond de lui, il aurait certainement souhaité assister aux obsèques de Neville. Bien qu'il n'ait pas été proche du défunt, qu'il ne lui avait jamais réellement parlé ou n'avait même travaillé avec lui, l'Auror avait participé à son sauvetage. Il devait lui rendre hommage, à défaut de n'avoir pu le remercier pour son action héroïque.

De plus, sa propre mère avait insisté pour être présente. Draco savait qu'elle avait besoin d'assister à la cérémonie pour rendre un dernier hommage à l'un des hommes qui avaient sauvé son unique fils. Il ne pouvait et ne voulait simplement pas l'en empêcher ils y étaient donc allés ensemble. En arrivant aux funérailles, Draco avait senti quelques regards étonnés sur sa personne et entendu quelques récriminations sur sa présence mais, la tête haute, les avait royalement ignorés en s'avançant au milieu des invités. Il avait néanmoins soupiré de soulagement lorsque Théodore les avait rejoints.

Soudain, il entendit Selfie, l'elfe de maison, apparaître à quelques mètres de lui, tenant un lourd plateau chargé de deux grosses tasses et d'une théière. Elle était vêtue d'un unique long vêtement noir lui arrivant aux genoux.

« Maître, Madame votre mère souhaite prendre le thé avec vous.

- Bien. »

Il vit la créature poser le plateau sur la table en verre, non loin du fauteuil de Draco, alors qu'il entendit des bruits de pas, l'obligeant à relever son regard vers l'encadrure de la porte du salon, où il découvrit sa mère lui souriant doucement.

« Je pense qu'une tasse de thé nous fera le plus grand bien. »

Il répondit par un simple acquiescement, tandis qu'après une courbette l'elfe transplana de nouveau afin de leur laisser un peu d'intimité.

Son esprit le mena de nouveau à leur arrivée au cimetière, et il repensa à ces personnes qui avaient osé le regarder avec méfiance. Il ne supportait plus de se faire dévisager par un inconnu, ou même observer par son entourage. Si l'admiration qu'il avait pu susciter, plus jeune, lui avait longtemps plu, elle était à présent purement incommodante. Il avait détesté ces regards et ces murmures sans aucune discrétion qu'il avait pu entendre. Il espérait néanmoins que sa mère n'ait pas entendu les insultes à son égard, dont le fameux « Mangemort ». Il avait même entendu le mot « victime », le déstabilisant plus qu'autre chose. La dernière de ses volontés serait que les autres le voient comme tel. Malheureusement, lorsque Pansy et Blaise étaient venus le visiter dans sa chambre d'hôpital le premier jour, il avait pu lire une certaine pitié dans leur regard, malgré leurs efforts louables pour occulter le souvenir de l'enlèvement et des agressions qu'il avait subies. Il se doutait bien que ses amis seraient au courant des choses obscènes qu'il avait subi mais il n'avait pu se sentir qu'humilié lorsque ses deux amis lui avaient confessé avoir vu les clichés le concernant dans la Gazette. Il avait espéré un temps qu'aucun de ses proches ne les aurait découverts… Mais il avait vite été désabusé.

Son regard se posa sur le plateau où sa mère achevait de verser l'eau chaude dans les tasses. Parfois, il avait du mal à croiser le regard de sa propre mère. Il se sentait tellement misérable face à sa grandeur, tellement honteux. Il avait l'impression d'avoir encore plus sali l'honneur familial, et craignait l'humeur de son paternel. Il ne l'avait pas encore revu et bizarrement, il préférait se cacher au fond de son lit plutôt que de l'affronter en prison. Il n'avait pas mis les pieds à Azkaban depuis très longtemps, et ne comptait pas lui rendre visite malgré les demandes incessantes de Narcissa.

Il prit sa tasse, souffla doucement au-dessus afin d'évacuer la chaleur et déposa ses lèvres lentement sur le rebord de la vaisselle. Le thé vert emplit peu à peu sa bouche, caressant sa langue avant que Draco ne l'avale. Depuis son arrivée à Sainte-Mangouste, Il avait du mal à manger correctement. Son appétit venait rarement, et il peinait à manger des aliments consistants sans qu'ils ne provoquent des vomissements en fin de journée. Il était plus à l'aise avec de la nourriture moelleuse ou liquide, malgré l'inquiétude de sa mère qui aurait souhaité qu'il mange de la bonne viande de qualité et des légumes plus appétissants qu'en purée.

« Je pensais rendre visite à ton père, demain. Souhaites-tu m'accompagner ? »

Draco tressaillit. Il n'était pas encore prêt à le voir. Il se doutait bien que son père connaissait les grandes lignes de sa séquestration, qu'il avait vu les photographies dans les journaux, menant Potter à la retrouver nu et dans un sale état.

« Je... commença-t-il en détournant son regard vers sa tasse, je ne pense pas que ça soit une bonne idée. »

Merlin, ce qu'il avait changé. Jamais en temps normal il n'aurait réagi de cette façon. Il aurait dû regarder droit dans les yeux de sa mère, lui affirmant qu'il ne voulait pas voir son père. Au lieu de baisser honteusement la tête, il aurait dû montrer clairement son visage à Narcissa, droit et fier comme il l'avait toujours été.

« Cela ferait plaisir à ton père de te voir.

- Maman, soupira-t-il d'agacement, je ne suis pas prêt à le revoir. »

Il avait fini sa phrase en un murmure, mais il savait que sa mère l'avait entendu et qu'elle comprenait. Alors qu'il levait son regard sur elle, il la découvrit émue, un petit sourire aux lèvres. Il écarquilla les yeux face à cette scène et essaya de comprendre son comportement. Il sentait encore son regard insistant sur lui.

« Qu'est-ce qu'il y a ?

- Non, rien. » Répondit-elle en agrandissant son sourire.

Il la vit porter sa tasse à ses lèvres, alors qu'il faisait de même, installant un silence plus serein entre eux. Drago replongea dans ses pensées, décrochant de la réalité. Deux billes vertes se formèrent dans son esprit, et il mit un temps avant de comprendre qu'il s'agissait des yeux d'un ancien Gryffondor. Il passa négligemment ses fins sur sa nuque où un léger bleu persistait sur sa peau pâle, ne sachant plus comment se comporter face au Survivant. Il avait croisé son regard lorsque celui-ci avait déposé quelques pétales de fleurs dans le trou de terre où se trouvait le cercueil, et celui-ci l'avait salué de loin en un hochement de tête. Naturellement, il avait répondu à son salut et il se souvint que sa mère lui avait déclaré qu'il devrait, au moins, offrir des remerciements à Harry. Cela lui avait fait bizarre d'entendre son prénom dans la bouche de sa mère, mais vu tout ce qu'il avait fait pour eux, il comprenait qu'il était temps d'enterrer la hache de guerre.

Le souci était qu'il ne se voyait pas le remercier de l'avoir trouvé et de lui avoir sauvé la vie. Il ne pouvait pas. Sa fierté était déjà en miettes, et sans aucun doute ces remerciements envers son rival de toujours achèveraient son amour-propre déjà piétiné. Ce serait comme admettre que sans le célèbre Harry Potter, sa vie aurait été sans valeur. De plus, il aurait dû moisir dans un cachot non loin de son père et savait qu'il était infiniment redevable à Potter de l'en avoir tiré lors de son procès il y a plusieurs années. Et il détestait cela.

Une nouvelle fois, il prit une gorgée de thé alors que sa mère lui parlait de sa prochaine sortie avec l'une de ses amies, membre d'une grande famille richissime. Draco sourit doucement derrière sa tasse, malgré la mélancolie qui s'abattait sur lui. Cela faisait à présent cinq longues années que sa mère vivait seule dans le Manoir, et savoir qu'elle faisait au mieux pour occuper son esprit provoqua un pincement au cœur au blond. Il savait que son père manquait énormément à Narcissa, bien que cette dernière essaye de rester fière.

« Ces funérailles étaient, en tout cas, très belles., changea-t-elle soudainement de sujet.

- Oui. »

Il aurait pu approfondir davantage sa réponse, mais il n'avait pas le courage d'épiloguer sur les obsèques de Neville. Une intense fatigue le submergea soudainement. Il songea à sa dernière petite amie en date, Marilyn. Il se demanda si elle s'était une seule seconde inquiétée pour lui, maintenant qu'il la voyait déjà au bras d'un autre, si peu de temps après son enlèvement. Il tenta de camoufler un bâillement de sa main mais sa mère le remarqua, son regard intense et rempli d'amour.

« Je pense que tu devrais monter te reposer dans ta chambre, Draco. »

Il soupira doucement, ne voulant pas réellement obéir à sa mère. Certes, il ne refuserait pas un peu de repos, mais chaque fois qu'il tentait de fermer les yeux, les visages de ses agresseurs remontaient à la surface, le forçant à s'éveiller. Il avait peur de dormir. Il avait peur de faire des cauchemars. Chaque fois qu'il se redressait en sursaut, il craignait que l'un de ses agresseurs ne soit auprès de lui et qu'il soit forcé de répondre à leurs exigences malsaines.

Que pouvait-il bien faire pour ne plus avoir à affronter ces phobies étouffantes ?

Alors que ses orbes gris se perdaient inéluctablement dans le feu de cheminée, il frissonna d'angoisse en se rappelant les regards fous de ses ravisseurs et de leurs mains violentant son corps. Dans le salon chauffé, entouré de sa tendre mère vers qui il n'osait plus regarder, Draco se sentit subitement plus faible que jamais.

O/O/O

Il était seize heures. Au sein de la maison d'Arthur et Molly, leurs enfants cadets ainsi que Luna, Hermione et Harry étaient dans la salle à manger pour porter un toast à Neville, avant que la maîtresse des lieux n'apporte divers gâteaux pour une collation.

Autour de la table, Luna et Ginny discutaient, tandis qu'Arthur écoutait leur conversation d'une oreille attentive. Quelques chaises plus loin, Hermione essayait de convaincre Ron de parler avec Harry, qui de l'autre côté de la table semblait perdu dans ses pensées.

Il avait vu Malfoy au cimetière. Il avait finalement décidé de venir, accompagné de sa mère. Harry se doutait bien que c'était la présence de celle-ci qui l'avait décidé autrement, le blond n'aurait jamais eu le cran de mettre ne serait-ce qu'un pied dans le lieu mortuaire. Il passa un regard perdu sur ses amis parlant à voix basse, ne parvenant pas à saisir un traître mot. Ses yeux verts continuèrent leur tour de table et s'arrêtèrent sur Ginny, dont les joues étaient encore striées de larmes à présent sèches. Il sentit son cœur se serrer. Elle avait été très proche de Neville, de même pour Luna qui, malgré son air rêveur, était très affectée par la perte de son ami. Leurs regards se croisèrent avant qu'elle ne détourne la tête vers l'ancienne Serdaigle. Il avait l'impression que la rousse ne s'était pas encore remise de leur rupture, et cela fit encore plus culpabiliser le jeune homme, qui se demanda un instant s'il avait toujours sa place dans cette maison, dans cette famille qui ne serait jamais totalement sienne.

« Ron ! »

Son regard se posa de nouveau sur le couple en face de lui, voyant Hermione soupirer d'exaspération et Ron croiser ses bras sur son torse, l'air contrarié. Il haussa un sourcil face à ce spectacle devenu banal pour le Survivant, qui les voyait souvent argumenter pour un rien. Il n'osa pas intervenir, de peur de regretter les foudres à venir de ses amis. Du coin de l'œil, il vit Luna prendre une part de tarte à la mélasse.

« Harry, prends donc une part de tarte, l'apostropha Molly en saisissant l'assiette vide de l'intéressé, j'ai l'impression que tu as maigri ces derniers temps.

- Oh, ne vous inquiétez pas, Molly, je mange suffisamment. »

Un sourire rassurant s'installa sur les lèvres de la propriétaire des lieux, alors qu'elle plaça une grosse part de tarte dans l'assiette du brun.

« Tiens, mon grand. »

Il la remercia, avant de voir le reste des attablés donner leur assiette à Molly pour qu'elle les serve. Ron et Hermione prirent chacun un morceau de gâteau au chocolat, alors qu'Arthur et Ginny optèrent pour une part de tarte. Il hésita une seconde à prendre sa fourchette à gâteau, songeant qu'il n'avait pas spécialement faim. Mais ne voulant pas inquiéter davantage Molly, il décida de couper un morceau et commença à manger. Il entendit son ami de l'autre côté de la table s'étouffer avant que la voix d'Hermione ne le rejoigne dans les aigus, intimant à son conjoint de manger plus lentement. Un petit sourire étira ses lèvres. Il avait vu mille fois cette scène. À l'époque de Poudlard, Hermione n'arrêtait pas de reprendre Ron sur sa façon de manger. Son sourire disparut alors que sa fourchette porta à sa bouche le premier morceau de tarte.

« Hermione, tu reprends ton travail demain ? Demanda subitement Luna

- Oui, j'ai réussi à avoir qu'un seul jour de congé. »

La conversation dévia alors sur l'activité professionnelle d'Hermione. Elle était psychologue. Les études sorcière étaient bien plus longues que les moldues ainsi la jeune femme avait passé certains tests pour franchir en avance les différents niveaux et accéder plus rapidement au diplôme. Elle était l'un des plus jeunes diplômés de son ancienne école supérieure. Elle gagnait à présent sa vie en enchaînant les consultations et les visites chez des particuliers pour accompagner au mieux ses différents patients.

Harry écoutait la discussion d'une oreille distraite. Il songeait à son travail, à ses bureaux vides et au tableau sans doute encore noyé sous les annotations de leur dernière enquête. Il ne savait pas lorsqu'il devrait reprendre son activité. Leur supérieur hiérarchique avait obligé Théodore et lui à prendre quelques jours de congé. Il sut à travers la conversation de ses amis que Luna retournerait à son laboratoire après-demain. Peut-être devrait-il suivre le mouvement ? Il soupira doucement avant de voir toutes les paires d'yeux fixées sur lui. Échappé dans ses réflexions, il avait perdu le fil de la conversation et se maudit de ne pas savoir la teneur du dernier sujet abordé par ses amis.

« Euh...

- Tu es très pensif aujourd'hui, remarqua Hermione, on voulait savoir quand tu reprendrais ton travail.

- Oh. Bientôt. Je ne sais pas encore quand. En tous cas, il est certain qu'on ne me confiera pas d'enquête jusqu'au retour de Théodore. »

Il parlait rarement de son collègue à sa famille adoptive, sauf lorsque Luna était présente et qu'elle lançait la conversation à son propos. À dire vrai, cela faisait un petit moment qu'il n'avait pas revu la famille Weasley au complet. Parfois, il voyait Arthur au Ministère, et celui-ci lui donnait des nouvelles de sa femme et de ses enfants, en particulier ces derniers temps sur George et une ancienne Serpentard. Il n'en savait pas plus sur le sujet, mais il était heureux de savoir que le digne successeur des Maraudeurs allait doucement de l'avant malgré son sentiment de tristesse omniprésent dû à la perte tragique de son jumeau. Une fois de plus, Harry avait vu son attention détournée, et il s'étonna de la vitesse à laquelle les conversations changeaient en aussi peu de temps.

Subitement, la conversation dériva sur Ginny. Celle-ci informa ses parents qu'un recruteur l'avait contactée pour faire un essai dans une équipe de Quidditch. Harry remarqua le sourire fier de Ron qui l'encouragea dans cette voie, alors qu'Arthur félicitait sa fille sous le regard joyeux de Molly. Il sourit doucement à son tour. La rousse avait du talent, elle savait mener une équipe et il lui souhaita silencieusement que le recruteur la prenne définitivement afin qu'elle puisse enfin commencer une carrière professionnelle en tant que joueuse de Quidditch.

En voyant les assiettes pratiquement vides de ses camarades, le brun décida de se concentrer sur sa part de tarte qu'il n'avait presque pas touchée. Il coupa un autre morceau avec sa petite fourchette avant de l'amener à ses lèvres et de mâchouiller lentement la pâtisserie. Il n'avait pas spécialement faim, et chaque bouchée lui demandait un effort surhumain. Il doutait même de pouvoir finir sa part, alors qu'il voyait Ron en débuter une deuxième du gâteau au chocolat.

Lentement mais sûrement, il parvint à réduire sa part de moitié, sous le regard discret mais inquisiteur de Molly, inquiète face à sa lenteur. Après tout, elle le connaissait suffisamment pour savoir s'il avait réellement faim. Il jeta un regard vers le couple formé par ses amis, où Hermione reprit une deuxième fois son petit ami sur ses manières. Ron avait à peine salué le brun lorsque celui-ci les avait rejoints au Terrier ce midi. Ils avaient convenu avec la famille Weasley et Luna qu'ils partiraient ensemble pour les funérailles. Il avait excusé son silence, l'attribuant au choc de la disparition de Neville, mais Harry lui cherchait toujours des excuses, que cela soit pour ses silences ou la distance qui s'installait entre eux. Le Survivant savait au fond de lui que quelque chose s'était brisé entre eux, mais il préférait se voiler la face. Il ne voulait pas perdre son meilleur ami, et encore moins après le décès tragique de Neville.

À ce propos, il entendit Ron assurer que Neville lui manquerait énormément. Il vit les autres acquiescer en silence, avant que Ginny ne prenne la parole et raconte un souvenir de Poudlard. Ils parlaient tous de Neville, chacun riait de leur bonheur passé avec le défunt alors que lui n'essayait même pas de rentrer dans une quelconque conversation. Sa gorge s'était peu à peu nouée et le souvenir de son ami mourant dans les bras de Théodore lui revint subitement à l'esprit, lui provoquant un haut-le-cœur. Il percevait encore les yeux éteints de son ami et les sanglots incessants de Théodore. Perdu dans ce souvenir, il fut ramené à la réalité par nausée soudaine. Il se souvint du goût amer de son vomissement et contempla d'un air écœuré la part de tarte non finie dans son assiette. Il n'avait définitivement plus faim et un soudain vertige le prit, tant il ressentait le malaise de cet événement marquant. De plus, le fait d'entendre ses amis parler de Neville le rendait bizarrement solitaire, lui prouvant encore à quel point il était proche de son défunt ami.

Des flashs de missions qu'il avait eues avec son équipe surgirent dans sa mémoire, mettant en avant les moments passés avec son ami. Ce dernier ramenait toujours du café et des dossiers que seul lui arrivait à dénicher dans les archives. Harry s'était engouffré dans ses souvenirs et se sentait de moins en moins bien. Il ne parvenait plus à respirer à cette table, au milieu de toutes ces personnes nostalgiques. Ils ne racontaient que des souvenirs de leur adolescence, de Poudlard, de la guerre. Ils ne parlaient ni de ceux qu'ils avaient pu vivre plus récemment, ni des fêtes de Noël et du Nouvel An d'il y a deux mois et encore moins des journées banales et pourtant parfaites du dernier été. Il savait pourtant que Ginny et Luna l'avaient passé avec Neville. Ils ne disaient rien concernant les quelques dettes qu'il avait pu accumuler, le savaient-ils même ? Harry soupira doucement avant de mettre sa main sur son front où il toucha, par habitude, sa cicatrice en forme d'éclair.

Il avait besoin d'aérer son esprit, de quitter cette pièce afin d'être un peu seul, pour avoir un instant de répit. Il se leva, quelque peu chancelant sous les regards curieux et inquiets d'Hermione, d'Arthur et de Molly avant qu'il ne quitte la table pour se diriger vers la cuisine. Finalement, le bruit des discussions se tarit doucement. Le brun s'était mis auprès de l'évier, et respira un bon coup. Une boule s'était formée dans sa gorge, comme si toutes ses émotions étaient bloquées et n'arrivaient pas à quitter le jeune homme. Il entendit des pas avant de percevoir la voix familière et inquiète d'Hermione.

« Harry ? »

Il sentit sa main se placer lentement dans son dos en un geste réconfortant et tourna doucement sa tête vers celle de son amie qui le regardait silencieusement. Harry savait qu'il n'avait pas besoin de mots pour se faire comprendre, et encore moins pour partager cette tristesse qu'il essayait tant bien que mal de canaliser.

« Je suis fatigué, avoua-t-il.

- Oui, ça se voit, tu as une petite mine. »

Harry soupira plus intensément. Ses mains se crispèrent sur le rebord de l'évier, alors que ses paupières se fermaient quelques instants. Il voulait partir. Il n'arriverait pas à tenir plus longtemps, à garder toute cette amertume, tout ce chagrin précieusement au fond de lui. Il avait oublié à quel point il pouvait se sentir si fragile parfois. Son enfance brutale et la guerre lui avaient laissé un certain nombre de séquelles, et la mort de Neville faisait revivre certains de ses traumatismes, notamment la disparition de son parrain, Sirius.

« Tu sais, tu peux rentrer chez toi, personne ne t'en voudra. » Rassura-t-elle tout en se rapprochant un peu plus de lui.

Il avait l'impression qu'Hermione lisait dans ses pensées. Son envie intenable de fuir, de s'emmitoufler dans sa couette grandissait un peu plus chaque instant. Il voulait dormir, rattraper ses nuits agitées et que la journée se termine enfin.

« Ouais... »

Il se tourna et vit les propriétaires des lieux s'avancer vers lui. Il se rassura en voyant le sourire compatissant de Molly tandis qu'Arthur mettait sa main sur son épaule dans un geste doux.

« Je crois que je vais rentrer.

- D'accord. Repose-toi bien Harry, tu as une sale tête. » Répondit Arthur.

Molly le serra dans ses bras, tandis qu'Hermione alla averti les autres du départ de son ami. Harry salua la modeste assemblée de loin avant de se diriger vers la cheminée et de disparaître dans les flammes vertes. Arrivé chez lui, le brun se déchaussa, déposa sa veste sur l'accoudoir d'un des fauteuils en velours de son salon puis se dirigea comme par automatisme vers sa chambre. Depuis sa dernière enquête, il passait tout son temps dans son lit, et ne mangeait que des plats déjà préparés ou commandés. Une fois installé dans son cocon, il retira rapidement ses vêtements avant de se glisser sous sa couverture, vêtu uniquement de son boxer, et enfonça la tête entre les deux oreillers.

O/O/O

La musique était douce et invitait les plus courageux à danser un slow romantique. Les lumières de la discothèque étaient dans les tons bleus et orange et animaient la piste où plusieurs couples gays bougeaient en un corps-à-corps sensuel. Non loin de là, les orbes bleus d'un ancien Serpentard observaient la scène qui se jouait devant lui. Un verre dans sa main droite et l'autre tirant sur sa cravate noire à moitié défaite, Théodore était assis sur le même tabouret que la dernière fois. Il était là depuis déjà trente musique douce disparut et laissa place à un son plus dynamique, excitant la foule bondée de la discothèque. Théodore soupira de lassitude avant de finir son deuxième verre de la soirée.

Il avait longuement hésité à revenir dans ce lieu. Après être parti du cimetière, il n'avait pu résister à laisser échapper misérablement quelques larmes. Il s'était pourtant promis de ne plus pleurer mais cette fois-ci, il ne pouvait rien faire pour lutter contre son chagrin lancinant. Il était trop difficile de réprimer ses émotions, en particulier lorsqu'elles concernaient une culpabilité sans nom et un amour naissant déjà anéanti.

L'image de Neville mourant dans ses bras le hantait encore. Il ne pouvait chasser le souvenir de ses yeux se figeant dans le vide et, depuis cette traumatisante scène, il avait du mal à dormir correctement. Parfois, il lui arrivait de se réveiller en pleine nuit, à la suite d'un rêve trop réaliste. La nuit précédente, il s'était imaginé que Neville était toujours en vie et que lui avait reçu le sortilège de l'agresseur. S'il venait à mourir, manquerait-il à quelqu'un ? Certainement à son père, devina le jeune homme. Mais à part lui ? Draco viendrait-il à son enterrement ? Et Harry ? Ses amis pleureraient-ils son absence ? Pendant que ses pensées lugubres l'envahissaient, il déposa son verre sur le comptoir où il sentit subitement une main lui caresser ses doigts fins. Il sursauta tout en se retournant promptement face au bar et découvrit un visage qui commençait à lui être familier.

« Oh désolé, je ne voulais pas te faire peur. Je voulais juste avancer ton verre pour éviter qu'il tombe.

- Je n'ai pas eu peur, Niait-il en bloc.

- Oh, répondit simplement Benoît dans un petit sourire, je vois que tu t'es bien fringué ce soir.

- Je ne sais pas comment je suis censé prendre ça… »

Il le vit écarquiller ses yeux noisette avant de le voir glisser sa main nerveusement dans ses cheveux courts et châtains.

« Pas que je te trouvais mal habillé l'autre jour... » Rajouta-t-il timidement.

Théodore se doutait bien que le barman cherchait un moyen de se rattraper. Il ne put s'empêcher de soupirer doucement. Benoît était la raison de son hésitation à venir. Il avait passé du temps avec lui deux jours auparavant. Certes, ce n'était pas comme s'ils étaient amis ou qu'ils sortaient ensemble, loin de là. Et heureusement, pensa-t-il en son for intérieur. Mais le brun avait l'impression que le serveur s'était étonnamment attaché à lui. Il avait eu ce drôle de sentiment lorsqu'il avait fait l'erreur de s'intéresser à sa... télévision.

« Quoique, tu étais plutôt beau gosse en uniforme. »

Théodore ouvrit grands ses yeux face à cette révélation. Comment pouvait-il dire ce genre de choses aussi simplement ? Il le vit prendre un air pensif, sa main tenant son menton comme s'il cherchait à tout prix à se souvenir de sa tenue vestimentaire. Théodore se sentit soudainement embarrassé.

« Euh... Du Whisky pur-feu s'il te plaît. »

Il espérait que sa demande pouvait changer la tournure de cette drôle de conversation. Il comprit que son plan avait réussi lorsqu'il le vit s'activer, le sourire aux lèvres. Bon sang, pourquoi était-il venu déjà ?

Un nouveau soupir quitta ses lèvres et il songea une nouvelle fois à sa récente découverte : la technologie moldue. Si son père découvrait qu'il se cultivait sur le monde non sorcier, il aurait sans aucun doute une crise cardiaque.

Il n'empêche que la télévision était réellement une invention géniale. Il avait pu constater par lui-même que les moldus pouvaient avoir de bonnes idées lorsqu'il s'agissait de divertissements. À force de changer les chaînes, Benoît et lui avaient fini par regarder un jeu télévisé, retardant encore plus le départ de ce dernier.

« Tiens. »

Théodore prit le verre dans sa main et en but une longue gorgée sous le regard étonné du serveur, avant que celui-ci ne soit appelé par un autre client. En l'absence de Benoît, le jeune homme replongea dans ses pensées. Il songeait à Augusta, à qui il avait rendu une visite dans sa maison de retraite le lendemain du décès de Neville.

Il avait pensé que sa visite la rendrait colérique, qu'elle l'aurait insulté de tous les noms, qu'elle l'aurait critiqué avec son habituel timbre acide, ou qu'elle lui aurait jeté un regard furieux digne d'une Weasley en colère. Il n'avait pu cacher sa surprise lorsqu'il l'avait découverte ce matin-là, prostrée, comme si elle avait perdu goût à la vie. Avec un événement aussi tragique, son habituel masque austère avait fini par se briser. Mais sa visite camouflait une raison bien particulière. Il souhaitait évidemment savoir comment se portait Augusta après cette nuit difficile, et se doutait bien que celle-ci aurait besoin d'un quelconque soutien dans les préparations de l'enterrement de son petit-fils. Il lui avait naturellement proposé son aide et elle l'avait gentiment refusée.

Il n'avait pas insisté et une heure plus tard il était parti vers l'accueil de l'établissement afin de s'entretenir avec le directeur. Ils avaient longuement parlé des dettes de Neville dans le bureau du supérieur et étaient parvenus à un accord. Théodore tenait absolument à prendre en charge le remboursement des dettes que son ami avait laissées derrière lui. Ce problème financier était réglé, mais un autre se posait encore. Maintenant que Neville n'était plus là, qui paierait les frais d'hébergement d'Augusta ? Il avait donc rassuré le directeur : le temps qu'une autre solution soit trouvée, il avancerait les frais. Bien entendu, il avait fait en sorte que la grand-mère de Neville ne sache rien de cette histoire de dettes et encore moins du remboursement qu'il avait opéré. Il avait eu besoin de le faire, comme pour se pardonner de ne pas avoir pu sauver la vie de Neville, de ne pas avoir su le protéger.

Il avait dû le faire, tout simplement.

Théodore observa son verre à moitié vide et le porta à ses lèvres. Il sentit le liquide s'infiltrer dans ses dents et sur sa langue avant qu'il ne vienne lui brûler la gorge. Il déposa son verre sur le comptoir lorsqu'il vit Benoît passer devant lui.

« Un autre verre. »

La soirée ne faisait que commencer pour l'ancien Serpentard. Il n'avait qu'une seule idée en tête : se saouler une nouvelle fois. Et oublier.


A bientôt!