Disclaimer : oui, oui, un an, deux ans… ! Piouf, que le temps passe vite, n'est-ce pas ? Bouhouhouh, je me repens, pardonnez ce creux roguien ! Bon, râlez pas, voilà la suite. Cooool, non ? Allez on se remue pour les reviews là ! Y en a qui attendent, m'enfin ! Petite purge traumatique de faits de langue, littérature, petit clin d'œil au Disque-Monde, un ptit chant irlandais pour le Nubuck, et les petites apparitions d'un grand blond et d'un éternuement pour Mirliton, même si elles ne sont pas drôles comme les siennes. Argh, je viens de réaliser que la bêbête emprisonnée quelque part a jailli de mon inconscient molesté par Mirliton aussi. Mais ça ronge pas, un Quissifrott, si ? Bon, j'en ai trop dit.

4. Flattez la donzelle, elle vous pondra du sel…

« Beute tou ènedeuh frrrrro, ine maïlle drrrrimz aïlle go, ènedeuh aïlle nil ènedeuh prrrrè forrrr iouuuuu-ou-ou, forrrr slèveurrry flède, O glori-ious dède, ouène iou fèl ine zeuh fogui d-iouuuuuuuu ! »

Exalté par ce chant brumeux irlandais, Severus Rogue souriait. C'était tellement inhabituel chez lui qu'une grande joie n'aurait pas dû produire plus d'un rictus flageolant évocateur. Mais ce jour-ci était différent. Le nouveau Rogue avait été accouché par Legolas l'Elfe facétieux, mis au monde de ses blanches mains fines, extrait de sa gangue d'humeur noire, désencastré de sa couche de graisse capillaire avec amour. Oui, avec amour. Et c'était d'ailleurs l'amour qui le portait sur son petit nuage blanc poudré de rose. C'était l'amour qui lui faisait entonner des airs autres que ceux de « Potter en pleurs meurt de peur », « Granger la grunge gruge la grange orange quand ça l'arrange » ou « Weasley l'aime laid, lourd, long le lilas lent lunaire ».

Pour une fois dans son existence, du plus loin que se souviennent ses neurones habitués à ficher la moindre incartade des gens et à les marquer d'une croix rouge s'ils avaient osé franchir la limite « attaque ciblée sur l'irascible Severus », le professeur de Potions se sentait d'humeur badine. L'air de larve malformée qui composait son expression dominante avait cédé le pas à une douceur béate. Pour preuve, suivons un instant les pensées de ce brave sorcier, dites dans le souffle tandis qu'il marche vers quelque lieu connu de lui seul :

- … conquise par ma verve depuis si longtemps déshabituée à la poésie ? Saura-t-elle reconnaître en moi un être sensible, loin de la réputation forgée dans l'acide que j'acquis pourtant durement au labeur ? Daignera-t-elle m'adresser un regard autre qu'austère, adoucira-t-elle ses traits pour me sourire avec compassion, si ce n'est ravissement ? Saura-t-elle entendre l'appel vibrant qui agite les chambres de mon cœur, pour laisser son âme voguer aux côtés de la mienne en une balade langoureuse ? Que va-t-elle…

L'homme ne termina pas sa phrase. Il venait de heurter de plein fouet une silhouette sombre, d'où une tête traitée au soleil hivernal jaillissait, le rictus en bouche. La tête en question était surmontée d'une masse de cheveux blonds comme l'or du Rhin en fusion. Le chef se mit a parler :

- Severussss ! assena insidieusement la voix. Comme il est étrange de te retrouver grimé de la sorte… Drago m'avait donc dit vrai, notre estimé Professeur Rogue s'est débarrassé de son cocon sinistre pour faire peau neuve. L'adolescent au visage fleuri que tu fus jadis aurait-il fini de te tarauder, pour que tu ailles si allègrement entre les murs de Poudlard ? Et qu'est-ce que cette chevelure soyeuse que tu trimbales sur ton crâne ? Tu as rompu avec les jets de pus et les potions grasses ? Depuis quand es-tu adepte de l'esthétisme, dis-moi, mon ami ?

La voix, basse et susurrante, était plus menaçante qu'un « bip » annonçant la fin d'un compte à rebours mortel. Severus tenta de ne pas se laisser décontenancer :

-Ah, Lucius, quelle surprise ! Euh, tu viens voir si ton rejeton ne fonce pas de la racine ? N'aie crainte, Drago craint tant son camarade Harry Potter qu'il blêmit de jour en jour. Ah ça, on peut dire que c'est le digne héritier de son père.

Lucius Malefoy lança un regard torve au sorcier, avant de pincer les lèvres, vexé. Dans un remous de cape, semblable aux entrailles perturbées du ciel, il tourna les talons, ouvrant à la volée les imposants battants de la porte d'entrée, avant de s'enfoncer dans la nuit. Etonné que Lucius ne lui cherche pas plus de poux dans la tête, Severus se sentit soulagé. Remarquez, Legolas l'Elfe avait libéré les âmes cristallisées de la faune clandestine nichée dans ses cheveux. Normal, donc ! Tout guilleret, il sourit. Sataniak l'exilée, l'araignée qui lui fut fidèle des années durant, en observation dans un vieux cyprès noueux, en fit un malaise. Au loin, l'air vibra de la rage écumante de Malefoy, qui aboyait à la face des lucioles « cette école a fait de mon fils une lavette ! ».

Le professeur de Potions reprit ses pérégrinations à travers les couloirs sentant la vieille pierre de Poudlard. Peeves l'esprit frappeur, occupé à suçoter l'orbite vide de la statue de la Sorcière Borgne d'un air ravi, délaissa sa victime pour suivre cet inconnu.

- Où vas-tu, beau gosse rosse ? caqueta le fantôme en se plantant face à Severus, le visage contorsionné par une grimace mauvaise. Poupoupourquoiiiiii cette mine de paon extatique tik tik !

Le professeur amoureux, animé d'une malice débridée, fourragea dans la poche de sa tunique verte pour en ramener quelque chose dissimulé dans son poing fermé.

- Qu'est-ce que tu caches là dedans, sorcier ? s'enquit Peeves, d'une voix rongée par la curiosité.

Severus découvrit deux rangées de dents étincelantes.

- Un présent pour toi, mon cher. Approche, c'est minuscule…

Ne réfléchissant pas plus loin que le bout de sa transparence, l'esprit frappeur avança sa trogne mauvaise face à la main fermée de Rogue. Lentement, Severus ouvrit ses doigts. Peeves, perplexe, scruta la paume, où se trouvait un petit tas de poussière dorée.

- Qu'est-ce que c'est ? grinça le fantôme, fronçant le sourcil de mécontentement. A quoi veux-tu que ça me serve ?

- Oh, mais il y a mille façon de l'utiliser, vois-tu, fit Rogue, si mielleusement qu'une abeille égarée vint inhaler son souffle mentholé. Oh, mais que m'arrive-t-il ? Je crois que mes sinus s'agitent… Aaah aaah aaaaaaah tchouuuuuum !

Et, dans l'élan éternuant du sorcier, la poussière qu'il tenait dans sa paume fut projetée avec force sur l'esprit frappeur, qui se mit à hurler comme un dément.

- Hiiiiiiiiiiiiiiiii ! Haaaaaaaaaaaaaa ! Je me transforme ! Je me transforme ! Aaaah ! Mon dos ! Mon dos me démange ! Qu'as-tu fait, maudit sorcier ! cracha-t-il en direction de Severus Rogue, qui déjà se tenait les côtes de rire. Des ailes ! De la soie d'araignée ! Des fleurs ! Mais, mais qu'est-ce que… j'ai une poitrine de fille ! Il m'a transformé en créature frivole ! C'est de la poudre de fée ! Je suis devenu une fééééééée !

Horrifié, Peeves fila droit à travers le premier mur qu'il rencontra, poussa encore un hurlement aigu et s'enfuit le plus loin possible, ne songeant pour l'heure qu'à se terrer le plus loin possible, à l'abri des quolibets de ses victimes habituelles, à savoir la généreuse majorité de l'école. Aux anges, Severus lança à la suite de son odeur de fleurs des champs : « ça, c'est pour toutes les années où tu faisais tourner mes potions. Et pour la fois où tu m'as volé mon luth pour le remplir de criquets ».

Le cœur léger, Severus s'approcha de la statue de la Sorcière Borgne et lui gratouilla le menton. La bouche de pierre s'ouvrit dans un bruit froid, et vomit un parchemin roulé, entouré d'un ruban violet. Le sorcier le prit avec émotion, huma l'odeur du papier imprégné de gingembre et repartit d'un pas svelte vers le hall d'entrée. En chemin, il fredonna un cantique elfique que sa mémoire avait depuis fort longtemps occulté derrière des remparts de grommellements.

L'air était agréablement frais, le ciel, étoilé au possible, chuchotait sa paix aux dormeurs. Au loin, une chouette hulula avant de boulotter son mulot de proie. Malgré toute son attention focalisée sur sa mission, Severus nota qu'il faudrait qu'il trouve des pelotes de réjection pour ses potions. Afin de concocter de merveilleux sorts, il n'aurait pas à ôter lui-même la vie à d'infortunés rongeurs. Tandis qu'il s'en faisait la réflexion, tel un présent du ciel, une de ces pelotes atterrit à ses pieds, dans l'herbe haute.

Severus releva son pantalon avant de s'accroupir. Il localisa vite la pelote encore chaude, et la contempla d'un air attendri. Des brins d'herbe et des poils de diverses couleurs côtoyaient des os fins. Le professeur sursauta lorsqu'il saisit, dans un éclair de lune, le scintillement de minuscules dents blanches. Que surmontait un museau minuscule. Qui bougeait encore ! Catastrophé, Rogue regardait la pelote où frétillaient les moustaches d'un petit rongeur tout juste ingéré, non digéré du fait des piques qui couvraient son pelage. Que devait-il faire ? La pauvre bête faisait peine à voir, elle couinait en essayant de se débattre, mais ses pattes étaient captives de l'amas coagulé de poils. Devait-il l'achever, pour qu'elle rejoigne au plus vite le paradis des… rongeurs à piques ? Ou devait-il la libérer, au risque de se retrouver face à une créature à moitié rongée par l'acide gastrique de la chouette ?

- COUIIIIIIIIIII !

Le professeur s'interrompit dans son cas de conscience. Un petit rongeur osseux, vêtu d'une robe à capuche noire, attendait au pied du sorcier en tapant de sa patte squelettique dans l'herbe. La créature tenait entre sa minuscule patte une faux au fil que l'on devinait très tranchant au bruit que l'air faisait en passant dessus. La Mort-aux-Rats, soupira intérieurement Rogue. Encore un spécimen échappé d'un de ces mondes parallèles autorisés par Dumbledore.

- COUIII ! s'impatienta le Rat mortel en brandissant sa faux avec irritation.

- Vas-y, libère l'âme de cette pauvre bête, mais attends que je m'éloigne avant…

- COUIII, concéda la Mort-aux-Rats en posant sur lui ses orbites vides où la genèse de l'univers se rejouait perpétuellement.

D'un pas raide, le cœur meurtri de pincements, Severus s'éloigna. Il eut un haut-le-cœur lorsque le fil de la vie du rongeur à piques fut tranché dans un bruit sec. Secoué, il n'en fut pas moins ragaillardi lorsqu'il aperçut la fenêtre à meneaux de l'élue de son cœur. Empoignant sa baguette, il murmura un « seducere decorum » et aussitôt une dizaine de rosiers jaillirent du sol, dans son dos ; une mare couverte de nénuphars en fleur s'ouvrit à ses pieds et une brume scintillante se répandit un peu partout autour. Servi par ce décor du tonnerre, Severus ensorcela ses lèvres pour qu'un baiser osé aille se coller avec un bruit humide sur la vitre de la chambre.

Peu de temps après, les deux battants s'ouvrirent, et la tête d'une femme coiffée comme une torche apparut par dessus le balcon, éclairée par un feu de cheminée ronflant.

- Qu'est-ce que c'est que ça ? Qui a graissé mes carreaux ! Qui a lancé une limace sur ma fenêtre ! maugréa-t-elle en sondant la nuit. Si j'attrape le sagouin qui a fait ça, je m'en vais lui apprendre l'éducation ! Mais qu'est-ce que… ?

Severus ne la laissa pas terminer, car déjà il avait fait apparaître un luth. Il utilisa un sortilège pour qu'un lapin de passage y joue une mélopée romantique. Le lagomorphe, qui ne comprenait pas très bien ce qui lui arrivait, se surprit à gratter les cordes de ses petites griffes terreuses, son petit nez remuant en cadence. Vibrante d'émotion, la voix de Severus Rogue, lisant le parchemin au gingembre, s'éleva dans la nuit et la brume invoquée :

-

Dame de mon cœur, qui sans heurts

Sur mon cœur fait un malheur.

Point n'est de rancœur à la liqueur

Qui leurre les subtiles saveurs

En fleurs adeptes de ma pâleur.

-

Dans ma poitrine que domine

Votre mine, mon cœur s'illumine.

S'il était de l'urine sur de la calamine,

Point ne serait de famine en Cochinchine.

Vos lèvres purpurines me sont coquines.

-

Laissez-moi goûter, ne me faites pas douter,

Mon âme est voûtée, car elle a redouté

De vous d'être désenvoûtée. Mais, doux thé

De l'amour dérouté, je suis toujours clouté

A vous, Téthys de ma mer intérieure, qui n'en sera jamais boutée.

-

Ah, je soupire car rien n'est pire,

Que la ire errante du désir

A faire pâlir le plus beau cachemire.

De vos paroles je tire des notes à honnir

La plus belle des lyres faite élixir.

-

Au jour où je vous croisai, dans mon cœur croissait

Une grenouille à lacets qui son amour coassait,

Et non pas croassait, non plus que gloussait.

Si vous m'aimez point ne sais, mais si je toussais,

Prendriez-vous ce Poucet comme un doucet ?

-

Qu'est cette poignée de décennies, qui nos cœurs bannit ?

Si j'étais un penny, j'achèterais des paninis,

Symboles de ce qui nous unit, et que nenni !

Aux orties la convention qui hennit, mauvais génie,

Contre cet amour béni des menhirs…

-

Oh, reine de sagesse que rien ne blesse,

Si vous avez une laisse, alors sans faire grand messe,

Attachez-moi à votre noblesse qui n'a de cesse

De me mettre en liesse. Je vous emmènerai à Lyonesse,

Où nous vivrons dans l'allégresse, ma chère prêtresse.

-

Je vous aime, et dans le vent je sème,

Je parsème des bouts de mon cœur, blême

Comme un nem qui n'a pas reçu de baptême.

Je veux être votre rhème, soyez mon thème,

O point de flemme pour mon œdème.

-

Ah, mon air valse, mon nerf va,

Tonnerre, vaque à tes tâches, salaire, va !

Tout se mélange dans mes songes,

La confusion me fait tension,

Votre nom jamais ne m'énerva : Minerva !

-

Et tandis que Severus venait de lancer avec fougue ces derniers vers, une pluie de sel s'abattit sur lui en crépitant.

- Vade retro, sac de glace ! hurla la voix hystérique de Minerva McGonagall, rendue furieuse par les rosiers grimpants qui envahissaient son balcon, agrippant de leurs épines sa robe de chambre écossaise.

- Mais… ! Mais… ! Minerva ! C'est moi, c'est…

Un jet de flammes atterrit juste aux pieds du malheureux éconduit, grillant un malheureux batracien qui se lavait les yeux sur son nénuphar. Horrifié, Severus Rogue froissa convulsivement son parchemin avant de tourner les talons, laissant en plan un lapin abasourdi qui se demandait s'il n'allait pas se mettre à regarder l'heure pour savoir s'il n'était pas en retard pour l'heure du thé, une mare qui sentait le poulet grillé et où les fleurs de nénuphar plongèrent en tremblant dans la vase, des rosiers qui préférèrent abandonner toute escalade au profit de l'escapade, ainsi qu'une tortue luth aigrie d'avoir été encordée de la sorte.

- Et ne remettez jamais les pieds sous ma fenêtre, espèce de pervers, ou il vous en cuira ! glapit McGonagall en agitant un point vengeur en l'air, assommant au passage une chauve-souris à bouloches.

Trop choqué pour réaliser quoi que ce soit, Severus Rogue s'enfonça droit dans la Forêt Interdite.

A suivre…