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Traduction partielle de "Lessons Learned #1: Impulsion" par DarthRuinous.
Chapitre n°16 :
Lessons Learned (#1)
[An 1 961 après J.C. / -74 avant Yavin]
« On n'est libre qu'en étant seul. »
- Arthur Schopenhauer
La plupart des enfants Naboo de huit ans savaient qu'il était dangereux de s'aventurer dans la jungle près des frontières de Theed. La plupart des enfants Naboo de huit ans craignaient les mystérieux guerriers Gungans qui erraient dans les marais. La plupart des enfants Naboo de huit ans n'étaient pas Sheev Palpatine.
Et pourtant, Sheev Palpatine n'était pas le genre de garçon à s'exposer aussi ouvertement au danger. Sauf si, bien évidemment, cela allait parfaitement avec ses intentions.
Comme défier Père jusqu'à ce que le rouge monte à ses joues aristocratiques.
Ou bien rester en vie dans la jungle s'étalant aux portes de Theed.
C'était là où il se trouvait présentement, trébuchant sur les épaisses racines des larges arbres. La prochaine fois, il devrait se montrer plus prudent avant de voler le speeder du directeur de l'école pour aller faire un tour...
Il se retourna pour lancer un regard à l'engin autrefois immaculé, et désormais à moitié immergé dans un marécage spongieux, ses moteurs noyés et le compartiment passager presque entièrement sous l'eau. Sheev renifla et repoussa une plante graisseuse et collante de sa manche.
La meilleure chose à faire aurait été de tout simplement ignorer le directeur, évidemment. Mais la dure main de l'homme s'abattant sur son visage lui avait bien trop rappelé Père, et il admettait ne pas avoir réfléchi à tête reposée lorsqu'il avait déverrouillé de force le speeder. Sa dernière école s'était certainement montrée très utile pour l'apprentissage de certains talents, ceux qui auraient fait pâlir les enseignants s'ils avaient su qu'il les avait acquis.
Il aurait dû attendre. La prochaine fois, il le ferait. Mais il avait eu soif de vengeance, et il n'avait pas anticipé la réaction rapide de l'officier de sécurité de l'école, qui s'était lancé à sa poursuite à travers la moitié de la capitale et dans les fourrés du territoire Gungan. Même à l'âge tendre de huit ans, la capacité de Sheev à piloter des speeders était impressionnante. Ce ne fut qu'une fois aux frontières de la civilisation que l'officier avait mis fin à la poursuite, et que Sheev s'était permis de relâcher sa concentration.
Dans un territoire inconnu.
D'où le speeder coulé.
Et la blessure sur son bras.
Il jeta un regard offensé à l'engin.
Les marais n'étaient pas les endroits les plus sûrs de Naboo. Des narglatchs et bien d'autres créatures peu plaisantes se tapissaient dans les environs, sans même parler des Gungans sauvages et incultes, alors Sheev surveilla son environnement immédiat tandis qu'il marchait péniblement dans une vague direction du côté d'où il provenait. Petit et maigre pour son âge, il n'était même pas imposant parmi son espèce, alors il savait qu'il ferait un délicieux en-cas pour n'importe quelle créature des marais trop entreprenante.
Il agrippa fermement son blaster personnel au nez retroussé qu'il tenait caché dans sa manche droite. Père ne savait pas qu'il en possédait un, mais il l'avait acheté vraiment peu cher sur le marché noir de Theed et lui avait apporté lui-même quelques modifications. La crosse tenait désormais bien mieux dans sa petite poigne, et il le cachait toujours sous le cinquième pont sur son trajet retour de l'école.
Il ne se faisait aucune illusion sur le fait qu'il n'était pas près de retourner dans cette école.
Un bruissement dans un buisson tout proche mit tous ses sens en alerte, mais la petite voix constamment présente en lui ne l'avertit d'aucun danger, alors il jeta un regard noir au petit nuna qui rampa en travers de son chemin. Les nunas étaient des créatures peu intelligentes et incapables de voler, qui constituaient la base de la chaîne alimentaire sur de nombreuses planètes. Il le regarda disparaître de l'autre côté du sentier et pencha la tête pour entendre d'éventuels poursuivants. Rien. Juste un nuna, donc.
Père serait sans doute en colère lorsqu'il rentrerait tard ce soir. Il pourrait lui donner une ou deux gifles et l'envoyer au lit sans manger. Sheev se rendit compte qu'il peinait à s'en inquiéter, alors que toute la beauté du marais s'étalait devant ses yeux. Il étudia les grands arbres, leurs troncs noueux presque aussi larges et enchevêtrés que leurs cimes, et remplis de vie sauvage et d'insectes bourdonnants.
Naboo semblait pleinement vivante ici, pas comme dans les plaines ou même au sommet des montagnes. Il écouta tous les sons différents et réalisa soudain qu'il ne pouvait même pas voir la lumière du soleil, en raison de la dense végétation au-dessus de sa tête.
Quelque chose l'appela dans les ombres de son esprit, soufflant sur sa gauche, et il sauta vers l'avant juste à temps pour éviter la collision d'un large corps avec le sien. Se retournant sur lui-même, à moitié accroupi, Sheev regarda le nouveau venu. Une large créature imitait sa posture à seulement quelques mètres de là, lui rappelant les gualamas dans l'écurie, toutefois différemment. Il n'y avait pas les longues cornes, mais la créature dévoilait dans sa grimace une collection de dents épaisses comme des molaires. Sa queue, battant les herbes hautes derrière elle, était bien plus longue et large que celle des gualamas, comme si la créature était davantage habituée à nager qu'à courir.
Sheev remarqua la bande jaunâtre le long de son flanc, et cela le frappa. Littéralement. Il cria alors que la créature plongeait en avant et le cogna dans l'épaule. Il roula désespérément sur le sol, évitant les sabots fendus et les dents tranchantes, et au milieu d'une roulade, il réalisa quelle était cette chose qui grognait et sifflait au-dessus de lui.
Un Zalaaca.
L'un des animaux ornant le blason des Palpatine. Il le voyait chaque jour sur celui peint dans le hall principal de Convergence.
Quelle ironie que celui-ci faisait désormais son possible pour le tuer. Sheev se tordit et grimaça lorsqu'une griffe s'enfonça profondément dans son épaule, le clouant au sol. Ignorant la douleur – la douleur ne représentait rien –, il se roula sur lui-même et mordit la patte de la créature aussi fort qu'il le put à travers la fourrure.
Le Zalaaca glapit et s'écarta en boitant, l'encerclant à seulement quelques mètres de l'endroit où le jeune humain se tenait l'épaule. Père serait furieux pour le trou dans ses vêtements.
L'animal n'attaqua pas de nouveau immédiatement, semblant plutôt incertain et nerveux, et Sheev cligna des yeux. C'était un enfant, comme lui. La rayure n'était pas assez marquée pour qu'il s'agisse d'un adulte. Sa taille était d'ailleurs inférieure à celle d'un gualama. Un jeune... qui pensait qu'il pouvait le dévorer ! Il l'insulta avec une injure en Huttese qu'il avait apprise dans sa précédente école, un mot que Père avait été furieux d'apprendre qu'il connaissait.
Le Zalaaca siffla en retour, sa large gueule rouge s'ouvrant dans une démonstration de défi. Sheev rit malgré le sérieux de la situation. Ce qu'il avait l'air ridicule !
La chose la plus étrange se produisit alors. Le jeune cessa ses pas et regarda l'humain, et pendant le plus bref des moments, Sheev eut l'impression qu'il l'avait insulté. Il fixa son regard dans celui de l'animal et ne détourna pas les yeux, car quelque chose lui disait que c'était le plus important à faire.
La créature baissa la tête et renâcla bruyamment. Siffla de nouveau.
Utilise le blaster, fit l'esprit froid de Sheev. Utilise le blaster, et tu pourras t'en aller. Il savait bien viser, et les yeux du Zalaaca étaient des cibles larges et faciles à atteindre. Lentement, il tira le blaster hors de son holster dans sa manche, et leva le canon jusqu'à ce que les yeux de l'animal soient dans son champ de visée.
L'animal avait-il... honte ? D'avoir été battu aussi facilement ? Il hésita lorsqu'il souffla dans sa direction.
Tue-le. Il devrait simplement le tuer et continuer sa route. Aucune raison de l'épargner, ou bien il essaierait de nouveau de le dévorer. Mais il était puissant, beau et fort, contrairement à tout ce qu'il pouvait rencontrer dans la Contrée des Lacs, et il se trouva fasciné malgré lui. Il baissa alors doucement le bras, et le Zalaaca renifla l'air de ses larges naseaux. Il émit un drôle de son, tel un renâclement qui se réverbéra à travers les arbres épais autour d'eux.
Le regard toujours fixe, il leva son autre bras en tendant la paume, et le Zalaaca vint doucement vers lui sur ses larges sabots griffus, renâclant avec avertissement. Mais Sheev ne sentait aucun danger le concernant, et cela le ragaillardit pour se relever.
La truffe qui vint se poser sur ses doigts était douce, si douce qu'il manqua de sursauter de surprise à cette sensation. C'était comme la soie la plus douce qu'on puisse importer d'Alderaan. La peau qui se trouvait à proximité était ferme, tiède et sèche. Il lui gratta le museau entre les naseaux, et le Zalaaca ronronna sous ses doigts.
- Tu as une famille ? demanda-t-il pour briser le silence.
Il se sentit à la fois maladroit et stupide de l'avoir demandé, car un Zalaaca ne pouvait parler, mais il sentait qu'il allait suffoquer s'il ne disait rien pendant encore longtemps dans ces marais.
Le Zalaaca gronda, couina et donna un petit coup de museau contre sa main, faisant naître un demi-sourire sur ses lèvres fines.
- Ils devraient mieux te surveiller. On ne sait jamais sur quoi tu peux tomber par ici, hm ?
L'animal hocha la tête avec approbation, plus probablement cherchant à savoir s'il était une possible source de nourriture. Il repoussa la tête de l'animal lorsqu'elle se cogna à son torse étroit.
- Je ne suis ni ta famille, ni ton repas.
- Hurrruuuppp..., protesta l'animal en reniflant son visage.
Il vit de près son expression curieuse, anormalement intelligente et l'étudiant de près.
Il se tendit, n'ayant jamais apprécié que quelque chose se trouve si près de lui. Il était facile d'être blessé lorsque des créatures vivantes se trouvaient si proches.
Mais le Zalaaca ne le blessa pas, et les ombres dans son esprit restèrent tranquilles et l'enveloppèrent, et il sut qu'il n'avait rien à craindre, du moins pas de la part de cette créature. Il posa une fine main entre les yeux de l'animal et fixa du regard ses yeux rouges.
- Tu es magnifique, murmura-t-il.
Père avait déjà utilisé ce mot pour décrire la vue depuis Convergence.
C'était bien mieux, tellement mieux. C'était vivant et réel, et assez fort pour le dévorer, mais en avait décidé autrement. L'animal, au contraire, pliait sous la pression de sa main, glissant sur ses genoux osseux dans la boue et baissant sa longue tête bien bas. Il toucha ses oreilles vaguement jaunes avec extase. Pourquoi se soumettait-il à lui ?
Il releva brusquement la tête en entendant un cri étrangement gazouillant dans la direction d'où était venu le Zalaaca. L'animal se tendit sous sa main et se leva, le dépassant déjà d'un demi-mètre. Le cri se fractionna en une demi-douzaine de voix aiguës et particulièrement accentuées, à mesure qu'elles avançaient. De la vie intelligente ! Sheev posa une main sur le museau du Zalaaca pour l'apaiser, et le lien entre eux le frappa tel un choc physique.
Quelques mètres plus loin sur le sentier, un groupe de guerriers Gungans et d'adolescents entra en scène, tenant les rênes de leurs Kaduus avec une attention alarmée à ce qu'ils voyaient devant eux. L'un des adolescents les plus à l'avant cria avec une colère défaitiste. Sheev se figea sur place. Il avait déjà vu des Gungans auparavant, bien sûr, mais seulement un ou deux en ville, et ils étaient restés dociles et silencieux. Père avait dit que c'était parce qu'ils connaissaient leur digne place. Sheev n'était pas sûr de croire Père.
De toute façon, c'était fort différent. C'était une sorte de partie de chasse, avec des armes aiguisées et des lassos d'énergie. Il fouilla dans sa mémoire pour la dernière tentative de traité de paix entre Gungans et humains. Sûrement, ils ne voudraient pas risquer la guerre pour seulement un jeune garçon entré sur leur territoire. Il ne put retenir son appréhension bloquant le fond de sa gorge, alors que deux Gungans mirent pied à terre et avancèrent dans sa direction de leur démarche molle.
- Hissa si petit. Minuscule hissa.
Le tiraillement familier de la colère menaça d'étouffer des mots impolis dans sa bouche, alors Sheev se tourna vers eux.
- Je m'excuse si j'ai empiété sur votre territoire. Je m'en vais immédiatement.
Père serait déjà suffisamment furieux à propos de l'incident de l'école ; y ajouter ceci le laisserait avec des blessures pendant des semaines, au lieu de jours. Il n'avait pas activement envie de faire empirer sa punition, cette fois.
- Noussa aider tissa à retrouver le chemin. Mui grande jungle, c'est, pour un si petit hissa.
