33 | Des tas de choses à discuter
L'invitation arriva juste après le petit-déjeuner sur un carton gravé et dans une enveloppe en papier épais; Les Parkinson les invitaient - enfin essentiellement Aesthelia - pour un thé où les enfants étaient les bienvenus. Sirius - comme sans doute l'ensemble de la gente masculine - était convié à les rejoindre plus tard "pour terminer l'après-midi".
"On n'est pas obligé de dire oui", indiqua Sirius en regardant Aesthélia droit dans les yeux.
"Non, mais je suis contente de voir que je suis invitée, que nous sommes invitées - Cruz et moi - malgré ce qui s'est passé l'autre fois..."
"Tu veux dire qu'ils n'ont pas peur que Cruz attaque les autres enfants", plaisanta Sirius. Aesthelia sourit mais avec un regard pour la petite fille qui les écoutait. "J'espère qu'ils ont raison", insista Sirius avec un clin d'oeil.
"Sim, Daddy", lui assura Cruz en écarquillant les yeux.
"Surtout qu'il n'y aura pas Harry pour te montrer l'exemple", rajouta Aesthélia d'un ton entendu.
"Je ne me battrai avec personne, Mãe", répéta Cruz.
"Et si quelqu'un t'agace ?", insista Aesthélia.
"Je viens te voir", soupira Cruz. "Je m'en vais avant de dire ou de faire quelque chose... que je regretterai après."
Ça sentait la récitation mais c'était un sacré bon conseil, décida Sirius, admiratif. Proposer une solution pragmatique plutôt que de grandes généralités. A prendre en notes.
"Je ne veux pas d'histoire, tu m'entends ? Je ne veux pas qu'on dise partout que tu es ingérable", continua encore Aesthélia, et Sirius se dit qu'en fait il ne l'avait encore jamais entendue faire complètement la leçon à leur fille. "Cette fois, je ne dirais pas : on verra ce qui dira ton père. Je serai fâchée, moi, parce que tu n'auras pas tenu ta parole."
Sirius vit l'impact des paroles dans les yeux de Cruz. La menace était prise au sérieux. Il n'avait sans doute pas à en rajouter, sauf si l'une ou l'autre lui demandait son avis.
"Tu veux y aller, Aesthélia", conclut-il plutôt quand cette partie de la conversation sembla close. "Il y aura sans doute les Malefoy... tu le sais ?"
"Il faut en parler avec Regulus", annonça son amour avec un air décidé. "En fait, lui seul aura peut-être une idée de quelque chose qu'on peut leur donner à ronger pour les occuper en attendant la fécondation... Il faut les maintenir occupés."
"Tu crois que leur donner quoi que ce soit soit une bonne idée ?", s'interrogea Sirius.
"Dans l'absolu, non, mais on est dans un cas concret, avec un calendrier serré... Le pire serait qu'ils réagissent trop tôt. Il faut les endormir", développa Aesthelia avec conviction.
"Je ne te savais pas si stratège", commenta Sirius un peu nerveux qu'ils aient cette conversation devant la fillette.
"Sirius, ce n'est pas de la stratégie, c'est de la survie", estima Aesthélia avec un intimidant regard entendu. "Une diversion, plus exactement."
"De la stratégie", insista Sirius. "Mais, si Regulus a une idée qui ne me coupe pas le sommeil, une bonne stratégie."
"De toute façon, tu dois lui parler", lui rappela sa femme.
"Je n'ai pas oublié, Aesthelia. Je fais ça maintenant."
"Tu ne m'accompagnes pas à Poudlard, Daddy ? J'aime bien quand tu m'accompagnes à Poudlard", se plaignit Cruz.
"Pas ce matin, il doit régler d'autres choses", intervint Aesthélia avec autorité. "Je t'emmène, il viendra te chercher."
"Sans problème et sans faute", s'empressa de confirmer Sirius. "Si le temps le permet, on fera un tour de balai", rajouta-t-il sans doute sur une impulsion
"Un tour de balai ? Je peux ?", vérifia la fillette, les yeux de nouveau écarquillés..
"Si tu ne te souviens plus combien c'est chouette de voler, ce n'est plus une punition de ne pas pouvoir", remarqua Sirius. Sa femme et sa fille sourirent largement en réponse - et c'était une bien belle chose.
oo Regulus
"Bonjour Sirius", le salua Regulus quand il referma la porte de son bureau.
"Bonjour Reg. Il faut qu'on parle", commença-t-il ne trouvant pas en lui la capacité de commencer par dire des banalités.
"Tu ne veux plus !", blêmit son frère.
"Je n'ai pas dit ça, Reg. J'ai promis et j'entends que ma parole ait une valeur", soupira Sirius. "C'est même sans doute la seule chose que Père et Mère nous ont appris que je respecte complètement : la parole d'un homme doit être tenue."
"Je suis d'accord", souffla son frère.
"Mais j'ai besoin de ton aide", posa Sirius. Regulus acquiesça un peu prudemment peut-être mais il acquiesça. Une inspiration plus tard, Sirius se lança : "Les Malefoy essaient depuis longtemps de récupérer ce qui se trouve dans cette maison et en particulier tes affaires. Kreattur a tenu bon face à eux - il faut une fois de plus lui rendre justice. Depuis que je suis revenu dans le paysage, ils essaient encore plus. Je leur ai filé des caisses d'objets et de livres insignifiants pour les occuper mais je crains que ce leurre ait fait long feu et... je trouve qu'il serait sage qu'ils ne s'intéressent pas trop tôt à Abigail..."
"Évidemment", s'inquiéta visiblement son frère.
"Du coup, je me demande si toi, tu aurais une idée de quelque chose que je pourrais leur donner qui les intéresse et les occupe... mais quelque chose qui ne me ferait pas perdre le sommeil non plus, si possible."
"Tu dors depuis que je suis là ?", questionna Regulus avec un air mutin qui allait bien avec ses traits jeunes mais que Sirius prit en plein coeur.
"Je suis fier de toi, Reg", décida-t-il d'avouer. "Je ne sais même pas si le mot fierté s'applique... Longtemps j'ai cru qu'on ne pourrait jamais rien partager, même pas des banalités... c'est presque aussi inespéré que le retour d'Aesthélia et l'apparition de Cruz. c'est comme une deuxième vie, une chance inouïe... "
"Mieux qu'une deuxième vie, Sirius... je crois", murmura le portrait. Et Sirius se sentit un peu égoïste et insensible. "Ainsi, ils auraient pu récupérer mon journal - sans Kreattur et toi ?"
"Ils s'y employaient."
"Je ne crois pas qu'ils seraient arrivés à me convaincre de coopérer avec eux mais... Tu sais, ce n'étaient évidemment pas les pires en termes de cruauté ou de violence mais, pour eux, ce qui compte c'est la suprématie des Sangs-Purs, et le reste importe peu. Ils suivaient Voldemort à cause de l'idéologie affichée, mais je ne sais pas si ils auraient été contents d'apprendre son sang mêlé..."
"Ils ne savaient pas ?"
"Je ne sais pas... Ça me donne une idée. J'ai encore caché à différents endroits des morceaux de ce que j'ai accumulés... pour trouver les Horcruxes... Il y a des choses aussi sur l'histoire familiale de Thomas Jedusor... On pourrait leur donner ça..."
"D'autres caches ?", souligna Sirius en croisant les bras sur la poitrine presque à son insu puis se rendant compte de la signification du geste et lâchant brutalement la posture.
"Pas tous les oeufs sous le même dragon", soupira Reg sans sembler remarquer son manège.
"Tu m'as promis que..."
"Tout le projet autour de mon Horcruxe et des moyens qu'Abigail ait un jour un enfant n'avait pas être caché au même endroit que mes recherches sur Jedusor," justifia assez vivement Regulus. "C'était même une mauvaise idée."
"Parce que quelqu'un qui aurait voulu détruire ou utiliser tes recherches aurait pu tomber sur ton Horcruxe...", commença Sirius en réalisant avec une certaine horreur combien employer le mot était devenu banal dans leurs conversations.
"Oui !"
"Ou parce que Abigail aurait pu être tentée d'utiliser tes recherches ?", termina Sirius le coeur un peu battant.
Reg le fixa durement.
"L'utiliser pour quoi ?"
"A toi de me le dire, Reg. Mais, une question m'est venue : pourquoi exiger que je certifie la disparition de Voldemort ? Tu n'avais pas confiance en Abigail pour respecter ta volonté ?"
"Pas totalement", admit Regulus un détournant un instant les yeux avant de revenir soutenir son regard. "Ça ne veut pas dire que je crois qu'elle aurait vendu mes recherches aux Mangemorts ou à Narcissa... Je crois que, parfois, elle ne voit pas toute l'étendue... Cet enfant, elle pensait pouvoir le cacher, elle ne voulait pas voir qu'il pouvait devenir l'enjeu d'un sordide marchandage, que les Mangemorts n'auraient certainement pas reculé si Voldemort avait ordonné qu'on le sacrifie pour obtenir mes recherches ou mon Horcruxe... Elle pensait que personne ne s'intéresserait à elle... Comme je n'arrivais pas à la convaincre, j'ai eu l'idée de cette condition. Sans savoir évidemment qu'il faudrait tant de temps pour qu'elle soit remplie."
"Vraiment ?", insista Sirius
"Tu doutes d'elle", constata Regulus.
"Je ne la connais que très peu et très mal. Elle est sur la défensive quand on se parle mais elle ne me connaît après tout pas davantage. Elle se demande pourquoi j'accepte, je crois... enfin, j'en sais rien. Peut-être qu'elle espère disparaître dès que l'enfant sera là, ou même pendant sa grossesse... Le truc, Reg, c'est que je ne crois pas que je la laisserais faire."
"Disparaître ?", vérifia son frère.
"Est-ce que c'est une bonne idée de la laisser s'enfuir, cacher l'enfant, l'élever loin de nous... est-ce que c'est de cela que tu avais peur ?"
"Peut-être un peu", reconnut lentement Regulus. "Pour elle, l'anonymat est la sécurité... J'ai tendance au contraire à penser que tu saurais protéger mon enfant. En pleine lumière. Dans tous les sens du terme."
"Comme j'ai protégé Harry ?", éternua Sirius.
"Sirius, je te faisais déjà confiance avant. Maintenant, après tout ce que tu m'as raconté et avec toutes les questions que tu me poses, je n'ai aucun doute."
"Donc tu accepterais que j'exige d'être le parrain de cet enfant ?"
"Evidemment", confirma Reg sans un seconde d'hésitation. "Je peux te l'écrire dans le journal, maintenant si tu veux, avec toutes les mentions expresses que tu voudras. D'ailleurs, c'est sans doute bien que je résume tout notre accord."
"Effectivement", reconnut Sirius.
"Et le processus de... fertilisation suit son cours ?"
"L'équipe de Sainte-Mangouste nous revoit demain ; je veux croire qu'ils ont réglé toutes les questions qu'ils avaient."
"Comme ?"
"La... qualité de ce que tu as laissé, la si longue conservation les a épatés..."
"Ils vont jouer le jeu ?", vérifia le jeune homme dans le portrait.
"Je crois. Si ça ne marche pas comme ça, on trouvera une autre solution. Mais c'est la plus simple - une banale fertilisation assistée magiquement..."
"Il vous faut du temps", réalisa Regulus. "Dans le journal, je vais aussi t'écrire comment retrouver une partie de mes recherches", ajouta-t-il revenant sur son engagement de départ. "Elles sont protégées. Je pense que Lucius et Narcissa seront obligés de détruire une partie des documents avant d'être sûrs de détenir la bonne méthode pour y accéder. Et après, ils auront surtout des confirmations... de ma trahison, rien de bien utile finalement pour eux. Sans parler du doute récurrent qu'ils aient effectivement détruit ce dont ils avaient besoin dans leurs premiers essais..."
Regulus avait l'air singulièrement content de lui à la fin de cet exposé. Sirius en eut un petit frisson dans le dos.
ooo Sainte Mangouste
Toute la seconde consultation à Sainte-Mangouste, Sirius fut frappé par le silence farouche d'Abigail. Elle ne posa aucune question, se plia à tous les examens, semblant retenir son souffle jusqu'à ce qu'un accord ait été trouvé entre Sirius et Susan Smiley sur la date de la fertilisation - onze jours plus tard, la date la plus favorable du cycle d'Abigail. Avec une certaine gêne, Sirius réalisa qu'il connaissait son cycle ovulaire mais pas son parfum de glace préféré.
"Ça te convient Abigail ?", insista Aesthélia se penchant en avant vers sa belle-soeur de fait qui était assise de nouveau entre eux deux.
"Tout me convient."
La sortie sembla laisser la doctoresse et ses assistantes aussi pensives que Sirius et Aesthélia, mais aucune pression n'y fit. La seule question pour laquelle Abigail n'arriva pas à cacher son intérêt fut le nombre d'embryons qui pouvaient être générés par la fertilisation.
"La loi magique permet la fertilisation posthume", expliqua Susan Smiley, "mais elle l'encadre et limite son emploi à deux mises au monde. Nous avons également l'obligation de maîtriser le processus et de ne pas créer - que dit la loi ? - ah oui, 'des êtres qui n'auraient pas pu être générés par la nature'. Ce qui, selon la jurisprudence du Magenmagot, revient à dire que des triplés, c'est déjà suspicieux", traduisit Susan avec un infime haussement d'épaules difficile à interpréter. "Vous avez exprimé votre souhait, lors de notre dernière entrevue, que ce processus reste aussi discret que possible. Je vous conseille de sembler extrêmement raisonnable et de dire que vous ne souhaitez pas davantage que des vrais jumeaux. Vous éviterez les opposants de principe."
C'était ce que Straightford leur avait expliqué le matin même en amenant les contrats qu'elle avait préparés pour Abigail. Mais Sirius était sincèrement curieux de mesurer le niveau d'information d'Abigail et surtout de juger par lui-même de sa réaction.
"J'ai attendu quinze ans. Des jumeaux ? Magnifique. Un garçon, une fille.. je m'en fiche", elle lâcha le souffle un peu court. "A moins que toi, Sirius, tu aies des exigences en la matière ?"
Dit comme ça, il était Orion qui décidait des mariages, des arbres généalogiques, commença par se rebiffer Sirius. Mais il allait lui dire à un moment ou un autre qu'il voulait un droit de regard sur l'éducation, s'obligea-t-il à se rappeler. Être hypocrite ne rendrait rien plus supportable.
"Le cadre légal me paraît raisonnable", il formula donc. "Un ou deux enfants... et le sexe m'importe peu. Et menons cette grossesse à terme, et nous verrons bien si tu as envie de recommencer, Abigail."
"Même si c'est un garçon ?," questionna l'amoureuse de son frère sortant de sa réserve avec un vraie curiosité. "Pour les vieilles familles... je sais que le sexe est important et...", elle se tourna pour la première fois vers Aesthélia. "Ta femme, Sirius... Aesthélia, je ne voudrais pas... que vous puissiez douter que... je ne veux pas que mon enfant prenne la place de quiconque."
Susan et le reste de l'équipe firent semblant de regarder ailleurs alors que Aesthélia se penchait en avant de répondre : "La promesse de Sirius telle qu'elle est rédigée dans le contrat que nous devons discuter est de donner à cet ou ces enfants leur place dans la famille. Toute leur place, Abigail. Admettons que ce soient des garçons jumeaux, ils seront les héritiers de leur père et non de toute la famille Black - et certainement pas de la famille Black-Da Silva", précisa-t-elle. "Autant nous mettre d'accord sur ça et vivre le reste plus sereinement."
"Effectivement. Un contrat... évidemment", murmura Abigail.
"Il protégera les droits de tout le monde contre les fâcheux", commenta Sirius. "Mais nous allons en discuter ensemble. On a des tas de choses à discuter."
L'équipe les laissa repartir avec un traitement préparatoire et en invitant Abigail à se reposer au maximum. Susan Smiley leur serra la main en s'excusant de ne pas les raccompagner ; Aesthélia répondit qu'elle devait être attendue ailleurs et la médicomage confirma d'un sourire. Sirius se demanda si non contente de rendre possible la future grossesse d'Abigail, elle continuait de soigner Albus. A chaque fois qu'il lui posait la question, Remus affirmait de manière sibylline que leur vieux mentor se remettait très lentement et autant que possible. Smiley en aurait peut-être dit davantage mais elle était déjà en bout du couloir.
"Sirius ?", s'enquit Aesthélia sans doute étonnée de le voir figé.
"Allons", se secoua-t-il et il suivit les deux femmes dans les ascenseurs et les couloirs. Une fois devant les cheminées d'accès, Sirius insista pour qu'ils raccompagnent Abigail chez elle et, cette fois, elle ne refusa pas.
"J'ai plusieurs choses pour toi, Abigail", se lança Sirius quand ils se furent installés autour d'un thé. "J'ai vu avec mon avocate, et elle a préparé un contrat de mariage magique qui reprend les termes de l'accord de Regulus tels qu'il a bien voulu les rédiger lui-même et également mon engagement... Te soutenir matériellement toi et l'enfant ou les enfants qui viendront, non seulement pendant leur petite enfance, mais aussi pendant leurs études à Poudlard et au-delà... s'ils en ont besoin..."
"Et s'ils sont Cracmols ?", coupa Abigail qui n'avait pas touché à son thé ou aux gâteaux secs qu'elle avait posé sur la table.
"Effectivement. Je vais demander à Straightford de trouver une formulation qui précise bien que ça ne dépendra pas de cela. Que je les reconnais comme les enfants légitimes de mon frère décédé quoi qu'il arrive", s'empressa d'accepter Sirius.
Abigail opina brusquement en réponse et ravala un commentaire.
"Le texte dit aussi mon engagement à leur léguer la fortune de leur père à leur majorité- son coffre, sa part des biens matériels... Straightford n'a pas fini de faire l'inventaire et l'évaluation - mais c'est une fortune conséquente", reprit Sirius. En fait, il avait été surpris lui-même de l'ampleur de ce qui restait : de la diversité des biens accumulés et des modes de gestion existants - du fermage de terres agricoles à des parts dans différentes Guildes dont celles des joailliers, en passant par un impressionnant parc immobilier dans un état variable... Il doutait que son père ait réellement eu une image globale de sa fortune. Orion avait employé des gestionnaires successifs qui avaient sans doute fait de leur mieux même si Barbara avait, sans surprise, encouragé Sirius à embaucher rapidement quelqu'un de jeune et dynamique qui mette de l'ordre dans ses affaires.
"Tu recevrais une pension pour eux et l'usufruit de certains biens immobiliers sans la possibilité de les vendre. Les enfants en seront totalement propriétaires qu'à ta mort. Ce n'est pas pareil pour l'or du coffre qui leur reviendrait en part égale à leur majorité. La pension, elle, serait tirée de mes revenus... Désolé si c'est confus. Je ne suis ni un juriste ni un homme d'affaire", conclut Sirius.
Qu'était-il d'ailleurs ? Un grand héritier qui s'amuse à diviser sa fortune et à réduire les droits de ses propres enfants - c'est ce que Barbara Straightford avait souligné d'un ton assez amusé : "Pas que vous n'ayez pas assez pour faire quelques choix irrationnels de la sorte sans que ça vous empêche de me payer mes honoraires".
"Et nous serions mariés ? Regulus et moi", vérifia Abigail.
"Oui. La question est de choisir quand on fixe la cérémonie. Avant ou après la fertilisation ? Avant, le risque est d'attirer l'attention de ma famille éloignée sur nos projets... je te promets de te protéger Abigail, c'est juste qu'il faut y être prêts."
"C'est-à-dire ?", questionna prudemment Abigail.
Sirius se retint de regarder Aesthélia. Il ne pouvait lui demander de parler à sa place.
"Honnêtement ? Je pense que le plus simple serait que tu t'installes Place Grimmaurt... C'est un endroit où je peux assurer ta sécurité en toutes circonstances. On réfléchira ensuite parmi les résidences dont tu vas hériter laquelle peut offrir une sécurité suffisante..."
"C'est ici chez moi", objecta Abigail.
"On peut réfléchir à rendre cet endroit sûr mais ça demande un peu de temps de mettre en place un dispositif. suffisant. Là, je parle du moment où notre riante communauté va apprendre le mariage, ta grossesse. Je pense qu'une maison incartable est sans doute le minimum..."
"Et ça insistera sur le fait que nous soutenons toutes ces évolutions, que tu fais partie de la famille, pleinement", remarqua Aesthélia. "On ne te met pas sous tutelle, Abigail, on cherche à ce que ça marche..."
Sirius se demanda si la formulation de sa femme était si heureuse.
"La maison est énorme, on peut te laisser facilement un étage ou presque. Nous ne sommes que trois", renchérit-il. "Il y a des elfes, il y a... le portrait de Regulus." Abigail se raidit. "Il est dans mon bureau. Pas au milieu du salon."
"Un portrait... on avait essayé... c'était terrible... il doit être si jeune dessus !"
"Terriblement", reconnut sans peine Sirius. Il regarda Aesthélia pour se donner du courage et continua : "Il a... il a écrit comment lui il voit les choses", se lança-t-il en tendant le journal. "L'avocate a fait une copie et est en train de le faire valider comme un testament valide."
Abigail le prit avec d'infinies précautions comme si elle craignait que le volume ne la morde. Elle se mit à lire lentement, intensément. Jusqu'au passage qu'ils le savaient ne pouvait que la faire réagir.
"Parrain et tuteur de l'enfant ?"
"C'est sa volonté... c'est aussi la mienne, Abigail... je ne peux pas... c'est mon engagement", plaida Sirius. "C'est encore un signe de combien cet enfant ou ces enfants font partie de la famille. C'est une protection pour eux", rajouta-t-il en se disant qu'il ne fallait mieux pas qu'il repense une nouvelle fois à Harry.
"Tu ne veux pas le porter toi-même, Aesthélia ?", questionna Abigail avec une colère vibrante.
"Abigail, pourquoi je porterai l'enfant de Regulus ? Je n'ai jamais rencontré Regulus de ma vie ! Sauf en portrait... On ne veut pas te prendre ton enfant, ton projet - au contraire. On est réalistes, Abigail. On essaie de construire un système où ça ne sera certainement pas possible de faire autre chose que de respecter la volonté de Regulus parce qu'on aura mis tout le droit de notre côté, de ton côté Abigail. Et pourquoi ce sera inattaquable ? Parce que Sirius représentera Regulus. Il le représentera à votre mariage, à la naissance de l'enfant et à chaque fois que cela sera nécessaire."
Les yeux d'Abigail allèrent de Sirius à Aesthélia, méfiants mais surpris, incrédules mais moins en colère.
"Tu seras madame Abigail Black, veuve de Regulus mais mère de ses héritiers. Crois-moi j'ai élevé ma fille en étant considérée au mieux comme une pauvre fille qui s'était faite avoir, au pire pour une malade mentale qui vénérait le souvenir d'un gars qui avait fini en prison", s'échauffa Aesthélia, les prenant tous les deux par surprise.
Sirius lui prit la main et elle inspira plusieurs fois avant de reprendre avec une voix où l'accent brésilien revenait en force : "Crois-moi, Abigail, un nom, de l'argent, une famille pour prendre le relais si besoin - je ne dis pas que tu nous remercieras ; on ne te demande pas de te remercier - mais c'est bien d'avoir ça. C'est mieux que d'être seule. On peut toujours se débrouiller seule, mais c'est dur, c'est fichtrement dur, Abigail. Pas impossible mais fichtrement dur."
"On ne cherche pas à te prendre en traître", essaya Sirius dans le silence vibrant qui suivit. "On pose tout ça par écrit. On définit nos règles du jeu. Je ne peux pas dire ensemble parce que c'est essentiellement Maître Straightford qui a réfléchi à tout ça. Mais ça ne marchera que si toi, tu trouves ta place dans tout ça. Garde ces papiers. Lis-les. Va voir Straightford si tu veux..."
"Je veux une maison... à moi le plus vite possible", réussit à articuler Abigail. "Je comprends le souci de sécurité mais... vivre avec vous... je ne sais pas si ça marcherait."
"Mais le temps de la conception et le début de la grossesse ?" plaida Sirius.
"J'imagine en effet que ce sera... rationnel."
"Et le mariage ?"
Abigail regarda autour d'elle comme si elle cherchait une issue ou un conseil. Elle inspira et finit par les regarder tous les deux, longuement.
"Puisque onze jours ne suffiront certainement pas à rendre cette maison sûre selon tes critères, Sirius... le plus tôt sera le mieux."
oooooooo
Vous connaissez le refrain, si je poste celui-ci c'est que le suivant "Le plus tôt sera le mieux" tient la route. A son tour, il sera posté quand j'aurais la suite.
Mention spéciale aux quatre qui ont laissé des traces dans la neige pour le précédent -Ch0c0Fr0g, Noellou, Mh et Chrys... bon, j'espère que celui-ci vous inspirera davantage... Et merci à Dina et LN qui sont là pour que ces chapitres existent.
