34 | Le plus tôt sera le mieux
Lucius avait manoeuvré une bonne partie de la soirée pour qu'ils se retrouvent tous les deux seuls. Sirius n'avait pas réellement cherché à lui échapper. Il n'avait pas non plus fait d'effort pour l'aider à réussir. C'était très différent. Il y avait cependant une limite à ce qui pouvait être une évasion plausible. Il s'était donc laissé entraîner par Lucius sur ce balcon du premier étage de la demeure des Parkinson. Le coeur un peu battant.
"J'avoue, Sirius, que je suis étonné de te voir ici... Je ne te savais pas proche des Parkinson."
"Ils nous invités. Aesthélia pense que c'est de bonne politique de montrer que Cruz peut ne pas de battre avec Drago", répondit Sirius avec son meilleur sourire.
"Nous avons parlé à Drago", s'empressa d'indiquer Lucius.
"Nous avons également parlé à Cruz", livra Sirius, amusé malgré lui par la situation.
Le fait de voir Lucius se tortiller et hésiter entre poser ses questions et respecter la plus grande politesse était presque charmant, décida-t-il. Presque une revanche pour tout le reste.
"Je n'imaginais pas Aesthélia aussi... intéressée par la vie londonienne", reprit finalement l'avocat. "On m'a dit qu'elle donnait des cours à l'Université."
"Des années qu'elle refuse ce type de propositions", raconta Sirius sur le ton de la confidence. "C'était inenvisageable pour elle de venir ici..."
Le rappel de l'injustice subie par Sirius eut l'effet attendu de rendre de nouveau Lucius assez prudent.
"C'est bien sûr un honneur pour l'université de Londres d'accueillir quelqu'un comme Aesthelia", commenta Malefoy se réfugiant dans la flatterie de bas étage. "Et on te voit partout ; on dit que tu soutiens Greengrass... et nous qui croyons que tu n'aurais qu'une priorité : partir au Brésil une fois le procès terminé !"
"Aesthélia et moi ne sommes pas encore décidés... Il y a des opportunités nouvelles pour elle ici, et je n'ai pas totalement fini de régler mes affaires", conclut Sirius en regardant le mari de sa cousine.
"Tu as été blanchi. Totalement."
"Ceci est en effet réglé", concéda Sirius.
"Mais tu as d'autres ambitions", supposa Lucius avec des nerfs impressionnants.
"Ce ne sont pas des ambitions, Lucius. Ce sont des dettes. Il me serait par exemple très agaçant que mon ami Remus soit inquiété pour son aide et sa fidélité. Ce n'est qu'un exemple mais c'est certainement le plus immédiat."
Lucius digéra lentement ce qu'il devait prendre pour une nouvelle exigence.
"Je n'ai pas d'intérêt personnel à la démise de Lupin", il finit par articuler.
"Je dirais même que tu as un intérêt familial à son maintien", posa Sirius en regardant ostensiblement la chevalière à sa main droite. Si au moins, elle pouvait servir à cela.
"Je ne sais pas si j'ai cette influence", tenta l'avocat.
"Tu es au Conseil de l'école."
"Tu pourrais y être."
"Je compte éventuellement réclamer mon droit de cité mais pour l'instant je préfère garder des marges de manoeuvre", tempéra Sirius. "Comme je te le disais, Lucius, ce n'est qu'une de mes dettes."
"Et Lupin a des tas de soutiens dans ce conseil", rajouta Lucius. "En commençant par Dumbledore - bon, on dit qu'il est très affaibli... Les versions se contredisent... mais on sait tous qu'il soutiendra Lupin, comme il l'a toujours fait."
C'était très très clairement un appel du pied. Lucius supposait que Sirius savait tout de la santé d'Albus. Ce n'était sans doute pas de bonne politique de lui réaliser à quel point la situation était différente.
"Je ne doute pas d'Albus, mais on sait bien toi et moi que certains n'ont pas digéré mon innocence et qu'ils cherchent à se venger de ceux qui m'ont fait confiance. Je ne les laisserais pas tomber, Lucius."
"Nous avions un accord, Sirius", tenta Lucius après avoir regardé le fond de son verre.
"Tu parles de l'intérêt de Narcissa pour les vieilleries Black ?!", fit mine de mettre du temps à comprendre Sirius. On y était. Le reste était du camouflage. "Ça tombe bien que tu évoques le sujet. Aesthélia me tanne pour libérer des chambres - elle voudrait accueillir des étudiants brésiliens, notamment. J'ai tout un tas de choses pour vous - de tout : des meubles, des livres, des objets... Faire plaisir à deux femmes en même temps..."
"Mes elfes peuvent prendre contact avec les tiens ?", vérifia Lucius.
"Exactement. Le plus tôt sera le mieux", affirma Sirius. Lucius allait se réjouir. "Reste que j'espère pouvoir compter sur toi pour ne pas me faire regretter d'avoir tenu cet engagement..."
Lucius prit clairement sur lui pour faire une promesse qui n'engageait sûrement que celui qui y croyait : "J'ai entendu tes nouvelles priorités familiales. Et c'est ta prérogative de les définir. Nous n'avons rien à gagner à te déplaire, Sirius. Narcissa te l'a déjà dit."
Sirius décida de se contenter d'un signe de tête et de ne pas rajouter de paroles inutiles ou menteuses à cet échange.
oo
"Voilà la version finale du contrat de mariage", expliquait Barbara Straightford. "Avec la mention de l'acceptation et votre engagement à soutenir les enfants nés de cette union quelque soit la magie qu'ils pourraient présenter... Et la reformulation de votre rôle de tuteur et de parrain, représentant votre frère Regulus au sein d'un Conseil de famille constitué d'Abigail et de vous, Sirius. En cas de conflit entre vous deux, elle pourra demander l'arbitrage d'un juge sorcier uniquement... Merlin, j'ai dû batailler pour qu'elle accepte ça, elle aurait dû faire des études de droit et non d'obstétrique !", commenta Barbara avec une vraie déférence dans la voix. "Elle a aussi soumis le soutien des enfants majeurs à la validation de leur usage de l'or versé par le même conseil de famille- pas la peine d'en faire des oisifs paresseux est sa formulation." Sirius acquiesca, surpris de tout ce qu'il entendait mais plutôt en bien. "Enfin, elle a aussi posé la question intéressante de ce qui se passerait si elle ou vous veniez à disparaître avant la majorité du ou des enfants nés... Elle demande si vous estimez que Aesthélia prendrait votre place dans le conseil ou quelqu'un d'autre... et ce qui se passerait dans le cas inverse - sachant qu'elle n'a aucune famille qui puisse prendre sa place."
Sirius écarquilla les yeux et regarda Aesthélia.
"Que nous conseillez vous Maître ?"
"Prenons les questions l'une après l'autre. Imaginons que Sirius vienne à disparaître". Aesthélia se tendit visiblement. "Personne ne le souhaite", commenta l'avocate. "Votre contrat de mariage et le testament qu'il a fait à cette occasion vous nomme exécutrice testamentaire et la principale héritière de ses biens, de ses privilèges et de ses obligations. Jusqu'à la majorité de vos enfants - pour l'instant, de Cruz", précisa l'avocate avec un bref regard curieux.
"Est-ce que la tutelle des enfants de Regulus peut être considérée comme un privilège ou une obligation transmissible ?", s'enquit Sirius.
"C'est une question que nous ferions mieux de ne pas laisser à la décision du juge", dit Straightford. "Je pense que la plupart estimeraient que oui. Si vous ne souhaitez pas que ça se passe comme cela, il faut le préciser dès maintenant..."
"Enfin, on ne peut pas supplier Abigail d'accepter un droit de regard sur l'éducation de ses enfants et puis dire qu'il suffirait que Sirius meure pour que ça ne soit plus d'actualité. C'est un message bien ambigu - presque un appel au meurtre. Surtout quand on pense que c'est mon idée", estima Aesthélia avec force. "Très bien, je prendrais la suite... Mais si nous étions tous les deux victimes d'un accident ? Je n'ai pas dit meurtre", rajouta-t-elle.
"Vous avez désigné Remus Lupin comme parrain de Cruz Magaelhis", rappela Barbara Straightford. "Et votre amie..."
"Florinda Da Cachoeira", souffla Aesthelia
"Merci, je n'arrive toujours pas à bien le prononcer et je m'en excuse", commenta l'avocate. "Sa marraine. Mais ces personnes... voudront-elles prendre la responsabilité des enfants de Regulus ?"
Ni Sirius ni Aesthelia ne surent que répondre à ça.
"Il me semble qu'une certaine continuité logique - de la même espèce que celle évoquée par Aesthélia un peu plus tôt, demanderait que ce soit quelqu'un de sang Black..."
"Merlin, Narcissa serait trop ravie", grommela Sirius en secouant la tête.
"Je pense qu'il serait judicieux de prendre plutôt quelqu'un de jeune.. Votre cousine Nymphadora serait un meilleur choix... vous pourriez lui léguer cette responsabilité."
"Quel cadeau empoisonné", jugea Sirius.
"Certes, reste que c'est une Auror, de père né moldu, ce qui peut l'aider à mener une conversation avec Abigail si l'un ou les enfants se révélaient cracmol", mentionna l'avocate. "Elle est Auror et pas totalement dénuée de notions juridiques et procédurières. Elle est proche - si j'ai bien compris - de votre ami Lupin... Je la trouve assez ... indiquée pour le rôle."
Aesthélia prit la main de Sirius avant qu'il ne quémande son avis.
"On peut lui en parler. Moi, je crois qu'elle sera fière que tu l'en juges digne, Sirius."
Faute de meilleure idée, Sirius opina.
ooo
"Moi ? Tutrice en second des mômes posthumes de Regulus ?", vérifia lentement Nymphadora. Le 'c'est pas une blague' flottait dans l'air.
"C'est une formulation exacte", sourit Sirius. "Pour le cas où il arriverait quelque chose à moi puis à Aesthélia... tu représenterais les Black", précisa-t-il.
"Moi ?"
"Narcissa risque d'être verte de rage", confirma tranquillement Sirius. "Tu n'es pas moins une Black que Drago. Ou même que Cruz, Dora. Faut arrêter avec ces conneries. L'idée est de garantir que les volontés de Reg soient accomplies. Ce n'est pas pour me faire plaisir à moi. C'est pour payer la dette que nous avons tous envers lui... si ça t'aide."
"Ça m'aide", sourit Dora. "Reste que moi, tutrice de mômes ? Qu'est-ce que j'y connais en môme ?"
"Entre Cyrus et Harry, moi, je crois que tu en connais davantage que moi à ton âge."
Bizarrement, Dora sembla gênée. "Harry t'aime beaucoup", décida de livrer Sirius.
"On dirait", murmura la jeune femme. "Il... l'autre jour, il est venu très solennellement me dire que si j'avais des enfants avec Remus... il serait content... d'avoir des frères et soeurs."
"Il l'a fait alors !", se réjouit Sirius. Son filleul avait un courage à la fois très particulier et profond. Il se savait pas si Remus prenait des paris sur son éventuelle répartition à Poudlard - mais l'avis de Sirius était fait.
"Tu savais ?", releva sa cousine, ni agacée, ni surprise.
"Cruz et lui militent pour l'élargissement rapide de leurs familles respectives", reconnut Sirius.
"C'est mignon", commenta Dora avec un sourire neutre.
"Clairement. Ça fait flipper mais c'est mignon", confirma Sirius.
"Ça te fait flipper ?"
"Tu sais ce qui me fait vraiment flipper ? C'est que je suis en train de m'habituer à l'idée", sourit Sirius. "Aesthélia en a envie ; Cruz en a envie... je ferais mon rabat-joie ?"
Dora rit ouvertement : "Présenté comme ça ! Et alors, ce sera avant ou après les neveux posthumes ?"
"Merlin, toi, tu sais parler aux hommes, cousine !"
Au blêmissement de Dora, ce n'était peut-être pas une blague si drôle que cela.
"Pas si sûre", articula-t-elle très bas.
"Remus...", commença à questionner Sirius . Il n'eut pas le temps de continuer
"...ne fera des enfants dont le père sera un paria, des enfants qui devront toute leur vie prouver la valeur de leur sang..."
"Remus continue à dire ça ? Malgré Poudlard ? Malgré Harry ?"
Dora haussa les épaules.
"Il n'a pas besoin de le dire. Je n'ai pas envie qu'il me répète combien il est... combien il me vole mes plus belles années ou d'autres conneries..."
"Ok, mais toi, tu as envie ? Tu te verrais prendre cette place-là ?"
"Tu ne m'en croies pas capable ?", se rebiffa Dora.
"Je ne crois pas grand monde en être capable, en fait", estima sincèrement Sirius. "Se coltiner Remus et un pré-adolescent avec un passé de malade... pas grand-monde est à la hauteur selon moi. Mais toi, plus que beaucoup."
"Tu as décidément une haute opinion de moi !", s'esclaffa Dora sans doute gênée.
"Tout à fait. Ce que tu as fait au Brésil pour Cyrus, pour moi, pour Remus... ce n'est pas le genre de choses que beaucoup de gens seraient capables de faire. Et tu l'as fait. Et bien. Cyrus t'adorait..."
"Chut... j'avais tellement l'impression de faire le malheur de ce gosse !"
"Non, tu étais ce qu'il y a eu de mieux dans sa vie. Il s'en souvient. Je m'en souviens. Toi et Remus, je crois que vous m'avez préparé sans le savoir à Cruz... Vous m'avez montré que les adultes et les enfants n'étaient pas des ennemis - que la mort des premiers n'était pas la seule chose qui pouvait libérer les seconds... Je n'ai pas oublié, Dora. Les histoires, les jeux, ta patience, tes sourires..."
"Je suis intimidée, là", avoua Dora les yeux humides.
"Très bien. Ça fait longtemps que je voulais te le dire. Et là, alors que je contracte auprès de toi une nouvelle dette au nom de Regulus, c'est sans doute un bon moment. J'ai des raisons de te faire confiance, Dora."
"Toi, quand tu veux, tu sais bien vendre tes envies", remarqua Nymphadora.
"Mais tu peux dire non."
"J'ai entendu mais tu sais bien que tu as rendu ça impossible, cousin", sourit Dora.
"C'est une dette, Dora. Si un jour tu as besoin de moi..." Ils se dévisagèrent, et Sirius fut certain que l'image invoquée de Remus flottait entre eux, presque palpable. "Pour quoi que ce soit", confirma-t-il. "Même traîner Remus Lupin devant un autel de mariage", précisa-t-il.
"Merlin", rit nerveusement Dora.
"Je te promets que je vais le secouer."
Dora mit ses mains sur ses oreilles en murmurant. "Je n'ai rien entendu."
"D'accord", promit Sirius et ils se tapèrent dans la main.
oooo
"Mais pas Harry ?", vérifia Cruz sur ses talons.
Clémente Ceridwenn, n'avait-il pas répondu dix fois par jour depuis cinq jours à cette question déjà ? Ce n'était pas comme si le mariage l'amusait lui-même, pourquoi fallait-il qu'il doive convaincre sa fille de faire bonne figure ? Pourquoi fallait-il qu'il doive l'extraire de son bureau - où elle n'était pas censée traîner seule - alors que tout le monde les attendait pour mettre cette corvée derrière eux ?
"Non, je n'ai pas invité de gens qu'Abigail ne connaît pas. Il y a Ted, Andromeda et Dora pour des tas de raisons légales que tu n'as pas besoin de retenir. On va déjeuner ici et puis se connaître mieux, mais on ne va pas faire une grande fête... on fera ça pour le bébé...", répéta-t-il avec toute la patience qu'il put réunir.
"Ou les bébés", corrigea la fillette alors qu'ils atteignaient le premier palier.
"Exactement", reconnut Sirius - la précision semblait lui tenir à coeur et elle était juste après tout.
"N'empêche que c'est nul. Y a que des vieux", reprit Cruz alors même qu'ils venaient de rejoindre la maigre noce rassemblée au pied du grand escalier.
Dora se mordit les lèvres et détourna le regard, mais les autres - Ted, Androméda, Abigail, sans parler de Barbara Straightford - écarquillèrent plutôt les yeux. Sirius battit Aesthelia de vitesse, à sa propre surprise.
"Cruz Magaelhis, si tout ça t'ennuie à ce point, tu peux bien sûr aller dans ta chambre", asséna-t-il sans l'avoir même prémédité. La fillette se figea, le regarda et sembla juger immédiatement qu'elle devait le prendre au sérieux.
"Estou de castigo ?" murmura-t-elle plus pâle que rouge.
"Disons que tu n'en es pas très loin, effectivement", répondit Sirius en remarquant qu'il s'habituait sans doute réellement à l'idée de pouvoir décider de punitions. Merlin merci, il n'avait pas crié. "C'est une petite fête familiale, où il n'y a pas tellement d'enfants, je te l'accorde, mais qui pourrait rester une fête pour tout le monde si tu veux bien y mettre du tien."
"Sim, Daddy", murmura la fillette. "Eu lamento."
"Abigail proposait que tu tiennes les anneaux", glissa Aesthélia.
Cruz braqua des yeux curieux sur Abigail qui lui fit un sourire précautionneux. Pour l'instant, depuis les trois jours passés tous ensemble dans cette maison, les deux s'observaient avec une curiosité mutuelle nette mais autant de timidité.
"Mais oncle Regulus ne pourra jamais mettre d'anneau", remarqua Cruz. "Et pourquoi il n'est pas là - le tableau ?"
"On ne se marie pas avec un tableau", rappela Aesthélia alors que Sirius soupirait - est-ce qu'elle allait remettre ça ? "Je crois que Daddy va penser que tu n'as pas compris ce qu'il vient de dire", rajouta sa femme assez fermement.
"J'ai pensé : on pourrait demander à Art de revenir et de lui peindre un anneau au doigt", continua la fillette malgré un rapide regard presque inquiet pour Sirius. "Voir d'imaginer comment il serait vieux.. pour Tante Abigail !"
"Tu as pensé ou tu en as parlé avec lui ?", interrogea Sirius instantanément viscéralement méfiant. Regulus avait eu l'air incertain quand il était entré à la recherche de Cruz - un regard presque coupable à y repenser. Un peu comme Cruz à cet instant. "C'est son idée ?"
Abigail pâlit légèrement à la mention de Regulus - on aurait pu croire qu'elle allait partir en courant se cacher dans sa chambre. Vous parlez d'une noce ! - et Andromeda lui prit la main d'un air rassurant.
"Naõ, Daddy. La mienne - oncle Reg dit que je suis... étonnamment créative", articula Cruz avec précaution comme à chaque fois qu'une formulation la surprenait et qu'elle devait faire un effort pour la retenir.
Barbara Straightford ravala un ricanement. Aesthélia leva les yeux au ciel.
"Ce n'est pas une foncièrement mauvaise idée... l'anneau", jugea alors Andromeda. "Vieillir le portrait me paraît nier trop de choses réelles, mais l'anneau... Il devrait être à son doigt. Vous étiez déjà ensemble quand il a été peint ; c'est une sorte de justice à rebours..."
"Abigail ?", questionna Aesthélia. Sirius pouvait dire sans légilimancie qu'elle appréciait l'idée.
"Vous me demandez, à moi ?", s'étonna ouvertement l'intéressée.
"Certainement", soutint Sirius. "Tu es sa femme, Abigail, ou tu le seras dans quelques minutes. Ton mari, ta décision."
Les yeux sombres d'Abigail brillèrent étrangement. Pas loin des larmes. Elle les ravala comme elle avait dû en ravaler des années entières, imagina Sirius avec un sincère serrement de coeur.
"Je... je ne sais pas si j'aurais le courage de... Mais... oui, si c'est possible, mille fois oui..."
"Il va être trop content", jugea Cruz en enserrant très spontanément Abigail. "Il ne faut pas avoir peur de lui, Tante Abigail. C'est un tableau. Un peu triste mais très gentil et qui veut tellement que tu sois heureuse !"
Les yeux cette fois débordants, Abigail regarda Sirius, les deux mains posées sur la tête de la fillette.
"Les enfants, ça nous pousse sur des chemins qui font un peu peur parfois mais... qui valent le coup", commenta-t-il la gorge assez serrée. "On appellera Art Avery dès cet après-midi. Après tout, on a peut-être plusieurs tableaux à lui commander..."
"Daddy !", se réjouit Cruz en lâchant sa future tante pour l'enlacer lui.
"Maintenant, on va marier Abigail et Regulus, et toi..."
"... eu me comportar", promit Cruz en levant ses grands yeux gris limpides vers lui.
"Tu ferais mieux si tu veux être sur le tableau", arriva à répondre Sirius malgré l'intense envie de rire qui l'emplissait.
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On a la suite - elle s'appelle "Les ravages d'une bonne éducation", imaginez ce que vous voulez ! Elle sera postée quand le chapitre suivant aura pris forme... Encouragements, idées, impressions toujours énormément appréciés.
