41 | Le sang, évidemment

Narcissa répéta, avec peu de variations, la même histoire et les mêmes détails trois fois d'affilée. Entre chaque version, elle supplia Sirius de lui jurer que Drago était en sécurité avec une effusion et un manque de fierté totalement inhabituels. Ce à quoi Sirius lui répondit à chaque fois que la médaille qu'il avait passée à son cou, après avoir rompu son mariage, lui dirait si ce n'était pas le cas.

"Comme la mienne me le dirait", précisa-t-il à chaque fois en montrant sa propre médaille argentée ornée d'un rubis. "Le sang que nous partageons transmettra."

"Le sang", souligna Narcissa à chaque fois. Évidemment.

Elle raconta d'abord son histoire aux Aurors bulgares, qui ne parlaient pas anglais et doutaient de leur propre sortilège de traduction. Une conversation longue, poussive et compliquée. Sirius assista sans intervenir, écouta, patient à sa propre surprise. La situation était dans les mains d'autres et, pour l'instant, ça le rassurait. Tonks était partie prévenir l'Ordre et les Aurors de leur bord - c'est-à-dire, essentiellement, Kingsley Shacklebolt, étoile montante de la Division et membre actif de l'Ordre du Phoenix. Elle devait aussi mettre Drago en sécurité. La famille Tudor était, elle, partout. comme témoins, comme médiateurs, comme traducteurs parfois et comme ambassadeurs. Ils firent un sacré bon job puisque le Commandant bulgare finit par admettre la nécessité de mobiliser la Coopération de son pays.

Ce fut donc à une femme aussi grande, blonde, raide et froide qu'elle que Narcissa raconta une deuxième fois toute l'histoire de la "trahison de Lucius" comme elle le formulait. Quand elle eut fini son récit, les questions de la représentante de la Coopération bulgare eurent surtout pour but de mesurer quels seraient les risques diplomatiques pour un pays qui cherchait des alliés et des financements pour ses projets. Narcissa indiqua sobrement qu'elle pensait que le Ministère britannique soutiendrait sa cause. Elle attendait peut-être que Sirius dise quelque chose sur ce sujet, mais lui s'inquiétait surtout que Lucius et Brytan se fassent la malle avant que quiconque ne s'intéresse sérieusement à eux.

Lucius ne pouvait que savoir qu'il avait dissous son mariage avec Narcissa. Le sortilège d'union sorcière était trop puissant pour qu'il ne ressente pas physiquement et instantanément la rupture. S'il avait cherché Drago depuis, il savait aussi que son fils avait disparu. Sirius ne lui faisait pas l'injure de ne pas penser qu'il ait pu voir un lien entre les deux événements. Restait à savoir comment il les interprétait. Pensait-il que Narcissa pouvait le trahir à ce point ? Les Tudor répétaient que les deux comploteurs étaient toujours dans le lieu où ils menaient leurs expériences et qu'ils les faisaient surveiller. Les Aurors bulgares ne semblaient pas prendre ombrage du fait que des privés en sachent plus qu'eux.

Ce fut à ce moment-là que le nom de Dumbledore fut prononcé par les Tudor - réveillant suffisamment Sirius de sa transe personnelle pour qu'il ose avancer que c'était une bonne idée de l'impliquer. Munie de toutes ces informations, la grande femme au chignon blond sortit et revint pour dire que rien ne pourrait être entrepris sans la participation active et officielle des autorités britanniques. Narcissa accueillit la nouvelle d'un sourire pincé et redemanda à Sirius si Drago était en sécurité. Sirius répéta les mêmes choses que précédemment avec patience, sans préciser que l'enfant était déjà, normalement, place Grimmaurd.

Sans surprise, la petite délégation d'Aurors qui arriva quelques heures plus tard d'Angleterre était menée par Kingsley Shacklebolt. Tonks avait trouvé le moyen d'être de la partie. Il y avait aussi un certain Amos Diggory pour la Coopération magique et une certaine Dolorès Ombrage, qui se présenta comme conseillère personnelle de Fudge. Sans attendre un quelconque rapport ou poser une seule question, elle assura solennellement Narcissa de tout son soutien. Elle essaya ensuite - Sirius devait lui accorder ça, elle essaya de toutes ses forces - interrompant les Aurors comme les réponses de Narcissa, mais elle n'arriva pas à réduire ce qui se passait à "un terrible malentendu jetant l'opprobre sur des familles britanniques honorables." Quand elle abandonna cette stratégie, ça se traduisit par un silence soudain et reposant.

Diggory, un petit homme plus mesuré, posa alors la seule question qui méritait d'être posée : "Que pouvons-nous faire ?"

"Les arrêter", lui répondit Kingsley les yeux rivés sur le Commandant bulgare.

"Évidemment", estima immédiatement l'officielle de la Coopération bulgare, et ça sembla totalement sceller l'affaire, comme si le temps s'accélérait enfin.

Autour de Sirius et Narcissa, tous se mirent à parler tactiques, forces, déploiement et stratégie. Ces discussions concernaient essentiellement les Aurors. Les diplomates et conseillers de tous pays les écoutaient comme Sirius et Narcissa. De nouveaux renforts britanniques arrivèrent très vite, nombreux et intimidants. Des Aurors mais aussi des Tireurs de baguette. Les Bulgares eurent l'air impressionnés par l'ampleur des moyens, mais surtout soulagés de ne pas devoir trouver seuls des solutions. Shacklebolt obtint assez facilement le commandement opérationnel de la "force conjointe" qui n'avait rien de très égalitaire de l'avis silencieux de Sirius.

Diggory et Ombrage furent invités dans une autre pièce par le froid chignon blond bulgare. En sortant, Sirius entendit Diggory expliquer à Chignon froid que c'était son ancêtre, Eldritch, qui avait créé le recrutement des Aurors britanniques au XVIIIe siècle. Sirius pensa avec une certaine mélancolie qu'il avait oublié cette histoire.

Dans la marée martiale d'Aurors de deux nationalités, Narcissa et Sirius étaient comme transparents, ou plutôt comme des écueils connus prudemment évités par les flux et les reflux.

"Où est-il, Sirius ?", le pressa Narcissa une énième fois.

"En sécurité", répéta son cousin d'une voix égale.

"J'ai fait ma part", souligna-t-elle.

"Je jure que je fais la mienne", lui opposa-t-il.

"Toujours pas confiance ?"

"Et toi ?"

"Quand Lucius sera en prison", elle décida.

"Nous voilà d'accord", Sirius lui affirma.

oo

Les heures passèrent et la nuit était là, noire et silencieuse. Les Bulgares finirent par les emmener dans une espèce de maison, un manoir serait sans doute un bon terme, en dehors de Sofia. Ils firent le trajet dans une longue et imposante voiture noire conduite par un chauffeur taciturne sous surveillance de deux tireurs de baguette bulgares qui ne parlaient pas anglais.

Malgré l'obscurité Sirius pensa que la maison ressemblait un peu au manoir que les Malefoy avaient acquis : une grande bâtisse en bois, peinte de motifs avec des balcons en bois travaillés. Sirius se retint néanmoins de faire cette comparaison à haute voix pour Narcissa. Ombrage et Diggory étaient déjà installés là a priori depuis des heures. Ils leur dirent d'un ton important que l'assaut avait été compliqué et que la poursuite s'étendait maintenant dans tout le pays. En fait, ils n'en savaient pas plus qu'eux, estima Sirius.

"I manger à volonté et du thé dans un samovar", indiqua Amos Diggory dans un élan de camaraderie bonhomme.

Sirius se servit un bol de ragoût au paprika, Narcissa se contenta de thé. Aucun des deux ne songea à se retirer dans les chambres proposées. Ombrage et Diggory non plus. Sirius observait de loin en loin sa cousine. Elle ne lui parlait plus de Drago. En fait, elle ne lui adressait plus la parole. Elle s'était calée dans un grand fauteuil et buvait du thé, lentement, les yeux ailleurs. Diggory tenta d'avoir une conversation avec elle. Narcissa lui fit comprendre qu'il n'était pas le bienvenu. Le diplomate se rabatit sur Sirius, l'interrogeant tour à tour sur les projets de sa femme, l'adaptation de sa fille à la vie en Angleterre et ses relations avec Greengrass. Le dernier point était sans doute ce qui l'intéressait le plus, estima Sirius. Il se mit à répondre lentement avec l'impression que Narcissa et Ombrage, sous couvert de repos, passaient leur temps à les écouter.

"Aesthélia est contente de transmettre ses pratiques de l'ethnomagie", développa-t-il prudemment. "Elle serait fière de susciter de nouvelles vocations… J'ai pour l'instant trop de choses à régler ici pour qu'on retourne longuement au Brésil et je suis content que ma fille connaisse mon pays et notre tradition magique, qu'elle soit proche de mon filleul, Harry, aussi... Greengrass est un homme moderne et entreprenant... Nous avons beaucoup de choses en commun…"

"Un sang pur par exemple", lâcha alors Narcissa.

"Et la volonté d'en faire davantage qu'un étendard, chère cousine", lui rétorqua Sirius.

"Nous jugerons sur pièces", soupira-t-elle.

"Bonne idée", il rétorqua.

Ombrage s'éclaircit la gorge, un tic récurrent chez elle, mais ni elle ni Diggory ne trouvèrent le moyen de relancer la conversation. Dans ce silence tendu, l'arrivée de Shacklebolt, avec sa haute masse, des robes un peu brûlées et une cicatrice sur la joue droite les soulagea presque de l'avis de Sirius. Les yeux de l'Auror allèrent d'abord vers Diggory et Ombrage et Sirius eut le sentiment qu'il aimerait pouvoir leur dire de sortir. Il sembla néanmoins se résigner à ne rien changer de la géométrie et se tourna vers Narcissa.

"Madame Mal..."

"Madame Black", le reprit immédiatement Narcissa. "Mon cousin a dissous notre mariage, Auror Shacklebolt. Et m'a ainsi libéré de la loyauté due à mon époux et de la nécessité de porter son nom", précisa sa cousine, soulignant adroitement que, sinon, elle n'aurait pas pu témoigner.

"Madame Black", répéta Shacklebolt, conciliant et résistant bien à son envie pourtant manifeste de regarder Sirius. C'est à Narcissa qu'il veut parler avant tout, réalisa Sirius qui ne voyait qu'une seule raison à cela. Dans une autre vie, il avait pu être celui qui annonçait le décès d'un proche. Jamais une partie de plaisir. "Nous avons tenté de procéder à l'arrestation de votre... ancien mari et de son complice, Dariusz Brytan. Ils ont refusé... ils ont opposé la plus vigoureuse résistance et nous ont obligés à les traquer dans tout le pays et à employer une force magique importante", développa l'Auror avec sa voix grave. "Au cours de ces affrontements,... votre ancien mari... a perdu la vie..."

Ombrage laissa échapper un étrange couinement. Narcissa resta raide, ses yeux gris plantés dans ceux de Shacklebolt. Sirius décida de se lever et de venir se placer à côté d'elle en soutien. "Je... L'enquête interne est en cours mais... pour avoir été témoin de la scène.. je pense pouvoir dire qu'il... ne souhaitait pas être pris vivant..."

Par instinct, et alors que sa raison lui hurlait que sa cousine allait rejeter son geste, Sirius plaça sa main sur l'épaule de Narcissa. A sa grande surprise, elle la prit et la serra à la broyer et il mesura l'intensité du désarroi qu'elle cachait pourtant plutôt bien. Peut-être à cause de l'anneau, peut-être à cause des médailles, Sirius sentit très précisément même la magie de sa cousine vaciller de douleur et d'incertitude.

"Lucius est décédé ?", arriva-t-elle à vérifier.

"Oui, Madame", reconnut sobrement Shacklebolt.

"Un Auror l'a tué ?", questionna Ombrage avec pas moins que de l'outrage dans la voix.

"Un Auror bulgare", répondit Kingsley Shacklebolt en se tournant vers la conseillère de Fudge. "Je ne lui jetterais pas la pierre, Madame. Lucius Malefoy était un opposant de taille qui ne lui a pas réellement laissé le choix..."

"Les Aurors sont là pour aider à faire régner l'ordre et permettre à la justice de faire son travail, pas pour abattre un suspect et le priver de son procès", affirma Ombrage avec dédain. Sirius s'émerveilla sincèrement qu'une femme petite et replette comme elle put se grandir et s'imposer par le dédain. Il lui semblait que sa propre mère, Walburga, aurait apprécié.

"Je ne pense pas que Lucius aurait aimé vivre son procès, vivre sa relégation, vivre la perte de son prestige...", commenta Narcissa. "Je n'étais pas là mais... je pense crédible qu'il ait préféré en finir..."

Ombrage allait reprendre, sans doute pas pour aller dans le sens de Narcissa, mais Diggory la fit taire.

"Nous avons trouvé sur lui une lettre pour vous et une autre pour votre fils, Madame", annonça alors Shacklebolt en fournissant lesdits parchemins.

Sirius vit que les sceaux étaient brisés, les Aurors les avaient lus. Kingsley les tendit à Narcissa, mais celle-ci ne semblait pas avoir envie de les prendre. L'Auror tourna ses yeux sombres vers Sirius qui se demanda s'il devait prendre les parchemins à la place de sa cousine quand celle-ci se décida.

"Vous les avez examinés", commenta-t-elle, distante et froide. "Ils ne sont pas piégés"

L'idée saisit Diggory comme Ombrage. Une crainte subite traversa leurs visages.

"Non, ils ne le sont pas. Ils ne l'ont jamais été. Il voulait certainement que vous les lisiez", fut la formulation conciliante de Kingsley.

"Posez-les sur cette table, s'il vous plaît, Auror Shacklebolt", demanda poliment Narcissa.

Quand il se fut exécuté, elle sortit sa baguette, ce qui tendit davantage ses compatriotes de la Diplomatie que l'Auror. Les sorts de détection de magie noire envoyés par Narcissa furent sérieux et précis. Certains ciblaient spécifiquement des réactions fondées sur la présence de sang sur le parchemin ou sur le fait que les personnes qui s'écrivent portent le même sang ou plus simplement un sang magiquement pur. Que des sortilèges auxquels Sirius n'avait pas pensés depuis des décennies.

Ombrage n'avait pas l'air de réellement comprendre ce que faisait Narcissa mais, pourtant, elle semblait nerveuse et agitée. Mal à l'aise devant l'idée même de magie noire, jugea Sirius. Diggory, lui, la regardait faire les sourcils froncés, mais Sirius pensait que ça dépassait clairement les connaissances théoriques et pratiques du diplomate. Il ne voyait au contraire que de l'approbation dans les yeux chocolat de Kingsley Shacklebolt.

Narcissa rempocha finalement sa baguette. Elle se saisit alors seulement du parchemin qui portait son nom et le déroula. De sa place Sirius vit qu'il n'y avait pas beaucoup de lignes. Les yeux de Narcissa coururent rapidement sur les mots, sa main qui tenait le parchemin tremblait. Elle tendit la lettre à son cousin d'un geste brusque.

"Narcissa... je ne sais pas... C'est à toi qu'il s'adresse", tenta Sirius, intimidé.

"Les Aurors l'ont lue", lui rappela Narcissa froidement. "Et tu verras que tu as tes raisons de la lire... ne serait-ce que pour comprendre où nous en étions... Lucius et moi... Tu n'avais que ma parole... voici la sienne."

Sirius se décida lentement à obéir, faute d'alternatives. Il prit le parchemin avec pas mal de réticences, Les premières phrases de Lucius posaient qu'il estimait que si Narcissa lisait cette lettre, il était mort. Mais la suite révélait clairement une relation conjugale totalement décomposée. Sans doute depuis pas mal de temps.

"... Je sais que tu avais arrêté de me comprendre et de me soutenir. Je ne pensais pas que tu en viendrais à me trahir, à me voler mon fils, à rejeter mon nom, mais j'aurais dû l'envisager. J'ai clairement sous estimé ton cousin - tes cousins. Tu penses que Sirius te protégera alors qu'il va balayer le peu de nos traditions et de notre identité qui avaient réussi à subsister dans ce monde désolant... Je ne peux que t'inviter à la prudence, qu'espérer que tu ne mentiras pas à notre fils sur moi, sur la pureté de mon idéal et la grandeur de mes rêves... Je ne te dis pas adieu, ça fait maintenant des mois que nous nous sommes séparés..."

"Je suis désolé, Narcissa", commenta Sirius un peu au hasard.

"L'important est de savoir si tu me crois enfin", répliqua sa cousine, impérieuse.

"Il me semble que je l'ai déjà montré."

"Non, tu as voulu me croire", souligna Narcissa. "Tu as espéré que j'étais sincère et que tu ne te trompais pas. Mais tu as continué de douter. Je comprends pourquoi. Mais au moment où je te fais allégeance, où je place l'avenir de mon fils entre tes mains, où je promets de suivre ton autorité et tes choix, j'ai besoin que tu saches que je ne mentais pas."

"Narcissa, je ne pense pas que ce soit la meilleure audience pour discuter de tout cela", remarqua lentement Sirius.

"Je veux parler devant témoins, et qui seraient de meilleurs témoins que des représentants du Ministère ?", rétorqua Narcissa. "Je veux que tu acceptes d'être le tuteur de mon fils. Je veux que tu l'élèves comme un Black et qu'il n'ait pas à porter la honte de son père... Je suis prête à tous les serments pour cela."

"C'est beaucoup d'honneur que tu me fais", lâcha Sirius, tentant de l'arrêter. Des sirènes d'alarme hurlaient dans sa tête que ça ressemblait terriblement à un putain de piège. Élaboré. Nouveau. Mais un piège. "Mais je ne conçois pas... les relations familiales comme... un royaume tyrannique où je régnerais en maître absolu, Narcissa. Je ne suis ni Orion ni Lucius, tu m'entends ?"

"Tu ne m'obliges à rien, Sirius. Je te cède librement et volontairement tous mes droits parce que c'est la meilleure solution pour Drago. Tout ce qui m'importe, c'est Drago", affirma Narcissa, droite et fière. Black jusqu'à l'accentuation de sa voix.

"Drago est en sécurité", soupira Sirius.

"C'est ce que tu répètes depuis des heures."

"Tonks l'a emmené chez moi, il est avec Aesthélia, se décida-t-il à lui livrer. Peut-être qu'un élément factuel allait la calmer. "L'Auror Shacklebolt est au courant. Il peut te confirmer."

Kingsley se raidit face à l'interpellation mais confirma gravement d'un ample signe de tête. Tous les yeux étaient sur lui et il finit par formuler. "Le jeune Drago est Square Grimmaurd, Madame. L'Auror Tonks l'y a mené."

"Merci, Sirius", fut l'étonnante réaction de sa cousine. Ni surprise, ni en colère. Juste soulagée a priori. "Je suis ta débitrice. Tu peux tout me demander..."

"Je crois que j'avais compris l'idée", soupira Sirius. Il allait élaborer mais il s'arrêta. Les yeux de sa cousine brillaient comme illuminés d'une joie intérieure. Trop de chocs et d'émotions sans doute "Je propose qu'on aille se reposer et qu'on reparle de tout cela demain, Narcissa... Calmement."

"Très bonne suggestion", commenta Amos Diggory nerveusement.

"Comment les Aurors britanniques ont-ils pu ainsi se soumettre aux désidératas de Monsieur Black ?", questionna alors Ombrage se dressant dans son fauteuil. Tous se tournèrent vers elle, sidérés de son intervention, mais ça ne sembla pas l'impressionner ou la faire douter. "Au nom de quoi, Auror Shacklebolt, pouvez-vous ainsi vous portez garant d'arrangements qui m'ont l'air de tenir de l'enlèvement et de la pression ?"

"Madame la Conseillère, tout le monde s'accordera à dire que s'il y a un innocent ici, il s'appelle Drago Malefoy...", tenta Shacklebolt.

"Black", corrigea Narcissa, imperturbable. "Ma priorité sera de rendre ce fait connu de tous dès mon retour en Angleterre."

"Beaucoup d'émotions", jugea Diggory, précipitamment. "Votre cousin a raison, Madame... Vous devriez vous reposer et attendre demain pour prendre des décisions. Nous devrions tous nous reposer et reprendre des forces..."

"Comment êtes-vous au courant, Auror Shacklebolt ?". insista Dolorès Ombrage sans porter une seule seconde d'attention aux efforts de son collègue de la Diplomatie.

"L'Auror Tonks était chargée de le mettre à l'abri dès que possible. La maison des Black lui était ouverte...", tenta Shacklebolt avec une certaine adresse de l'avis de Sirius.

"Chargée par qui ? Avant même que nous ne soyons officiellement invités par les Bulgares, la Division aurait chargé l'Auror Tonks de cette mission ?", continua d'enquêter Ombrage. "Cette Auror est bien connue pour être la... compagne potentielle de Remus Lupin, n'est-ce pas ? La petite cousine de Sirius Black et la compagne de son meilleur ami ? Madame Malefoy..."

"... Black", corrigea Narcissa avec patience mais fermeté. Il ne semblait pas certain qu'une nuit de réflexion allait la faire changer d'avis.

"Vous semblez y tenir mais, Madame. Je comprends que vous vouliez à cette heure vous démarquer des choix a priori discutables de votre époux. Mais, ne soyez pas si prompte à... laisser votre cousin décider de toute votre vie. Je sais l'importance que votre famille accorde aux liens du sang et à la primogéniture. De vieilles traditions, éminemment respectables en elles-mêmes. Je sais aussi que Sirius Black a été réhabilité et que nous ne pouvons plus aujourd'hui le soupçonner de collusion avec Vous-savez-Qui. Mais... je doute de plus en plus que ses intentions soient aussi... innocentes que nous aurions pu l'espérer", estima Ombrage, toujours dressée dans son fauteuil, animée d'une force de conviction étonnante qui expliquait sans doute l'influence qu'elle avait pu gagner au sein du Ministère malgré des compétences magiques basiques, des raisonnements étriqués et une empathie inexistante. "Il est assez clair pour moi que votre cousin Sirius poursuit des ambitions politiques personnelles et qu'il est prêt à suborner des Aurors pour les faire advenir. Je ferai un rapport à Monsieur le Ministre l'invitant à la plus grande vigilance..."