Puisque chez moi il est déjà demain...
Ah, les joies de vivre dans l'hémisphère sud.

Chapitre un peu court, je l'admet, mais je me rattraperai plus tard, promis.

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Si tu ne n'écoutes pas

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Dorothy l'a traînée jusqu'à son bureau. La cérémonie est finie depuis une demi-heure, sous les feux d'artifice multicolores.
La porte claque. Et puis soudain, l'éclat de voix.
Les hurlements.
L'incompréhension.

Elle regarde son amie. Elle pleure, elle prie. Elle la supplie de la laisser, de ne pas aborder le sujet, mais rien n'y fait. Son amie veut le dernier mot, celui qui fait tout, qui dévoile la vérité.
Elle lui prend la main.
Elle se sent comme une petite enfant que l'on réprimande injustement.
Elle n'a pas demandé ça. Elle n'a pas voulu.
Les larmes dévalent le long de ses joues.
Elle hurle en retour. Elle dénie, elle crie de toutes ses forces, de tout l'air dans ses poumons que non, non, elle ne l'aime pas.
Non, elle n'est pas amoureuse.
Mais sa voix est brisée entre sanglots et incertitudes.
Elle ne peut pas. Pas comme ça. Elle n'en a pas le droit.
Elle est la reine, le modèle, elle est la dernière, elle doit porter le prochain des héritiers.
Elle ne peut pas.
Alors, alors elle sanglote enfin qu'elle ne veut pas, parce que vouloir fera trop de mal.
Déjà une fois, une fois elle a voulu et n'a gagné qu'en retour un amour dans l'oubli.
Un fantôme insaisissable.
Elle pleure son âme dehors, cachée dans la robe de maternité de sa meilleure amie.
Elle refuse de recommencer.
Elle refuse de décevoir.
Elle refuse de perdre encore une fois.
Elle ne peut pas, elle ne peut plus.
Pas depuis la rousse.

Dorothy la houspille, la câline, la conseille.
Mais elle se bute et s'entête.
Et les cris encore.
Sa gouvernante toque à la porte inquiète, appelée par les gardes, mais Dorothy la rejette violemment. Pas d'échappatoire, dit-elle à la brunette.
Alors elle se mord les lèvres. Elle voudrait ne jamais avoir cette conversation, cette dispute.
Elle pensait pourtant avoir été discrète, indétectable.
Elle s'est trompée.
Elle attrape un verre sur son buffet, se sert un whisky bien tassé. Elle voudrait hurler en retour, mais elle a perdu sa voix.
Elle repense à la rousse. À sa chevelure ardente, son sourire étincelant, ses courbes tellement superbes. Elle pleure dans son verre d'ambre. Elle se décrit, se dénigre, son ventre rond, ses hanches larges, ses fesses un peu trop grosses, sa poitrine trop lourde pour son armature. Le temps ne l'a pas gâtée.
La reine s'est empâtée. Elle ressemble plus à du Ingres qu'à une gravure de mode de magasine aux formes élancées.
Comment rivaliser ?
Comment attirer une créature aussi forte et charismatique que sa Garde ?
Elle ne peut pas.
Elle ne pourra jamais.
Elle se mariera pour raison d'état, se laissera dépuceler par un mari noble et bien assorti, portera un enfant, et s'oubliera derrière ses devoirs, son image de royauté.

Dorothy essaye de lui faire entendre raison.
Mais à quoi ça sert ?
À quoi ? S'égosille-t-elle soudain.
Elle hurle enfin vraiment. Jette son verre contre la porte, loin de Dorothy, dans un ultime souci pour ne pas la blesser.
À quoi ?
Elle lui demande de la regarder. De la regarder vraiment ordonne-t-elle.
Elle déchire presque sa robe pour lui montrer ce qu'elle trouve si laid et ordinaire en elle.
Elle si commune, une belle reine tiens.
Elle crie son agonie, son besoin de l'autre, son incapacité à comprendre pourquoi sauf à quel point Hilde l'obsède.
Qu'elle voudrait être superbe et forte, et décidée, et plus courageuse pour tenter sa chance.
Mais elle n'est pas courageuse, à peine suicidaire.
Elle ne retient rien. Les frustrations, les doutes, l'incompréhension, pourquoi elle ? Pourquoi une femme ? Pourquoi Hilde ?
Pourquoi elle rougit quand elle la croise. Ses manigances honteuses pour un moment avec elle, ses fugues dans le jardin, ses cachettes, son besoin, pour respirer de savoir qu'Hilde est là pas loin.
Et même si c'est jamais, avoir au moins un bout d'elle, près d'elle, à elle, de loin.
Elle hurle son besoin, la gêne qu'elle en ressent, la jalousie qui lui crève le cœur, parfois, à imaginer une rousse ou une autre dans les bras de la Garde.
Elle se lamente en se tordant les mains, en se mordant les lèvres.
Elle voudrait que la conversation n'aie jamais eu lieu parce qu'elle vide son cœur, et son âme et son désir... ses désirs, qu'elle voulait irréels, stupides, hormonales, éphémères, intangibles, et qu'elle crie à l'agonie.
Avoir sa main tenue par celle d'Hilde.
Avoir le droit de goûter les lèvres minces.
Ne plus rougir sous son regard d'océan tranquille.
Et puis la chaleur de ses bras.
Elle n'ose même pas imaginer plus, avoue-t-elle dans un souffle, honteusement. Parce que vouloir plus n'arrivera jamais.
Alors, elle pleure, elle pleure toutes les larmes que son corps contient, à nouveau dans la robe de maternité foutue de Dorothy.
Elle lui dit qu'elle voudrait aussi des enfants mais comment avec une autre femme.
Elle parle de l'uniforme d'Hilde, si impeccable toujours, aux boutons étincelants qui attrapent les rayons du soleil, elle décrit la chevelure d'ébène épaisse, les yeux aux cils courts, le visage impérial qui la hante.
Elle parle, encore et encore, elle vide son sac, son trop-plein.

Et tout ce temps, Dorothy la tient, et la console, et la cajole.
Et tout ce temps, avec elle, son amie pleure.
Et tout ce temps, elle lui sourit et la tient contre son cœur.
Tu verras, dit-elle, doucement, tu verras tout ira bien.
Et elle, elle pleure encore plus fort, parce que c'est aussi ce qu'elle a dit après qu'Heero s'en est allé.

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à suivre...

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Ben je savais pas trop comment amener une dispute sans que ça pête dans tous les coins.
On est méridional dans la famille. Une dispute qui éclate pas quelque chose ou qui a pas des hurlements féroces, c'est pas une dispute.
Et puis oublions pas les grands gestes...
Sigh...

Lied qui espère qu'elle fera mieux au prochain chapitre