En réponse à la tienne aurélie : Oui pas facile de cerner Alex. Contente que ça te plaise. J'espère que la suite te plaira.

On revient sur Norma.

Un chapitre plus court. J'ai tellement d'idées pour la suite mais va falloir attendre, je ne veux rien précipiter. Et puis ça reste un UA. Je me fais un peu plaisir.

Bonne lecture.


Partie 8


J'avais hâte de terminer mon service. Quand Shelly n'était pas là c'était bien plus long.

Je m'activai comme une folle, stressant à l'idée d'aller manger avec Alex. Quand je l'avais vu installé à une table ce matin, je n'en avais pas cru mes yeux. Ma prière avait été exaucée, je voulais le revoir une dernière fois avant qu'il ne reparte de la ville. Je voulais le remercier. Il m'avait défendu contre ce gros porc, son ami soi-disant. Mais ils étaient tellement dissemblables.

Je n'avais pas pris la peine de prévenir la nourrice de cet imprévu, je faisais toujours mes courses pour la semaine le samedi après mon service. Je ne rentrais que vers quatre heures et demie.

Je commençai à avoir faim, je n'avais rien mangé à ma pause en prévision de ce repas. Les minutes s'égrenaient lentement, m'agaçant prodigieusement.

Cinq minutes avant la fin, j'aperçus un véhicule qui se gara sur le parking. Alex en descendit et me fit signe. A deux heures dix minutes, j'étais encore de service car mon autre collègue n'était pas encore arrivée. C'était une nouvelle, en un mois de temps, elle n'avait jamais été à l'heure. Elle n'allait pas faire long feu ici. Je surveillai de temps en temps Alex qui finit par me montrer sa montre du doigt. Je haussai les épaules d'un air contrit. Cinq minutes plus tard, je vis débarquer ma remplaçante en courant, sa tenue à moitié mise.

-Et ben c'est pas trop tôt, râlai-je.

-Je suis désolée.

Je lui accordai à peine un regard et me hâtai d'aller me changer, je fus à l'extérieur en un temps record. Face à Alex, je perdis mes moyens. Etait-ce un rencard ? Je déviai mon regard sur la voiture pour reprendre contenance. C'était une BMW noire haute gamme.

-Wahou ! Belle voiture.

-Je l'ai louée pour trois jours. Viens, nous avons perdu assez de temps.

Il se montra galant en ouvrant la portière passager et fit le tour rapidement. Il conduisait plus calmement que la veille. Il s'était changé et arborait un jean et un perfecto noir et un polo sombre. Il était séduisant et il se dégageait de lui une force qui me subjuguait. Je me sentais en sécurité dès qu'il était dans les parages.

-Nous allons où ?

-Pique-niquer à mon endroit préféré.

-Ah oui ?

Que j'aimais cette idée ! Sur le chemin, nous passâmes devant un motel mais ce n'était pas tant le motel que la maison en amont qui retint mon attention. Elle était époustouflante, provenant d'une autre époque. Un manoir de caractère.

-Quelle belle demeure.

-C'est la maison de la mère de Keith.

A l'énoncé de ce prénom, je me crispai.

-Il s'occupe du motel, sa mère est trop âgée pour cela.

La demeure disparut de mon champ de vision à regret. Il roula encore quelques kilomètres avant de s'enfoncer dans la forêt sur une route un peu rude qui nous conduisit près d'un lac. Quand il se gara, je vis naitre un large sourire sur son visage. J'aurais pu le regarder jusqu'à ce que mes yeux me brûlent tellement il semblait heureux.

-J'adore cet endroit, j'y venais souvent pique-niquer avec ma mère. Parfois je piquais une tête dans l'eau glacée sous son regard affolé.

-Les enfants son téméraires parfois.

-Ça m'arrive encore de le faire.

-Sérieusement ?

-On pourrait tenter d'y aller, dit-il en se tournant vers moi, excité à cette idée.

-Ce sera sans moi.

-Allez !

-Non, je n'ai pas de maillot de bain.

-Pas besoin.

-Je serai gelée.

-Je te réchaufferai.

Qu'est-ce qu'il n'avait pas dit là ! J'en frissonnai de partout et ne pus m'empêcher de sourire.

-Tu cherches par tous les moyens à me voir toute nue ?

-Je suis démasqué.

Je ris de plus belle. Cette nouvelle complicité entre nous était merveilleuse.

-Allez, allons pique-niquer et arrête de dire des sottises.

Il obtempéra, et alla ouvrir le coffre. Il en sortit un panier bien garni, une couverture et des fleurs.

-C'est pour toi.

-Des roses, m'émerveillai-je en les attrapant.

Je respirai leur parfum délicat C'était un peu différent des fleurs sauvages de mon enfance, plus entêtant.

-Personne ne m'a jamais offert de fleurs.

-Il faut un début à tout.

J'étais sur un nuage. Je lui souriais à pleine dent. Il m'entraina au bord du lac, et m'invita à m'asseoir une fois tout installé. Il prit place en face de moi et parut ne pas savoir quoi faire. C'était étrange, lui qui savait toujours tout.

-Qu'as-tu emmené de bon ? Tentai-je.

Il sembla sortir de sa torpeur et m'offrit un sandwich jambon crudité mayonnaise. Je n'aimais pas trop la mayonnaise mais je fis bonne figure et attaquai de bon cœur.

-En dessert, j'ai pris deux parts de tarte à la pomme de la meilleure pâtisserie de la ville et une bonne bouteille de vin.

-Du vin, cela me parait un peu tôt.

-Tu aurais préféré une bière, j'en suis sûr.

-Oui, avouai-je entre deux bouchées.

-J'ai hésité, j'aurai dû suivre mon instinct.

-Oui, c'est étonnant que tu ne l'aies pas fait. Tu es du genre intuitif pourtant.

Il m'observa un instant avec stupeur.

-Je commence à te connaître maintenant.

-Tu crois ?

Je hochai la tête avec confiance.

-Révèle-moi qui je suis alors.

Il déboucha la bouteille de vin et me servit un verre. Tout était parfait, l'ambiance, le paysage… et surtout le mec en face de moi. Je ne me cachai pas pour le dévorer des yeux. C'était plus fort que moi. Il avait déjà terminé son sandwich et en entamai un autre. Je finis par lui répondre, détendue par ce verre de vin.

-Tu es gentil.

-Ce n'est pas ce qu'on m'a dit.

-Tu es honnête, fort et courageux. Tu ne supportes pas la déloyauté.

Il termina son sandwich et s'essuya la bouche, impassible.

-Mais encore ?

-Tu as subi des violences mais au lieu de te rendre mauvais, cela t'a rendu plus humain. Tu ne supportes pas de voir un homme lever la main sur une femme. Et je pense savoir pourquoi.

Il sirota son vin, ne me fixant plus comme il le faisait précédemment. Il ne me demanda pas de préciser pourquoi.

-Intéressant.

-Tu es obstiné et curieux.

-Déformation professionnelle.

-Je ne pense pas non.

-Si nous passions au dessert ? Détourna-t-il l'attention.

J'approuvai d'un signe de tête et savourai avec lenteur cette merveille.

-Je suis au bord de l'extase, soupirai-je avec gourmandise.

J'avais fermé les yeux, plongée dans un autre monde. Quand je les rouvris, il me dévisageait avec amusement. Je me sentis rougir et je n'aimais pas cela.

-J'adore cuisiner, me justifiai-je, mais là, c'est un autre niveau, je suis loin de l'avoir atteint.

-Qu'est-ce que tu aimes faire d'autre ?

-Chanter.

-Chante pour moi.

-Je ne suis pas douée.

-Chante pour moi, répéta-t-il cette fois avec un timbre plus grave qui me chamboula tout le corps.

J'entonnai alors un air que j'adorais : Mr Sandman. Alex était sous le charme, je le vis. Etonnée, ravie, je me laissai emporter.

-Tu chantes divinement bien.

-A d'autres, répondis-je, gênée, par contre je suis très douée pour le piano.

-Ah oui ? J'aimerais bien t'entendre me jouer un morceau.

-Ça me manque parfois. Je jouais souvent cet air et mon frère m'acc…

Je m'interrompis. Pourquoi Caleb revenait sur le tapis ? Pourquoi maintenant ? Mon sourire s'était envolé et je me sentais bien seule.

-Il te manque ?

Je n'aimais pas le ton de sa question. Je ne voulais pas y répondre.

-Tu es allée le voir en prison ?

Le choc fut rude.

-En prison ? Il est toujours en prison ?

-Il en a encore pour dix ans si mes souvenirs sont bons. Le décès de ce gars dans le coma lui a été fatal.

John était mort ?

-Tu n'étais pas au courant ?

-Non, soufflai-je.

J'avalai d'une traite mon verre et voulus m'en resservir un deuxième. Il interrompit mon geste.

-Ça ne va pas t'aider.

Sa main sur la mienne se fit pressante. J'en oubliai de boire, j'aimais tellement le contact de sa peau sur la mienne. Mon regard dévia de sa main vers ses yeux. Des yeux noirs intenses. Des yeux noirs brillants. Des yeux noirs qui m'aspiraient. Je le vis se pencher vers moi, j'aurais pu ne penser à rien, tout oublier dans ses bras. Cependant le souvenir de petite amie me détourna de lui. Il se redressa et s'enfila son dessert sans un mot. Il s'était renfermé, il était loin de moi.

-Comment va ta fiancé ? Me justifiai-je à demi-mot.

-C'est ça qui t'inquiète ? Se dérida-t-il d'un seul coup.

-Disons que ce n'est pas anodin. Je n'aime pas partager.

Pourquoi j'avais dit ça ?

-Moi non plus et Rebecca et moi ne sommes plus ensemble. Et nous n'étions pas fiancés.

Un poids immense s'ôta de mon cœur. Je me sentis stupide, il ne m'appartenait pas et ce n'était peut-être même pas un rencard. Il repartait sûrement demain et…

-Qu'est-ce qui t'inquiète encore ?

Il avait délicatement attrapé ma main, soucieux. J'étais libre de l'enlever à tout moment. Mon cœur chavira littéralement.

-Je ne veux pas que tu partes, avouai-je dans un murmure.

Il ne répondit pas, il m'était impossible de l'affronter du regard.

-Je suis désolée. Nous aurions pu passer un merveilleux moment avant que tu ne repartes chez toi mais j'ai tout gâché.

Sa main était toujours aussi douce, ses doigts caressants. Je me sentais au bord des larmes, et aussi très stupide. Je n'avais pas d'explication à cet attachement rapide, à ce besoin de le garder près de moi. Je savais juste que je voulais le savoir à proximité.

-Tu veux que je reste ?

Silence.

-Réponds-moi Norma, c'est important.

Je hochai la tête.

-Viens.

Il se rapprocha, m'enveloppa de ses bras et me cala la tête au creux de son épaule. J'étais en sécurité. Et je voulais avoir cette sensation tous les jours. Ses doigts glissèrent dans mes cheveux dans un tendre va et vient.

-Je pourrais rester Norma, à vrai dire j'y ai pensé…

Je reculai pour l'observer, étonnée.

-Mais avant de te dire oui, je voudrais te demander quelque chose… ça concerne ton frère.

Un froid polaire me congela brusquement, et je me souvins du shérif qui avait des choses à dire sur ma famille. Il remarqua mon expression effrayée et se ravisa.

-Ce n'est pas grave, ça peut attendre.

Mais j'étais déjà debout, loin de lui.

-Je veux rentrer.

-A chaque fois qu'on se rapproche, tu fuis Norma.

-Je ne veux plus que tu mêles de mes affaires.

-Si tu veux qu'on soit ensemble, il va falloir me faire confiance et tout me dire.

-Je n'ai rien à te dire et je n'ai jamais dit que je sortirais avec toi.

Il se leva à son tour.

-Je ne veux pas sortir avec toi…

-Ben comme ça c'est réglé.

Merde, cela me fit un mal de chien au fond de mon cœur.

-… je veux t'épouser Norma-Louise Calhoun.


La suite quand je pourrai.