Bonne lecture! Merci à Miss Mpreg pour sa fidélité sans faille :D
Chapitre 2 : Tourments infinis
Le Titanic prit le large, accompagné de quelques oiseaux en quête de poisson, glissant calmement sur une mer d'huile. Le capitaine tenait encore la barre, les yeux brillants fixés vers l'horizon, un sourire s'étalant dans sa barbe blanche taillée au cordeau. Son équipage se félicitait pour ce départ réussi tout en admirant leur capitaine pour son dernier voyage avant la retraite. Fier comme un paon, celui-ci écoutait son précieux navire chanter sa mélodie de fumée et son ronronnement des moteurs. Doucement, il allait glisser vers la France pour sa prochaine étape.
Ses passagers, quant à eux, étaient rentrés dans leur cabine pour la plupart. Ils s'affairaient à s'installer pour le voyage, appréciant avec ravissement le luxe dans lequel ils évoluaient, toute classe comprise. Raiponce était de ceux qui passaient leur temps à tout regarder et à s'émerveiller de peu de choses. Dans sa chambre violette d'un luxe à faire pâlir les rois d'autrefois, elle jubilait de la qualité de son environnement. Tous ses ornements, ses moulures sculptées mains l'impressionnaient. Les yeux rivés sur les murs elle caressa du bout des doigts tout ce travail d'artiste quand son fiancé vint la déranger.
- Ma chère femme, que faites-vous accroupie de la sorte ? Répliqua-t-il offusqué. On voit presque votre jupon ! Je vais vraiment devoir vous apprendre à vous tenir lorsque nous serons arrivés en Amérique. Là-bas je ne permettrai guère autant de laisser-aller.
- Je ne fais que regarder ce travail d'orfèvre, se défendit-elle dans le vide.
- Vous et votre passion pour les arts… Enfin, peu importe, allons nous restaurer un peu. Le service est ouvert.
Il lui tendit sa main qu'elle refusa, se relevant d'elle-même, les yeux toujours épris par l'amour de l'art. Pitch reprit sa main, le regard sombre. Elle se refusait toujours à lui de la sorte et cela commençait doucement à l'agacer. Il s'approcha lentement d'elle qui se tendit, le sentant dans son dos. Alors il l'attrapa par les épaules et approcha son nez de son cou pour humer son odeur. Elle sentit son poil se hérisser. Il lui apposa un baiser dans la nuque en relevant ses cheveux avant de la prendre contre lui.
- Je ferai de toi une reine, je te couvrirai d'or et de luxure, lui susurra-t-il langoureusement. Mais surtout…, je ferai de toi une femme.
Pitch laissa sa main glisser lentement vers le bas de sa robe, passant sur sa poitrine. Il la savait vierge, il la savait pure. Il serait le seul à l'avoir, sa princesse dorée. La plus belle femme qu'il eut jamais rencontrée. Il voulait tellement la posséder, là, maintenant.
- Excusez-moi ? Où est-ce que je mets les robes ?
Pitch stoppa son geste alors que sa main soulevait le premier jupon. Il persifla de colère et relâcha sa proie. Puis il tourna ses yeux furieux sur Cassandra, « la boniche ».
- Domestique inutile, railla-t-il. * Il se retourna vers sa fiancée*. Je vous attends pour le souper, ne tardez pas trop.
Il la regarda d'un sourire profond, dévorant. Elle hocha simplement la tête, incapable d'ouvrir ses lèvres puis le regarda partir avant que ses jambes ne se dérobent sous son poids. Cassandra lâcha aussitôt les tenues de bal pour se précipiter vers sa maitresse qui se mit à pleurer en silence. Elle lui caressa le dos et la posa sur le lit moelleux qui s'enfonça un peu.
- Tu m'as encore sauvée, Cassandra… Je ne sais pas ce que j'aurais fait si il…
Sa dame de compagnie déglutit, le regard peiné.
- Je sais, mademoiselle. Mais… Il faudra que vous y passiez un jour malheureusement. Je ne peux que vous encourager à… fermer votre cœur. Vous vous y ferez à force.
Outrée, Raiponce se releva.
- Comment peux-tu me dire une chose pareille ?! C'est horrible ! Je… Je croyais que nous étions amies ! Que nous avions dépassé le stade de maître et domestique ! Tu m'as toujours aidée, soutenue… Pourquoi maintenant tu… tu me vouvoies, tu t'éloignes de moi… Je ne te comprends plus Cassandra ! Je n'ai plus que toi ! Et tu m'abandonnes à LUI !
La ténébreuse laissa ses yeux sur le sol avant de se lever et de reprendre les robes.
- Où dois-je les mettre, mademoiselle ?
- …
Scandalisée, Raiponce pleura de plus belle faisant couler son maquillage, elle se cogna contre le mur, les mains serrant sa poitrine.
- Mets-les où tu veux je m'en fiche ! Déchire-les si l'envie t'en prends, jette-les par-dessus bords. Après tout, tu n'es bonne qu'à obéir aux ordres maintenant, tu te fiches bien de mes robes et de ma personne !
Le cœur au bord des lèvres, la blonde sortit de la chambrée pour s'enfermer dans la salle de bains où, à contre cœur, elle essuya ses yeux et se refit une beauté. Cassandra resta un moment sans bouger, les lèvres tremblantes. Puis, elle se remit en marche et retourna ranger le reste des bagages, les yeux vides. Elle attacha toutes les tenues hors de prix sur les cintres, posa les bibelots sur les meubles, épousseta le lit correctement, rangea les affaires personnelles dans les tiroirs… Elle se stoppa sur un magnifique mouchoir violet en dentelle avec un soleil en or brodé au centre. Le cœur lourd elle le rangea le plus délicatement possible dans une boîte en or massif qu'elle cacha comme sa maîtresse le voulait, sous le lit. C'était le trésor secret de Raiponce.
Peu après, elle regarda la belle blonde sortir sans un regard pour elle avant qu'elle ne s'occupe d'ouvrir sa propre valise dans sa chambre adjacente. Être domestique lui valait de vivre dans de bonnes conditions comme celle-ci, c'était bien la seule chose positive à sa condition. D'un grand soupir, Cassandra sortit son linge de bonne, ses affaires de nettoyage et ses couteaux préférés qu'elle gardait en souvenir de son père. Les rangeant délicatement dans un tiroir elle plaça ensuite un vieil album photo rempli de souvenirs qu'elle ne quitterait pour rien au monde. Sur la couverture trônait une photo d'une petite Raiponce avec son père Frederick ainsi qu'elle-même couverte de boue, recueillie par le charmant comte de Corona.
Les plus beaux moments de toute sa vie.
Raiponce rejoignit son fiancé qui l'agrippa par le bras en la dirigeant vers la salle restaurant. Evitant à tout prix son regard elle contempla les allées bordées d'or et de boiseries. Sa mère les rejoignit sur le chemin et fut scandalisée par l'apparence de sa belle-fille. Furieuse elle la prit à part juste avant de rentrer dans la salle. Elle lui serra si fort le bras que Raiponce retint un cri de douleur, sa peau rougissant sous les mains de sa belle-mère.
- Qu'as-tu fait à ton maquillage ?! Murmura-t-elle en persiflant.
- Je…
- Tu me fais honte ! Tu n'apprends donc jamais rien ? As-tu envie de passer ta vie à te faire pointer du doigt par les autres ?! A te faire réprimander ?! A passer pour une idiote éternellement ?! Crois-moi, ma fille, si tu ne changes pas d'attitude rapidement, ton mariage, ton futur va être un véritable fiasco … ET, il est HORS DE QUESTION, que je sois humiliée par ta faute, tu m'entends ! Tu feras honneur à Pitch où c'est moi qui te ferais comprendre ta place ! Et crois-moi, tu n'as pas envie de savoir ce que je te réserve si tu échoues.
Les yeux exorbités, Gothel tira son enfant adoptif par le bras, lui arrachant des gémissements avant de la remettre au propre dans un coin. Elle cacha la marque de ses doigts sur sa peau en lui collant un châle qu'elle lui interdit d'enlever puis elles retournèrent avec Pitch qui s'impatientait. Le déjeuner fut un enfer infini pour la jeune comtesse. Retenant ses larmes et sa douleur, elle mangea dignement aux côtés de sa famille et des amies de sa mère qui piaillaient comme des dindes. Silencieuse, Raiponce ne bougea pas d'un poil, laissant même Pitch poser une main sur sa cuisse avec un sourire provocateur.
Si elle avait pu, elle aurait hurlé, retourné la table et fui par la première porte pour se jeter dans l'océan. Reposer en paix, elle y songeait de plus en plus. Avant que sa vie ne lui échappe définitivement c'était… une possibilité qui la hantait. Qui l'appelait.
Après le repas, Pitch partit prendre un Brandy dans le salon fumoir avec les autres hommes présents et les femmes ne remarquèrent pas du tout l'absence de Raiponce qui s'éclipsa comme un chat. Elle délaissa sa mère se faire mousser par les autres pour ses fiançailles et la richesse qui l'attendait après cette union. Un pactole à faire pâlir de jalousie la haute société. C'est tout ce qui intéressait Astoria Gothel, Raiponce n'était pas dupe. L'argent, toujours l'argent. Le luxe. Et surtout : la beauté.
Enfin seule, la jeune femme sortit à l'air libre pour humer avec force les embruns de l'océan. Un cœur pouvait-il exploser de douleur ? Raiponce se dit que si c'était possible, ce serait déjà fait. Accablée, la blonde resta un moment sur le bord d'une passerelle, à contempler l'eau gracieuse s'étirer sous ses pieds. Que la nature était belle. Si belle… D'un geste imprévu, la jeune femme se dirigea lentement vers les ponts inférieurs. Elle ne cessait de fixer l'eau avec envie. Se fondre avec elle serait une merveilleuse fin, songeait-elle vaguement.
Une grille la stoppa, celle qui séparait les hautes classes des autres. Elle voulut l'ouvrir mais retint son geste. En proie à une profonde indécision elle regarda les deuxièmes et troisièmes classes s'amuser plus bas. Ils semblaient si heureux, si vivants. Elle les enviait. A cet instant, ses yeux se posèrent sur un jeune homme atypique qu'elle avait déjà vu auparavant. Il la regardait elle aussi. Une profondeur dans ses yeux la happa, un sourire naturel ornait timidement ses lèvres d'où il leva sa main pour lui faire un signe. Raiponce recula, confuse. Elle se rendit compte de ce qu'elle s'apprêtait à faire quelques secondes auparavant… Dans le brouillard elle leva un peu sa main avant de s'enfuir à toutes jambes vers l'intérieur.
Son cœur tambourinait. Avait-elle songé au suicide là tout de suite ?! Comment en était-elle arrivée là ? Si ce jeune homme ne l'avait pas interpellée elle aurait sûrement continué sa route. Effrayée par ses propres pensées, Raiponce retourna dans ses appartements où elle reprit ses esprits en dessinant dans sa plaquette à dessin.
Elle devait à tout prix chasser ce genre de pensées. Son père ne lui aurait jamais pardonné un tel geste ! Même si la vie était dure depuis sa disparition, voir infernale... Il lui aurait souhaité de trouver son bonheur quoi qu'il arrive… Elle devait tenir bon. Garder espoir en un avenir meilleur.
Plus tôt de cela, Jack Frost avait lui aussi emménagé dans sa cabine. Elle se trouvait dans le fond du bateau avec un simple hublot comme fenêtre. Bien plus luxueux que tout ce qu'il avait connu, le jeune homme n'avait rien à déballer. Son baluchon comportait seulement de quoi se laver, des sous-vêtements de rechange, trois sous, des vieux biscuits périmés et une photographie. C'est la seule chose qu'il sortit. Une image en noire et blanc de lui et sa sœur, tous petits, avec leurs parents. Bien que la photographie était fortement abîmée et presque effacée par endroits, il n'avait que celle là pour se souvenir de ses proches et se rattacher à quelque chose.
D'un maigre soupir il s'allongea sur sa couchette en hauteur et contempla le visage tout rond de sa sœur Emma quand elle avait trois ans. Elle était adorable ! Si adorable… Elle avait les mêmes traits que lui hormis sa couleur de cheveux auburn et ses yeux noisette. Elle avait tout pris de leur père tandis que lui avait les gênes de sa maman. Une belle albinos argenté aux yeux bleus clairs. Il avait hérité de la même apparence, des même gênes ratés, mais il en était plus que fier malgré toute la haine que cela lui avait valu des autres. Notamment pour les familles d'accueil qui ne voulaient jamais de lui. Alors que sa sœur, elle…, avait tout de suite été adoptée. Le laissant seul. Seul pour toujours.
Jack secoua la tête avec colère. Il détestait être aussi négatif. Capuche sur la tête il prit son bâton préféré et se leva pour visiter les lieux. Cela le mit en joie. Il fit le tour des cabines, se fit houspiller pour être entré dans la salle des machines, contempla les magnifiques meubles dans la salle d'eau commune tout en prenant une longue et magnifique douche chaude qui le fit revivre avant de se restaurer dans la luxueuse salle de restauration des deuxièmes et troisièmes classes mélangées. Il fit ainsi plein de belles rencontres, de familles et surtout d'enfants avec qui il s'amusa tout l'après-midi. Il adorait les enfants. Plus que tout. Leur innocence, leur joie de vivre ! Ils étaient la pureté de ce monde.
Mais ce qui l'interpella arriva au beau milieu de ces jeux d'enfants. Alors qu'il jouait aux billes, son regard fut attiré par les premières classes. Il pensait à l'ange blond depuis un moment et ne cessait de jeter un coup d'œil par ci par là. Un réflexe, juste pour la revoir une fois. Pour l'admirer et se gorger de sa beauté digne du soleil. Et c'est là qu'il la repéra. Elle arrivait vers la grille séparant leur frontière. Jack était surpris non pas par ce fait mais par le regard hanté de celle qu'il admirait.
Arrêtant son regard sur elle il la détailla et eut envie de l'approcher pour lui parler. Elle semblait si triste. Non… C'était au-delà de ça, il pressentait autre chose. Quelque chose qu'il avait connu. L'envie de… Jack secoua la tête, ca ne pouvait pas être ça. Cet ange avait tout pour être heureux. Mais alors…, pourquoi ce regard ? Pourquoi ces traits désespérés ?!
Il sursauta. Elle le regardait aussi. Que faire ? Il était totalement désemparé. Bloqué sur ses yeux aussi sombres qu'un ciel de tempête. Il se mit alors à lui sourire sincèrement, bêtement, et leva la main pour la saluer.
« MAIS QU'EST-CE QUE JE FAIS MOI ?! » hurla t-il sans sa tête.
L'air benêt qu'il devait avoir le couvrit de honte et pourtant, aussi surpris fut-il, elle leva sa main aussi. Faiblement mais assez pour qu'il remarque son geste avant qu'elle ne s'enfuit en courant. Choqué, Jack en lâcha sa bille.
- Je ne sais pas ce que tu espères en saluant une première classe mais tu rêves tout éveillé, commenta un homme qui fumait non loin de lui et avait vu l'échange. Elle a dû avoir pitié de toi. J'aurai jamais osé à ta place. Tu imagines ce qu'elle pense de toi en vrai ?
Il rit avant de tirer sur sa cigarette, avalant à grandes gorgées la fumée du cancer. Jack grommela.
- Je le sais bien. Je ne sais absolument pas ce qui m'a pris.
- C'est ta queue qui a parlé en premier, répondit l'autre crûment.
- Je ne suis pas ce genre d'homme, se défendit Jack.
- Jack ! Jack ! A toi !
Déconcerté, l'argenté retourna à son jeu, préférant la compagnie des petits aux adultes sans cœur. Le fumeur en ricanait encore mais il ne semblait pas mauvais, juste fataliste. Jack préféra l'ignorer et continua son jeu. Même si, au fond, ses yeux étaient hantés par ce qu'il venait de se passer.
Le soir venu, la lune presque ronde vint recouvrir le bateau de sa douce lueur argentée. Raiponce et Jack contemplèrent tous deux le coucher de soleil depuis leurs ponts respectifs tandis que les étoiles commençaient lentement à se faire voir.
Rapidement rappelée à l'ordre, Raiponce partit dîner avec son futur mari et sa belle-mère, ayant réussi à calmer un peu son cœur. Elle décida d'écouter Cassandra et de se murer derrière un masque. De commencer à « s'y faire ». Peut-être trouverait-elle le bonheur en Amérique ? Peut-être que Pitch la traiterait bien… ? Peut-être… D'un soupir discret, Raiponce se resservit du champagne et laissa l'alcool diluer ses idées. Les apaiser ne serait-ce qu'un temps alors que Pitch lui caressait la main devant ses amis et parlait de leur mariage en grande pompe. Il avait déjà prévu environ huit cent invitations, un feu d'artifice, un autel devant un décor enchanteur dans un palais, le traiteur et l'alcool dont les mets les plus fins seraient servis. En bref, tout ce qui pouvait se faire de plus clinquant et tape à l'œil. La seule chose que retint la blonde ce fut l'alcool. Au moins pourrait-elle éviter de trop penser ce jour-là…
Exténuée par la soirée ennuyeuse à souhait, le soulagement vint quand le Brandy fut servi. Raiponce bénissait qui voulait l'entendre que cette chose existe. C'était LE moment où elle avait la paix avec son fiancé beaucoup trop collant à son goût.
- Raiponce ? Où vas-tu encore ?! Sermonna Gothel.
- Visiter encore un peu le paquebot, répondit-elle sincèrement.
D'un soupir Astoria leva son verre pour boire une gorgée de liqueur digestive avant de s'adresser à ses amies.
- Cette fille ne tient pas en place. Je ne sais plus quoi faire avec elle. * Un regard vers la blonde elle reprit * Je t'interdis d'aller sur le pont inférieur, tu m'entends. Je te connais, je sais que tu veux y aller. Et prends Cassandra avec toi. Je préfère te savoir accompagnée.
Son regard perçant convainct Raiponce de ne pas riposter. Elle approuva et se retira en laissant Gothel se plaindre de sa fille difficile à vivre. Lasse, elle se rendit machinalement dans sa chambre pour prendre sa dame de compagnie et fit enfin le tour du pont supérieur. Rapidement elle balaya ses problèmes pour se concentrer sur le paquebot de luxe qu'elle visitait. Les escaliers étaient gigantesques tout en or et en boiseries. Du cristal pendait des lustres aussi monstrueux que dix chandeliers réunis. La salle centrale était sa préférée. Un dôme de verre attirait à lui la lune en sublimant le décor. Il faisait briller les pierres de cristaux qui pendaient un peu partout. Enchanteur était le mot qui décrivait le mieux cet endroit.
Cassandra resta silencieuse derrière sa maîtresse mais approuvait le lieu où elles se trouvaient. La jeune servante profitait de la ballade avec rien qu'elle et son amie pour se détendre. Raiponce continuait sa route, découvrant la salle de bal qui lui arracha un « OUAH » de stupéfaction qui résonna en écho. Elle se mit à rire à ce fait et Cassandra la suivit discrètement. La blonde le remarqua et elle se rapprocha un peu.
- Tu ne trouves pas ce bateau splendide ? Questionna Raiponce.
- Au dela de tout ce que je pouvais imaginer.
- Moi aussi et pourtant j'en ai vu des choses classes mais là… Je suis enchantée ! J'aimerais tellement être à l'origine de si beaux objets ! Regarde ce tableau et là ce chandelier ! Oh regarde comme les drapées sont soyeuses et ornées de dessins précis.
L'excitation de sa maîtresse fit sourire Cassandra. Ca c'était sa Raiponce et elle aimait la voir ainsi !
- Viens on va voir par là-bas !
Tirée par le bras comme avant, Cassandra se mit à rire et à secouer la tête, faussement blasée. Les amies admirèrent la vue depuis le grand pont, celui le plus haut avant de longer l'espace détente de style salon de thé. Mais quand vint le moment pour Raiponce de s'approcher de la grille interdite, Cassandra se posta devant elle pour la repousser.
- Non. Votre mère désapprouverait ceci.
- Elle n'en saura rien. Allez !
- Je refuse, gronda Cassandra. Vous restez sur ce pont. Sinon j'irais vous dénoncer moi-même.
Raiponce la fixa dans les yeux puis elle fronça les sourcils.
- Avant tu me laissais tout faire et cachait mes bêtises. Qu'est-ce qui a changé ?
- J'ai mûri. Et vous devriez en faire de même. N'oubliez pas qu'en Amérique je ne pourrais plus vous aider. Je n'aurai plus aucune autorité sur les autres domestiques.
Raiponce se recula, en colère.
- Tu me déçois énormément, asséna-t-elle avant de s'en aller.
Cassandra voulut la suivre mais la blonde la repoussa d'un geste.
- Laisse-moi tranquille ! Ne t'inquiète pas je vais rester ici. Je vais MÛRIR dans mon coin !
Sans se retourner la blonde retint un sanglot avant de se rendre à l'autre bout du pont, le plus loin possible de sa traîtresse d'amie.
- Je dois m'y faire… m'y faire…
Raiponce inspirait et expirait, les mains agrippées à ses joues. Elle eut un frisson en sentant le froid nocturne lui lécher la peau. Elle n'avait même pas pensé à prendre une laine, quelle idiote elle faisait, songea-t-elle.
Perdue dans ses pensées, la jeune femme repensa au jeune homme qu'elle avait aperçu plus tôt. Son apparence si singulière, son sourire respirant la vie, son petit air bon enfant. Elle se mit alors à le chercher pour apaiser à nouveau ses souffrances morales. Le regarder, voir son sourire, cela lui donnerait chaud au cœur. Voir que dans ce monde il existait autre chose que de la souffrance.
Jack flânait sur les bords du bateau. Il était monté sur les barrières, tenant son bâton entre ses épaules et ses bras. Il s'amusait tout en regardant la lune. Il se fit très vite prendre par un Steward et enguirlander de son inconscience. Le jeune homme s'excusa et promit de ne plus le refaire avant de marcher nonchalamment entre les quelques personnes qui se baladaient là. Une famille interpella ses yeux. Le papa et la maman faisaient des chatouilles à une petite fille qui riait à gorge déployée.
« Ne pas penser à Emma, pas tout de suite, pas avant de la retrouver et de s'assurer qu'elle va bien ».
Il détourna rapidement les yeux de la scène pour contempler l'arrière du bateau en s'installant sur une des barrières, loin des regards des Stewards. Il adorait ce genre de moment calme où il écoutait la nature vivre et la paix régner dans son cœur. Il sentit pourtant un regard sur lui, une présence. En rouvrant les yeux il retomba sur son ange tout là-haut. Il ne la voyait pas bien mais il la sentait sur lui. Son cœur se mit à tambouriner dangereusement.
Il osa la saluer à nouveau, elle lui répondit aussitôt. Jack crut bien que son cœur s'arrêtait. Cette fois il n'avait pas rêvé ! Il avait tout à coup très envie de la rejoindre, de lui parler. Mais il ne le pouvait pas. Il n'avait pas le droit de monter là-haut. Et elle… sans le savoir n'avait pas le droit de descendre. Elle ne pouvait que le regarder, lui, l'esprit libre qui lui donnait un peu de courage. Elle finit par lui sourire, bien trop tristement aux yeux de Jack.
Celui-ci allait se lever pour se rapprocher mais se stoppa aussitôt dans son geste. Le beau gosse gominé arrivait et il prit sa belle par la taille. Il n'entendait rien mais vit simplement son ange disparaitre avec lui comme un mirage dans le désert. Déçu, Jack retourna à la réalité. Un signe de main, c'est tout ce qu'il obtiendrait de l'ange. Mais… Mais c'était déjà beaucoup pour lui ! Il n'aurait rien de plus il le savait. Ce simple geste le remplissait d'un bonheur étonnant et il sourit, contemplant l'océan glacé avec tendresse.
De son côté, Raiponce fut bien obligée de retourner dans ses appartements.
- Que faisais-tu dehors toute seule ? Questionna son fiancé en agrippant sa taille.
- Je contemplais l'Atlantique.
- Hum, c'est vrai que le paysage est sublime de nuit. Cassandra n'était pas avec toi ?
- Non, j'ai préféré être seule.
- Ce n'est pas très prudent. Si tu veux je pourrais te prêter un de mes gardes.
- Non merci, refusa la blonde en se dégageant devant la porte de sa chambre. Je n'ai pas besoin d'être surveillée en permanence. Je suis une grande fille.
Agacée elle ouvrit la porte avant de repousser Pitch qui la suivait.
- Tu ne me fais pas entrer ?
Son regard… Non elle ne devait SURTOUT pas faire ça, elle le sentait jusqu'au plus profond de son âme.
- Je suis fatiguée, j'aimerai me reposer si tu le veux bien. Nous nous reverrons demain matin.
- Fort bien, je comprends, passez une bonne nuit ma douce.
Il lui baisa la main et en vola un second sur son cou, près de sa poitrine. Sa respiration s'accéléra et elle allait refermer la porte quand il lui attrapa le bras un peu trop fermement.
- Je suis patient, ne t'en fais pas. J'attendrai autant qu'il le faudra.
Il lui fit un grand sourire puis s'en alla suivi des gorilles non loin de là qui la regardèrent comme un morceau de viande. Tremblante de haut en bas, Raiponce ferma la porte à clef et se colla contre le dos de celle-ci, la respiration saccadée. Cassandra lui apporta aussitôt un thé, s'excusant de ses mots un peu plus tôt. Raiponce préféra l'ignorer, incapable de lui pardonner son abandon. Elle préféra se préparer pour la nuit sans un mot de plus. Se délivrant enfin de ses habits de torture.
Réellement épuisée par cette journée difficile, la blonde se coucha dans son lit de soie, s'enveloppant dans ses draps et enfonçant sa tête dans les oreillers. Pieds nus, elle savoura la chaleur de son lit et se mit à pleurer en silence, recroquevillée en fœtus. Ses cheveux sursautaient à chaque sanglot, entourant le lit comme une seconde protection. Elle fut incapable de s'endormir cette nuit-là.
Cassandra la vit et hésita à s'approcher pour la rassurer. Elle abdiqua lorsqu'on frappa à la porte de sa chambrée adjacente. Se retirant à ses appartements elle ouvrit à Astoria Gothel dont les yeux n'auguraient rien de bon.
- Ne t'avais-je pas dit de rester avec Raiponce et de la surveiller ? Siffla-t-elle avec lenteur.
- Si, madame, je l'ai fait mais elle m'a repoussée… Je l'ai surveillée de loin comme vous me l'avez conseillé. Je ne l'ai jamais perdue de vue ! Je vous le promets. Elle est restée sur le pont supérieur…
Astoria lui agrippa la bouche en la serrant du plus fort qu'elle le put, arrachant un cri étouffé à Cassandra. La menace du regard de la belle-mère fit frissonner la domestique.
- Ta dévotion me revient en priorité. Moi et pas celle de ma belle-fille, est-ce clair ? Même si elle t'ordonne de la laisser tu ne l'écoutes pas. * Elle relâcha sa pression* Mais j'apprécie tout de même tes efforts alors continue sur ta lancée et prépare-la pour ce fichu mariage. Tu dois la contrôler, c'est ton rôle. Me suis-je bien fait comprendre ?
- OUI MADAME GOTHEL !
- Bien. Tu comprends toujours vite.
Astoria la relâcha en la fixant avec orgueil et puissance. Puis elle s'en alla comme elle était venue. Cassandra referma la porte et se massa le menton, la douleur était lancinante. Elle devrait cacher ça demain. Par chance cela ne ferait pas de bleu cette fois. Elle n'aurait pas besoin de mettre du fond de teint. Juste un peu de crème pour calmer la douleur.
De toute manière, elle avait l'habitude.
Jack Frost retourna dans sa cabine vers minuit. Il était l'un des derniers à se promener et à se coucher. Fatigué, il ne demanda pas son reste quand il plongea dans ses draps propres aux senteurs de lavande. Il s'endormit aussitôt. En une fraction de seconde, il plongea dans le monde des rêves et des souvenirs.
« - Grand frère, regarde !
- Oh comme c'est joli, c'est toi qui l'a fait?
- Oui, c'est un cadeau ! Tiens !
- Comme c'est gentil, merci ! C'est trop beau !
Jack saisit le bâton de ses jeunes mains d'enfant. Emma y avait gravé un cœur tremblant et leurs initiales dessus. Les seules lettres qu'elle connaissait pour l'instant. E et J.
- Ce sera mon trésor, reprit le frère ainé. Je le garderai toujours avec moi.
- C'est vrai ?!
- Oui !
Il prit sa petite sœur contre lui et l'embrassa partout.
- Arrête Jack ! Ah, ah, ah, ah !
- Une attaque de bisous !
Jack rit, sa sœur aussi. Leurs parents les appelèrent et ils se précipitèrent vers eux pour les enlacer. C'était l'heure de manger, ils mourraient de faim ! Ils se mirent à table après s'être lavé les mains, enfournant avec délice leur brioche faite maison. »
Jack souriait inconsciemment. Une petite perle s'était échappée du coin de l'œil, absorbée par l'oreiller en plumes d'oie.
« Jack courait à présent sur le bateau du Titanic. Le rêve avait changé au cours de la nuit. Il était entouré de personnes mais il ne fixait que la lumière tout en haut. Un ange s'y tenait. Son ange. Avec des ailes et une auréole. Elle voletait avec ses cheveux autour d'elle, l'appelant à le rejoindre. Mais Jack n'y arrivait pas, tout le monde l'en empêchait. Emma était là aussi, sur les genoux d'un inconnu, toujours petite. Son cerveau était incapable de l'imaginer adolescente. Elle souriait et prenait le thé parmi la noblesse juste à côté de Raiponce. Elle le regardait tout en bas. Mais elle l'ignora et reprit son breuvage en compagnie d'un autre jeune garçon qui prétendait être son frère. Elle était heureuse et Jack ne pouvait jamais l'atteindre. Ni elle, ni son ange.
Alors il se laissa choir sur le sol, un homme riant dans son dos dans un nuage de fumée de cigarette ».
A son réveil, ce onze avril, Jack sentit son cœur se déchirer. Il se souvenait toujours de ses rêves et encore une fois, il se sentit bien seul, serrant son bâton tout contre son cœur.
Des regards sont échangés... Une main en l'air, un sourire...
La vie n'est pas facile pour Raiponce, Cassandra et Jack. Si ce n'est l'enfer pour la blonde!
Comment va t'elle réussir à survivre à tout ça? Vous le découvrirez dans la suite :3
