Chapitre 25 – Désir
Dans ce chapitre, la visite au spa est un clin d'oeil et un hommage à la super Zucest fanfic "Night Request" de mon ami Levannols sur AO3.
Ceux qui ne l'ont pas encore lue, allez-y ? Il n'y a que deux chapitres, postés il y a quelques temps déjà, mais je sais de source sûre que l'histoire n'est pas abandonnée ! Si vous recherchez quelque chose à la fois drôle, léger et bien écrit, jetez-y un coup d'œil ! Mais pas avant d'avoir lu mon chapitre!
Encore un pas. Lever le pied. Le reposer. Apprivoiser la peur et reposer le poids de son corps sur sa jambe. Ignorer la douleur. Lever l'autre pied.
« Bravo, Azula ! C'est bien ! Continue, n'arrête pas ! s'enthousiasmait Ty Lee.
La voix de Zuko : « Je savais que tu pouvais le faire, c'est formidable ! »
Les encouragements de Taïma : « Encore un effort, Princesse ! Vous y êtes presque ! »
Le visage contracté dans une grimace de douleur qui devait l'enlaidir, Azula leva une nouvelle fois le pied gauche et le posa devant elle en étouffant un gémissement proche du sanglot.
Ses jambes que le manque d'activité avait rendues débiles se mirent à trembler sous son poids et Azula se raccrocha plus fermement à la barre, regrettant que Taïma ait retiré l'autre. Elle chancela un peu et Zuko fut à ses côtés en un instant pour la réceptionner avant l'inévitable chute.
Elle se laissa porter et passa ses bras autour de la taille de son frère, profitant de cette proximité éphémère pour respirer une bouffée de son parfum. Elle dut lutter férocement contre l'envie de l'embrasser dans le cou quand lui parvinrent les effluves de sève de pin. Elle reconnut l'eau de toilette qu'il portait tous les jours depuis qu'elle lui avait fait remarquer, le plus innocemment du monde, que ce parfum lui rappelait ses voyages dans le Royaume de la terre et les nuits à la belle étoile.
Azula aurait aimé que cela dure plus longtemps. Mais Zuko l'avait déjà portée jusqu'à sa chaise roulante où il la fit asseoir. Elle poussa une petite exclamation de douleur en s'asseyant, son bassin protestant violemment.
C'est dans votre tête, Princesse. N'écoutez plus la peur.
Dans ma tête, tu parles ! eut-elle envie de hurler à Taïma qui la regardait, un grand sourire illuminant ses yeux embués de larmes de joie.
Ty Lee n'était pas moins exaspérante à trépigner sur place, ses deux mains jointes comme pour une prière devant son menton, dans l'attitude d'une mère qui assiste, émerveillée, aux premiers pas de son enfant.
En parlant de mère, Azula remarqua qu'Ursa n'était pas là. Pour une fois que sa séance ne tournait pas au désastre… Cette femme n'aimait rien mieux que contempler sa déchéance. Il n'y avait aucune chance pour qu'elle apparaisse dans un tel moment.
Maman venait de moins en moins. Le traitement faisait effet et Azula savait que bientôt, elle ne la verrait peut-être plus du tout. Elle ne savait pas trop quoi en penser et ne voulait pas y songer. Pas maintenant que Zuko s'agenouillait à ses côtés, se tenant au bras de son fauteuil roulant et qu'il prenait sa main dans la sienne pour l'embrasser.
« Tu as été formidable ! Regarde-toi, c'est incroyable ! Tu as fait des progrès inimaginables, en quelques jours seulement!
– Du calme tous les trois. J'ai fait dix pas en me tenant à une barre. Si c'est ce que vous appelez un exploit... »
Elle chassa de son esprit le souvenir de ses séances d'entraînements dans la cour où elle exécutait saltos, pirouettes et figures aériennes avec l'aisance d'un maître de l'air. C'était trop douloureux de penser à ce qu'elle avait perdu. Sa maîtrise avait regagné un peu de vigueur depuis une semaine, mais son feu restait tristement orange et Azula se désespérait de revoir un jour la fascinante teinte azur de ses flammes jaillir dans la paume de sa main.
Elle se demanda, ni pour la première, ni pour la dernière fois, ce qu'en pensait vraiment Zuko. Une partie d'elle était convaincue qu'il s'en réjouissait. Il avait toujours été jaloux de ce don qui la rendait si unique aux yeux de leur père.
« Enfin, Azula, rendez-vous compte, dit Taïma qui la ramena à la réalité. Il y a dix jours encore, vous ne faisiez pas plus de quatre pas avec les deux barres. À ce rythme, dans moins d'un mois, vous pourrez marcher seule, peut-être avec l'aide d'une canne, tout au plus.
– Formidable ! s'exclama Azula en forçant sa voix. Passer du statut de vieillarde impotente à celui de vieille femme physiquement diminuée, c'est un progrès incontestable, surtout si l'on pense que je viens d'avoir vingt ans ! Vraiment, je ne mesure pas ma chance !»
À côté d'elle, Zuko, qui tenait encore sa main, fronça légèrement les sourcils en signe de réprobation. C'était drôle comme il ressemblait à Mère dans ces moments-là.
« Azula, ne sois pas grossière. Taïma veut simplement t'encourager. »
Cela aurait été si facile de rétorquer quelque chose de désagréable à Zuko, de lui rappeler sa responsabilité dans toute cette affaire. Mais Azula restait déterminée à respecter ses propres engagements. Elle n'avait pas fait tous ces efforts de réconciliation avec Zuko pour renoncer maintenant. Pas pour quelque chose d'aussi insignifiant. Surtout quand son frère réagissait aussi bien et semblait plutôt heureux de l'absolution inespérée qu'elle lui accordait.
– Oui, d'accord. Pardon. Je suis désolée Taïma... Je vous prie de m'excuser.
– Ce n'est rien. Ne vous excusez pas, Princesse. » répondit aussitôt la guérisseuse avec sa bonté écœurante.
Azula se disait souvent qu'elle et Ty Lee auraient dû être les meilleures amies du monde. Si seulement elle l'avait toléré.
Je suis désolée.
Combien de fois avait-elle prononcé ces mots au cours des derniers jours écoulés et combien de fois devrait-elle les prononcer encore ?
Cela avait déjà été assez humiliant de ramper devant les amis de Zuzu et de mendier leur pardon.
Ramper n'était pas le mot exact, puisqu'elle se trouvait au-dessus d'eux à ce moment-là, assise à la droite de Zuko sur le trône, dans la grande salle hérissée de colonnes où résonnait l'écho de sa voix.
Zuko lui avait tenu la main pendant toute la scène, ses yeux dorés brillants d'émotion et de fierté, alors qu'elle ânonnait sans passion des excuses toutes faites. Heureusement, des années de pratique du mensonge avaient fait d'elle une excellente actrice et si ses mots avaient sonné si creux à ses propres oreilles, ils avait dû paraître convaincants aux paysans. Ils avaient grommelé quelque chose qui ressemblait à un assentiment.
Le fait que Zuko leur ait tout expliqué : le poison, le faux-traitement, la maladie, tout cela avait dû aider un peu. Si Katara et Aang avaient eu l'air à peu près satisfaits, Azula doutait qu'il en allât de même pour Sokka qui n'avait pas daigné la regarder dans les yeux quand elle parlait. L'insolent ! avait-elle pensé avec fureur. Et que dire de cette peste de guerrière Kyoshi qui n'avait même pas répondu à son invitation. Elle se reposait, soit-disant, épuisée par les douleurs de la grossesse. Comme si Azula allait y croire ! Elle avait peur, voilà tout !
Celle-ci est une comédienne encore plus douée que moi ! s'était-elle dit.
Mais celle qui la dérangeait le plus était sans aucun doute la petite aveugle qui attendait, les bras croisés sur la poitrine, à l'écart du petit groupe. Azula savait très bien ce qu'elle faisait là. Chaque battement de son cœur, chaque geste, chaque inflexion de sa voix était passés au crible par ce détecteur de mensonge ambulant et la princesse détestait ces yeux aveugles qui la fixaient, incapables de distinguer ses traits mais qui semblaient lire dans son âme à livre ouvert.
Heureusement, Azula bénéficiait d'années d'expérience. Mentir à Père était un exercice autrement plus périlleux et épineux que de faire semblant d'éprouver du remords face à ces rustres.
Azula n'était pas fière de ce qu'elle avait fait et aurait tout donné pour que cela ne se soit pas produit. Mais on ne change pas le passé et d'ailleurs, ce n'était pas vraiment sa faute. Elle n'était pas elle-même quand elle avait attaqué ces deux pestes. Pas plus qu'elle ne l'était en agressant Kojiro. Ou encore Zuko quand il avait failli lancer des éclairs à Sokka dans les cachots.
Ty Lee lui avait tout dit. Zuko ne lui en avait pas parlé et elle était certaine de ne pas se tromper en supposant qu'il ne le ferait jamais. Il était sans doute trop honteux de lui-même. Son imbécile de frère au cœur trop tendre.
Mais entendre parler de cet exploit avait tout changé. Depuis qu'elle l'avait appris, Azula s'était mise à aimer son frère d'une manière encore plus farouche. Une dévotion presque animale la poussait vers lui. L'idée d'un Zuko maîtrisant la foudre, autrefois motif de déplaisir et de jalousie, était maintenant une source de fascination et de désir. Plus encore le fait de savoir qu'il l'avait fait pour elle.
Dès lors, il lui fut impossible de feindre la colère une minute de plus.
C'était vraiment contrariant. Cette révélation arrivait au moment où Azula s'était enfin décidée à exercer un meilleur contrôle sur ses sentiments. Comment faire croire à Zuko qu'elle ne pensait plus à lui d'une manière interdite si elle rêvait qu'il lui arrache ses vêtements à chaque instant ?
Depuis, elle était rongée par les désirs. Elle qui rougissait encore d'indignation, quelques mois auparavant, quand Ty Lee lui avait expliqué comment rendre un homme heureux, ne rêvait plus que de cela. Elle se découvrait une sensualité qu'elle pensait réservée aux autres et qui n'avait rien de comparable avec l'attirance qu'elle ressentait déjà pour Zuko avant cela.
Parfois, Azula regrettait de ne pas s'être liée d'amitié avec la petite Beifong. Ainsi elle aurait pu savoir si Zuko y était sensible et s'il faisait semblant, comme elle, de ne pas être dévoré par cette attirance destructrice.
S'il mentait, il le faisait bien. Il ne lui refusait pas sa tendresse quand elle en exprimait le besoin. Mais il s'assurait toujours, quand il la touchait, que ses gestes ne puissent pas être interprétés de la mauvaise façon. Elle soupirait après des caresses qui ne semblaient jamais devoir venir et son cœur parfois lui donnait le sentiment qu'il flétrissait dans sa poitrine.
« Tes progrès sont incontestables, trancha finalement Zuko en se relevant, désireux de mettre un terme au silence gêné qui s'était installé dans la pièce. Mais je veux que tu te reposes maintenant. Je te ramène dans ta chambre pour ta sieste.»
Avant qu'elle ait pu protester, il poussa sa chaise vers la sortie, laissant derrière eux Taïma et Ty Lee qui devaient échanger des regards gênés.
– Je t'en prie, Zuko ! Arrête de me traiter comme un bébé ! protesta-t-elle alors qu'ils s'engageaient dans le couloir. J'ai vingt ans ! Je ne fais plus de sieste !
– Tu vas en faire une cet après-midi. Ce n'est pas négociable.»
Le ton était sans réplique mais Zuko se trompait lourdement s'il pensait pouvoir la faire abdiquer aussi facilement. Tous ses amis s'étaient dispersés après le repas qu'ils avaient partagé dans une atmosphère tendue. Et Azula comptait bien mettre leur absence à profit pour passer du temps en tête à tête avec son frère.
C'était Azula elle-même qui avait insisté pour qu'ils déjeunent tous ensemble le midi, après cette mascarade dans la salle du trône. Tout cela afin de leur prouver sa sincérité. Toph n'avait pas manqué de ricaner à cette idée et si Zuko n'avait pas posé une main sur son épaule à ce moment-là et qu'elle avait encore disposé de ses dons prodigieux, il ne faisait nul doute qu'il ne serait resté de cette bêcheuse qu'un tas de cendres fumantes.
Enfin au moins, elle savait grâce à ce nouveau rituel, qu'Iroh allait s'absenter, sans doute pour rendre visite à quelque membre de son organisation secrète, que Sokka et Suki comptaient aller se détendre à la plage. – Pourquoi ces deux crétins aussi utiles qu'une paire de bottes usagée traînaient-ils encore dans le palais ? – Aang et Katara avaient prévu de se rendre en ville avec Toph pour patrouiller dans les quartiers populaires, là où ils étaient le plus susceptibles de tomber sur un rassemblement clandestin des Fils d'Agni.
Azula était soulagée que Zuko ait enfin commencé à prendre au sérieux la menace que représentaient ces fanatiques. Et si le mouvement ne faiblissait pas et que son succès ne se démentait pas, le renforcement des patrouilles de police dans les quartiers où ils sévissaient habituellement les dissuadait au moins d'apparaître en public. Le fait que l'Avatar en personne se soit officiellement déclaré sur ce sujet avait dû calmer un peu leur ardeur également. Aucun meurtre scabreux, aucune disparition suspecte n'était à déplorer depuis cinq jours consécutifs. Sans compter le nouvel édit qu'Azula avait suggéré à Zuko qui interdisait tout rassemblement de plus de dix personnes dans l'espace public et imposait un couvre-feu dès la tombée de la nuit.
La mesure était certes impopulaire, mais même les Sages n'avaient pas pu s'y opposer face au climat d'insécurité qui régnait sur la ville. Azula ne pouvait pas croire qu'ils soient tous si timorés au point de n'y avoir pas songé plus tôt. La soif de liberté qui avait gagné ce nouveau monde depuis le couronnement de Zuko, leur faisait parfois perdre tout discernement.
Heureusement qu'elle était de retour, en pleine possession de ses facultés mentales, pour guider son frère sur le chemin de la grandeur. Il serait toujours temps de trouver d'autres façons d'étendre son pouvoir et de forcer tous ses opposants à s'incliner devant eux – devant lui, se corrigea-t-elle.
Mais il y avait encore du travail. Zuzu était trop frileux lui aussi et c'était toujours avec une horripilante hésitation qu'il se rangeait à ses arguments. Azula n'avait pas encore pu le convaincre de mettre en place de plus lourdes sanctions envers les agitateurs et les opposants politiques qui osaient proclamer leurs velléités de sédition en public.
Sans parler de cette brute de Lu Fang qui avait l'audace de poursuivre son odieux chantage ! Malgré les efforts de Zuko pour lui épargner cette source supplémentaire d'inquiétude, Azula savait pour les lettres qui continuaient d'arriver, répétant encore et toujours les mêmes menaces stériles, jamais suivies d'effet. Un plan habile de Lu Fang pour susciter la peur chez Zuko et lui faire perdre ses moyens. Elle-même avait assez souvent usé de ce genre de manipulation psychologique dans le passé pour savoir à quel jeu jouait le Ministre de Kuei.
Elle se rappela avec un sourire la fureur de Zuko quand il avait trouvé parmi ses parchemins, la dernière lettre de Lu Fang qu'elle avait interceptée avec l'aide de Ty Lee.
Ty Lee était les jambes dont elle ne pouvait plus se servir. Plus précieuse que jamais, son amie faisait maintenant preuve d'un dévouement sans faille. Ce n'était plus qu'une question de temps avant que l'acrobate accepte de l'aider à réaliser des projets d'ordre plus personnels.
Zuko avait affiché ce petit air renfrogné qui amusait tant Azula et agité la lettre devant son nez en lui hurlant dessus. Azula n'avait eu qu'à feindre quelques larmes et bredouiller des excuses de sa plus petite voix pour apaiser sa colère et pour éteindre les braises qui couvaient dans le regard de son Zuzu.
Azula n'aimait pas vraiment en arriver à ces extrémités. C'était humiliant. Elle avait une réputation à tenir, tout de même ! Mais Zuzu ne pouvait résister à ses larmes et cela s'était révélé plutôt utile puisqu'il avait accepté d'en parler avec elle. Et c'était toujours une bonne occasion de passer quelques délicieuses minutes dans ses bras. Mais le lâche était resté sourd à ses instances quand elle lui avait suggéré d'envoyer de nouvelles troupes réduire quelques villages du Royaume de la Terre en cendres à titre de représailles. S'il ne le faisait pas pour elle, qu'il pense à toutes ces innocentes familles de colons évacuées qui avaient dû quitter leur maison et leur terre à cause de cette chiffe-molle de Kuei, incapable de contrôler son Ministre des armées !
« Tu n'es pas obligé de verser le sang, avait-elle insisté. Juste incendier quelques maisons pour envoyer un message fort, ce n'est pas si grave ! » avait-elle essayé de le convaincre.
Mais Zuko avait refusé net et écourté leur soirée. Depuis, Azula évitait de lui exposer ses vues belliqueuses.
Mais il restait le problème des Sages.
Azula avait été positivement effarée quand, quelques jours plus tard, la tête basse et les joues rouges, Zuko lui avait avoué pour la réforme décidée par lui et l'Avatar au début de son règne.
« Tu as fait quoi ? avait-elle crié, sa voix montant dans les aigus plus que d'ordinaire. Répète-moi ça ! »
Zuko venait de lui confesser l'impensable alors qu'elle le pressait de questions pour savoir pourquoi il ne sévissait pas contre les manifestations anti-colons qui se multipliaient en ville.
– J'ai offert au Sage le pouvoir de contrôler d'éventuelles dérives du Seigneur du Feu… Ils ont un droit de veto sur un certain nombre de lois et peuvent demander mon abdication si je prends des mesures allant contre les droits fondamentaux des citoyens, ou contre l'ordre moral, répéta-t-il docilement sans la regarder. J'ai fait cela...parce que je ne voulais pas que l'un de mes descendants puisse devenir comme Ozai...ou que je devienne comme lui.
– Rassure-moi, Zuko. Cette réforme n'a pas été inscrite dans la Constitution ? »
Zuko n'avait pas répondu.
Encore maintenant, Azula éprouvait le besoin de se frapper le front quand elle y pensait. Stupide Zuzu avec son cœur tendre de jeune fille !
«Pourquoi ne pas directement proposer au peuple d'élire lui-même le prochain Seigneur du Feu ? avait-elle éclaté d'un rire sans joie en le frappant sur le bras. Tu as cédé notre pouvoir pour de stupides idées philosophiques auxquelles tu ne crois même pas!
– Je le regrette, d'accord ? Arrête de m'accabler avec ça et de tout caricaturer ! Père s'en est suffisamment chargé comme cela. Ce qui est fait est fait. Je- je n'avais pas prévu que les choses prendraient une telle tournure, d'accord ?
– Comment as-tu pu faire une chose pareille sans me consulter ? J'avais le droit de savoir ! Je suis ton héritière !
– Tu ne l'étais plus à l'époque ! rugit-il.Tu étais...tu étais…
– J'étais quoi ? Vas-y, dis le ! le pressa-t-elle, de vraies larmes dans les yeux cette fois.
– Non… Ne me fais pas dire…
– La princesse déchue ? Ton ennemie ? Une cinglée ? Un cas désespéré ? Tu me haïssais, alors dis-le ! »
Zuko qui s'était contenu tout ce temps laissa soudain échapper de sa main qu'il tenait fermée en poing une orbe de feu incandescente qui explosa contre le mur, renversant un guéridon orné d'un vase ancien. Le tout prit feu sous leurs yeux et d'un geste de la main, Azula fit disparaître les flammes. Quand elle se retourna, Zuko avait filé.
Comme toujours, c'était à Azula de réparer ses erreurs. Depuis cet aveu, elle avait employé toute son intelligence à réfléchir à un moyen de diminuer la part inimaginable de pouvoir que son idiot de frère avait naïvement concédée à ces vieux décatis. En vain jusqu'à maintenant.
Cette scène avait eu lieu trois jours plus tôt. Le soir même, Zuko était revenu la voir et la dispute s'était oubliée dans des étreintes affectueuses et des excuses grandiloquentes. Pourtant, une vive tension persistait entre eux. Mais cet après-midi, elle avait d'autres projets pour eux. Elle aussi était lassée de leurs interminables disputes et avait besoin d'une trêve. Un peu de détente leur ferait du bien.
« S'il-te-plaît Zuzu. Après tous ces efforts dans la salle de rééducation, j'ai peur de me réveiller pleine de courbatures si je ne me délasse pas avant. Un massage me ferait du bien. Tu veux bien m'emmener au spa royal s'il-te-plaît ? »
Elle assortit sa demande d'un regard suppliant qu'elle espérait parfaitement irrésistible et n'oublia pas de poser sa main autour du poignet de Zuko. Son frère émit un soupir et répondit :
« Bon d'accord. Mais promets-moi d'aller te reposer après cela.
– Tout ce que vous voulez, Seigneur du Feu. »
Elle s'assura que Zuko ne puisse pas voir le sourire qui gagnait ses lèvres. Elle ne pouvait espérer mieux que l'intimité des bains royaux pour convaincre son obstiné de frère qu'il n'y avait rien de mal à passer un peu de temps seul à seul avec sa petite sœur. Il serait peut-être plus influençable après un massage aux huiles essentielles. Peut-être oserait-elle lui demander de lui prodiguer le sien ? Un frisson de plaisir parcourut tout son corps à cette idée et elle sentit ses joues s'empourprer. Non. Jamais elle n'aurait l'audace… Avec un peu de vin, peut-être ? Mais Zuko était pire que Taïma. Il surveillait étroitement tout ce qui entrait dans la chambre d'Azula et l'alcool lui était strictement interdit.
Peu importe. Elle trouverait bien le moyen de faire rester Zuko. Un massage était une bonne occasion de dévoiler sa peau d'ivoire et elle savait que son frère n'y serait pas insensible. Les hommes sont un peu idiots quand il s'agit de cela, n'est-ce pas ?
Elle ne se rappelait plus très bien qui lui avait appris cela. Était-ce Li et Lo ? Ty Lee ? Ou encore...
Zuko la poussait à présent dans un long corridor dont les murs étaient garnis d'immenses glaces au cadre doré et ouvragé,. Tournant la tête vers l'une d'elles, elle aperçut le reflet d'Ursa. Sa mère réapparut dans chacun des magnifiques miroirs, secouant la tête de gauche à droite, un air de profonde déception imprimé sur ses traits aux contours presque effacés. À chaque fois, sa silhouette paraissait plus lointaine mais le volume de sa voix augmentait tandis qu'elle déversait sur sa délurée de fille une pluie de reproches.
Le sourire d'Azula s'effaça. La ruse et les manigances ne suffiraient pas à lui garantir un moment en tête à tête avec son frère. Ou alors, il faudrait qu'elle trouve le moyen de duper son propre esprit.
La bougie vacillait dans son petit globe de verre. Un courant d'air soulevait parfois les parchemins entreposés sur le petit bureau en chêne dur. Du dehors paraissaient les bruits de la rue : le roulement des charrettes qui passaient devant la fenêtre laissée entrouverte, le martèlement des sabots de la police-montée, les rires des passants, des bribes de conversation dont il ne percevait qu'une partie.
Il aimait se poster là dans la journée et écouter ces fragments de vie. Il se plaisait à reconstituer l'histoire de ces gens à partir de ces morceaux épars. Il imaginait la raison d'une dispute quand deux voix s'élevaient au-dehors, ou se demandait si ce jeune homme pressé à l'air naïf allait retrouver sa fiancée au coin de la prochaine rue.
Tout le jour, Kojiro restait dissimulé dans l'ombre, derrière les persiennes d'où il pouvait voir sans être vu. Il se nourrissait du spectacle de cette vie foisonnante qui se déroulait sous son œil unique comme les petits dessins sur ces sortes de jouets optiques qui le fascinaient tant, enfant. Quand on faisait tourner le petit tambour dans sa main et que l'on regardait à travers les fentes découpées sur sa surface, une succession d'images fixes donnaient l'illusion du mouvement et le petit personnage semblait s'animer comme par magie.
Ainsi observer les passants dans la rue donnait-il à Kojiro l'impression de percer un secret, de découvrir une histoire, de capturer des tranches de vie. Il le fallait bien puisque la sienne ne lui appartenait plus.
Il fallait rester bien caché, ne pas se montrer. Ne pas imposer aux autres le désastre qu'était son visage.
Kojiro ne s'était regardé qu'une fois. À la faveur de la nuit, profitant de l'absence de son père, il s'était rendu dans la salle de bain qui jouxtait la chambre du Commandant. C'était la seule pièce dans laquelle les miroirs n'avaient pas été retirés.
La vision que lui avait renvoyé la glace était indescriptible. Kojiro n'avait même pas crié. Seul un sourd gémissement étouffé, plus proche du gargouillement que de la plainte, avait transpercé le silence de mort qui emplissait la salle.
Kojiro était retourné à pas furtifs dans son lit et s'y était roulé en boule, dissimulé sous ses draps.
Le lendemain, en rentrant, son père trouva le bandage recouvert de pus et de croûtes au pied de la cuve en pierre au-dessus de laquelle il était venu se rafraîchir le visage. Il essaya de faire parler son fils, en vain.
Dire que Kojiro parlait était d'ailleurs une affirmation présomptueuse. De nombreux sons provenaient de la bouche du garçon : des hoquets, des borborygmes, des glapissements mouillés. Et ces inspirations et ces exhalaisons, semblables au ronronnement d'une machine alimentée au charbon ou à la vapeur. Son souffle rauque et guttural, ce bourdonnement qui parfois couvrait les paroles de son père ou des guérisseurs qui venaient à son chevet. Pour les entendre, Kojiro devait retenir son souffle et il lui arrivait de s'étouffer dans ses propres mucosités. L'air s'engouffrait par vagues à travers la béance qui avait été autrefois un nez droit et bien taillé. Kojiro y portait parfois la main, fasciné par cet orifice saugrenu qui avait transformé un visage autrefois avantageux en un champ de mines. De même il caressait du bout des doigts l'os de sa pommette qui transparaissait sur sa joue. Le contact doux et lisse de l'os avait quelque chose de magnétique et il y revenait sans cesse comme la main de l'amant au sein de sa maîtresse.
Les femmes…
Agni, ce que les femmes lui manquaient ! Savoir qu'il serait privé à tout jamais de leur douceur, de leur parfum enivrant et de leur sensualité le portait fréquemment au comble du désespoir. Il était ironique que ce qu'il regrettait le plus de son ancienne vie soit précisément ce qui l'avait plongé dans ce calvaire. S'il avait su que la dernière femme qu'il caresserait serait la cause de son tourment. On lui avait tout dit. Hikaru était venu. Ainsi que l'Avatar et sa compagne, la maîtresse de l'eau. Il savait qui avait fait de son visage un champ de ruines et de sa vie un tourment sans fin.
Le démon aux flammes bleues portait finalement bien son nom. Si Kojiro ne gardait qu'un souvenir confus des détails de cette soirée funeste, les yeux d'ambre et les lèvres rouges de sa tortionnaire hantaient ses nuits.
De son agression, il ne restait presque plus rien. Que quelques fulgurances qui traversaient sa mémoire comme un éclair, visions épouvantables et souvenirs d'une douleur affolante et irrationnelle.
Kojiro ne supportait plus que l'on approche une flamme de son visage. Malgré les sermons de son père, il se refusait même à émettre la plus petite étincelle. Kojiro ne voulait plus entendre parler de feu.
Les rayons du soleil qui passaient à travers les interstices des persiennes était toute la lumière qu'il pouvait tolérer. Il portait souvent un masque pour reposer son œil toujours ouvert que ne protégeait plus que ce léger voile presque transparent qui avait été sa paupière. Mais le cordon qui permettait au masque de tenir autour de sa tête rongeaient sa chair meurtrie et il fallait parfois l'enlever plusieurs heures pour laisser à sa peau molle et suintante le temps de se remettre de la brûlure causée par l'élastique.
Les nuits auraient dû être un soulagement. Mais c'était sans compter sur les crises d'apnées qui le tiraient d'un sommeil agité et le forçaient à se redresser brusquement pour cracher une substance visqueuse et verdâtre, sorte d'agglomérat de ce qu'il inspirait involontairement par l'orifice béant au centre de son visage.
À cause de tout cela, Kojiro préférait rester seul dans l'obscurité. Les guérisseurs lui avaient de toute façon formellement interdit de s'exposer au soleil tant que les tissus n'auraient pas cicatrisé. Et même après cela, il lui faudrait attendre encore des années pour pourvoir sortir sans risque. Il n'en avait guère envie d'ailleurs. Le regard terrifié d'Hikaru, les yeux fuyants de Père étaient déjà assez.
Il n'y avait que cette guérisseuse, Katara, qui le regardait en face. Il ne voyait dans ses yeux saphir qu'une bienveillante compassion. Kojiro s'était mis à penser à elle à toute heure de la journée et l'évcocation de sa peau cuivrée l'aidait à traverser les nuits ténébreuses. Il avait glané assez d'informations pour savoir qu'elle était la fiancée de l'Avatar. Et une amie du Seigneur du Feu : le frère de celle qui lui avait fait cela.
Père lui avait parlé de l'accident qui avait presque coûté la vie à la princesse, quelques semaines après son agression. Elle avait survécu et d'après lui, son visage était intact. Leurs informateurs leur décrivaient les progrès de la jeune femme qui chaque jour retrouvait un peu plus ses forces. Ils leur avaient dit aussi la sollicitude de son frère qui la couvait des yeux et interdisait à quiconque de s'approcher d'elle.
Avant que Kojiro ne reprenne conscience, on avait emprisonné la princesse mais son accident semblait l'avoir absoute de tous ses péchés.
On la disait folle au moment où elle avait attaqué Kojiro, atteinte par une maladie de l'esprit qui lui avait fait perdre tout discernement. Ce n'était pas sa faute, il fallait comprendre.
Mais quand Katara lui avait parlé, il n'avait pu s'empêchait de lire le même doute dans ses yeux où dansaient les vagues des mers du sud.
Père était devenu fou furieux. Et si Kojiro avait pu parler en émettant autre chose que des sons glaireux inintelligibles, il lui aurait demandé de se calmer.
Kojiro était parfois exaspéré de la colère qui bouillonnait sans discontinuer chez son père. Il aurait préféré qu'il reste près de lui plutôt que de le voir s'agiter, quitter la maison la nuit pour quelque réunion secrète. Kojiro pensait savoir ce que faisait Père au-dehors après le couvre-feu. Il craignait qu'il ne se mette en danger pour lui. Une cause perdue.
Kojiro poussa un profond soupir et il sentit quelque chose d'humide vibrer sur les muqueuses qui tapissaient sa gorge et un goût un peu acide se répandit sur sa langue au bord brûlé.
Il se pencha en avant pour cracher dans la bassine posée sur ses genoux devenus cagneux à cause du manque d'exercice et d'une alimentation insuffisante. Et c'est là qu'il aperçut entre les persiennes la diligence garée devant la maison d'en face.
Il s'approcha de la fenêtre et vit un homme en sortir. Il était grand et vêtu d'une cape à capuche qui le dissimulait entièrement. Avec la discrétion d'un ninja, il parcourut les quelques mètres qui le séparaient de la maison du Commandant et disparut du champ de vision de Kojiro. Il ne sut pourquoi mais quelque chose l'avait frappé chez cet homme, comme une réminiscence.
On frappa alors trois coups à la porte.
Son père était à la maison pour une fois et Kojiro l'entendit ordonner au domestique que l'on ouvre.
La poitrine de Kojiro se soulevait à un rythme anormal et sa respiration rauque couvrait totalement le son de leurs paroles. Il sursauta quand on ouvrit doucement la porte de sa chambre et que son père entra, suivi de l'homme à la haute silhouette qu'il avait vu au-dehors.
« Kojiro, annonça le Commandant, tu as de la visite. »
Paniqué, Kojiro tourna la tête à la recherche d'un drap, d'un vêtement, n'importe quoi qui puisse couvrir la bouillie de son visage et la dissimuler aux yeux de l'inconnu.
Comme s'il avait lu dans ses pensées, l'homme s'approcha de lui et parla d'une voix douce et mélodieuse.
« N'aie pas peur Kojiro. Tu n'as pas à te cacher de moi. Ton père m'a raconté ce qui t'était arrivé. Je suis là pour t'aider.
– Je vous laisse », dit Tsuneo en quittant la pièce à reculons.
Kojiro leva la tête vers lui dans une expression suppliante mais son père sortit sans le regarder.
Il se trouva seul avec l'homme.
Celui-ci resta silencieux et fit le tour de la pièce. Kojiro l'observa tandis qu'il déambulait à travers la chambre et examinait les tableaux qui ornaient les murs. Il s'arrêta devant un portrait de Kojiro, commandé quelques mois auparavant et qui le représentait dans sa tenue de soldat. Tsuneo avait fait commander ce portrait quand Kojiro avait reçu son premier uniforme militaire.
Le garçon à la fière allure représenté sur la toile n'avait rien à voir avec la misérable créature à demi-humaine qui attendait, silencieusement assise sur une chaise, le cœur battant d'appréhension.
« Quelle tristesse… murmura l'inconnu pour lui-même mais à voix suffisamment haute pour que Kojiro l'entende. Un si beau garçon… Avec un avenir si prometteur. »
Kojiro gardait le silence. Quelque chose dans cette voix, dans cette démarche, dans la manière dont l'homme se mouvait et s'exprimait lui était inexplicablement familier.
L'homme se tourna d'un coup pour lui faire face et Kojiro baissa aussitôt les yeux sur ses jambes amaigries. De son œil valide, il voyait les bottes de cuir qui se rapprochaient de son fauteuil.
« Kojiro. Je suis venu te trouver car j'ai entendu ton histoire. Je ne peux supporter d'entendre qu'un fils du feu tel que toi ait à endurer de telles souffrances. Et cela par la faute d'une famille de traîtres à leur race. »
Ces mots firent résonner quelque chose dans la mémoire de Kojiro et il remua légèrement sur sa chaise, mal à l'aise.
L'étranger s'agenouilla alors près de lui et avança son visage suffisamment près du sien, comme pour le forcer à le regarder dans les yeux.
« Regarde-moi…
– Non ! Non ! Ne regardez pas. Je suis horrible ! »
Telles étaient les paroles qu'il avait voulu prononcer. Mais ce qui s'échappa de ses lèvres enflées ressemblait plutôt à : « Won, ne 'ega'ez -ha. Ah i ho'ib »
– Non Kojiro. Tu ne l'es pas. À nos yeux, tous les fils d'Agni sont beaux et méritent d'apparaître à la lumière. Ton heure est venue. Ton père est venu nous trouver. Ton calvaire prend fin à partir de ce jour. Tu quitteras les ténèbres auxquelles le démon aux flammes bleues t'a condamné et tu resplendiras à la lumière. »
Les Fils d'Agni… Maintenant Kojiro savait où il avait entendu cette voix mélodieuse et séduisante. La dernière fois, il l'avait entendue haranguer une foule surexcitée depuis une estrade montée sur des tréteaux, un beau soir d'été.
Et à peine une heure plus tard, il… il…
« 'on ! 'Aissez'moi t'anqui ! vociféra-t-il alors que l'homme plaçait un doigt sous son menton pour l'obliger à lever les yeux vers lui.
« Mon cher Kojiro, mon garçon. Sais-tu ce que je vois quand je te regarde ? »
Un monstre. Une créature abominable au masque de ténèbres. Quand Kojiro repensait à son nouveau visage, celui-ci se superposait à l'image de l'horrible goule qui le terrifiait tant dans le bestiaire qu'il aimait regarder, enfant.
« Je sais ce que tu penses, mon enfant. Tu crois que ta place est ici, dans l'ombre, à l'écart de tes semblables. Mais tu te trompes. La chose terrible qui t'est arrivé te semble un calvaire aujourd'hui. Mais c'est une bénédiction. Un don du ciel qui transcende la tragédie individuelle. Je sais que tu as beaucoup souffert, mais Agni m'a envoyé ici pour te montrer ton véritable destin. Et quand tu le connaîtras, tu remercieras les dieux qui t'ont mis sur la route de ce démon d'amoralité. »
Quelles absurdités cet homme débitait-il ? Le destin ? Un don du ciel ? Ce n'était pas lui qui crachait des glaires la moitié du jour dans une bassine, ou qui devait se cacher dans l'obscurité pour que le soleil ne brûle pas sa peau, ni son œil unique.
« Tu ne vois pas encore la beauté de ta destinée. Je suis là pour te la montrer. Les Fils d'Agni ont besoin de toi Kojiro. Tu dois accepter de laisser partir l'ancien Kojiro, le beau garçon destiné à suivre la carrière prestigieuse de son père. Et revêtir ta réelle identité pour être digne du rôle qu'Agni te destine. »
Kojiro baissa brutalement le menton pour se soustraire au regard de l'homme.
« Non, vous vous trompez. Je suis un monstre. Ma vie est finie. Personne ne veut d'un monstre.»
Comme si un souffleur lui avait répété à l'oreille les paroles inintelligibles de Kojiro, l'homme sembla comprendre tout ce qu'il disait. Son père lui-même lui demandait parfois de répéter, l'air gêné, si bien que Kojiro avait pris l'habitude d'écrire ce dont il avait besoin sur un carré d'ardoise qu'il gardait toujours à sa portée et auquel était attachée une craie.
« Tu te trompes, répéta l'homme en posant sa main sur la joue d'écorché de Kojiro, indifférent à l'horrible bruit de succion qui en résulta. Par cette épreuve, Agni t'a dépouillé de tes artifices et de tout ce qui te reliait de façon superficielle au monde des hommes. Te voilà tel que tu es vraiment et tel que tu devais être. Tu es l'élu que nous attendions, mon garçon. »
Kojiro releva les yeux et pour la première fois, regarda l'homme qui lui faisait face. Des yeux creux cernés de liserés d'or en forme d'amande le fixaient dans un visage de cire. Les mots s'échappaient de ses lèvres closes et deux orifices taillés là où auraient dû se trouver les narines, laissaient passer l'air derrière le masque.
Kojiro ne comprenait rien aux inepties qu'ânonnait ce fanatique masqué mais quelque chose dans sa voix était étrangement réconfortant. Et dans les mots enrobés de miel qu'il prononçait, Kojiro ne pouvait s'empêcher de ressentir un je ne sais quoi qui ressemblait à…
l'espoir.
« Qu'est-ce que vous voulez ? baragouina-t-il en faisant un effort conséquent pour articuler correctement.
L'homme fit mine de ne pas l'avoir entendu et poursuivit :
« Ta vie d'avant t'aurait apporté bien des satisfactions : une carrière ambitieuse, une belle épouse, des fils aussi valeureux que toi… Mais ta nouvelle vie…Oh ! Kojiro ! Tu ignores encore combien tu es important. Tu sauveras la Nation du Feu. Par tes efforts et ta pureté, tu la nettoieras de l'engeance qui la ronge. »
Kojiro aurait voulu lui dire qu'il ne croyait pas en ces fadaises, ni en ces théories raciales absurdes mais il ne s'en sentait pas la force. Les quelques questions qu'il était parvenu à poser l'avaient déjà éreinté et il sentait sa gorge devenir aussi sèche qu'un désert aride. Et puis, il devait y avoir une raison pour que Père lui présente cet homme mystérieux. Le Commandant Tsuneo était connu pour ses idées progressistes. N'était-il pas l'un des deux héros qui s'était opposés au projet impérialiste d'Ozai, qui avait rejeté ses vues suprématistes ?
Alors il se saisit de son carré d'ardoise et inscrivit ce mot à la craie : « Comment ? »
Il devina que sous son masque, l'homme souriait. Il se leva et contourna la chaise où était assis Kojiro. Il sentit deux mains se poser sur ses épaules.
« Tu n'auras presque rien à faire, mon ami. Nous serons ta famille. Nous serons tes amis. Nous serons la société à laquelle tu as été si odieusement arraché. En nous rejoignant, tu auras tout ce que ton cœur peut désirer. Tu seras puissant. Tu auras la richesse. La foule t'adulera et érigera des statues à ta gloire : Kojiro le Martyre de l'Ordre Nouveau !Tu auras tout cela et bien plus encore. Tu n'auras peut-être plus ton ancien visage mais le nouveau sera connu de tous : aimé de nos alliés, craint de nos ennemis. Tu étais jadis un beau garçon, c'est vrai. Mais ton nom et ton visage se confondaient dans la foule. Ce n'était qu'une seconde peau, qu'un masque. Le visage que tu arbores maintenant est ton vrai visage et c'est avec celui-ci que tu accompliras ta destinée. En restant ici, tu te condamnes à une vie de ténèbres et de solitude. Mais si tu nous rejoins, tu brilleras à la lumière. Agni accueille en son sein les pauvres et les déshérités.
Nos enseignons à nos disciples les vertus de la modestie et de la simplicité et réprimons les travers que sont la vanité et l'orgueil. Des vices que cultive la royauté dans notre belle nation. »
À l'évocation du Seigneur du Feu et de la harpie qui lui servait de sœur, Kojiro releva la tête et inspira involontairement une bouffée d'air qui, en s'engouffrant brutalement dans sa gorge, déclencha une quinte de toux incontrôlable. Très vite la toux se mua en grognements de rage et de frustration, puis en longues plaintes qui résonnèrent dans la chambre plongée dans l'obscurité.
« Cela ne te fait donc rien de passer tes journées ici, dans le noir à regarder passer les gens, pendant qu'elle dort dans des draps de soie au palais ? De savoir que son frère, non content de l'avoir libérée de la prison où elle devait rôtir, l'accueille dans son lit et la caresse chaque nuit ? »
Des larmes échappèrent de l'œil unique de Kojiro. Certaines ruisselèrent sur ses joues, bloquées dans leur course par les sillons que formait sa peau carbonisée. D'autres chutèrent dans le trou où aurait dû se trouver son nez et finirent leur course dans sa gorge, déclenchant une nouvelle quinte de toux.
L'homme raffermit sa prise sur l'une de ses épaules et posa une main sur la joue ruinée de Kojiro. Puis il susurra d'une voix caressante emplie de sollicitude :
« Kojiro, mon pauvre ami. Agni a entendu tes souffrances et tu seras récompensé pour le courage que tu as montré. Dis-moi, ajouta-t-il de sa voix enjôleuse en serrant sa main comme une serre autour de son épaule, que serais-tu prêt à faire pour tenir à nouveau une femme dans tes bras ? »
Le sommeil, encore une fois, fuyait Zuko. Il avait changé cent fois de position, retapé ses oreillers, essayé de lire mais rien n'y faisait. Chaque fois qu'il tentait de vider son esprit, ce dernier le ramenait dans la petite salle de massage du spa royal où, cet après-midi encore, il avait conduit Azula.
Quand il fermait les yeux, il ne voyait que sa peau d'ivoire et ses cheveux d'ébène qu'elle ramenait sur une épaule afin de permettre aux masseuses de délasser ses muscles endoloris par l'effort.
C'était devenu leur rituel depuis quelques jours. Après chaque séance de rééducation marquée par des progrès fulgurants, il amenait sa sœur jusqu'aux bains royaux où elle commandait un massage qu'elle recevait des mains délicates des meilleures masseuses du royaume. Zuko restait assis en face d'elle et ils discutaient agréablement de choses et d'autres, évitant les sujets houleux, soucieux d'éviter les disputes, profitant de la présence des serviteurs qui les obligeait à une certaine retenue.
Zuko savait que le reste de ses amis et son oncle ne partageaient pas les convictions d'Azula et il était fatigué de devoir composer entre les valeurs humanistes et utopistes de l'équipe de l'Avatar et les vues de plus en plus impérialistes d'Azula.
Certainement, ses amis et Oncle Iroh auraient désapprouvé les discussions qui le retenaient chaque soir dans le salon de la famille royale ou dans les appartements de sa sœur.
Ici au moins, il pouvait se contenter d'être le frère d'Azula et profiter de sa compagnie.
Zuko refusait de penser à ce que les autres auraient dit. Il en avait assez qu'on le mette en garde contre son influence. Il aimait sa sœur et bien que leurs idées divergent souvent, il se réjouissait de passer du temps avec elle.
Le spa était l'endroit idéal pour passer du temps en tête à tête. La présence constante des serviteurs coiffeurs et masseurs en ces lieux les préservait des ragots et c'était une bonne occasion de profiter, en toute légitimité, d'une vue plutôt plaisante quand la serviette blanche posée sur le corps d'Azula laissait deviner toutes ses courbes.
Un homme a le droit de rêver. Mais il a aussi le droit de regarder, non ?
Une fois Zuko avait également commandé un massage mais il n'avait pas renouvelé l'expérience. Les regards noirs qu'Azula lançait à la jolie masseuse qui s'occupait de lui l'avaient dissuadé d'en demander plus. Autant que le silence boudeur qu'elle lui avait opposé dans les heures qui avaient suivi.
Cet après-midi encore, elle avait insisté pour qu'il reste auprès d'elle. Elle était de mauvaise humeur. Bien qu'elle eût fait des progrès extraordinaires au cours des derniers jours, la séance quotidienne ne s'était pas très bien passée. Se tenant à l'aide de béquilles, elle avait chuté plusieurs fois et il avait fallu mettre un terme à la séance un peu plus tôt que de coutume.
Habituellement, Azula retirait ses vêtements dans l'anti-chambre, aidée de deux servantes et le rejoignait dans la salle de massage, vêtue d'un long peignoir de lin blanc qu'elle retirait pudiquement derrière un paravent tendu entre elle et son frère.
Pour une obscure raison, ce jour-là, elle avait dérogé à ce petit rituel et après avoir refusé d'un geste le paravent qu'une servante portait à bout de bras, elle s'était déshabillée devant lui. Zuko avait précipitamment fermé les yeux pour ne rien voir quand, sans prévenir, elle avait commencé à retirer sa ceinture et le peignoir qui la recouvrait.
Incapable de s'endormir, Zuko se repassa une nouvelle fois le déroulement de cette séance.
– Tu peux rouvrir les yeux. »
Obéissant, Zuko ouvrit les paupières pour découvrir sa sœur allongée sur sa table de massage, sur le ventre, une simple serviette blanche recouvrant une partie de son dos jusqu'à mi-cuisses.
La masseuse, debout à côté d'elle, enduisait ses mains d'une lotion parfumée et les frottait l'une contre l'autre.
Comme hypnotisé, il la regarda poser ses mains sur les épaules blanches d'Azula et commencer son massage.
Zuko était en train de se demander ce que cela ferait d'être à sa place quand la voix d'Azula s'éleva, forte et claire dans la petite pièce parfumée d'encens.
« Ah ! Petite maladroite ! Soyez un peu attentive à ce que vous faites ! Vous venez d'appuyer sur un nœud !
– Pardonnez-moi, Princesse, je ne… »
Azula se redressa sur un coude, la serviette glissa et dévoila accidentellement un sein éclatant qui se terminait par un bouton de rose délicat. Zuko détourna vivement le regard, les joues virant immédiatement au rouge vif.
– Vous pardonner ? À vous seule vous êtes mieux payée que la moitié des masseurs de ce fichu pays et tout ce que vous trouvez à dire quand vous faites mal à votre princesse, c'est « Pardonnez-moi » ? Qu'ai-je fait pour mériter des serviteurs aussi incompétents ? »
La masseuse, une jeune femme de petite taille aux cheveux noués dans une longue queue de cheval, recula d'un pas et, la tête baissée, des larmes roulant sur son visage rond, joignit les mains sur ses cuisses dans une attitude de contrition.
« Je vous en prie, Princesse, je- je vais faire de mon mieux pour vous servir…
– Me servir ? J'ai fait une chute de plus de dix mètres ! Les os de mon bassin et mes côtes se sont brisés ! Je ne peux toujours pas marcher sans l'aide d'une canne. Et je devrais accepter qu'une vulgaire masseuse aux doigts gourds sabote la seule chose qui me fasse me sentir mieux, simplement parce qu'elle m'en supplie ? Zuko, comment peux-tu laisser passer…
– Ça suffit ! intervint Zuko qui craignait depuis le début de cette scène affligeante que son nom soit prononcé. Vous, sortez d'ici ! ordonna-t-il à la jeune masseuse, sur un ton plus cassant qu'il ne l'avait voulu. Vous n'avez rien à craindre. Ma sœur est simplement fatiguée. Ses efforts lors de sa séance de rééducation l'ont épuisée. Veuillez l'excuser.
– Bien sûr, votre Majesté, je vous remercie pour votre clémence. Encore toutes mes excuses, Princesse.»
Après une rapide courbette, elle fila sans demander son reste. Zuko la suivit des yeux tandis qu'elle se dirigeait à pas rapide vers l'antichambre.
Dans son dos il sentait le regard de braise d'Azula et aurait juré que l'atmosphère de la pièce venait d'augmenter de quelques degrés ainsi que la quantité de vapeur émanant des pierres chaudes au sol, comme si l'on venait de verser dessus un sceau d'eau complet. Finalement, il se retourna, un peu anxieux de ce qui allait suivre.
Azula le considérait, abasourdie, sa bouche à moitié ouverte trahissant la plus vive indignation.
« Comment – balbutia-t-elle, comment oses-tu me contredire devant mes serviteurs ? Tu ne peux pas me décrédibiliser ainsi ! Épuisée ? Tu lui as dit que j'étais épuisée ? Je suis le plus grand maître du feu de ma génération ! Je maîtrise les techniques de sept arts martiaux. Et un simple séance de marche à pied m'aurait épuisée ? Que vont-ils croire mainte-
– Ce ne sont pas tes serviteurs, Azula, coupa-t-il sèchement. Ce sont les miens. Je n'ai qu'un mot à dire et l'accès au spa te sera défendu ! »
Azula referma la bouche mais son regard devint plus ardent que jamais et Zuko fut soudain heureux qu'elle ait provisoirement perdu sa faculté à lancer des éclairs mortels.
Il s'avança en s'efforçant de garder une attitude royale. Azula le regardait approcher, ses épais cheveux noirs ramenés sur une épaule dégageaient sa gorge qui laissait voir la naissance de ses seins pressés contre la table. La serviette était légèrement remontée et Zuko pouvait apercevoir le haut de sa cuisse.
En passant, il prit entre ses doigts le pan de la serviette et le replaça sur la cuisse, à une hauteur qu'il jugeait plus convenable.
Azula ne disait toujours rien mais ses joues avaient pris une teinte cramoisie qui jurait avec la blancheur de sa peau.
Zuko tira une chaise et l'approcha de la table de massage afin de faire face à sa sœur qui évita son regard, visiblement furieuse.
« Je veux que tu traites mes serviteurs correctement, Azula, dit-il sur un ton plus doux mais toujours ferme. Je suis sérieux. »
Il tendit la main pour saisir celle d'Azula qui pendait sur le côté mais elle la lui refusa et la retira vite.
« Azula, tu ne comprends pas. Je dis ça pour ta sécurité. Tu as déjà failli être empoisonnée par l'un d'eux...
– Au cas où tu ne l'aurais pas compris, ce n'était pas un vrai serviteur, mais un espion embauché par nulle autre que ta chère épouse dans le but de me nuire ! Crois-moi Zuko, j'ai appris ma leçon ! Et si je dois me méfier de quelqu'un, c'est vers le sommet de la pyramide que je lèverai les yeux. »
Ses yeux d'ambre lançaient des éclairs à Zuko et il se sentit soudain idiot :
« Azula… je… je
– Si tu n'avais pas été aveuglé par ton amour pour cette traîtresse, rien de tout cela ne serait arrivé ! Ne me fais pas porter la responsabilité de tout ce qui va de travers dans notre nation quand c'est toi et ton manque cruel de discernement qui sont responsables de ce carnage ! »
Elle avait raison bien sûr mais cela lui coûtait trop de l'admettre. Depuis qu'elle acceptait à nouveau de lui adresser la parole, Azula ne lui épargnait rien et ne cessait de pointer ses erreurs et ses incohérences. Il avait accepté certains de ses conseils. Le couvre-feu et l'interdiction des rassemblements de plus de dix personnes en ville avaient été instaurés après qu'elle lui en eut soufflé l'idée.
Il fallait reconnaître que cela avait ramené un peu de calme et de sérénité en ville et les actes criminels s'en étaient trouvés diminués de moitié d'après les rapports fournis par les forces de police.
Pour autant, ce n'était guère agréable de s'entendre dire, à longueur de journée, que l'on faisait les choses de travers, et ce par une fille qui avait failli tuer trois personnes simplement parce qu'elles l'avaient offensée. Malgré les preuves réunies contre Mai et son mystérieux serviteur, tout le monde n'avait pas été aussi prompt que lui, Ty Lee et Taïma à excuser les actes de la princesse.
Malgré tout, Zuko préférait mille fois cette Azula à sa version boudeuse. Au moins était-il récompensé par des gestes affectueux et tendres quand ils ne se disputaient pas.
La voix autoritaire d'Azula rompit à nouveau le silence.
« Je suis venue ici pour recevoir un massage et tu as renvoyé la seule masseuse disponible. Mes muscles sont toujours aussi raides, pourtant.
– Désolé. Je vais faire venir quelqu'un d'autre, annonça-t-il en esquissant le geste de se lever.
– Non ! Reste ici, ordonna-elle d'un ton impérieux. Je n'ai pas envie d'avoir affaire à ces incapables. Tu peux tout aussi bien t'occuper de moi. Après tout, ce ne sera pas pire qu'avec cette pauvresse aux doigts d'éléphant. »
Zuko rougit furieusement.
« Je ne pense pas que ce soit une bonne idée, Az…
– L'huile est sur la table », dit-elle en pointant du doigt le petit meuble garni de flacons variés. Puis elle enfouit sa tête dans le trou ménagé à cet effet dans la table de massage, lui signifiant ainsi qu'il était inutile de discuter.
Une vague d'émotions confuses déferla violemment sur Zuko. Cette demande formulée sur le ton de l'ordre avait beau paraître inappropriée, le ton qu'elle avait employé ne souffrait aucune contestation. Cela ne ressemblait pas vraiment à une invitation à partager un moment intime et sensuel. Il pensa donc qu'il pouvait donc s'exécuter sans risque.
Après tout, ce n'était pas criminel d'aider sa jeune sœur à se sentir mieux. Elle n'en aurait pas eu besoin s'il n'avait pas fait preuve d'une sottise sans commune mesure au cours des derniers mois.
Il poussa un soupir délibérément audible pour faire comprendre à Azula qu'elle lui infligeait là une pénible corvée. Il ne voulait pas la laisser croire une minute qu'il lui obéissait pour d'autres motifs que celui d'avoir la paix. C'était déjà faire preuve d'une trop grande soumission à l'égard de cette capricieuse.
Il se leva donc et enduisit ses mains de la lotion odorante que la masseuse avait utilisée tout à l'heure et les frotta l'une contre l'autre.
Zuko n'avait jamais massé personne à l'exception de Mai qui avait bien vite appris à ne plus formuler ce genre de demande. Il se souvint comme ils riaient parfois tous les deux de ses piètres compétences dans ce domaine et craignit un moment de causer l'ire d'Azula s'il se montrait incapable de la satisfaire.
Il se pencha au-dessus d'elle et leva les deux mains au-dessus de son dos à demi-nu et attendit.
« Eh bien ? Tu ne vas pas rester là comme un empoté ? Qu'attends-tu pour commencer ? s'impatienta sa sœur en poussant un grand soupir de frustration.
Zuko obéit aussitôt. Deux semaines de silence et de regards méprisants lui avaient suffi. Il était trop heureux qu'Azula lui parle à nouveau et fasse preuve de tendresse envers lui. Il ne prendrait plus le risque de lui déplaire. Mais il s'était aussi fait la promesse de ne plus tomber dans ses pièges, de rester insensible à ses charmes et à ses tours.
Mais comment tenir cette promesse futile quand son visage se trouvait à seulement quelques centimètres de ses cheveux noirs dont émanait une odeur enivrante de jasmin et quand ses mains goûtaient enfin à la douceur de sa peau de satin ?
« Mmmmh… oui, c'est ça Zuko. », gémit-elle à la seconde où il posa les mains sur ses épaules. Il n'avait pas même commencé à les pétrir qu'elle poussait déjà un profond soupir de contentement.
Très bien, elle voulait jouer à cela. Il lui montrerait qu'il n'était pas dupe. Il allait lui offrir le massage le plus professionnel et le moins sensuel de l'histoire. Il s'assurerait de rester froid et distant et ne céderait pas à la tentation. Il y était déterminé !
Bien sûr, ce fut un échec retentissant. Sa belle résolution fut mise à l'épreuve dès les premières secondes. En y repensant, des heures plus tard dans son lit, il était encore tout en émoi. Quand elle lui avait demandé de baisser sa serviette juste au-dessus des reins pour masser le bas de son dos… Oh, Agni !
« Oui Zuko. C'est parfait, avait-elle approuvé d'une voix chaude en balançant un peu ses hanches. Réchauffe un peu tes mains, s'il-te-plaît. »
Il obéit. Une douce chaleur irradia rapidement de ses paumes et fit fondre la crème qu'il appliquait sur sa peau, tout en faisant rouler ses pouces pour dénouer ses reins. Elle exprimait son approbation par des gémissements de satisfaction et de profonds soupirs.
Il fut soulagé que la position de permît pas à Azula de découvrir la preuve accablante de son excitation.
Les vapeurs d'eau et d'encens les enveloppaient et donnaient à Zuko une agréable sensation de vertige. De drôles de pensées traversaient son esprit. Il se dit par exemple que la table sur laquelle sa sœur reposait était bien chanceuse. S'il avait été à sa place, il aurait lui aussi sentir son ventre et ses seins pressés contre lui.
Zuko restait résolument silencieux, espérant qu'elle interpréterait ce silence comme l'indice d'une indifférence suprême. Il voulait lui montrer qu'il pouvait la toucher ou se trouver proche d'elle sans perdre ses moyens. Il n'était que trop évident qu'Azula le testait et il ne lui donnerait pas cette satisfaction.
« Contrôle-toi, contrôle-toi », pensait-il en appuyant ses mains de chaque côté de sa taille, tirant un peu la peau qui rosissait de manière charmante sous ses doigts.
Finalement, le massage prit fin. Azula avait suffisamment de retenue pour savoir qu'elle ne pouvait décemment pas lui demander de poursuivre plus bas et le libéra.
« Oh, mon cher frère ! Si j'avais su que tu étais un masseur si talentueux, je n'aurais pas perdu toutes ces années à t'expliquer comment être un dirigeant digne de ce nom ! plaisanta-t-elle en passant son peignoir sur son corps dénudé.
Zuko lui tournait le dos, soi disant pour rincer dans la cuve de pierre ses mains enduites de crème et de lotion parfumée. Mais il y resta plus longtemps que nécessaire, le temps de pouvoir se retourner vers elle sans honte.
Il sentit deux bras s'enrouler autour de sa taille et il se retourna brutalement. Un sourire diabolique étirait les lèvres écarlates de sa petite sœur. Avant qu'il ait eu le temps de lui demander comment elle était arrivée là par ses propres moyens, elle agrippa d'une main le col échancré de la tunique de Zuko et leva les yeux vers lui, puis dit sur un ton séducteur :
« J'ignore si ce talent est héréditaire et si j'ai également reçu ce don prodigieux. Mais si tu es intéressé, je serai plus qu'heureuse de m'exercer sur toi. »
Zuko se sentit totalement désorienté par cette soudaine proximité. C'était toujours pareil ! Pourquoi le prenait-elle toujours par surprise ? Il pouvait se contrôler tant qu'il restait maître de la situation, mais pas quand elle arrivait furtivement, comme cela !
« C'est gentil Azula, mais ça ira, merci. Je suis parfaitement détendu.
– Tu es sûr ? dit-elle en posant une main sur sa poitrine, juste au-dessus de son cœur qui battait furieusement contre ses côtes. Tu sembles nerveux. Cela ne me dérange pas du tout de jouer les servantes pour une fois. Tu sais bien que je ferais n'importe quoi pour satisfaire mon roi.
– Azula, parvint-il à articuler en la saisissant doucement par les poignets pour la forcer à s'écarter de lui. Tu- tu me mets mal à l'aise. »
Elle émit un petit gloussement.
« Oh, vraiment ? Pardonne-moi, Zuzu. Je pense que les vapeurs et l'encens me sont montés à la tête. »
Elle fit mine de s'éloigner mais soudain, ses jambes qui semblaient avoir miraculeusement retrouvé leur vigueur, cédèrent sous son poids et elle manqua s'écrouler. Elle se rattrapa juste à temps aux bras que Zuko tendait vers elle.
« Oh...je crois que ton massage a été un peu trop efficace et m'a rendue trop confiante. Tu te rends compte, j'ai marché jusque là, sans mes béquilles !
– C'est...c'est merveilleux, Azula ! déglutit-il. Je vais t'aider à t'asseoir sur ton fauteuil maintenant.
– Oh non, roucoula-t-elle en affectant un petit air dépité. J'espérais profiter d'un bain chaud après cette séance merveilleuse. Je sais qu'il n'est pas convenable pour un homme et une femme de partager un bain, mais comme il n'y a personne, nous pourrions peut-être faire une petite entorse à cette règle, acheva-t-elle d'un air coquin en faisant courir le bout de ses doigts le long de sa poitrine.
– Non, répondit-il un peu plus fermement, rejetant au loin la vision paradisiaque que cette suggestion faisait naître en lui. Je n'ai pas envie d'un bain. Et puis j'ai du travail. Je dois me rendre à une réunion du Conseil maintenant. Ils doivent déjà m'attendre. Je suis désolé, Azula, mais cela devra attendre une prochaine fois. Je te ramène dans ta chambre. »
L'attitude d'Azula avait radicalement changé après qu'il l'eut ainsi éconduite. Son visage se ferma et elle devint maussade. Quand il s'était penché vers elle pour embrasser sa joue au moment de la quitter dans sa chambre, elle lui avait refusé ce baiser, l'humiliant un peu plus aux yeux des dames de compagnie qui attendaient silencieusement que leur roi quitte la pièce pour aider Azula à s'habiller.
« Qu'est-ce que tu regardes, toi, petite idiote ! Avait-elle lancé à une innocente Sanae qui les avait regardés craintivement tout le temps qu'avait duré cette scène de ménage pathétique. Ne reste pas plantée là et amène-moi ma robe ! »
Zuko s'était éclipsé avant que la pauvre adolescente ait pu bredouiller quelque chose. Heureusement pour elle, Sanae était noble, ce qui la sauverait sans doute du courroux de la princesse capricieuse.
Zuko se retourna une nouvelle fois dans son lit, faisant grincer les ressorts de son matelas.
Il ne faisait aucun doute pour lui qu'Azula allait mieux. Son attitude irascible à l'encontre des domestiques en était la preuve irréfutable. Cela ne rendait pas sa mauvaise humeur plus supportable.
Azula en avait assez de rester clouée à son fauteuil et de ne se déplacer qu'avec des béquilles ou une canne, comme une vieille femme. Parfois elle venait assister à son entraînement dans la cour et il lisait une grande frustration se peindre sur ses traits.
Il supposait aussi que tous les efforts qu'elle faisait pour se montrer aimable envers ses amis devait parfois faire déborder toute cette énergie négative qu'elle déversait alors sur d'autres innocentes victimes.
Se sentir rejetée par son frère quand elle essayait activement de le séduire n'aidait pas non plus.
Mais Zuko ne pouvait plus laisser se produire des moments comme celui qu'il avait partagé l'après-midi même avec sa sœur. Il aurait été incapable d'expliquer pourquoi elle était passée si soudainement de son mutisme boudeur à cette attitude versatile qui oscillait entre des moments simplement cordiaux et des instants terriblement ambigus comme cette séance de massage improvisée.
Il se demanda pour la dixième fois au moins, ce qui se serait passé s'il avait accepté sa proposition de se baigner avec elle. Quitte à ne pas s'endormir, il s'était autorisé à laisser son esprit divaguer un peu, mais même ces quelques minutes volées à sa raison n'avaient pas suffi à étouffer son désir de la rejoindre.
Derrière-lui, le passage secret semblait aspirer l'air de la pièce et il n'eût pas été surpris d'entendre la voix envoûtante du dragon bleu, celui de ses rêves, s'élever dans la nuit.
Si la vague de chaleur qui avait culminé au moment de l'accident d'Azula s'était dissipée, c'était toujours l'été, et il faudrait encore attendre un mois au moins avant que les nuits apportent une fraîcheur réconfortante. Zuko était en nage.
Tu aurais moins chaud si tu ne t'étais pas imaginé toutes ces choses dégoûtantes tout à l'heure.
« Ça suffit ! Je n'en peux plus ! »
Et jetant rageusement ses draps par-dessus le lit, il bondit hors du matelas, passa une tunique à manche courte sur son torse nu et une paire de pantalons. Puis, pieds-nus, il quitta sa chambre, suprêmement indifférent au regard surpris des deux gardes qui défendaient sa porte, se demandant sans doute où se rendait leur roi d'un pas si pressé quelques heures avant l'aube.
Finalement, il avait peut-être bien envie de le prendre, ce bain.
Le ciel exhibait toute l'énigmatique beauté des fins de nuit. Un bleu profond et mélancolique persistait et combattait vaillamment les premières lueurs rosées du jour. L'étoile du matin, plus brillante qu'un phare dans la nuit, semblait couver de son regard la terre encore endormie.
Les feuilles des érables rouges qui entouraient le petit bassin cerné de pierres lisses s'agitaient tranquillement dans la brise matinale. Zuko trouva ici la fraîcheur dont il avait si désespérément besoin pour calmer le bouillonnement de son corps et de son cerveau.
Grâce à son trousseau de clé, il était entré à la faveur de l'obscurité dans le spa royal, déserté à cette heure, et avait traversé les différentes salles jusqu'à l'arcade d'or ouvragée qui donnait accès aux bassins extérieurs. Ce havre de paix et de beauté permettait aux membres de la famille royale et à leurs éminents invités de venir se prélasser dans des bassins d'eau pure, chauds ou froids, tout en profitant de la vue des arbres et des plantes alentours qui offraient un chatoiement de couleurs variées selon les saisons.
En cette fin d'été, les érables, plus précoces, avaient commencé à se couvrir de rouge et d'or.
Zuko retira ses vêtements et s'immergea dans le bassin le plus proche. La fraîcheur de l'eau lui fit pousser un profond soupir de satisfaction. D'un geste de la main, il embrasa les mèches des lanternes qui entouraient le point d'eau, et qui donnèrent aux lieu une apparence un peu mystique. Il ferma les yeux, accueillant avec bonheur le plaisir de ne penser à rien. Au loin il entendait le croassement permanent d'un crapaud-buffle qui appelait ses femelles.
Zuko s'enfonça dans l'eau jusqu'aux oreilles et ferma les yeux.
Au bout d'un moment, il se mit à penser à Azula. Elle se trouvait avec lui dans le bassin et il songeait avec une excitation à peine mêlée de remords à toutes les choses qu'il pourrait lui faire. C'était toujours plus facile de s'abandonner à ces fantaisies à cette heure indécise du jour. Un homme a le droit de rêver, se répétait-il inlassablement pour empêcher le malaise grandissant qui enflait dans sa poitrine de gâcher son plaisir. Il lui semblait presque pouvoir sentir ses seins se presser contre sa poitrine et ses jambes blanches s'enrouler autour de sa taille. Ses lèvres rubis plonger dans son cou et l'y mordre doucement. Sa main à lui s'égarerait un peu et elle gémirait son plaisir dans le creux de son oreille.
Il était sur le point de s'abandonner totalement à sa rêverie quand le bruit d'une porte et un claquement semblable au son d'une canne frappée régulièrement sur un sol de marbre le réveillèrent.
Il sortit aussitôt du bassin le plus discrètement possible, pour ne pas trahir sa présence, peu enclin à l'idée qu'on le découvre ici. Bien qu'il fût seul, il était certain que l'intrus, quel qu'il fût, le démasquerait et devinerait qu'il rêvait d'étreintes amoureuses avec sa petite sœur.
Il avait déjà repassé son pantalon sur ses jambes encore trempées et atteint l'orée de la petite forêt d'érables quand la porte s'ouvrit dans un grincement.
Le cœur cognant furieusement dans sa poitrine, il se rendit compte qu'il avait oublié d'éteindre les lanternes qui continuaient de brûler paresseusement autour du bassin.
L'intrus approcha, silhouette menue immédiatement reconnaissable, appuyée sur une paire de béquille en bois.
C'était Azula.
Elle était seule, vêtue d'une simple robe de nuit blanche qui épousait toutes ses formes et que la clarté des bougies rendait presque transparente. Comment se pouvait-il... Les gardes l'auraient laissée quitter la sécurité de ses appartements ? Ou bien avait-elle emprunté le passage, profitant que Ty Lee fût endormie pour s'éclipser ?
Azula se figea en remarquant les lanternes allumées et tourna la tête de tous côtés, les sourcils un peu froncés. Zuko retint son souffle. Finalement, elle dut penser que le dernier occupant avait simplement oublié d'éteindre les chandelles et, posant ses béquilles contre un gros rocher, le dos tourné à Zuko, témoin attentif de ses moindres gestes, elle se déshabilla.
C'était une chose de l'imaginer nue. C'en était une autre de la voir vraiment.
La vue de ce corps parfait procura à Zuko un mélange d'émotions dissonant comparable à celui que l'on éprouve devant des idoles religieuses ou toute manifestation du sacré. La gène, la culpabilité, le fait de savoir qu'il n'aurait pas dû la voir ainsi... Ces sentiments combattaient la fascination et le désir de la posséder, immédiatement, sans délai. Pour lui seul.
Azula se retourna et les yeux de Zuko glissèrent immédiatement vers le fin duvet noir sur son pubis. Captif, il ne pouvait plus en détacher le regard, songeant aux promesses délicieuses que recelait cet écrin. Il remarqua un peu au-dessus, sur la hanche droite, une étrange ombre dont il percevait difficilement les contours. Ce pouvait être un bleu -mais quand et comment l'aurait-elle obtenu ? Il ne la quittait pas et les hématomes consécutifs à sa chute avaient dû tous faner depuis. Ou était-ce une brûlure ?
Il essaya de se convaincre que c'était la curiosité qui l'avait poussé à avancer de quelques pas entre les arbres. La curiosité bien naturelle d'un frère attentionné qui découvre une blessure sur le corps de sa sœur.
Sa jeune sœur nue et incroyablement désirable.
Il ne se rendit pas immédiatement compte qu'il avait recommencé à se toucher. Pas avant qu'un grognement ne s'échappe de sa gorge. Horrifié par lui-même, il relâcha aussitôt son membre érigé et sortit sa main de son pantalon.
Se toucher en pensant à elle était peut-être acceptable. Mais le faire en la regardant vraiment, à son insu… Il se fit l'effet d'un pervers et éprouva un profond dégoût pour lui-même.
Plus loin, Azula s'était assise au bord du bassin, trempant ses jambes blanches dans l'eau claire. Il contempla un moment les petits plis de peau que la position assise formait sur son ventre, puis ses seins. Ses seins qu'il avait osé toucher et embrasser une fois et auxquels il rêvait presque chaque nuit. Il se demanda quel goût pouvaient avoir les deux boutons de rose qui pointaient à leur extrémité. Il aurait été si facile de le savoir.
Ils étaient seuls. Il n'y avait personne autour d'eux. Les arbres, les pierres et les dernières étoiles seraient seuls témoins de leurs amours interdites. Qu'est-ce qui l'empêchait de la rejoindre, de se glisser près d'elle, de presser son corps contre le sien. Passée la surprise de le découvrir ici, il aurait été plus que bienvenu, il en était certain. Juste quelques instants de plaisir, ce bain volé loin des yeux accusateurs de leurs proches. Et pourquoi pas, après tout ?
En s'avançant, bien malgré lui, il fit craquer une branche sous son pied. Heureusement, ce fut le moment que choisit Azula pour s'immerger dans les eaux turquoises et le son de son corps qui entrait dans l'eau couvrit celui qu'il avait fait. Cela le rappela à la réalité et il recula dans l'ombre.
L'eau lui cachait le spectacle du corps désiré mais le peu qu'il apercevait encore : ses épaules au galbe délicat, la courbe annonçant la naissance de ses seins, son cou de gazelle, l'excitèrent plus encore.
« Que ce doit être frustrant de vivre sous le même toit qu'une telle créature et d'être le seul à ne pas pouvoir en profiter.»
Les paroles acides de Lu Fang lors du Conseil d'urgence, des semaines auparavant, frappèrent sa mémoire avec la violence d'un boulet de canon. Et il sut. Il sut qu'il ne pouvait rien faire. S'il succombait maintenant et rejoignait Azula, il mettrait en marche les rouages d'une machine dont il perdrait très vite le contrôle. Les rumeurs d'inceste, alors qu'ils n'avaient pas fait grand-chose s'étaient répandues à une vitesse folle. Qu'en serait-il quand on apprendrait que le Seigneur du Feu entretenait une vraie liaison secrète avec sa sœur mentalement dérangée ?
Les murs ont des oreilles et le personnel du palais aurait tôt fait de découvrir leur secret et de le répandre. Et pire que tout, il redoutait que de son côté, Azula ne fasse aucun effort pour maintenir leur histoire secrète. Zuko perdrait son trône, l'amitié de l'équipe de l'Avatar et l'amour de son oncle.
S'il la rejoignait dans ce bassin, il ne pourrait pas revenir en arrière. Quelques minutes de volupté valaient-elles un chaos généralisé ?
Il s'accroupit et attendit dans l'ombre qu'Azula finisse son bain.
Elle ne sortit de l'eau que quand le jour fut totalement levé et que le ciel fut parcouru de filaments pastels délavés.
Il s'autorisa un dernier regard quand elle émergea telle une nymphe du bassin turquoise. Il fut ébahi par sa grâce, même quand elle chancela un peu pour se saisir d'une serviette qu'elle enroula autour de sa taille, dissimulant son corps à sa vue.
Enfin Azula disparut sous l'arcade et Zuko attendit encore un peu. Il sut qu'il ne pourrait pas indéfiniment lutter contre ce désir irrépressible. Il lui fallait trouver un moyen de l'exorciser, et vite.
Dans le prochain chapitre, Azula et Zuko vont prendre quelques vacances ! (Oui oui !)
Le ton est un peu plus léger dans ces deux derniers chapitres et le suivant (sauf pour Kojiro mais difficile d'en faire un élément comique !). Profitez-en avant que l'angoisse ne revienne.
Pour ceux qui n'ont pas eu leur dose de drame, vous pouvez lire ma nouvelle histoire : "Un Petit Lit de Fleurs Safran".
Mais je dois vous prévenir que c'est très déprimant...
