Bonjour à toutes! Tout d'abord, un énorme MERCI à toutes celles (et peut-être ceux) qui ont pris le temps de laisser un review, ça me fait vraiment plaisir! Comme j'ai dit, c'est un carburant pour moi ! Peut-être trouvez-vous que ça prend du temps entre chaque publication de chapitre, mais croyez-moi, sans vos commentaires je ne crois pas que cette suite aurait de suite lol Je travaille le plus vite que je peux : )

Bonne lecture !

Chapitre 9

Le bal de la Court

-'Mais, William, y suis-je vraiment obligée?' se plaignit Elizabeth en faisant la moue, observant le dos de son mari alors qu'il s'extirpait lentement du lit. La lumière du soleil illuminait la pièce vivement, les ayant tirés de leur sommeil à une heure matinale. Darcy détestait dormir avec les rideaux fermés et, au plus grand dam d'Elizabeth, le printemps avait apportés de plus longues journées. Et de plus matinaux réveils.

-'Lizzie, soyez raisonnable.' La gronda-t-il sans grande sévérité, plutôt amusé par l'expression enfantine du visage de sa femme. 'Je ne crois pas que vous apprécieriez vous présenter au bal de la Court de manière inappropriée.'

-'Mais combien de fois encore dois-je supporter ces longues heures à ne rien faire d'autre que rester debout, sans bouger, à laisser Mrs. Munch tournoyer autour de moi à faire je ne sais quoi? Vous m'avez affirmé qu'elle était la meilleure couturière de la ville, Will, alors j'aimerais bien comprendre ce qui prend tout ce temps à terminer une simple robe…'

Darcy l'observa un moment, un sourire aux lèvres. 'Je ne savais pas qu'en mariant une Bennet j'aurais déjà une enfant à ma charge.'

Elizabeth ouvrit la bouche, choquée, mais Darcy se pencha vers elle et étouffa les mots qu'elle allait prononcer avec un long baiser. Elle se calma alors qu'il prolongeait cet échange, oubliant même où elle se trouvait pour quelques secondes. Les mains de son mari se glissèrent dans ses cheveux, l'emprisonnant dans cet étau; ses propres mains s'accrochèrent à son cou avec vigueur. Alors qu'elle pensait que les activités nocturnes de la veille allaient reprendre là où elles s'étaient terminées, Elizabeth fut désappointée lorsque Darcy brisa leur étreinte avec un petit rire. 'De meilleure humeur?'

-'Hm-mm.'

-'Georgiana sera en votre compagnie aujourd'hui, ce ne sera pas si pénible. Nous serons sur notre départ en fin d'après-midi. Serez-vous prête?'

Lizzie roula les yeux. 'Bien sûr que je serai prête. Je ne voudrais pas être en retard pour notre grande entrée en société.'

Darcy nota le sarcasme dans sa réponse et haussa les sourcils, surpris. 'Je croyais que vous étiez impatiente de prendre part à cette soirée.'

-'Je le suis. Seulement, pas si tôt le matin.'

-'Un bon petit-déjeuner vous rendrait-il le sourire?'

-'Et risquer ne plus rentrer dans cette robe que Mrs. Munch semble avoir tant de mal à ajuster? Non merci. La pression de faire mon entrée est suffisante sans que j'y ajoute le risque de la déchirer en faisant la révérence.'

-'En effet, ce serait fort désastreux.' Commenta Darcy, moqueur. 'Et surtout impossible.' Ajouta-t-il en l'embrassant sur le front avant de se diriger vers son vestiaire.

Il disparut derrière la porte et Lizzie poussa un long grognement avant de se plonger parmi les oreillers. Cette journée s'annonçait particulièrement éreintante.

Elizabeth n'avait jamais été une femme sédentaire. Son corps demandait de l'exercice lorsqu'elle restait inactive trop longtemps, son humeur se détériorant rapidement lorsqu'elle se trouvait enfermée à l'intérieur. Elle avait toujours été friande des longues marches, l'air frais étant un remède à tous ses maux, faute de ne pouvoir faire comme les hommes et pratiquer des sports comme le squash ou le cricket. L'escrime, même. Si seulement ce genre d'activités n'était pas réservé seulement à la gente masculine! Ce ne fut donc pas une surprise pour Lizzie lorsqu'après seulement une heure à rester immobile ses jambes se mirent à frétiller d'impatience. Mrs. Munch la rappela poliment à l'ordre plusieurs fois et Georgiana, qui était dans la même position qu'elle, essaya de lui faire la conversation. Bien qu'Elizabeth appréciait l'effort de sa belle-sœur de la divertir, elle n'arrivait tout simplement pas à rester tranquille.

-'Tout se passera bien, Eliza, nul besoin d'être nerveuse.'

Lizzie allait tout bonnement répondre qu'elle n'était pas nerveuse du tout, mais elle se ravisa au moment même où elle ouvrit la bouche. L'était-elle? Était-ce l'anxiété qui la rendait aussi agitée? Elle se ravisa donc, dirigeant vers sa belle-sœur un sourire coupable.

-'Vous voyez plus clair en moi que moi-même, Georgiana. Je devrais prendre exemple sur vous, vous me semblez si calme.'

Georgiana haussa légèrement les épaules. 'J'ai eu toute ma vie pour m'y préparer, j'ai toujours su que ce moment viendrait. Cependant, je mentirais si je disais que je ne l'ai pas redouté... Surtout dans les dernières années. Dix-huit ans semble un long moment, mais le temps passe si vite…'

Elizabeth vit le visage de Miss Darcy s'assombrir et voulu tendre la main pour la rassurer, mais sa position – entre les griffes d'une couturière qui s'agitait autour d'elle comme une souris, discrète, pinçant ci et là sans émettre le moindre bruit – l'empêchait de marcher jusqu'à elle. Lizzie opta donc pour un sourire compatissant; c'était le meilleur qu'elle puisse faire dans cette situation. Georgiana, qui se faisait aider hors de sa robe, vint ensuite la rejoindre afin de prendre ses mains dans les siennes.

-'Je suis heureuse de ne pas être seule, Eliza. Avec vous à mes côtés, faire face à la Court me semble beaucoup moins pénible. Sans votre présence, j'ai bien peur que d'être présenté au roi et à la reine m'aurait terrifié au point de ne pas être en mesure de me tenir sur mes deux pieds.'

-'Tsss, Georgiana, ne dites pas de telles choses. Vous savez à quel point votre frère et moi estimons vos capacités et votre accomplissement. Rassurez-vous, devant mon incompétence, vous brillerez telle une étoile dans un ciel d'hiver!'

-'Oh, ne dites pas une telle chose. Vous savez très bien que c'est faux. Les yeux seront sur vous, bien entendu, et je n'en serai que soulagée.'

Mrs Munch, ayant enfin terminé, retira la robe et l'emporta dans la pièce d'à côté. Enfin seules, Elizabeth attira Georgiana vers le fauteuil et la fit s'asseoir, percevant en elle une gravité bien plus grande que sa contenance ne le laissait paraître. Maintenant que les deux couturières étaient parties, les convenances pouvaient bien prendre le large et Lizzie ne se gêna pas pour tutoyer sa belle-sœur.

-'Allons, Georgie, que se passe-t-il? Je sens que tu me caches quelque chose.'

Devant une telle familiarité, Georgiana fut facilement convaincue et ne tarda pas à se confier. Elle baissa la tête, gardant son regard fixé sur ses mains qui reposait sur ses genoux. 'Eliza, je crains ne pas avoir le même courage que toi pour faire face à ce genre de choses. Je ne me sens pas prête à faire mon entrée dans le monde, à me jeter parmi tous ces prédateurs qui…qui…'

Ses joues s'empourprèrent et elle se tut, visiblement inconfortable avec l'idée de formuler sa pensée à voix haute.

-'Qui ne cherchent qu'à s'emparer de la fortune d'une jeune fille naïve?' termina Elizabeth d'une voix douce, le souvenir de Wickham bien présent entre elles.

Georgiana hocha la tête, embarrassée. 'Je sais qu'il est mon devoir de bien me marier, mais je ne peux m'empêcher de songer avec horreur à ce qui m'attend dans les années à venir…Mon frère et toi avez la chance de partager un amour dont peu de gens sont gratifiés dans une société comme la nôtre. Et bien que je sois plus qu'heureuse de t'avoir comme sœur, je sais aussi que le lien qui vous unit est hors conventions. Mon frère est un homme et avait le pouvoir de faire abstraction aux règles afin de t'épouser. Il a choisi le bonheur et l'amour plutôt que la fortune et les titres. Il n'en sera pas de même pour moi. Je devrai me marier avec l'homme que William choisira et je n'aurai aucun dires à ce sujet.' Elle se tut un moment, jouant distraitement avec le tissu de son jupon. 'J'ai l'impression que je ne serai plus jamais en sécurité, que je n'aurai plus l'excuse de mon jeune âge et de mon statut pour échapper aux hommes qui veulent me courtiser. Je crains de ne jamais aimer la ville, Eliza, je ne m'y sens pas à ma place. Je suis beaucoup trop timide et l'idée qu'on me force à apparaître en public, à fréquenter et danser et recevoir tous ces gens…cela me terrifie.'

Elizabeth l'écouta en silence, réalisant seulement maintenant ce que signifiait cette entrée dans le monde pour Georgiana. Elle n'était plus cette jeune fille qu'elle avait rencontré presqu'un an auparavant lorsque Darcy la lui avait présenté. Et elle n'était certainement plus l'enfant qui était tombée follement amoureuse de George Wickham… Elle était une femme à présent et, débutant en cette soirée même, tout le peuple de l'Angleterre le saurait.

-'Mais, sûrement William ne laissera pas une chose arriver si tôt.' Commenta lentement Lizzie, incertaine de ce qu'elle avançait. Le ferait-il vraiment? Était-ce ses intentions de la marier alors qu'elle venait tout juste d'avoir dix-huit ans? Non, cela ne se pouvait pas. Georgiana n'était pas prête. Darcy ne laisserait jamais cette sœur qu'il aimait tant s'envoler aux mains du premier soupirant convenable qui allait se présenter. Elle ajouta donc, d'une voix plus ferme : 'Non, Georgie, je suis convaincue que tu es bien en sécurité pour les années à venir. William ferait n'importe quoi pour toi et ton bonheur lui tient à cœur. Il ne fera rien sans avoir la certitude que tu es heureuse avec la situation. Et si cela peut te rassurer, je veillerai personnellement à ce que ton frère ne fasse rien sans ton accord.'

Georgiana poussa un long soupir. 'J'ai bien peur de ne jamais pouvoir faire confiance à nouveau. Je ne trouverai pas d'homme qui puisse capturer mon cœur, je l'ai perdu avec…avec…lui.'

Maudissant Wickham en silence, Elizabeth dut inspirer profondément à quelques reprises avant de pouvoir chasser la colère de sa voix. 'Ne dis pas cela. Lorsque tu auras trouvé l'amour, le vrai, tu sauras lui faire confiance. Il chassera tout mauvais souvenir et pansera la plaie que tu as en ton cœur.'

Georgiana hocha piteusement la tête. 'Cependant, c'est si je trouve l'amour. Mes chances de trouver un homme qui m'aime pour ce que je suis et non pour la position qu'il obtiendra en m'épousant sont minces.'

-'Mais possible.' Répliqua Lizzie qui releva le menton de Georgiana avec son index. 'Ne te décourage pas.'

La jeune fille eut un petit sourire. 'J'essayerai, Eliza, de tout mon cœur.'

-'Mais ne regardons pas trop vers l'avant. Nous avons beaucoup sur la conscience présentement et si nous ne voulons pas ajouter le manque de ponctualité à notre manque d'intérêt dans les soirées mondaines, mon avis est que nous devrions nous y préparer à l'instant.'

Georgiana quitta donc la pièce et Elizabeth se retrouva seule dans le grand salon. C'est plongé dans ses pensées que Darcy la trouva, allongée à moitié sur le sofa, battant l'air avec l'un de ses pieds. Surpris de la trouver ainsi accoutrée – elle portait encore le sous-vêtement dont elle s'était vêtue pour l'ajustage de sa robe de soirée – il resta un long moment à l'observer, non sans amusement.

Lorsqu'elle remarqua enfin sa présence, elle sursauta violemment et se redressa aussitôt dans une position plus présentable.

-'William.' Souffla-t-elle en rougissant. 'Vous m'avez fait peur. Vous auriez pu annoncer votre présence.'

-'Et briser un aussi beau tableau?' Répondit-il avec un haussement de sourcil. 'Jamais.'

Lizzie eut un bref rire. 'Ne vous moquez pas, Will. D'ailleurs, vous ne devriez pas me voir dans cet état, je suis à peine vêtue.'

Darcy s'avança lentement vers elle, dangereusement espiègle. 'Vous êtes ma femme.' Répondit-il d'une voix grave. 'De vous voir ainsi ne me choque pas le moins du monde. Cependant, il est vrai que j'apprécierais être le seul à vous surprendre de cette manière. Dois-vous raccompagner jusqu'à votre chambre?'

Elizabeth se laissa docilement vêtir de sa lourde robe de chambre. À quoi s'était-elle attendue? Que Darcy la prenne dans ses bras et l'emporte jusqu'à leur lit? Qu'il fasse fi de son strict contrôle et lui enlève le reste de ses vêtements? Quelle pensée ridicule…Et pourtant, la frustration était bien là, au creux de son estomac. Pourquoi cette envie de lui faire perdre sa contenance? Pourquoi ce besoin de lui faire abandonner les convenances? Elle voulait que ses charmes l'ensorcèlent d'une telle manière qu'il ne puisse résister à l'envie de…

Non, elle n'avait pas le droit de songer ainsi. Quelle genre de femme était-elle pour vouloir entraîner son mari sur un chemin de concupiscence à n'importe qu'elle heure du jour? Elizabeth prit une grande inspiration alors qu'elle faisait son chemin jusqu'à sa chambre, la main de Darcy sous son bras, mais son corps à une distance respectable. Il fallait qu'elle chasse ces pensées, qu'elle chasse ces frustrations. Cependant…Non. Non! Elle n'allait pas laisser son désir emporter sa raison. Elle n'était plus à Longbourne. Elle était Mrs Darcy maintenant. Une dame de la société n'était pas supposée entretenir de telles idées, de telles envies de jouer avec les sentiments de son mari. Elle n'aurait qu'à se contenir, voilà. Si Darcy pouvait le faire, elle le pouvait aussi.

Darcy entra dans la chambre avec elle, mais ils furent bien vite séparés pour se préparer chacun de leur côté. Sa propre suivante l'emmena dans une pièce adjacente à son vestiaire afin qu'elle y prenne son bain. Maggie, qui avait quitté le service de la famille il y avait plus d'une semaine déjà, avait été remplacée par une jeune fille habile, mais très discrète. Intimidée, cette dernière gardait toujours le regard baissé et Elizabeth avait du mal à la comprendre car sa voix, douce au départ, ne semblait pas s'élever plus haut que le murmure. Ce fut donc en complet silence qu'elle se prépara cet après-midi-là.

Enfin, presque en silence.

Lorsqu'elle eut revêtu sa nouvelle robe de satin bleu pâle, dont les manches courtes et l'encolure étaient brodées de perles blanches, une coiffe couverte de plumes et de rubans lui fut offerte. En voyant cela, Lizzie s'étrangla presque en riant et refusa nettement que l'on pose une telle extravagance sur sa tête. Mrs Munch, offensée, insista que sa toilette ne pouvait être complète sans un chapeau.

-'Si je me dois de poser quelque chose sur ma tête, ce sera quelque chose de simple, Mrs. Munch.' Répliqua Elizabeth. 'Un ruban, une plume, quelques fleurs ou perles…mais pas tout en même temps.'

-'Mais…'

-'Je crois m'avoir bien fait comprendre.' La coupa-t-elle d'une voix ferme. 'Je n'ai aucune envie de paraître en public accoutrée d'une oie enrubannée sur la tête. Je vous prierais donc de réviser cette coiffe.'

Puis, voyant que sa couturière en était toujours insultée, Lizzie ajouta d'une voix plus mielleuse. 'Cette robe est magnifique, une vraie œuvre d'art, je ne voudrais pas que les regards se perdent sur ma tête alors qu'ils pourraient observer votre travail.' Amadouée par les compliments, Mrs Munch avoua finalement qu'elle avait raison et se mit aussitôt à la confection d'un nouveau bandeau beaucoup plus simple.

Avant son mariage, Elizabeth n'avait jamais porté autre chose que les robes Empire en mousseline adéquates à son rang. Maintenant qu'elle était Mrs Darcy, elle avait à sa disposition une vingtaine de nouvelles robes et la possibilité d'en avoir bien plus en claquant des doigts. Son mari avait été généreux, lui offrant tous les fonds nécessaires afin qu'elle refasse sa garde-robe; cependant, Lizzie préférait nettement la simplicité à la mode et il n'était pas rare de la voir déambuler dans les jardins de Pemberley avec l'un de ses vieux vêtements. En préparation de la Saison, Georgiana et elle s'était vu offrir de riches tissus afin de confectionner le trousseau nécessaire aux soirées mondaines auxquelles elles allaient assister. Si tout d'abord cet aspect lui avait paru hautement excitant, revêtir la lourde robe de Court dont la traîne dépassait en longueur tout ce qu'elle avait pu porter auparavant lui semblait grandement encombrant. Certes, son reflet était agréable à regarder, mais l'inconfort qu'elle éprouvait enlevait à son bonheur.

-'Mrs Darcy, vous êtes à couper le souffle.'

Elizabeth sourit en faisant un tour sur elle-même. 'Cela vous plaît?'

-'Certainement. Le contraire aurait été tout simplement impossible.' Répondit Darcy qui, s'approchant d'elle, la tourna face au miroir. 'Je crains cependant qu'un tel accoutrement ne fasse tourner les têtes un peu plus que je ne le voudrais.'

Il était vrai que la robe était coupée très basse au niveau de la poitrine, révélant généreusement la courbe de ses seins. 'Mrs Munch m'a affirmé que je ne pouvais l'avoir autrement.' Se défendit Lizzie. 'Selon elle, toutes les femmes sont accoutrées ainsi et je ne peux y échapper.'

-'Hm-mm.'

-'À moins que mon mari ne m'empêche formellement de paraître en public ainsi vêtue, bien sûr.' Commenta-t-elle sur un ton léger, espérant au fond d'elle-même que Darcy soit jaloux et possessif à ce point. Elle se sentirait beaucoup mieux si un fichu camouflait au moins la moitié de ce que son décolleté dévoilait à ce moment. 'On ne pourrait blâmer une femme d'obéir à son époux.'

-'Vous ne trouverez pas en moi un partisan pour votre cause, je le crains. Ne m'en voulez pas, mais je suis égoïste au point de vouloir vous exposez aux yeux de tous afin qu'ils voient à quel point je suis l'homme le plus chanceux de l'Angleterre.'

Elizabeth allait répondre qu'elle n'était pas un cheval sur la place du marché dont le large poitrail, les jambes fines et la bonne dentition faisaient sa valeur, mais Georgiana fit son entrée à ce moment et l'attention se tourna vers la cadette des Darcy.

-'Voilà, maintenant tous les gentlemen présents seront doublement jaloux de me voir arriver!' s'exclama le maître de Pemberley en prenant les deux mains de sa sœur afin de mieux voir ce qu'elle portait. 'Magnifique. Je ne pourrais être plus ravi d'avoir deux aussi belles femmes à mes côtés.'

-'Et si vous continuez vos flatteries, Mr Darcy, non seulement serons nous en retard,' Commenta Elizabeth avec un sourire moqueur. 'Mais nous n'aurons plus la possibilité de passer le cadre de cette porte tant notre égo aura pris de l'ampleur.'

Le chemin jusqu'à la Court sembla durer une éternité. Essayant de calmer les papillons dans son estomac, Lizzie prit de grandes inspirations en comptant plusieurs fois jusqu'à quatre. Toute excitation avait laissé place à la nervosité alors qu'elle réalisait que le bal auquel elle allait assister n'était pas n'importe quelle soirée mondaine…Elle se rendait à la Court. Elle, Elizabeth Bennet Darcy, allait rencontrer le roi George III et la reine Charlotte. Cette seule pensée draina toutes les couleurs de son visage et elle s'éventa maladroitement avec son éventail. Elle allait assister à la plus grande réception annuelle donnée en Angleterre. Elle allait faire face à la royauté et au reste de la société. Elle allait…

Les pensées d'Elizabeth furent interrompues lorsqu'elle sentit la main de Darcy se glisser dans la sienne. Légèrement calmée, elle jeta un coup d'œil à Georgiana qui, tout comme elle, semblait bien pâle. Les souvenirs de leur conversation faisant écho dans sa tête, Lizzie n'eut pas de mal à deviner les pensées de sa belle-sœur.

Comme Darcy les avait prévenus, de nombreux regards se tournèrent vers eux lorsqu'ils débarquèrent de leur diligence et firent leur entrée dans le grand Hall du Palais St-James. Accrochée au bras de son mari, gardant la tête haute et sa traîne par-dessus son avant-bras, elle s'avança d'un pas décidé jusqu'à la porte d'un petit salon où le roi et la reine, assis sur des chaises rembourrées, accueillaient leurs invités. Derrière eux, une multitude de ministres commentaient à voix basses. L'un d'entre eux, entre chaque présentation, se penchait pour murmurer à l'oreille du roi le nom du prochain invité. Lorsque fut venu leur tour, Elizabeth laissa une suivante placer sa traîne et prit une grande inspiration, le cœur battant.

-'Mr, Mrs et Miss Darcy de Pemberley.'

Ils s'avancèrent d'un pas constant. Darcy, fier et droit dans son costume de Court, dirigea sa femme et sa sœur avec l'assurance d'un roi.

-'Ironique.' songea Lizzie alors qu'elle s'arrêtait, laissant son mari prendre les devants et s'incliner devant Georges III et sa femme. Elle l'observa, un petit sourire aux lèvres, ne pouvant s'empêcher de ressentir une vague d'orgueil à cette vue. Son admiration pour son mari se dissipa soudainement alors que son nom fut prononcé, lui rappelant où elle était et, surtout, devant qui elle se trouvait.

-'Vos Majestés, permettez-moi de vous présenter ma femme, Mrs Elizabeth Darcy.'

Moment décisif. Tous les regards étaient tournés vers elle, inquisiteurs, curieux. Lizzie sentit ses jambes fléchir.

Non. Cela n'irait pas. Elle ne devait pas faire honte à Darcy. Elle ne devait pas s'humilier devant tous ces gens et prendre la poudre d'escampette, il en était hors de question. Elle se devait d'aller de l'avant. Elizabeth Darcy allait toujours de l'avant.

C'est avec assurance qu'elle s'avança et fit sa révérence. 'Vos Majestés.'

-'Mrs Darcy, bienvenue à St-James.'

Georgiana fut ensuite présentée – et Lizzie remarqua avec satisfaction que la jeune fille, malgré ses joues roses, ne tremblait pas – et tous les trois passèrent au Grand Salon. Ce n'est qu'à ce moment qu'Elizabeth sentit le monde tourner autour d'elle et, s'agrippant à son mari, tenta discrètement de retrouver sa balance. Sentant sa femme tanguer sur ses pieds, Darcy tourna vers elle un regard inquiet et insista pour qu'elle s'asseye.

-'Nul besoin, Mr Darcy,' répondit Elizabeth d'un air un peu gênée. 'Je crois avoir oublié de respirer.'

Il leva les sourcils, les coins de sa bouche se soulevant pour former un léger sourire. 'Vraiment?'

-'Ce n'est pas tous les jours que l'on rencontre la royauté.' Se défendit-elle, mais devant le ridicule de la situation elle ne put s'empêcher de rire. 'Au moins j'ai attendu d'être hors de la pièce. Quelle impression aurai-je faites si je m'étais effondrée aux pieds du roi!'

-'Il en aurait été flattée, je crois. Il y a longtemps que les femmes ne tombent plus à ses pieds.' Plaisanta Darcy à voix basse et Elizabeth et Georgiana pouffèrent.

Depuis son arrivée à Londres, Lizzie avait eu à visiter une vingtaine de famille. Lorsqu'elle avait vu la pile de cartes de visite sur le plateau d'argent, elle avait bien failli abandonner son titre et serait volontiers retournée à Longbourne si Darcy ne lui avait pas précisé qu'il serait avec elle à tout moment. L'idée de passer tout ce temps en compagnie de son époux ôta grandement à l'énorme tâche que cela représentait. Cependant, la présence de son mari était justement ce dont elle avait besoin en public. Si Darcy avait eu toute sa vie pour évoluer en société et apprendre les innombrables noms de ses relations, il n'en était pas de même pour Elizabeth. En visitant en privé, il avait été facile pour elle d'apprendre les noms de deux ou trois personnes en l'espace d'une heure. De s'en rappeler ici alors que toutes les relations auxquelles elle avait été présenté circulait autour d'elle était une toute autre chose. Son époux occupé, elle n'avait pas le support essentiel dont elle avait besoin pour remplir ses devoirs et discuter avec ses nouvelles connaissances. Georgiana, qui avait passé son temps entre les études et le piano, n'était pas d'une grande aide. C'est ainsi qu'à peine une heure après leur arrivé Elizabeth se fit aborder par deux totales inconnues qui elles semblaient fortement la reconnaître.

-'Alors, Mrs Darcy, comment trouvez-vous Londres?' s'enquerra Mrs. Quelquechose, dont le nez aquilin donnait une allure de volatile à son visage. 'Cela doit être bien différent du Hertfordshire.'

-'La ville et la campagne ne sont pas comparables.' Répondit poliment Elizabeth, qui n'avait aucune idée de qui cette dame était. 'Chacune possédant ses avantages et ses désavantages, l'une n'étant pas meilleure que l'autre.'

-'Avec une propriété comme Pemberley, nul doute que la campagne vous semble plus attrayante que la ville.' Enchérit l'autre, son chapeau rehaussé d'une plume si gigantesque qu'Elizabeth dû faire un effort énorme pour ne pas avoir de mouvement de recul chaque fois que la femme bougeait la tête. 'Si je n'étais pas en besoin d'un peu de mondanité, je n'aurais aucune envie de quitter le Kent.'

-'Oui, mais après une jeunesse passée à la campagne, la vie trépidante de la ville doit certainement être un vent de fraîcheur, une renaissance même!'

-'Certes, certes. N'empêche, tout ceci doit être d'une grande nouveauté pour vous, n'est-ce pas Mrs Darcy? Ne soyez pas timide, nous comprenons tout à fait que vous soyez intimidée par tout ceci.'

-'Oh, bien sûr, Mrs Darcy, n'ayez pas honte d'avouer votre inconfort en une si haute société! N'importe qui en votre situation réagirait de même, c'est tout à fait normal.'

Elizabeth écouta ces commentaires, bouche bée. 'Et bien, je…je…'

Incapable de trouver réponse à ces commentaires déplacées, Lizzie se sentit rougir. Comment ces dames osaient-elle faire allusion à son rang social d'une telle manière? Essayaient-elle de la rabaisser ou bien était-ce vraiment de la bonne volonté derrière ces mots? La deuxième option lui semblait peu plausible.

-'Mrs Darcy!'

Alors qu'Elizabeth pensait s'enfoncer dans le plancher afin d'échapper à cette humiliation, un homme apparut à ses côtés et s'inclina bien bas avant de lui faire un discret clin d'œil. 'Mrs Darcy, quel bonheur de vous revoir! Votre mari vient tout juste de m'apprendre votre présence et je me suis empressé de venir vous faire mes respects.'

-'Oh, Mr Bingley, il y a trop longtemps depuis notre dernière rencontre!' Répondit chaleureusement Elizabeth, soulagée d'échapper à l'obligation de répondre à ses interlocutrices. 'Vous gardez ma sœur beaucoup trop précieusement, je commence à croire qu'elle sera bientôt une étrangère!'

Un petit mensonge blanc ne faisait de mal à personne. Trois jours seulement s'étaient écoulés depuis sa dernière visite chez les Bingleys, mais son beau-frère avait visiblement reconnu son malaise en la présente compagnie et lui apportait son salut.

-'Et bien, il faut absolument remédier à ce problème.' s'exclama Bingley en lui offrant son bras. 'J'espère que vous ne m'en voudrez pas trop, mesdames, mais jamais de ma vie n'ai-je vu deux femmes si inséparables! Il est de mon devoir de reconduire Mrs Darcy auprès de Mrs Bingley qui se tarde de revoir sa chère sœur.'

S'excusant rapidement, ils s'éloignèrent en traversant la foule et lorsqu'Elizabeth fut certaine que les deux dames étaient hors d'oreille, elle poussa un long soupir de soulagement. 'Mr Bingley, jamais n'ai-je été si heureuse de vous voir apparaître, elles étaient en train de me dévorer! Des remerciements sont de mises.'

-'Si vous devez remercier quelqu'un, ce sera plutôt votre mari.' Répondit-il avec un sourire, son visage juvénile portant toujours cet air joyeux qui le caractérisait tant. 'Je n'ai été que le cobaye dans cette mission, Darcy insistant pour que je vous porte secours.'

Tournant la tête dans la direction de son époux, Elizabeth rencontra son regard et, très brièvement, le sourire qui apparut sur ses lèvres. Avait-il observé la scène qui venait tout juste de se dérouler? Avait-il pu entendre ce que ces deux femmes avaient dit? Non, certainement pas, il était beaucoup trop loin. C'était donc qu'il gardait constamment un œil sur elle, à observer ses moindres gestes, ses moindres pas. Comment avait-il été possible pour lui de deviner sa détresse s'il en était autrement? 'Merci de vous être plié aux ordres de mon mari, Mr Bingley.'

Celui-ci sourit. 'Peu d'occasions me permettent de rendre service à Darcy comme il le fait si souvent pour moi. Ce fut un plaisir d'agir sous sa demande ainsi que de vous rescaper. Ah, voilà ma femme!'

Jane était, comme à son habitude, resplendissante. Abordant sa sœur avec un certain soulagement, Lizzie se résolut presque à ne plus quitter son côté jusqu'à la fin de la soirée. Cependant, ses plans furent bien vite déjoués par l'annonce du dîner et la réalisation qu'en plus de ne point être assis côte à côte, elles n'étaient pas à la même table. Donc à peine avaient-elles eu le temps d'engager une conversation qu'elles étaient déjà séparées. Heureusement, son voisin de gauche n'était nul autre que le Colonel Fitzwilliam qui, Georgiana à sa propre gauche, se déclara le plus chanceux de tous les invités d'être si bien entouré. Discutant avec eux se trouvait Mr Parker, un ami du Colonel, qui se révéla un véritable gentleman. Grand, les traits harmonieux, il était un jeune homme très séduisant et Elizabeth ne manqua pas de voir un certain éclat dans les yeux de sa belle-soeur. Lorsque le repas fut terminé, ils passèrent à la salle de bal et les musiciens s'installèrent afin d'ouvrir la danse.

-'Puis-je avoir l'honneur de la première danse, ma chère cousine?' s'enquerra le Colonel Fitzwilliam en s'inclinant. Elizabeth jeta un coup à son mari, qui discutait silencieusement avec son oncle, et lorsqu'elle vit qu'il n'avait aucunement l'intention de l'inviter, accepta.

-'Bien sûr, Colonel.' Répondit-elle poliment en essayant de cacher sa déception.

Lisant aisément en elle, son cavalier tenta de la rassurer. 'Il ne faut pas vous en faire, vous savez très bien que Darcy ne se prête guère à ce genre de récréation. N'y voyez rien de personnel.'

Elizabeth afficha un air penaud. 'Je ne voulais pas vous offenser. Vous êtes un partenaire très doué, j'en suis certaine.'

-'Je n'en suis pas offensé, rassurez-vous. Et vous avez bien raison d'en vouloir à ce rabat-joie, il n'a jamais appris à s'amuser.'

-'Que voulez-vous dire?'

-'Eh bien, il n'est pas un secret d'état que ce genre de soirée n'a jamais été au goût de mon cousin. Il préfère les parties de chasse et la campagne, malgré ses fréquentes visites en ville. Je crois que s'il avait le choix, il ne quitterait jamais Pemberley. Il semble bien à l'aise en public, ou plutôt, son air hautain lui donne l'air d'être tout à fait à sa place en haute société, mais je peux vous assurer qu'il n'attend que le moment de disparaître.'

Lizzie pouffa de rire. 'En effet, j'en avais déjà fait l'observation.'

Le Colonel Fitzwilliam eut une drôle d'expression à ce moment, à la fois douce et nostalgique. 'Oui, vous êtes bien la seule qui avez su percer sa carapace, Mrs Darcy. Vous avez ouvert en lui quelque chose que je n'avais jamais vu. Ou plutôt, quelque chose que je n'avais pas vu depuis un long moment.'

-'C'est-à-dire?'

-'Une once d'humanité.'

Voyant qu'elle haussait les sourcils d'un air interrogateur, le Colonel détendit l'atmosphère en transformant son air sérieux en un grand sourire. 'Vous êtes sa faiblesse, Mrs Darcy et seul l'Homme peut avoir des faiblesses! Peut-être n'êtes-vous pas consciente du changement que vous avez apporté en lui, mais je le connais, certainement mieux que quiconque, et bien qu'il essaie de le cacher il n'est plus le même homme. Darcy a toujours été…comment dire…solide comme le roc. Toujours très droit, très strict, très juste aussi. Il a toujours fait tout ce que l'on attendait de lui, sans fautes, et si son affection pour Georgiana n'avait pas adouci son caractère, j'aurais été porté à croire qu'il était inhumain!'

Elizabeth eut un rictus, reconnaissant bien là les traits de son mari. Ces choses n'étaient pas des défauts en elles-mêmes, bien sûr, mais c'était justement cet air d'homme par-dessus tout qui avait poussé Lizzie à classifier Darcy comme étant le dernier homme sur terre à prendre pour époux. 'Et quelle différence voyez-vous maintenant, Colonel? Je n'ai pas eu la chance de connaître mon mari dans son jeune âge et je n'ai donc pas de références pour comparer ce qu'il était et ce qu'il est aujourd'hui.'

-'Enfant, il était comme tous les autres, si ce n'étaient que sa mère le couvrit d'un peu trop d'attention et lui transmis, malheureusement, une vanité hors du commun. Rien n'était jamais assez bon pour lui, il était au-dessus de tout. Lorsque Mrs Darcy, Dieu ait son âme, est décédée, son père s'est alors chargé de son éducation et a heureusement su lui enseigner à être un bon maître. Et à s'humilier un peu. Mais les habitudes se perdent difficilement et même si je suis persuadé que mon cousin n'a plus de fierté mal placée, cela n'empêche pas que ses airs semblent dire le contraire. Il a toujours été ainsi en public et je crois qu'il n'a jamais réussi à agir autrement. C'est hors de sa zone de confort.'

-'Il est étrange de savoir que mon époux puisse être inconfortable, je dois l'avouer. Il semble tout à fait sûr de lui.'

-'Oui, il a su parfaire sa contenance. En apparence il semble être le dernier homme sur lequel on puisse compter et pourtant il est certainement la seule personne sur cette terre en qui j'ai entièrement confiance.'

Elizabeth ne put s'empêcher de sourire, fière malgré elle. 'Je suis heureuse d'avoir appris à connaître cette partie de lui, mes préjugés m'ont longtemps aveuglés sur sa véritable nature.'

-'Oh, Mrs Darcy, je vous conseille de ne pas trop le mettre sur un piédestal.' Répliqua le Colonel avec un petit rire. 'Cependant, je suis heureux que pour la première fois de sa vie il ait su fait fi des conventions et qu'il ait écouté son cœur.' Puis, jetant un coup d'œil vers son cousin, il ajouta : 'Ne remarquez-vous pas à quel point il vous regarde?'

-'Il me surveille pour ne pas que je fasse de bêtises.' Plaisanta-t-elle.

-'Il vous protège.' La corrigea-t-il en secouant la tête. 'Je ne l'ai jamais vu être subjugué de la sorte. Beaucoup de ses préoccupations tournent autour de votre protection. Il semble indifférent, mais je peux vous affirmer que tout est mis en place pour que rien ne vous arrive.'

Lizzie réfléchit un moment, incertaine de ce qu'elle devait penser. Il était vrai qu'elle n'avait jamais vraiment rencontré de problèmes, physiquement parlant, étant toujours bien entourée. Si on l'embêtait durant une conversation, elle était toujours tirée d'embarras d'une manière ou d'une autre. Son confort était grand, sa chambre toujours rangée, l'eau de son bain toujours chaude, son lit toujours remplumé. Toutes ces petites attentions faisaient qu'elle ne manquait de rien. Bien qu'Elizabeth fût flattée d'une telle attention, percevant dans ces petits gestes l'amour que lui portait son mari, elle devait cependant reconnaître qu'il y avait un domaine où il ne pouvait pas la protéger.

-'Certaines choses ne peuvent être évitées.' Commenta Lizzie, songeant à ces quelques semaines d'enfer au début de leur mariage. Elle avait passé tant de temps à se morfondre! Cette torture mentale avait été difficile et éprouvante; Darcy ne pouvait pas la protéger de cela. De lui démontrer matériellement son amour ne la protégeait pas des idées qui germaient dans sa tête. La seule chose dont il ne pouvait pas la protéger – et qui faisait le plus de dommages – était elle-même. 'Toutes ces petites attentions sont agréables, j'en conviens, mais il y a plus à l'amour que de s'assurer que je ne manque de rien. Je l'ai épousé parce que je l'aime et non pour la protection que son nom me donne.'

Colonel Fitzwilliam eut un sourire. 'Je sais, l'attirance entre vous est palpable. Cependant, croyez-moi lorsque je vous dis que même s'il n'est pas très démonstratif, il vous aime plus que sa propre vie. Il ne sait tout simplement pas comment le démontrer.'

Elizabeth hocha brièvement la tête. Elle ne pouvait pas exprimer le reste de ses pensées, ce n'était pas convenable. Elle ne pouvait pas dire que parfois elle souhaiterait que Darcy démontre publiquement, presque outrageusement, à quel point il l'aime. Qu'il l'enlace subtilement par la taille…qu'il frôle ci et là sa main sur son corps par « accident »…qu'il la dévore des yeux sans essayer de le cacher…qu'il la tutoie lorsqu'ils sont seuls… 'Merci de défendre les intérêts de votre cousin, Colonel. Vos paroles me rassurent.'

Celui-ci haussa les épaules puis la mena un peu plus loin alors que la danse se terminait. 'Ce qui est important pour Darcy est important pour moi.' Répondit-il simplement, puis, faisant la révérence : 'Si vous voulez bien m'excuser, j'ai promis la prochaine à Georgiana et je me flatte de toujours tenir mes promesses.' Il disparut parmi la foule, laissant Elizabeth seule avec des pensées mitigées.

La première fois que ses yeux s'étaient posés sur Darcy, et que ses oreilles eurent entendu les jolis propos qu'il prononça à son égard, elle s'était demandé comment un homme aussi vivant que Bingley pouvait supporter le caractère de ce spécimen si hautain. Elle avait pensé de même lorsqu'elle avait rencontré le Colonel Fitzwilliam à Rosings, si charmant et bon. En apparence, ces deux hommes possédaient bien plus que son mari; pourtant, ils avaient une estime sans bornes pour Darcy, n'hésitant pas à l'élever au-dessus d'eux. Au fil des mois elle avait appris à partager cette opinion et estimait grandement son mari aujourd'hui. Cependant, le cœur de Darcy n'était pas un livre ouvert. Il était voilé et même elle n'avait pu percer ce secret, n'ayant droit qu'à quelques illuminations par ci par là. Peut-être qu'avec les années, elle saurait découvrir ce qui se cache réellement derrière ce rideau de marbre…

-'Mrs Darcy, il m'est insupportable de vous voir ainsi seule, une jolie femme ne devrait jamais être laissée à elle-même lors d'un bal.' Déclara Mr Parker en l'abordant. 'N'aimez-vous pas danser?'

Elizabeth eut un bref rire. 'Moi? Ne pas aimer danser? Au contraire, c'est une activité que j'apprécie énormément.'

-'Votre mari n'est-il pas disposé à vous accompagner?'

-'Je crains que mon mari ne danse que très rarement.'

-'Même pour vous?'

Lizzie sourit. 'Même pour moi. Chacun ses goûts, Mr Parker, et je respecte les vœux de mon époux.'

-'Et bien, je ne peux accepter que vous restiez ainsi seule alors qu'il est évidant que vous avez envie de danser.' Il lui tendit sa main, haussant un sourcil ludique en sa direction. Lizzie accepta après un moment d'indécision, décidant qu'un bal avait pour but de permettre aux gens de prendre plaisir à la danse, peu importe le cavalier. Si Darcy ne voulait pas qu'elle danse avec des inconnus – et de toute façon, Mr Parker n'était plus vraiment un inconnu, ils avaient été introduits pendant le repas par le Colonel Fitzwilliam – il n'avait qu'à venir danser avec elle. Elizabeth jeta tout de même un regard vers lui et fut surprise, et étrangement satisfaite, de voir son visage habituellement impassible porter un léger froncement au niveau de son front.

Mr Parker était un partenaire doué. Il alimentait la conversation avec une légèreté naturelle, menant Lizzie à travers les couples avec aisance. Pas une fois il n'hésita dans ses pas, son sourire ne quittant jamais ses lèvres. Son charme gagna la plupart des femmes partageant un segment avec lui et Elizabeth se retint de sourire lorsqu'elle vit les joues de sa belle-sœur s'empourprer lorsqu'elle exécuta les quelques mouvements avec lui.

La danse se termina sur une révérence et à peine eut-elle le temps de remercier Mr Parker que celui-ci se raidit soudainement en fixant un point derrière elle. Faisant volte-face pour s'enquérir de la raison d'un tel changement de comportement, elle faillit s'heurter à la poitrine de Darcy qui fixait son cavalier d'un air presque farouche.

-'Mrs Darcy.' Lui dit-il en ne le quittant pas des yeux. 'Puis-je avoir l'honneur de vous conduire dans la prochaine danse?'

Ahurie, Elizabeth resta sans voix pendant quelques secondes. 'B-bien sûr, Mr Darcy, avec plaisir.'

Il lui présenta son bras et l'emmena au bout de la ligne, sa pression forte sur ses doigts. Il s'inclina, son air sérieux trahissant son mécontentement. Lorsque la musique s'éleva et qu'elle fut assez forte pour couvrir leur conversation des oreilles indiscrètes, Darcy lui murmura : 'Méfiez-vous de lui, Mrs Darcy.'

-'Pourquoi donc? Que se passe-t-il?'

-'Il vous regarde d'une manière que je n'apprécie pas. Vous êtes ma femme et il se permet de flirter ouvertement avec vous.'

-'Nous ne faisions que danser.'

-'Vous étiez trop proche.'

-'Au contraire, les distances étaient plus que respectables.'

-'Il sourit beaucoup trop.'

-'Vous savez, sourire est habituellement une action encouragée par les gens en général. Peut-être que si vous l'essayiez de temps en temps, vous y prendriez goût.'

-'Je ne plaisante pas, Lizzie.' S'exclama-t-il sèchement, baissant la voix.

Elizabeth éclata de rire. 'Oh, Will…' chuchota-t-elle. 'Seriez-vous jaloux?'

Piqué au vif, il se renfrogna légèrement. 'Je vous mets seulement en garde, Mrs Darcy. Ses intentions ne sont certainement pas aussi innocentes que vous pouvez le croire.'

-'Et quelles seraient ses intentions?' Elle attendit un moment et, voyant qu'il n'avait aucunement envie de répondre, elle ajouta : 'Je ne crois pas que ce soit le cas.'

-'N'acceptez pas la prochaine fois.' Dit-il soudainement, très sérieux. 'Je ne veux plus vous voir danser avec lui.'

Surprise de ce comportement possessif, Lizzie haussa les sourcils. 'Quel mal y a-t-il pour un homme d'inviter une femme seule à danser, surtout lorsque le mari de cette dernière ne daigne jamais l'inviter lui-même?'

-'Je danse avec vous présentement.' Se défendit Darcy.

-'Oui, car vous avez peur que le premier venu m'enlève et non pas parce que vous avez réellement envie de partager ce moment avec moi.' Répliqua Lizzie, agacée. 'Si de me voir m'amuser est si pénible pour vous, je peux vous promettre de rester assisse bien sagement dans un coin jusqu'à ce que cette soirée finisse.'

Le visage de son époux s'adoucit. 'Vous ne pouvez m'en vouloir d'être possessif alors que tous les hommes de cette pièce ont les yeux rivés sur vous. Je crains que vous n'avez aucune idée de l'image que vous projetez.'

-'Et quelle image est-ce que je projette?'

Il la jaugea du regard, une étrange lueur lui traversant les yeux. 'Une vision angélique.' Il lui glissa ensuite à l'oreille : 'Je ne peux attendre que cette soirée se termine.'

Elle sentit le feu lui monter aux joues. Aucune réponse lui vint à l'esprit et elle se maudit d'être aussi désemparée devant cette phrase remplie de sous-entendus. Déjà des images lui vinrent en tête et il lui fut impossible d'ignorer les brûlements que cela provoqua en elle. 'Vous êtes mesquin, Mr Darcy.'

-'Je ne vois pas de quoi vous voulez parler.'

-'Si vous pensez que vos paroles m'empêcheront de profiter de cette soirée et que je ne prendrai plus aucun autre partenaire, détrompez-vous. Vos petits manèges ne m'affectent pas.'

-'Vraiment?'

Elle hocha la tête, leva la tête en signe de défi. 'Pas du tout.'

Lorsque la musique cessa, Darcy embrassa lascivement l'envers de sa main gantée, lui jetant un regard si séduisant et brillant de désir qu'elle sentit ses jambes fléchir sous elle. Il s'éclipsa ensuite, un sourire aux lèvres, et disparut vers la table de rafraîchissement. Le souffle saccadé, elle essaya tant bien que mal de calmer son cœur battant.

Sans succès.

Contrariée, elle prit place sur une chaise et attendit que Darcy revienne avec deux verres avant de boire le sien presque d'un trait. Il lui tendit alors son propre breuvage, qu'elle but avec modération cette fois. Elle l'observa du coin de l'œil, irritée de le voir si satisfait de lui-même. Cependant, peu importe les plans de vengeances qu'elle tramait mentalement, aucun ne pouvait atténuer l'anticipation du corps de Darcy contre le sien, ses lèvres sur son cou, son souffle près de son oreille, ses mains dans ses cheveux…

Oh, Darcy était certainement futé. Maintenant qu'elle ne pouvait plus le chasser de ses pensées, elle attendit la fin de cette soirée avec une impatience palpable et, à son plus grand dam, refusa malgré elle toutes les invitations qui lui furent faites.

(-*-)

Alors voilà! Il y avait un peu plus de Darcy/Lizzie non? Et certaines d'entre vous souhaitaient plus de Georgiana aussi : ) Et je me suis aussi dit qu'un peu de Colonel Fitzwilliam ne serait pas mal non plus… ; ) J'espère que vous avez appréciez ce chapitre! Je ne promets pas de date pour la publication du prochain chapitre, mais je peux vous affirmez que je travaille très fort pour que ce soit très bientôt !