Enfin le chapitre 16 est en ligne, après sept révisions et une semaine et demi de retard…Désolée d'avoir tant tardé, mais j'ai eu beaucoup de mal à décider par où je voulais que l'histoire se dirige et comme la dernière semaine n'a pas été la meilleure de ma vie, j'ai dû reporter la publication. Enfin bref, le voici donc, et j'espère que vous l'apprécierez

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Chapitre 16

L'héritier de Netherfields

Même si Elizabeth appréciait réellement la présence de sa famille entière à ses côtés, cela ne signifiait pas nécessairement que c'était de tout repos. Lorsque son père était présent, les choses semblaient plus calmes car la présence de Mr Bennett avait toujours eu un effet très calmant sur ses filles et sa femme. Cependant, il n'était pas dans les habitudes du patriarche de s'attarder trop longtemps en milieu majoritairement féminin et, rapidement lassé des conversations insipides, il se réfugiait souvent dans la grande bibliothèque. Par chance, la présence de ses gendres apaisait ses oreilles sensibles et lui remontait nettement le moral. Après autant d'années auprès de femmes, Mr Bennett fut soudainement très satisfait que ses filles aient épousés des hommes intelligents qui, par conséquent, soutenaient des conversations plus qu'appréciables. Ainsi, son séjour à Netherfields ne fut pas aussi éprouvant qu'il ne l'aurait cru et il se surprit même à l'apprécier.

Quant à Lizzie, elle retrouvait dans ce chahut-bahut quelque chose de rassurant. C'était comme si elle revenait en arrière et qu'elle était Miss Elizabeth Bennett à nouveau. Combien d'après-midi avait-elle passé à écouter Lydia et Kitty se chamailler à propos d'une robe ou d'un chapeau? Combien de fois avait-elle supporté en roulant les yeux les heures de pratique que s'imposait Marie au piano? Sans parler de toutes les crises de sa mère…C'était un environnement à rendre fou et Lizzie le savait. Pourtant, elle ne pouvait s'empêcher d'apprécier l'atmosphère. Elle avait l'impression de revivre ses années à Longbourn et ce bref retour en arrière lui apportait une nostalgie au goût aigre-doux.

Elizabeth passa donc beaucoup de temps avec ses sœurs et sa mère. Maintenant que Jane pouvait à nouveau se déplacer et que Mrs Bennett semblait s'être miraculeusement rétablie de sa crise, elles passaient toutes leur après-midi dans la salle à dessin à préparer le trousseau du futur bébé.

Oh, Jane. Elle était si radieuse! Sa grossesse maintenant avancée était si évidente qu'il lui était impossible de sortir en public ou de visiter des amis. La protubérance de son ventre saillait sous sa robe de coton, parfaitement rond, et un sourire comblé était peint sur ses lèvres à tout moment de la journée. Un après-midi, alors qu'elles brodaient toutes des habits, la conversation dévia soudainement vers Jane qui, aussi calme qu'à son habitude, souriait à son travail. Lydia, qui n'avait pas touché à sa robe, trop occupée à calmer Edwina, ne cacha pas le dégoût dans sa voix lorsqu'elle lui dit : 'Ciel que tu es grosse, Jane.'

Toutes les têtes se tournèrent vers elle, scandalisées.

-'Je ne crois pas avoir été si grosse.' Poursuivit-elle d'un air suffisant. 'J'ai gardé ma ligne, Dieu merci, et je rentrais dans mes robes quelques jours après la naissance d'Edwina. Si tu ne fais pas attention, Jane, tu ne rentreras plus jamais dans les tiennes. Il est si facile de prendre du poids quand on est enceinte.'

Jane ne sembla pas du tout affectée par les paroles de Lydia et se contenta de sourire timidement. 'Le médecin trouve mon poids très adéquat. Merci de t'inquiéter pour moi, Lydia, mais je ne me soucie pas de ma ligne. Tant et aussi longtemps que mon enfant se porte bien et que je lui donne tout ce dont il a besoin, je ne m'encombre pas avec de si petits détails.'

-'En tout cas, je suis bien heureuse de ne plus être dans cette situation. Porter Edwina a été les plus longs neufs mois de ma vie.'

-'Huit.' Grinça Elizabeth en rougissant, n'oubliant pas facilement la « précocité » de la naissance de sa nièce.

-'Huit ou neuf, peu importe. Je ne souhaite pas revivre ce moment pour rien au monde. Je suis déterminée à ne pas avoir d'autres enfants, c'est beaucoup trop difficile. Si on disait aux femmes dès le début ce que c'est de mettre au monde un bébé, je suis certaine qu'il y aurait moins de naissances. Qui voudrait volontairement s'imposer les douleurs de l'accouchement? Et puis les risques que l'on prend! J'ai entendu parler de cette femme, Mrs Carrera, qui a été en travail pendant si longtemps que le médecin a été obligé d'utiliser les forceps. Et bien, elle est morte d'une infection le lendemain.'

Lizzie fixa sa cadette d'un air horrifié. Comment Lydia pouvait-elle être si insouciante et déplacée? Non seulement de parler de ce sujet inapproprié, mais surtout devant Jane! La pauvre avait pâli devant les propos de sa jeune sœur, ses mains soudainement tremblantes.

-'La procréation est un miracle de la vie.' Commenta alors Marie, sa voix dure et hautaine. 'Et une décision de Dieu, non pas la tienne.'

Lydia roula les yeux. 'Le jour où tu passeras à travers ce que j'ai vécu, tu reviendras t'excuser à genoux.'

-'Je ne crois pas, non. Les enfants sont des dons, chacun d'entre eux, et je serais très heureuse d'en avoir autant que le Seigneur voudra bien m'en donner. C'est mon devoir d'épouse et de chrétienne de procréer, peu importe les souffrances que cela peut entraîner.'

-'Oh, foutaises.'

-'Lydia! Ce ne sont pas des choses à dire, surtout pas devant Edwina!'

-'Elle ne comprend rien à rien, Lizzie, elle est beaucoup trop jeune. Les bébés sont bêtes comme des poissons.'

-'Et Mr Wickham?' pointa Mrs Bennet, concernée. 'Ne voudra-t-il pas un fils?'

Le visage de Lydia s'assombrit et elle chassa la question d'un geste négligeant de la main. 'George est très satisfait de sa fille et ne souhaite pas d'autres enfants.'

-'Impossible!'

-'Impensable!'

-'Tout homme veut un fils!' s'écria Mrs Bennett, outrée. 'Oh, si j'avais pu satisfaire Mr Bennet dans ce domaine! Mais je ne pouvais pas, ma nature est trop fragile pour porter des garçons, bien sûr. Tout homme veut un fils, Lydia, il ne voulait sûrement pas te mettre de pression. Quel gentleman! Et de toute façon, qui serait votre héritier si vous n'en aviez pas un?'

Lydia, qui ne semblait pas très heureuse de la tournure de la conversation, répliqua : 'Oh, et bien, j'en aurai peut-être un autre alors. Mais pas maintenant. J'ai déjà assez de mal avec Edwina, je ne veux pas un autre bébé braillard dans les pattes avant quelques années au moins. Je suis jeune et j'ai encore du temps devant moi. C'est un avantage à se marier à mon âge.'

-'Oui, bien sûr.' Approuva Mrs Bennett, rassurée.

-'Ridicule.' Murmura Marie, se concentrant furieusement sur son travail.

-'Et bien moi, je ne suis pas prête à être mère ni femme ni rien.' Maugréa Kitty d'un ton acerbe. 'Père refuse que j'assiste aux soirées mondaines. À ce rythme, je serai vieille fille et n'aurai jamais la chance d'être rien d'autre qu'une Bennett.'

-'Il n'y a rien d'honteux à être une Bennett, fille!' s'exclama Mrs Bennett, choquée. 'Pourquoi t'attaques-tu donc à ta propre famille? N'as-tu donc aucune gratitude?'

Lizzie s'interposa. 'Ce n'est pas ce qu'elle voulait dire. Elle voulait seulement dire que la privation de sorties ne lui permettra pas de se marier et donc, de changer de nom.'

-'Oui…je suppose que ce n'est pas la meilleure des situations pour toi, Kitty, et Dieu seul sait combien j'ai supplié votre père de bien vouloir retirer cette prohibition.' Concéda Mrs Bennett d'un air renfrogné. 'Ce n'est pas ainsi qu'elle trouvera mari, lui ai-je dit, et il m'a répondu qu'au rythme où on mariait nos filles, plus aucun célibataire de l'Angleterre ne serait disponibles de toute façon.'

Elizabeth fronça les sourcils, un peu déconcertée. Elle connaissait l'humour de son père et ce genre de déclaration n'était pas rare vu sa nature, mais elle aurait cru qu'après autant de temps depuis l'histoire de Lydia il aurait céder aux supplications de Kitty de recommencer à sortir en société. Pourtant, selon sa sœur, non seulement n'avait-elle pas repris sa place là où elle l'avait laissé une année auparavant, mais il ne semblait pas avoir d'espoir qu'elle la reprenne de sitôt. Lorsqu'elle demanda ce que Mr Bennett avait dit sur le sujet, c'est Marie qui répondit.

-'Selon les convenances, les plus jeunes sœurs ne peuvent sortir tant que les aînées ne sont pas mariées. Kitty devra donc attendre que je sois mariée avant de pouvoir elle-même faire sa sortie.'

-'Autant mieux dire jamais.' Grommela la concernée.

-'Cela me semble un peu injuste.' Commenta Lizzie. 'Nous étions toutes sorties, il est cruel de revenir ainsi sur ce qui a déjà été fait. Qui plus est, Kitty a toujours agi de manière presque irréprochable.'

Cette dernière jeta un regard surpris à Lizzie, peu habituée que l'on prenne sa défense. Jane, qui était resté silencieuse, posa une main sur le bras d'Elizabeth. 'Peut-être pourrais-tu en toucher deux mots à Père? Vous vous entendez si bien tous les deux. Je suis sûre que tu aurais plus de succès qu'aucune d'entre nous à lui faire voir raison.'

-'Oh! Comme si une fille pouvait avoir plus de poids qu'une épouse!' renifla grossièrement Mrs Bennett d'un air dédaigneux.

Après maintes supplications de Kitty, Lizzie accepta à contrecoeur. Dans un sens, elle trouvait injuste que Kitty soit la seule à ne pouvoir sortir et à souffrir de l'agissement de Lydia, mais d'un autre, cette situation la rassurait car elle la savait en sécurité pendant cette censure. Elle était consciente que le caractère de Kitty n'était pas aussi fort et écervelé que celui de Lydia, mais Elizabeth ne savait pas si elle souhaitait vraiment prendre la chance qu'une autre histoire du même genre ruine pour de bon la famille Bennett.

En l'observant un peu, Lizzie remarqua à quel point sa sœur avait changé en l'espace de quelques mois. Ses yeux étaient tristes, remplis de rancune. Elle avait rarement souris, dans ces quelques jours ensemble. Kitty devait trouver le temps long à Longbourne, sans bals ou soirées auxquelles elle pouvait assister. Et n'avoir que Marie comme compagnon…Non pas qu'elle n'était pas agréable à fréquenter, mais…Et bien, il fallait qu'Elizabeth l'avoue, Marie n'était pas la meilleure personne pour se désennuyer. Et qu'allait-il se passer si les choses persistaient comme elles étaient? À quel point Kitty serait-t-elle changé d'ici quelques années? Son amertume serait-elle si forte que plus rien ne la rendrait heureuse? Elle était si discrète, si influençable! Si elle n'avait pas d'exemple elle ne pouvait pas évoluer, elle était trop timide pour faire sa propre place. Elle avait suivi Lydia pendant si longtemps, tellement que parfois on aurait pu croire que l'ainée des deux était la cadette et non le contraire. Kitty avait besoin de quelqu'un avec qui elle pourrait apprendre à être elle-même, quelqu'un de son âge qui saurait lui montrer comment bien se tenir en société. Maintenant qu'Elizabeth et Jane étaient mariées à des hommes d'influence, la possibilité de faire une bonne alliance dans leur cercle de connaissances n'était pas impossible.

Soudainement, Lizzie sut qu'elle n'avait pas le choix de lui venir en aide. Avec l'attitude de sa mère, qui ne semblait pas s'en faire le moins du monde de l'état d'âme de sa fille, et celle de son père, qui ne pouvait voir autre chose en Kitty qu'une jeune femme sans intelligence particulière, tout semblait dire que si personne n'intervenait sa soeur allait certainement être très malheureuse.

-'Je suis déçue que Mr. Wickham n'ait pas pu se joindre à nous.' Soupira Mrs Bennett à un moment. 'Toute la famille serait alors complète. Lydia, tu aurais dû insister.'

-'Mère, vous savez bien que George est très occupé. Il avait des engagements dont il ne pouvait se dérober. De toute façon, il est impossible de mettre mon époux et Mr Darcy dans la même pièce.'

Lydia jeta un coup d'œil à sa sœur, qui le lui rendit avec autant d'indifférence que si elle avait regardé un mur. L'absence de Wickham avait été un sujet chaud cette semaine et Elizabeth ne voulait certainement pas s'emporter encore une fois.

-'Oui, je n'ai pas oublié.' Commenta Mrs Bennett d'un ton sec. 'De toute façon, on ne voit que très rarement Mr Darcy. Même si Mr Wickham était présent, cela ne changerait pas grand-chose. C'est un vrai gentleman, Lydia, qui sait traiter une femme comme il se doit. Il n'hésiterait pas une seconde à passer du temps avec nous et à nous divertir. On ne peut pas en dire autant de tous…' Elle posa un regard pesant sur Lizzie. 'Lydia, Mr Wickham sera sûrement apte à se libérer dans les prochains mois, n'est-ce pas? Mr Darcy ou non, il ne peut se dérober à ses obligations familiales. D'autant plus que nous sommes sa seule famille, puisque ses parents sont morts. Il serait inacceptable qu'il ne se présente pas au baptême.'

Elizabeth leva brusquement la tête. Le baptême! Elle n'avait pas songé que, à ce moment, Wickham et Darcy aurait à se faire face. Il était impossible que Darcy n'y assiste pas, étant non seulement le meilleur ami de Bingley, mais aussi le futur parrain de l'enfant.

-'Il était à peine présent pour celui de sa fille, alors.' Répondit Lydia d'un ton détaché. 'Je ne sais pas s'il sera capable de se libérer pour celui de l'enfant de Jane.'

-'Et bien, écris lui rapidement pour lui dire que tu insistes. Il faut qu'il soit présent. Dis-lui que s'il ne se présente pas, je serai terriblement vexée.'

-'La moitié de mes sœurs ne sont pas venus au baptême d'Edwina, pourquoi ferait-il l'effort de se déplacer?'

-'Et bien, si tu nous avais averti avant de la date du baptême, nous aurions pu être présentes.' répliqua durement Elizabeth, piquée au vif. Elle s'en était beaucoup voulu d'avoir manqué l'évènement, mais la lettre de Lydia était arrivée si tard qu'il avait été impossible pour elle et Jane de s'y rendre.

Lydia haussa les épaules sans répondre, trop occupée avec son bébé pour ajouter quoi que ce soit. 'Si elle pouvait arrêter de pleurer!' maugréa-t-elle en la changeant de position pour la vingtième fois. Les pleurs se transformèrent en hurlements et le petit visage d'Edwina, dont les traits étaient déformés par un outrage inconnu de sa mère, n'était pas particulièrement joli à observer.

-'Tu ne sais pas t'y prendre, voilà tout.' Répondit Marie sans même lever les yeux des petites fleurs blanches qu'elle effectuait avec minutie sur une robe immaculée.

-'Et toi, tu le saurais peut-être?'

-'Non, mais c'est évidant que tu n'y connais rien.'

-'Oh! Edwina, qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de toi! Arrête de pleurer, non de non!'

-'A-t-elle mangé?' demanda Jane, caressant le crâne chauve de l'enfant. 'Peut-être fait-elle de la température, elle me semble chaude.'

-'Tes mains sont glacés, Jane, bien sûr qu'elle te semble chaude. Et elle ne veut pas manger convenablement. Peut-être a-t-elle attrapé froid?'

-'Elle ne semble pas enrhumée.'

-'Mère, qu'en pensez-vous?'

Mrs Bennett eut un rictus, presqu'offensée par la question. 'Pourquoi le saurais-je? Votre père et moi avions les moyens de nous offrir plusieurs nourrices pour s'occuper de vous, bien sûr. Sans offense, Lydia, ma chérie.'

Elizabeth observa la scène en silence. Edwina n'était pas un bébé facile, comme l'avait dit sa cadette. Il suffisait de la voir essayer de s'en occuper pour constater que Lydia n'avait aucune idée de ce qu'elle faisait avec l'enfant. Lizzie ne put s'empêcher de ressentir de la pitié; envers la mère ou la fille, ça, elle n'était pas encore tout à fait certaine.

-'Pourquoi est-ce que je n'ai qu'une seule nourrice?' grommela Lydia en se levant pour balancer l'enfant plutôt maladroitement. 'Oh et puis zut, que quelqu'un la prenne.'

Marie refusa obstinément de prendre l'enfant. 'Elle bave partout, je ne souhaite pas salir ma robe du dimanche.'

Mrs Bennett clama que sa migraine était trop forte pour supporter les cris de plus près et dans les bras de Kitty Edwina atteignit un apogée de pleurs insupportables. Même les bras réconfortants de Jane n'y purent rien. Déboussolée devant le comportement du bébé, les filles Bennett se regardèrent à tour de rôle d'un air inquiet. Pourquoi Edwina pleurait-elle autant?

-'Seigneur, je n'en peux plus!' geignit Lydia, dont les bras n'étaient pas habitués à la soutenir très longtemps. 'Tiens, Lizzie, prend la toi. Tu n'as pas encore essayé.'

Elizabeth voulut refuser, mais Lydia lui présenta le bébé si rapidement qu'elle n'eut pas le temps de protester et dût presque l'attraper pour ne pas qu'elle tombe au sol. Paniquée, elle resta immobile pendant un moment, incertaine de ce qu'elle devait faire. Dans sa crise, Edwina peinait à respirer tellement elle pleurait, inspirant en hoquetant avant d'hurler de plus belle. Son petit menton tremblait, sa bouche grande ouverte découvrant ses gencives roses. C'était la première fois que Lizzie voyait un bébé de si près et elle ne put s'empêcher de froncer devant la grimace édentée de l'enfant. En regardant de plus près, elle remarqua que sa gencive à droite était enflée et rouge. Était-ce la cause de ses pleurs? Avant même de savoir ce qu'elle faisait, Elizabeth effleura l'endroit de son doigt. Soudainement, Edwina referma sa bouche, mordillant son index à travers ses sanglots. Elizabeth retira vivement sa main, surprise, et l'enfant se remit à pleurer.

La pièce était silencieuse. Tous les yeux étaient fixés sur elle, choqués, curieux. Que venait-elle de faire?

-'Et bien, recommence.' La poussa Lydia, impatiente.

-'Je ne sais pas si…' balbutia Elizabeth en rougissant, incertaine de si cette action était appropriée. Elle recommença tout de même, laissant l'enfant mordiller son doigt. Edwina ne cessa pas de chigner, mais les hurlements cessèrent; toutes les six soupirèrent de soulagement.

-'Et bien.' Commenta Mrs Bennett après un moment. 'Je n'aurais jamais cru que tu pourrais la faire taire, Lizzie, tu n'as pas du tout la fibre maternelle.'

-'Mère!' s'écria Jane. 'Quelle terrible chose à dire!'

-'Il faut bien que quelqu'un le dise. Elle est beaucoup trop vive et impulsive pour être mère, Jane, elle n'est pas comme toi.'

-'Et pourtant, elle est la seule à pouvoir la calmer.' Nota Marie d'une voix silencieuse.

Cramoisie, Elizabeth n'osait pas se prononcer. Elle ne savait pas du tout ce qu'elle était en train de faire et les paroles de sa mère semblaient faire beaucoup de sens à ce moment. Elle n'avait pas l'étoffe d'une mère, elle n'était ni douce, ni patiente et elle ne savait rien des bébés. De prendre Edwina dans ses bras, sans savoir ce qu'elle voulait, l'effrayait plus qu'elle n'aurait pu l'expliquer.

-'Tu es sûr qu'elle n'a pas faim?' demanda Lizzie d'un ton hésitant.

-'Je te l'ai dit : elle refuse de manger.'

-'Il doit bien y avoir quelque chose…'

Mis à part la quantité phénoménale de salive qui s'échappait de la bouche d'Edwina, elle ne voyait rien qui clochait chez l'enfant. Soudainement, elle se concentra sur la sensation de la gencive sous son doigt et remarqua que là où l'enflure se trouvait il semblait y avoir une petite bosse.

-'Je sais que la question est un peu ridicule, mais…les bébés n'ont pas de dent jusqu'à quel âge?'

Elles se dévisagèrent puis les regards se tournèrent vers Mrs Bennett, qui haussa les épaules.

-'Vous croyez qu'elle perce une dent?' demanda Jane, son visage s'illuminant.

-'Comment en être sûre?'

-'Je…je ne sais pas.'

-'C'est certainement ça, regardez-la. Elle a certainement besoin de quelque chose pour mâchouiller.'

-'Je vais y aller.' Se proposa l'ainée en se levant péniblement.

Lydia s'interposa. 'Tu es beaucoup trop grosse pour bouger, Jane. Le doigt de Lizzie semble lui suffire pour le moment. Qui veut faire une partie de cartes?'

Ce soir-là, alors que chacune d'elles étaient dans leur chambre respective et que les hommes étaient toujours au salon, Lizzie se glissa hors de la sienne pour rejoindre celle de Jane.

-'C'est moi.' Chuchota-t-elle après avoir cogné silencieusement à sa porte. 'Je peux entrer?'

-'Oui, bien sûr.'

Jane se brossait machinalement les cheveux, la lueur de la chandelle jetant des reflets dorés sur ses longues mèches blondes. Même dans la pénombre Elizabeth pouvait voir que quelque chose clochait. Elle avait remarqué le silence de sa sœur pendant le repas du soir et c'est avec une certaine inquiétude qu'elle s'approcha du lit.

-'Qu'y a-t-il, Jane? N'essaie pas de me cacher ce que c'est car je sais qu'il se passe quelque chose. Tu as à peine touché à ton assiette.'

Jane eut un pâle sourire. 'J'ai peur que le discours de Lydia m'ait troublé. Crois-tu vraiment que cela fasse si mal?'

Ses grands yeux effrayés se levèrent vers elle et Elizabeth ne put s'empêcher de sourire avec tendresse. 'Ne prends pas ce que dis Lydia trop au sérieux. Tu sais bien qu'elle exagère tout le temps.'

-'Ce n'est pas vraiment un secret, nous savons toutes que l'enfantement ne se fait pas sans…douleurs. Et après tout, Lydia a vécu ce…genre de choses…avant, elle est très bien placée pour savoir ce qu'il en est. Je n'étais pas naïve au point de ne pas savoir, mais je crains de ne pas avoir réalisé pleinement ce que mettre un enfant au monde impliquait. Maintenant que j'y pense, Lizzie, j'ai bien peur d'être terrifiée à l'idée de…de…'

Elle frissonna. Elizabeth prit fermement sa main dans la sienne et la regarda droit dans les yeux, forçant sa voix à être ferme. 'Tout se déroulera à merveille. Tu n'as pas à avoir peur, le médecin sera présent et je serai là, derrière la porte, si tu as besoin de quoi que ce soit.'

Lizzie n'avoua pas qu'elle aussi était inconfortable lorsqu'elle songeait à l'accouchement. Elle avait entendu tant d'histoires à propos de femmes qui étaient mortes en couche ou de fièvres puerpérales – notamment la mère de son mari – et jamais elle ne pourrait supporter de perdre sa sœur.

-'Oh, Lizzie, comment est-ce que je vais faire pour supporter cela toute seule?' murmura Jane, les larmes aux yeux. 'Si seulement tu pouvais être présente, ou Charles même, je n'aurais pas si peur! Oh, non, pas Charles! Il serait terrifié à l'idée de me voir souffrir et je me sentirais si coupable de le mettre mal à l'aise…'

Elizabeth soupira. Pourquoi ne pouvait-elle pas assister sa sœur seulement parce qu'elle n'était pas mère elle-même? Pourquoi l'empêcherait-on d'aider Jane alors qu'elle était certainement la personne qui pourrait le plus la consoler? 'J'aimerais tant pouvoir y être, Jane.'

-'Je sais.'

-'Tu n'as pas à t'en faire, tout ira bien.' Lizzie s'efforça à ne pas songer aux forceps. Quelle sotte Lydia avait été de mentionner cette histoire!

-'Je suppose que tu as raison. Je crois que…Oh!'

Elizabeth sursauta lorsque sa sœur s'exclama et l'observa avec stupéfaction alors qu'elle éclatait de rire, une main sur son ventre. 'Un vrai petit guerrier, celui-là.'

Lizzie était fascinée malgré elle. Jamais elle n'avait vu de femme enceinte de si près et le renflement abdominal de sa sœur ne manquait pas de piquer sa curiosité. Elle se demanda l'effet que ça faisait de porter un enfant, de le sentir bouger en soi. Et l'ampleur que ça avait! Soudainement, une furieuse envie de poser sa main sur le ventre de Jane s'empara d'elle et elle avança le bras prudemment.

Comme c'était étrange! Elle ne s'était pas attendue à ce que ce soit aussi ferme…Elle crut distinguer du mouvement sous ses doigts, des espèces de vagues irrégulières et –

Elle enleva brusquement sa main. 'Il a donné un coup.' Murmura-t-elle, stupéfaite.

Jane hocha la tête en riant. 'Oui, il fait la même chose avec Charles.'

-'Tu crois toujours que c'est un garçon?'

-'Oui, j'en suis certaine.'

-'Tu as toujours dit que tu voulais une petite fille.'

Jane rosit, haussant les épaules. 'Oui…Mais ça ne m'enlève pas que je suis extrêmement satisfaite d'avoir un garçon. Je suis jeune encore, j'aurai d'autres bébés et malgré ce que Lydia a dit, je veux d'autres enfants. Rapprochés, si c'est possible.'

Lizzie ressentit un pincement au cœur en entendant cela. Elle se sentit soudainement coupable de ne pas avoir bronché lorsque Darcy avait exprimé son désir d'attendre avant d'avoir des enfants; pire, elle avait été d'accord. Elle n'avait pas particulièrement hâte d'être mère et ce n'est que maintenant qu'elle réalisait que ce n'était sûrement pas normal. Pourquoi n'avait-elle pas cette hâte, comme Jane?

-'Je n'ai jamais vu un homme être aussi heureux d'être père.' Enchaîna sa sœur, rayonnante. 'Charles me complimente tous les jours, ne cesse de parler de notre enfant et il est impatient qu'il soit au monde. Je suis beaucoup trop gâtée; un mari idéal et un futur père idéal. Je ne le mérite pas.'

Elizabeth força un sourire. 'Bien sûr que tu le mérites, Jane. Personne ne le mérite plus que toi.'

-'Que se passe-t-il, Lizzie?'

-'Rien. Je suis seulement fatiguée.' Mentit-elle.

Lorsqu'elle fut dans sa chambre, Elizabeth marcha jusqu'à son lit d'un pas lent. Elle regarda le côté droit, là où Darcy dormait habituellement, et se sentit très triste tout à coup. C'était tout comme si un énorme poids venait de s'abattre sur ses épaules, et dans son cœur, lorsqu'elle réalisa qu'elle ne vivrait sûrement jamais ce que Jane vivait présentement. Sa mère l'avait dit : elle n'avait pas la fibre maternelle et sa réticence à enfanter ne faisait que prouver ce fait. De plus, Darcy ne lui dirait jamais ouvertement les choses que Charles disaient à Jane. Peut-être ne lui parlerait-il même pas de sa grossesse, faisant comme si de rien n'était, comme le voulait les convenances. Peut-être allait-il vouloir faire chambre à part, le temps que le bébé soit né.

Lizzie chassa l'idée aussitôt. Non, il n'oserait tout de même pas faire cela; après tout, il partageait bien une chambre présentement, contrairement à la plupart des couples qui avaient chacun la leur. Une étrange oppression s'abattit sur elle alors qu'elle faisait les cents pas dans la pièce. Si la maternité n'avait eu aucun intérêt à ses yeux auparavant, maintenant elle lui faisait peur. Et si elle n'avait pas l'étoffe d'une mère? Et si elle n'arrivait pas à élever ses enfants comme il le fallait? Ferait-elle honte à son mari? Serait-il déçu de son incompétence? Ses enfants grandiraient-ils malheureux? Incompris?

Le lendemain, c'est avec culpabilité qu'elle accueillit le soulagement que lui apporta la venue de ses saignements.

(-*-)

L'héritier de Netherfields naquit en fin de soirée par une sombre journée de novembre et fut nommé Charles Gerard Bingley en l'honneur de son père et de son grand-père.

Darcy et Lizzie était retourné à Pemberley une semaine et demie après avoir visité Netherfields à la fin de septembre et à peine étaient-ils à la maison que quelques semaines plus tard ils étaient appelés à revenir chez les Bingleys dans l'attente imminente de l'enfant. Ne voulant manquer cela pour rien au monde, Elizabeth insista pour qu'ils arrivent tôt dans le mois. Le bébé ne devait naître que vers la fin novembre, mais elle ne prit pas de chance et heureusement car Charlie décida de pointer le bout de son nez plus tôt et c'est le quinze novembre au matin que Jane ressentit les premières douleurs. De ce moment tout se déroula très vite, comme dans un rêve, et Elizabeth eut du mal à réaliser que tout était fini et qu'une nouvelle addition avait été faite à la famille Bingley.

Lorsque Jane fut endormie ce soir-là, deux heures à peine après avoir donné naissance à son fils, Elizabeth sortit de la chambre de sa sœur éreintée, mais remplie d'une joie indescriptible. La fierté qu'elle ressentait envers son neveu était une émotion qu'elle ne s'était pas attendue à ressentir et c'est comme sur un nuage qu'elle se rendit à sa chambre, où Darcy l'attendait.

-'Ils dorment.' Dit-elle dans un soupir satisfait, déposant son châle sur le coffre au pied du lit. 'Qu'en est-il de Charles?'

Darcy eut un bref rire et Elizabeth remarqua ses yeux légèrement rougis. Elle haussa un sourcil devant l'allure hagarde de son mari, surprise de le voir dans un état autre que sobre. 'Dans les bras de Morphée. Je serai surpris s'il se souvient de quoi que ce soit demain matin.'

-'Les hommes et le brandy.' Commenta Lizzie en secouant la tête, s'agenouillant devant lui pour l'aider à enlever ses bottes. 'Vous n'y avez pas été de main morte aussi, à ce que je vois.'

Darcy se laissa faire, un sourire aux lèvres. 'Peut-être. C'était le seul moyen de calmer Charles pendant le travail de Jane, il était si nerveux qu'il a cassé deux bibelots de porcelaine et une assiette décorative. En l'espace de cinq minutes.'

-'Quelle façon de célébrer la venue au monde de son fils, il n'en aura aucun souvenir. Pauvre Jane, elle était si heureuse de lui présenter son enfant.'

-'Ne le jugez pas trop vite, Lizzie, ce n'est pas facile pour un homme de savoir que sa femme souffre par sa faute. Charles a subit un enfer cet après-midi, il en faisait pitié. Je me suis dit que l'assommer avec de l'alcool était le meilleur moyen de calmer ses nerfs avant qu'il ne détruise Netherfields au grand complet.'

Elizabeth jeta les bottes près de l'âtre. 'Dois-je vous mettre au lit vous aussi?'

Darcy eut un rictus et se leva, sans chanceler. 'Je vais très bien, Lizzie, je suis seulement un peu échauffé.'

Il était vrai qu'il n'avait pas l'air très affecté par sa consommation d'alcool. Pourtant, il y avait quelque chose de différent en lui; il était de bonne humeur, gai même. Ses gestes étaient un peu plus négligeant, presque nonchalants. Elizabeth s'amusa de ce comportement peu commun à son époux, lui qui ne buvait généralement qu'une coupe de vin pendant les repas et qui s'abstenait à n'importe qu'elle occasion de faire des excès dans ce domaine.

Lorsqu'Elizabeth revint du vestiaire après avoir revêtue sa tenue de nuit, elle retrouva Darcy accoudé contre le manteau du foyer, l'air songeur. Elle s'approcha de lui, inquiète de voir son visage si sérieux, et il parla avant même qu'elle ait pu lui demander quoi que ce soit.

-'C'est étrange, je n'ai passé qu'un temps infime ici et pourtant j'ai l'impression que cet endroit est remplis de souvenirs. C'est comme si je les revivais à nouveau, dans ma tête. Je ne sais pas pourquoi je songe à cela maintenant.'

Lizzie eut un sourire. Oui, Netherfields était plein de souvenirs. Les deux mois de leurs fiançailles avaient été passés entre ici et Longbourn; ils avaient dînés ensemble presque tous les soirs, que ce soit à cet endroit ou à l'autre. Ils avaient fait de longues marches couvrant facilement deux fois la distance entre les deux maisons. Ils s'étaient embrassés ici, dans le petit salon, pour la première fois. Elizabeth sentit se cœur se serrer en songeant à ces moments où le monde ne semblait contenir qu'eux deux.

-'À quoi songez-vous?' demanda soudainement Darcy, curieux.

Lizzie sourit en baissant la tête. 'C'est ici que nous avons dansé ensemble lorsque Charles a donné un bal, vous souvenez-vous?'

Darcy lui prit alors la main, caressant l'envers avec son pouce. Il avait un air espiègle lorsqu'il répondit : 'Oui…et je me rappelle que vous avez été odieuse.'

-'Moi? Et vous, vous croyez avoir été aimable? Vous auriez pu manifester quelconque émotions pour ne pas me faire sentir comme si j'étais la dernière personne avec qui vous auriez voulu danser.'

Darcy hésita un moment avant de répondre. Lorsqu'il le fit, ce fut d'une voix silencieuse. 'C'était un peu cela.'

-'Pardon?'

Son mari haussa négligemment les épaules et n'ajouta rien, son visage révélant qu'il en avait trop dit à son goût. Cependant, c'était mal connaître Elizabeth d'espérer qu'elle abandonne aussi facilement. 'Je serais curieuse de savoir la raison de cet aveu, Will.'

-'Vous seriez offensée.'

-'Essayez et nous verrons bien.'

-'Soit… Je ne voulais pas danser avec vous. Depuis cette soirée où j'ai eu l'audace de vous rejeter, je n'arrivais pas à vous enlever de mes pensées et je savais que vous inviter ne ferait qu'empirer ce que déjà j'essayais d'ignorer.'

-'Et qu'était-ce?'

-'Que mon cœur ne m'appartenait plus.' Ses yeux devinrent soudainement plus doux et il effleura sa joue avec tendresse. 'Et que plus jamais il ne m'appartiendrait.'

Darcy l'attira à lui, un petit sourire aux lèvres, mais Elizabeth posa un doigt sur sa bouche pour l'empêcher de l'embrasser. Ce n'était pas la fin de l'histoire et peu importe son désir de s'abandonner dans ses bras, elle devait savoir. 'Et? Pour quelqu'un qui ne voulait pas danser, vous sembliez déterminé à m'inviter.'

-'Je suppose que mon orgueil m'a poussé à le faire.' Avoua Darcy d'un air légèrement coupable. 'Je me suis mis au défi de danser avec vous pour me prouver que j'étais encore propriétaire de toute ma raison…En fait, c'est votre attitude qui m'a fait garder ma contenance.'

-'J'imagine. Je me rappelle avoir été froide et distante et d'avoir souhaité être capable de refuser votre invitation.'

-'Et j'étais déterminé à montrer à tous que votre présence ne m'affectait pas.'

-'Pourquoi vous en inquiéter? Peu de gens peuvent voir quand quoi que ce soit vous affecte.'

Darcy eut un bref éclat de rire. 'Les joutes sont basses ce soir.'

-'Et les enjeux hauts.'

Il haussa un sourcil, amusé. 'Vraiment?'

-'Bien sûr. Si la fin de cette histoire ne me plaît pas, je serai contrainte à vous faire changer de chambre.'

-'Vous n'oseriez pas.'

Elle lui jeta un regard malicieux en le repoussant doucement. Sa grippe se resserra sur sa taille, mais il la laissa partir lorsqu'elle insista. 'Croyez-vous?'

-'Vous êtes cruelle, Mrs Darcy.'

-'Et vous, vous n'avez pas terminé votre histoire. Nous nous sommes quittés assez brusquement. Que pensiez-vous alors?'

Son mari songea un instant, jaugeant ses alternatives, puis répondit : 'Que vous étiez la plus merveilleuse créature que ce monde ait créée.'

-'Menteur. Dois-je sonner pour que l'on déplace vos affaires?'

Elle tendit la main vers la corde de service, mais Darcy fut plus vite qu'elle et il s'empara de son poignet fermement, sans serrer, et l'attira de nouveau à lui. 'D'accord, d'accord…disons que vous étiez la dernière personne que j'avais envie de fréquenter à ce moment. Votre attitude était irritante. Ce soir-là, alors que j'étais certain que mon idylle pour vous était bel et bien morte, je me suis surpris à…' Il s'interrompit. 'Je n'ai pas le droit de dire de pareilles choses, ce n'est pas convenable.'

Elizabeth soupira. 'L'aveu ou la porte, Will.'

Darcy roula les yeux, mais obtempéra. 'J'ai eu quelques pensées…inappropriées.'

Lizzie ne put s'empêcher de rosir, mais un grand sourire s'étendit sur ses lèvres. 'Vraiment?'

-'Votre fougue avait été si…si ardente. Savez-vous combien de femmes dans mes connaissances tiennent tête aux hommes? Aucune. J'étais si accoutumé aux dames calmes et droites et parfaites que votre désagréable comportement à mon égard était presque comme une bouffée d'air frais.' Il leva son menton avec son index, plongeant son regard dans le sien. 'Vos yeux étaient deux flammes qui me brûlaient à chaque fois qu'ils se posaient sur moi. Vous étiez impossible, inatteignable, imparfaite – oui, Lizzie, imparfaite pour cette société stricte et sévère – et je vous voulais plus que tout ce que j'ai pu vouloir dans ma vie. C'était plus fort que moi, je vous désirais avec une passion démesurée. Et plus j'essayais de fuir cette étau qui m'emprisonnait entre vos griffes, plus je serrais la corde qui me liait à vous. Je n'arrivais plus à voir autre chose que vous, votre sourire…' Il l'embrassa légèrement sur la bouche. Son haleine sentait le brandy. 'Votre cou…Vos épaules…Vos mains…' Il apposait un baiser à chaque endroit qu'il énumérait, lentement, suavement. 'Et beaucoup d'autres éléments de votre anatomie qu'un gentleman ne devrait pas songer à explorer…et toucher.'

Elizabeth retint son souffle. À son grand bonheur, Darcy n'arrêta pas son discours là. 'Et ce jour, à Pemberley, alors que je croyais finalement m'être débarrassé de mon amour pour vous, je vous ai vu, là, sereine et merveilleusement belle. J'ai vu le soleil illuminer votre visage et j'ai su à ce moment que je ne vous avais pas oublié. Que je ne l'avais jamais fait. J'ai su que je vous voulais pour moi seul non pas seulement parce que je vous désirais, mais parce que vous sembliez faites pour être maitresse de Pemberley. Ma détermination a éclaté comme du verre et j'ai compris, ma très chère, ma tendre, ma douce Elizabeth…que je t'aimerais à jamais. Et que si je ne pouvais pas t'avoir alors je n'aurais personne.'

Lizzie ouvrit la bouche pour parler, mais aucun son n'en sortit. Ses pensées étaient brumeuses, enivrées par les mots qu'elle venait d'entendre, hypnotisée par la lueur dans les yeux de Darcy. Un bref rire amusé s'échappa des lèvres de ce dernier en voyant la stupéfaction de sa femme.

-'Dois-je croire par ce silence que je suis à nouveau la bienvenue dans la chambre de mon épouse?'

Son air moqueur dénoua sa langue et Elizabeth se mordit la lèvre. 'Peut-être.'

Il lui fallut quelques secondes pour comprendre ce qui se passait. Un moment Darcy l'observait avec des yeux fiévreux et un instant plus tard elle était dans ses bras, emprisonnées dans une étreinte presque étouffante, sa bouche contre la sienne, ses mains entourant son cou et sa nuque. Elle goûtait l'alcool sur sa langue et, étrangement, cela ne la dérangea pas du tout. Au contraire, cette saveur était enivrante et elle répondit avec fougue, étourdie par l'intensité de ses baisers, de son insistance auprès d'elle. Il la repoussa vers le lit alors qu'elle s'attaquait à sa chemise déjà à moitié détachée, le libérant en un instant de ce vêtement superflu. Les lueurs du feu dansaient sur sa peau nue.

Jamais Darcy ne l'avait-il prit ainsi; impatiemment, avidement, passionnément. Il était un autre homme, cette partie de lui qu'il laissait si rarement faire surface et qui, relâché pour la première fois, laissait ses instincts prendre sur sa raison.

(-*-)

Voilà ! J'espère que vous êtes contente de voir que Darcy s'est enfin décoincé un peu ! Bien sûr, il a eu un peu d'aide de son ami Brandy, mais ça ne change pas que le vrai Darcy, celui qui se cache sous les convenances, ait enfin pu faire son apparition : )

Ne soyez pas surprises si Lizzie n'est pas très maternelle, il ne faut pas lui en vouloir! Elle n'est pas à l'aise avec l'inconnu et elle ne réalise que maintenant ce que ça signifie d'avoir des enfants. Elle s'y fera, le moment venu ;)

Merci à celles qui ont pris la peine de visiter mon LiveJournal, c'est très apprécié! Tout comme j'apprécie recevoir des reviews (d'ailleurs, j'ai vraiment hâte de savoir ce que vous pensez de ce chapitre!), des Story Alert ou des Favorite Story! Ça m'encourage à continuer, malgré tout ce qui se passe dans ma vie qui m'empêche de travailler autant que je le voudrais sur cette fanfic, et je fais mon possible pour publier le plus rapidement que je peux.

Finalement, j'aimerais dire un merci tout particulier à France, qui est toujours fidèle au poste et qui attend avec tant d'impatience chaque chapitre. Ta dévotion me touche beaucoup et je te dédie donc ce chapitre, en espérant que tu l'aimeras autant que les autres : )

À bientôt !