« L'Âme du Sabre »

Lordess Ananda Teenorag


Titre : « L'Âme du Sabre »

Auteur : Lordess Ananda Teenorag

Série : The Great Ace Attorney Chronicles

Genre : Alternate Universe – Fantasy, Supernatural, Adventure, Frienship, Romance, Family.

Résumé : Le destin d'un sabre est de protéger. Le devoir d'un chevalier est de servir. Le rôle d'un partenaire est de soutenir. Tous deux le savent, car c'est ce qu'ils sont l'un pour l'autre.

Personnages centraux : Kazuma Asogi, Ryunosuke Naruhodo

Pairing : Kazuma Asogi x Ryunosuke Naruhodo


Chapitre 1 : Soleil Levant


Archipel du Soleil Levant, Pagode de la Vérité.

Après-midi ensoleillé.


« Il suffit. »

Plus tranchantes que la coupe d'un sabre, les paroles stoppent tout danger à son intégrité.

« Vous ne direz pas un mot supplémentaire et ne ferez pas un pas de plus. Veuillez quitter le temple sur-le-champ. »

Il n'est nul besoin de proférer une menace, quand on est le gardien du prêtre. Kazuma Asogi le sait, car c'est lui qui tient ce poste.

« Jeune Maître. » reprend-il, avec plus de douceur, à son encontre. « Retournons dans vos quartiers. Il est l'heure de votre prochaine leçon. »

« Oui. »

Une marche assurée ouvre le chemin jusqu'à l'entrée, et, tous deux quittent la salle où est reçu le peuple. Les requêtes – toujours plus insistantes – se multiplient. Le mécontentement des rejetés grandit. Mais la priorité de Kazuma Asogi – chevalier personnel de Sa Sainteté – est et sera toujours la sécurité de son protégé. C'est, après tout, son meilleur ami. Son partenaire.

Partenaire.

« … »

Arrivé dans l'intimité de leurs quartiers, le jeune prêtre soupire de toute son âme.

« Kazuma. Tu étais vraiment obligé de le fusiller du regard, tout en posant la main sur ton sabre ? Les gens vont finir par raconter que je fais exprès de faire fuir les gens. »

« Ryunosuke. »

Le regard – sévère – de son protecteur et ami stoppe toute protestation.

« Peux-tu me rappeler ce qui est arrivé la dernière fois que tu as écouté jusqu'au bout la requête personnelle d'un de nos concitoyens ? »

Défait, le jeune homme baisse la tête.

« Il a voulu m'entraîner dans le quartier ouest pour… euh, m'intégrer au personnel d'un établissement. »

« Précisément. Si je n'étais pas intervenu… l'Héritier du Clan Naruhodo se trouverait dans l'endroit le plus mal famé de la région, où les garçons un peu trop naïfs se retrouvent à servir de main d'œuvre gratuite à des individus plus que douteux. »

Rouge comme une tomate, ce dernier secoue la tête.

« Je ne pouvais pas savoir que c'était un marchand d'esclaves ! »

« Le fait qu'il était armé ne t'a pas mis la puce à l'oreille ? »

« … »

Un soupir s'échappe du samouraï. Il a beau être un expert en arts martiaux, particulièrement en sabre… face à ce visage angélique, il est impuissant. L'apparence du jeune homme est à la fois si vraie, si trompeuse. Si vraie, car c'est l'être le plus honnête qu'il connaisse. Si trompeuse, car dort en lui un potentiel exceptionnel. Mais il n'en a pas conscience.

« Ryunosuke. » reprend le sabreur, plus doux. « Je sais que tu vois le bon chez chacun d'entre nous et que tu désires le meilleur pour tous. Mais tu ne peux pas te mettre en danger, par seule compassion. Surtout en étant l'unique Héritier du Clan Naruhodo. »

« Mais s'il avait eu besoin d'aide… ! »

C'est avec tendresse que le gardien élève sa main et effleure le visage si expressif. Il est lié à lui, pour le meilleur comme pour le pire.

« Tu es… trop bon. Trop gentil. Cette douceur que tu as, couplée au fait que tu es le Prêtre de la Pagode de la Vérité… attire les mauvaises personnes vers toi. J'aimerais que tu en prennes conscience et que tu fasses plus attention. »

'C'est la raison pour laquelle je t'aime, aussi. Et que je ne peux rien laisser t'arriver.'

Avec la même confiance, son protégé accepte la main offerte, puis, la serre.

« Je suis désolé que tu aies à te faire autant de souci pour moi, Kazuma. En tant qu'Héritier du Clan Asogi, tu es promis à un avenir brillant. Arts martiaux, pratique des armes, arcanes magiques, calligraphie… tu es si doué dans tous les domaines ! »

« Nous en avons déjà parlé, Ryu. Tu es plus talentueux que tu ne le penses. Après tout, ce bandeau atteste de ma défaite face à ta force ! »

« Ton hachimaki ? Mais ce sont juste des virelangues ! Allez, répète après moi. Les chaussettes de l'archiduchesse sont-elles sèches, archi-sèches… »

Un silence s'installe – éloquent. Puis, vaillamment, le guerrier tente.

« Les saucettes du hachis duchesse sont-elles rêches, archi pêches… ARGGGH ! Diabolique. Diabolique. Ryunosuke Naruhodo, tu es l'incarnation du mal suprême ! »

« Ce n'est pourtant pas difficile, tu sais. » rit son ami, avec douceur, tel le tintement argenté de la lune.

Pour cette mélodie, Kazuma Asogi est prêt à décrocher les étoiles, à laisser passer cette contre-vérité (les virelangues sont une invention des démons et devraient être exorcisés !). Mais il se contente de regarder son protégé, le regard étréci. C'est alors que ce dernier lui sourit – avec la même tendresse – et effleure son bandeau.

« Oh ! Ton hachimaki s'est remis à flotter, après être retombé. Il est si expressif ! Là, il dit : 'Pfff ! Cause toujours !'. »

Kazuma Asogi – le fier descendant des samouraïs de son clan – n'a jamais laissé quiconque toucher à ce bandeau. Sauf lui. Son partenaire. Mais il ne le lui dira jamais.

« Hum, je ne vois pas ce qu'il y a d'étrange. Il fait partie de moi, comme tu le sais. »

« Kazuma. Je te signale que ton bandeau vole au vent, y compris en intérieur. Qu'il prend des formes selon ton humeur. Et qu'il exprime tes sentiments les plus profonds ! »

'C'est parce que je le porte à cause de toi, Ryu. Pour toi, partenaire.'

Le chevalier tait ses paroles et adopte une banalité.

« Tu te poses des questions inutiles. C'est comme ça, c'est tout. Allez, viens. »

(Mais le hachimaki ne mentira jamais. Il a dessiné un cœur dans l'espace, et… son partenaire le capte, sans faillir. Lui aussi comprend sa pudeur et sait y répondre, avec délicatesse…)

« Tu veux faire une partie de shogi ? » détourne-t-il savamment, par considération.

'Merci, partenaire…'

Ryunosuke Naruhodo – en dépit de son apparence maladroite – est adroit à ce jeu de stratégie traditionnel. Il résout les énigmes mathématiques avec brio et adopte des tactiques originales. C'est également un grand lettré, fin connaisseur de langue et de littérature, ainsi qu'un orateur hors du commun à ses heures. Mais puisqu'il a osé se mettre en danger, il mérite une correction.

« Il n'en est pas question. » tranche le samouraï. « C'est l'heure de ta leçon avec Dame Mikotoba. Et, crois-moi, lorsqu'elle sera au courant de ton entrevue, tu auras droit à un châtiment dans les règles de l'art. »

« Naaaaaaan ! Je t'en prie, ne lui en parle pas ! »

« Tu peux toujours rêver. »


Alentours de la Pagode de la Vérité, Bois des Songes Nocturnes.

A l'approche de la nuit.


Kazuma patrouille non loin du temple, sabre perché à son flanc. Sa ronde le mène dans le Bois des Songes Nocturnes – là où repose le secret de sa destinée, le serment de son cœur. Bien qu'il soit extrêmement attaché à Ryunosuke, il doit aussi prendre un peu de distance avec lui.

Le sabre en bois claque sur la protection, envoyant le prêtre par terre.

« C'est tout ce dont tu es capable ? » lance le samouraï, en posture de combat.

« Kazuma, tout le monde n'est pas un expert en arts martiaux de ton niveau ! »

Kazuma l'admet. Quoi qu'en disent leurs pairs, il n'est pas parfait. Sa maîtrise des armes et sa discipline ascétique en font un combattant émérite, mais également un professeur très dur. Ryunosuke dit souvent qu'il est un tyran envers ses proches (et lui déconseille une carrière dans l'enseignement). Mais mieux vaut être le tyran d'un prêtre vivant, que l'ami d'un compagnon défunt.

Sans attendre, il le relève avec plus de ménagement.

« Comment se fait-il qu'un homme de ton talent ne sache pas manier le sabre ? »

Son partenaire se frotte la tête et gémit.

« Tu sais bien que j'ai peur des lames ! »

« Ridicule, quand on sait que tu es l'Héritier du Clan Naruhodo. Allez, en garde ! »

« Naaaaaaan ! »

Ses sentiments sont forts – trop forts. Ils battent à l'intérieur de lui, comme un cœur qui refuse de s'arrêter. Il aurait dû depuis longtemps les réprimer, mais l'autre cœur lié à lui est trop vivant.

« Tiens, Sire Asogi. En train de faire sa ronde du soir. Ton protégé en a donc assez de toi ? »

Les yeux du chevalier s'étrécissent. Encore un de ces démons mineurs, qui rôdent la nuit, près de la Pagode de la Vérité… attirés par la pureté de son résident.

« Tu oses te montrer en ce lieu ? » crache le guerrier, méprisant.

'Près de mon prêtre bien-aimé ?'

La créature rit, abjecte. Puis assène cette cruelle vérité.

« Pour un soi-disant gardien, tu es bien égoïste. Tu prétends le protéger, mais, en réalité, tu veux juste le garder pour toi. »

« … »

Il est inutile de nier. Les démons perçoivent les plus profonds désirs, le cœur des pensées. Et Kazuma ne peut cacher ce qui le lie à son ami.

« Pars. » assène-t-il. « Avant que je ne te renvoie d'où tu viens. »

Le rire lugubre accompagne, et sa fuite, et ses songes – plus sombres encore.

'Ryunosuke… pardonne-moi, car… je t'aime.'