Chapitre 11 : Les écorchées
Note d'Auteur : Tellement de temps pour publier un nouveau chapitre. J'en suis désolée. J'ai été absorbée par d'autres événements, d'autres projets, d'autres émotions. C'est difficile de reprendre le fil et ce chapitre était compliqué à écrire pour moi.
J'espère que vous l'apprécierez !
2021 – Fin de l'été avant cinquième année – Maison des Potter
" Lâche-moi Potter !"
Il aurait dû s'en douter. Jamais il n'aurait dû descendre en pleine nuit prendre un verre d'eau dans la cuisine. Pas après la dispute de cette après-midi.
Il passait la fin des vacances d'été chez les Potter. C'était la première fois. Il avait accepté après des années d'insistance de la part d'Albus. Et dans l'après-midi, le jour même de son arrivée, le ton était monté. James et Hugo faisaient rebondir une petite balle avec deux petites raquettes sur une table, quand Albus et lui avaient passé la grille de la propriété. Dès qu'ils l'avaient vu, ils avaient cessé de jouer, figés dans une posture ridicule. La balle avait quitté la table et s'était perdue dans la pelouse. Ils n'avaient pas fait deux pas sur le chemin de gravier que James avait fondu sur eux, la raquette rouge tendu vers le visage de Scorpius.
- Qu'est ce qu'il fout ici? s'insurgeait-il, le visage rougi de colère.
Albus n'avait prévenu personne apparemment. Scorpius sentit la bile s'échauffer dans son ventre mais il attendit que son ami réponde. Celui-ci le fit avec calme et contrôle, Scorpius se dit qu'il avait anticipé ce moment.
- Il est mon invité pour ces quatre prochains jours de vacances.
La visage de James prit plusieurs teintes différentes, et serra si fort la mâchoire que Scorpius se dit qu'il allait faire éclater ses dents. Il crut qu'il allait leur sauter dessus, et il se préparait déjà à riposter, le corps tendu, quand la porte d'entrée de la maison des Potter s'ouvrit.
Harry Potter apparut, un grand sourire aux lèvres, un jean couvert de poussière ou de farine, un torchon sur l'épaule droite. Pas vraiment l'image du héros, ce qui attendrit Malfoy.
" Scorpius, bienvenue!"
Et le garçon se retrouva pris dans une étreinte serrée dont il cacha l'inconfort en lançant un sourire radieux à un James qui paraissait sur le point d'exploser.
- Albus va te montrer la maison.
- Pourquoi personne ne m'a prévenu ? intervint James.
- Pourquoi fallait-il le faire ? demanda Harry en se tournant vers lui. Tu ne préviens pas ton frère et ta soeur quand tu invites tes amis.
- Mais ça n'a rien à voir, on parle de Malfoy là !
Harry garda le sourire aux lèvres mais le regard devint plus dur semblant dire à son aîné "ne commence pas !".
Scorpius connaissait bien ce genre de regard, son père avait parfois le même à son égard.
Et derrière le dos d'Harry Potter, Scorpius fit un doigt à James. Pas son geste le plus malin mais c'était tellement tentant. Le garçon lui lança un regard noir avant de regarder à nouveau son père.
- Bien dit-il calmement, avant de retourner vers la table où Hugo l'attendait, la raquette à la main.
Et Scorpius pénétra pour la première fois dans la maison des Potter. Le reste de la journée s'était formidablement passé, malgré des réticences et regards en biais de certains membres de la famille. Albus et Scorpius les ignoraient superbement. Mais évidemment cette quiétude ne pouvait pas durer.
Et cette nuit-là, il avait fallu que Scorpius ait soif en pleine nuit.
Il s'éclipsa de la chambre et descendit dans la cuisine qui donnait sur une terrasse. La nuit était chaude, étouffante. Scorpius vit les portes fenêtres ouvertes, mais n'y prêta pas attention. Il se dirigea vers l'évier et sortit un verre du placard le surmontant. Il but un grand verre d'eau qu'il abandonna ensuite dans l'évier quand un bruit de pas attira son attention.
Il se retourna et vit James dans l'encadrement de la porte fenêtre, rentrant de la terrasse. Le garçon était torse nu, en short. Quand leurs yeux se croisèrent, Scorpius sut qu'il allait payer leur rencontre. Et en observant le corps noueux devant ses yeux, il comprit qu'en cas de combat, il allait perdre. Il hésita à fuir, puis il se dit qu'il ne tenait à son visage autant que cela. Il voulait bien avoir des côtes cassées s'il parvenait à défigurer un minimum ce salopard.
Il eut un souffle du nez, un sourire méprisant et les jeux étaient faits. En une seconde, James était sur lui et le plaquait contre le frigo. Sa tête se cogna contre la surface lisse mais c'était le bras que Potter lui appliquait sur la gorge qui retint toute son attention. Cet abruti l'étouffait. Scorpius attrapa des deux mains la peau sur les côtés de son corps, y enfoncer ses doigts et tira séchement de toutes ses forces comme s'il étirait une pâte à tarte. Potter cria de douleur, le lâcha, échappa à ses mains et revint à la charge avec un crochet du droit que Scorpius évita de justesse en tombant à genoux. Il rampa vers l'îlot centrale de la cuisine puis se remit debout pour foncer vers l'escalier. Une main attrapa ses cheveux, ses foutus cheveux longs et il fut projeter en arrière. Il atterrit lourdement sur le sol. A nouveau sa tête se cogna et cette fois le choc le troubla. Il retrouva ses esprits juste assez pour vite éviter le poing que James projetait sur lui. Les phalanges s'écrasèrent sur le sol. James hurla à travers ses dents serrés et releva le poing quand ils entendirent des bruits de pas à l'étage.
Ils s'écartèrent l'un de l'autre en un instant. James s'adossa au mur tenant son poing blessé dans son autre main et Scorpius se colla à l'ïlot central et ils attendirent dans l'ombre.
Quand Hugo passa dans la cuisine, Scorpius en fut soulagé. Ce fut court car il vit James quitter la porte du regard et le regarder d'un air féroce, prêt à bondir. Scorpius se souleva en un éclair et attrapa une lame sur le porte-couteau et le pointa sur le garçon qui stoppa net. Hugo fit un mouvement pour remonter les escaliers, mais Potter l'arrêta.
" Reste Hugo. N'appelle personne", dit James puis il se tourna vers Scorpius. "Tu vas me saigner Malfoy? Dans ma propre maison?" ricana-t-il.
Scorpius se sentit ridicule et lâche, le couteau à la main, le regard d'Hugo sur lui.
- J'en ai pas l'intention, non, dit-il calmement. Mais je pense que tu as eu ton émotion de la soirée et que je peux retourner me coucher.
James eut un rire mauvais et lui lança un regard noir. Il avança et Scorpius leva le bras, la lame tendue vers la poitrine de James. Le garçon avança encore, jusqu'à ce que la pointe du couteau touche sa peau. Scorpius tressaillit. James ne semblait pas sentir le métal froid qui menaçait de lui couper la chair.
- Tu penses que tu as dégusté Malfoy ? souffla-t-il Prépare-toi. Parce que c'est ma dernière année à Poudlard, je vais m'appliquer à te pourrir.
- Tu n'as rien de mieux à faire, espèce de cinglé ? grinça Scorpius.
- Non, pas tant que tu continueras à pourrir la vie de mon frère.
- Ton frère? Mais arrêtes tes conneries Potter, tu n'en as rien à faire de ton frère.
James garda le silence, la haine luisait dans ses yeux bruns.
- Tu sais pourquoi il n'a pas été élu Capitaine des Serpentards ? demanda-t-il à Scorpius, observant ses réactions.
Scorpius fut surpris de la demande. Le poste pour cette année était vacant, puisque le Capitaine de Serpentard avait fini l'école en juillet. Albus voulait poser sa candidature, il lui avait presque fait un trou dans la tête avec cela toute l'année mais il avait décidé d'abandonner avant la fin de l'année et n'avait pas déposé sa demande. Scorpius avait été surpris mais Albus avait éludé la question.
- Il a dit que le poste ne l'intéressait pas, répondit-il.
Potter eut un rire sans joie, écoeuré.
- Foutaises ! Il voulait le poste, il a fait sa demande, mais il n'a pas eu l'adhésion du groupe.
- Qu'est ce que tu racontes Potter ? demanda Scorpius, les dents serrés.
- Ils ont refusé sa candidature… à cause de toi !
Scorpius hocha de la tête, la bile lui montait aux lèvres.
- Tu racontes n'importe quoi !
- Ils ne veulent pas ternir l'image de l'équipe en étant associé avec toi, ta famille et les rebus dans ton genre.
- Ferme-la Potter ! ragea Scorpius, son corps tremblant de colère.
Soudain, James lui saisit le bras et le tordit en un geste sec jusqu'à lui faire lacher le couteau. Sous la douleur Scorpius tomba à genou et Potter le lâcha. Scorpius serrait son bras et masser son coude, une douleur lanscinante se propageait dans son membre. Mais la souffrance était ailleurs.
James mentait, évidemment il mentait. Ce n'était pas sa faute...
La voix venimeuse de James lui parvint.
- Tu es une plaie purulente qu'il se traine." A nouveau ce ricanement sinistre. "Et tu ne t'en rends même pas compte."
Du coin de l'oeil, il vit Potter quitter la cuisine et prendre l'escalier vers les chambres.
Hugo restait là, adossé au mur près du couloir.
- Il a raison, dit-il enfin, alors que Scorpius ne faisait aucun geste pour se lever. Sa voix était froide. Cette histoire a assez duré.
- Cette histoire ? souffla Scorpius, désabusé.
- Tu n'es pas le bienvenu ici, continua la voix dépourvu de compassion, froide et cinglante. Je ne comprends même pas qu'Albus ait osé demander que soit invité. Tu n'as pas l'impression de détoner dans le paysage. Putain Malfoy, personne ne veut de toi ici et le seul qui veut ta présence le paie tous les jours.
- Et qui le fait payer? Toi et cet abruti qu'il a pour frère. C'est vous qui lui rendait la vie difficile. Tu as l'impression de le soutenir ?
- Je ne vois pas pourquoi je le conforterai dans ses délires. Et tu as de la chance que James ne t'ai pas encore éclaté la tête. Cela pourrait changer. Alors à ta place,... je m'effacerai.
Scorpius secoua la tête, écoeuré. Il se mit debout en ménageant son bras. Il se retint d'envoyer Hugo se faire foutre, il en avait assez pour ce soir. Il le dépassa et prit le chemin des escaliers.
- Autre chose Malfoy, dit Hugo derrière lui, et je ne le dirai pas deux fois : dis à Sila de rester loin de ma sœur.
Scorpius ne voyait pas de quoi Hugo voulait parler, et franchement, à cette heure de la nuit, il n'en avait rien à battre.
1997 – Manoir des Malfoy
Scorpius était sur le grand balcon, les mains en appui sur rebord de pierre taillée. Bellatrix se tenait à côté de lui un verre rempli d'un liquide rouge à la main.
- Ils vont nous faire un vacarme d'enfer. Quelle sale race !
Elle but la totalité du verre en longues gorgées ininterrompues.
Scorpius ne l'écoutait pas. Il observait le jardin, et cet énorme édifice de paille et de bois. Il avait été construit dans la journée. Une horde d'hommes massifs et robustes avaient envahis le domaine. Des voix rauques et des semi-grognements résonnaient dans le château et des individus trapus étaient arrivés tôt dans la cour en tirant des chariots de planches de bois. Les hommes avaient déchargés. La création avait commencé et au fil des heures une immense tête de loup finit par se découper dans l'ouvrage.
"C'est le Dévoreur des Mondes, Fenrir, dit Antonin Dolohov en s'accoudant à côté de lui, si proche que son bras touchait celui de Malfoy qui ne fit aucun geste pour s'écarter.
Il sentait le vin chaud, alcool et cannelle, et ses yeux bleus luisaient dans la lumière déclinante. Scorpius se rendit compte que sa présence le rassurait. Chose stupide car ce Mangemort était sans doute l'un des plus terribles parmi la cohue peu fréquentable de Voldemort. Mais il avait cette manière affable et paternelle qui l'enveloppait comme un halo, sentiment inestimable dans cet environnement de mort.
"Cette pleine lune est particulière, les loups-garous célébrerons son culte.
- Finalement Lucius est bien où il est…à Azkaban," intervint Bellatrix dont la voix prenait un timbre désarticulé par l'alcool." "Une célébration paienne dans son jardin …
- Vous avez déjà assisté à la Fête de Fenrir ? l'interrompit Scorpius en regardant Dolohov.
- Plusieurs fois, répondit l'homme à l'accent slave. "Elle est importante pour les peuples du Nord. Dans l'Est, on la célèbre aussi, mais sous un autre nom. Elle est tout aussi barbare." Sa voix prit une note profonde et basse, alors qu'il reportait son regard sur l'horizon. "Je te déconseille d'y assister, tu ne vas pas apprécier ce que tu vas voir.
- Pourquoi voudrais-je y assister ? demanda Scorpius.
- Parce qu'il y sera.
Il pointa les travailleurs et Scorpius porta son regard sur Sila qui portait les cordages et le bois avec les autres. Il serra les poings sur la pierre, se maudissant de son imprudence.
Impossible de le libérer aujourd'hui. Au matin, l'elf de maison avait averti Scorpius que Sila avait été emmené par des hommes aux cheveux longs et gras. Il avait rejoint la troupe de travailleurs qui s'affairait autour sur le domaine. Dès lors, Scorpius avait pris son poste de guetteur.
Et cela n'avait pas échappé au mangemort... Inutile de feindre l'indifférence.
- Pourquoi est-il là ? demanda Scorpius laissant l'appréhension percer dans sa voix.
- Greyback pense que c'est un loup, répondit Dolohov, en scrutant les réactions du garçon. Il l'a senti.
- Greyback se trompe.
Dolohov eut un rire bref, presque indulgent. Ils entendirent Bellatrix poussait un cri et Scorpius sursauta quand il sentit un liquide froid sur son bras. Sa tante avait vidé une partie de son verre - à nouveau rempli par magie! - sur la pierre du balcon et sur lui.
- Arg ! Rogue revient enfin ! Ce n'est pas trop tôt ! dit-elle en quittant le balcon pour se rendre dans le grand salon.
Scorpius vit le professeur passer les grilles du chateau et il oublia le vin sur son bras. La robe noire du sorcier flottait autour de lui comme un liquide. Il soupira en le voyant. Il n'aimait pas le bonhomme mais il avait sûrement vu les autres et il désirait tant avoir des nouvelles de…
Il sentit la main de Dolohov se poser sur son épaule et il se tourna vers l'homme vétu de cuir noir. Le mangemort le regardait comme s'il voulait résoudre une énigme.
- Je dois moi aussi m'entretenir avec Severus, dit-il de sa voix chantante. N'approche pas les loups ce soir. Ils seront dangereux avant la tombée de la nuit." Il pointa Sila. "Ton ami aussi."
Scorpius sentit un frisson parcourir son dos et la peur lui vrillait le ventre. Tous ces hommes en bas étaient des loups-garous. Et cette nuit, c'était la pleine lune.
Il leva les yeux au-delà des travailleurs et de leur ouvrage, vers le soleil qui filait vers l'horizon. La peur, insidieuse, s'infiltrait dans ses veines.
Il retourna dans le salon où un groupe s'entretenait en messes basses. Tous semblaient soucieux et tendus. Il s'approcha pour se fondre dans la petite masse et tendit l'oreille.
- Les loups resteront sur le domaine? Un nuit de pleine lune? entendit-il Narcissa dire au petit groupe qui l'entourait.
- Nous verrouillerons le château au coucher du soleil, Madame Malfoy, dit Scabior, un petit sourire apparut au coin de sa lèvre quand il aperçut Scorpius, qui l'ignora superbement.
- Le Seigneur des Ténébres se rend-t-il compte du danger dans lequel ils nous place ? insista sa grand-mère, tordant nerveusement ses mains blanches.
- Le Seigneur des Ténébres sait parfaitement ce qu'il fait Narcissa, déclara Bellatrix, outrée. Et il nous a autorisé à les tuer s'ils pénétraient dans le château.
- Ce sont des bêtes sauvages … frissonna Narcissa. Scorpius la rejoignit et passa un bras autour de sa taille. Elle paraissait si frêle. Elle lui sourit, tentant de dissimuler son inquiètude.
- Nous resterons dans le salon cette nuit, dit Severus. Inutile de nous éparpiller dans le manoir.
Son regard croisa celui de Scorpius qui le dévisagea avec le même port glaciale. Le professeur fut rapidement emporté par des Mangemorts et Scorpius se retrouva isolé dans la grande salle à manger, ne sachant quoi faire de lui-même. Après avoir tenter de rassurer Narcissa sans succès, il retourna à son poste d'observation, perché sur le bord du balcon.
Son coeur battit plus fort quand il aperçut trois énormes pieux devant la structure. Il frissonna devant les préparatifs du rituel, devant les ouvriers trapus qui s'affairaient gaiement, trépignant d'impatience, bouillant de sentir leur corps se transformer, muter en monstre pour laper l'air humide de la nuit. Alors que le soleil déclinait, un tremblement agitait ses mains de plus en plus fort. Tout son corps se tendait sous le murmure d'un danger imminent. Rien ne lui semblait naturelle et connu. Le château dans lequel il avait vécu, poussé, lui semblait étranger. Ces murs n'avaient pas encore accueilli son enfance. Ses rires et ceux de Sila n'avaient pas encore résonnaient sur la pierre. Ce monde non advenu, rendait le présent faux. Tout lui semblait irréel, exceptée la peur qui s'insinuait dans ses entrailles, créant une agitation dans toutes les cellules de son corps. Ses mains tremblantes étaient glacées, signe que son sang étaient déjà dans ses jambes, prêtes pour la fuite.
Des torches étaient placées tout autour de la tête de loups. Un échalas encapuchonné les alluma une à une, et les feux donnèrent un reflet sinistre à la tête du canivore. Des plateaux aux contenus douteux furent déposés, des offrandes rougeâtres, un peu dégoulinantes, accompagnés de fleurs blanches. Des fagôts étaient placés devant la sculpture de bois, comme on dresse un bûcher. Quelques hommes en tunique noire arrivèrent et il entourèrent la divinité de bois.
Le spectacle était grotesque. Terrifiant et grotesque.
- Votre ami semble affamé.
Scorpius sentit les poils de sa nuque se hérisser et il se tourna vers le professeur qui approchait. Ses pas ne faisait aucun bruit sur la pierre. Il attendit que Rogue soit à ses côtés pour parler.
- Ils essayent de le nourrir avec de la chair crue, sans doute humaine. Il n'y touchera pas.
Scorpius chercha une once de compassion sur le visage de l'homme, mais n'en trouva aucune.
- Vous l'avez vu ? demanda-t-il enfin, après avoir vérifié que personne ne les écoutait.
- C'est un geignard.
Scorpius eut une moue dégoutée.
- Vous êtes toujours aussi agréable.
- Un geignard agressif et belliqueux, dit Rogue en insistant sur chaque syllabe. Quand je l'ai quitté sa lèvre avait été fendue par le poing de Harry Potter.
- Imbécile, souffla Scorpius en fermant les yeux. Quel imbécile…" En si peu de temps Albus avait réussi à se mettre à dos son propre père.
- C'est également mon avis, déclara Severus. C'est un poids mort. Il est bien trop terrifié pour vous.
- Mais est-ce qu'il…?
Un battement assourdissant retentit et Scorpius se tut.
En bas, dans l'ombre montante, résonnaient des tambours. Des hommes en cercle tapaient sur de grandes percussions, des os lustrés et blanchis cognaient une toile tendue et retenue par des tressages.
Une immense procession d'individus enveloppés sous des capes et des capuchons à doublure fourrée s'avançaient vers le loup de bois. Impossible de savoir si Sila était parmi eux. A leur tête, Greyback marchait fièrement, vétu de cuir noir, le torse à demi-découvert, les cheveux gras tirés en arrière. Ses yeux brillaient et un sourire aux dents acérées et jaunâtres ne quittait pas son visage. La troupe encercla la représentation du Dieu Fenrir, alors que le battement des tambours devenaient de plus en plus fort.
- Rentrons, dit Severus en faisant tournoyer sa grande cape noire. Des chants étranges s'élevaient, comme un vent hurleur, diffus. "Les autres nous attendent. Nous devrions fermer les portes.
- Rentrez si vous avez peur, rétorqua Scorpius. Moi je reste. S'il a besoin de moi je serai là.
Il entendit Rogue poussait un râle derrière lui, puis les pas s'éloignèrent. Les loups ne pourraient pas monter jusqu'au balcon, c'était impossible, et il n'avait aucune envie de se calfeutrer à l'intérieur du château comme un lâche alors que son ami se trouvait au milieu des carnassiers. Il restait accoudé au garde-corps, le ventre contre la pierre froide, glissant son genou entre les balustres et il attendit, observant sans admiration, mais avec un certain dégoût mêlé d'appréhension, la célébration de Fenrir.
Les chants se firent plus fort et les loups à venir se mirent à claquer des mains et des mains sur leurs avant-bras et sur leurs cuisses. A battre le rythme sur leur corps.
Des cris s'élevèrent au-dessus des chants et Scorpius se raidit quand il vit des prisonniers, vociférant et se tortillant dans les bras robustes de leurs ravisseurs, être trainés vers la sculpture. Il se pencha davantage. Sous ses yeux terrifiés, deux jeunes femmes et un jeune homme étaient menés au centre du cercle enflammé. Ils se débattaient, essayaient d'échapper aux mains puissantes qui les tiraient vers la troupe. Jetés au milieu de la foule féroce, des griffes déchirèrent leurs vêtements, entaillèrent la peau. La moindre trace de blessures et de sang provoquaient des hurlements plaintifs parmi l'assemblée des hommes-loups. Nus, suppliants, les trois prisonniers furent menés à des pieux de bois, et ligotés.
Soudain Scorpius sentit une main recouvrir sa bouche, l'étouffant et il se sentit écraser contre une poitrine dure.
"Arrête de crier", entendit-il souffler à son oreille.
C'était la voix de Dolohov.
Scorpius avait hurlé, à plein poumons, il ne s'en était même pas rendu compte. Dolohov retira sa main et porta lui aussi son visage vers le spectacle macabre.
- Je t'avais dit de ne pas y assister, dit-il, sombre.
- Faîtes quelque chose ! Vous pouvez arrêter cela, dit Scorpius en pointant les prisonniers.
- Pourquoi? demande Dolohov. Pourquoi ferais-je une telle chose ? Cette nuit est sacrée pour eux, nous ne pouvons pas intervenir. Et aucun de nous ne le désire. Le Seigneur des Ténébres a besoin des loups pour notre cause.
Scorpius ferma les yeux, révulsé. La colère bouillonnait dans ses veines, le dégoût le submergeait alors que les tambours se taisaient doucement. Il ouvrit les yeux sur la scène sinistre, maintenant enveloppée de silence. Un vieil homme courbé sous sa lourde toge noir, tenant un bâton sculpté, s'approcha des prisonniers qui sanglotaient. Des vasques furent deposés à leurs pieds tandis que le vieillard se posta devant eux en tendant ses bras vers le ciel, le bâton dans une main, un couteau long dans l'autre. Il parla et la foule s'inclina. Scorpius ne parvenait pas à l'entendre.
" Que se passe-t-il?
- C'est le choix de Fenrir, dit Dolohov, et la passion dans sa voix effraya Scorpius. "Les offrandes au Grand Loup. Ils ont le choix : soit devenir loup et le servir, soit être sacrifié, saigné à blanc. Le loup géant se saisirait alors de leur âme dans l'au-delà quand le cadavre sera brulé avec sa sculpture.
Scorpius inspira bruyamment, sentant l'effroi le saisir quand il entendit des cris et les mots lui parvinrent d'une des formes attachée au poteau.
C'était le prisonnier.
« Je veux devenir l'un des vôtres ! hurla encore et encore l'homme, les mains liés dans son dos. "Je veux devenir l'un des vôtres !
"Rapide, entendit Scorpius. Dolohov continua : Il vivra. Pour les deux autres c'est la fin."
Scorpius regarda des hommes s'approchaient du prisonnier.
Ses liens furent déserrés et il fût jeter parmi les loups, puis tiré jusqu'à un cercle de pierres.
Malfoy n'eut pas le temps de s'attarder sur lui, car un cri strident lui parvint, interrompu d'un trait, remplacé par des râles humides. Le couteau pointait vers le ciel, la lame ensanglantée. La jeune femme brune avait eu la gorge tranchée, son crâne se pencha et tout son corps s'affaissa. Son sang coulait dans la jarre à ses pieds en goulées épaisses et sombres.
Le loup s'approcha de la jeune blonde avec le couteau au manche d'os taillé. La femme se débattit, tirant sur ses liens et hurlant :
« Je veux devenir l'un des vôtres ! Je veux devenir l'un des vôtres ! »
La troupe éclata d'un rire puissant et sinistre alors que le vieillard s'approchait d'elle.
« Non je vous en supplie! Je veux être l'une des vôtres, je veux être l'une des vôtres ! »
- Trop tard ma belle, souffla Dolohov et Scorpius eut une inspiration d'horreur quand le poignard se leva sur la jeune femme.
- Détachez-la ! »
Le cri avait retenti à travers la foule et le vieillard baissa son couteau en se tournant vers Fenrir qui approchait.
"Détachez-la."
Ils s'exécutèrent et Scorpius se tourna vers Dolohov. Il secouait la tête, les yeux froncés. Malfoy comprit que c'était irrégulier.
La jeune femme s'était jetée dans les bras de Fenrir, qui accepta l'embrassade de son corps nu avant de la repousser et de la présenter à l'assistance.
« Tu veux être l'une des nôtres? cria-t-il en exhibant la jeune femme, terrorisée. Soit! » Il lui prit le bras et la traîna à sa suite. Elle tituba et se reprit. La troupe s'écartait sur leur passage.
Fenrir s'arrête d'un coup et la jeta… aux pieds de Sila.
Scorpius eut un hoquet d'effroi. La femme gisait à genoux, nue et ensanglantée devant le garçon horrifié qui reculait.
Fenrir pointa son doigt sur Sila.
« Transforme-la, dit-il avec un sourire acéré sur ses lèvres épaisses et gercées. Transforme-la ou pour elle, ce sont les flammes !"
Sila, tremblait, semblait sur le point de défaillir, les mains tendues.
"Je ne peux pas" sembla-t-il dire.
- Alors elle mourra !
Et la foule exulta de joie.
- Non ! hurla la jeune femme. Elle se traina vers lui, l'implorant. Elle attrapait son pantalon et se hissait en tirant sur sa chemise. Il reculait, n'osant la toucher, désespéré devant sa terreur son corps meurtri et son visage larmoyant. Voyant son refus, elle se mit à se mordre le bras à plusieurs reprises, tirant et déchirant la peau puis présentant son membre ensanglanté à la bouche de Sila.
"Je ne peux pas, je suis désolé je ne peux pas ! hurlait Sila.
- Comme tu voudras, dit Fenrir en attrapant la jeune femme par les cheveux, et elle hurla.
Soudain Sila l'attrapa, la serra dans ses bras et la mordit à l'épaule, désespéré de la sauver. La femme eut un hoquet de soulagement, et sourit en passant ses bras fins et blancs autour de lui. Mais il planta à nouveau ses dents dans son cou et elle hurla. Il tira et arracha le chair, le sang éclata en goulées dans sa gorge. Il mordit à nouveau dans la plaie sanguinolente, écrasant la jeune fille sur sa poitrine de ses bras puissants, enfonçant ses ongles dans sa peau.
Scorpius hurla et il quitta le balcon, cogna la porte fenêtre qui menaça de se briser, ils bouscula les figures debout dans le grand salon et dévala l'escalier jusqu'à la grande porte qu'il ouvrit. Il entendit les cris qui prononçaient son nom derrière lui, mais il se précipitait déjà vers la foule qu'il fendit en donnant du coude, bousculant et vociférant.
Il arriva là où ma foule s'était séparée, là où Sila, secouait de tremblements, tenait encore dans ses bras le corps inerte de la jeune femme aux yeux bleus voilés. Le sang coulant de sa veine déchirée se tarissait.
Morte. Elle était morte.
Portant le cadavre, Sila leva ses yeux embrumés et hagard vers Scorpius, dont les jambes cédèrent devant le visage maculé de sang frais et de larmes de son ami.
Une masse s'approcha. Greyback arracha le corps de ses bras.
« Ne le prend pas comme ça, dit-il, jovial, aucun de nous ne se contrôle la première fois qu'il goûte au sang humain ».
Il porta la jeune femme dans ses bras, la serrant comme une jeune mariée en marchant vers les flammes. Arrivé devant la brasier, il sourit à la morte.
« Rejoins le Dévoreur des Mondes, Princesse ! » Et il jeta le cadavre dans le feu.
Sila tomba à genoux en hurlant de douleur. Et ce cri n'avait rien d'humain.
« Sila, souffla Scorpius. Et sa voix était brisée. Les larmes qui tombaient sur la sol transformaient le terre et la poussière en boue. Les hurlements de Sila lui vrillaient les oreilles, mêlés aux rugissements de joie des loups. Il lui semblait perdre connaissance.
Des bras le soulevaient de terre et l'emportaient.
Il leva des yeux vers celui qui le serrait contre sa poitrine et le ramenait vers le manoir. C'était Antonin Dolohov.
"Il est imprudent de se retrouver seul parmi les loups quand ils sont dans cet état d'hystérie".
Il ne répondit pas. Il entendit à peine sa grand-mère l'accueillir alors que Dolohov le déposait sur le canapé. Il se sentait vide, anéanti.
On lui tendait un verre,et il leva les yeux vers le professeur Rogue qui le regarder avec impatience.
"Buvez-ci, ce n'est pas négociable."
Le verre faillit lui échapper et on l'aida à le porter à ses lèvres. Le goût était fort et détestable mais anesthésiant. Il lui sembla que les couleurs lui revenait.
- Ils ont donc raison, dit Severus avec froideur. C'est un loup.
- Et un dangereux, commenta Dolohov. Très puissant. Se métamorphoser sans avoir été mordu…
- Il ne s'est pas métamorphosé. Mais ce n'est qu'une question de temps. Fenrir va-t-il continuer à le provoquer?
- Je n'en sais rien. Fenrir est inquiet. Ce loup est trop fort. Greyback veut des loups pour servir sa meute, pas pour lui voler sa place de meneur. Ce garçon en est bien capable.
Scorpius secouait la tête, incapable d'ingérer les mots des deux hommes. Il se sentait nauséeux. Assis, la tête penché vers ses genoux, il serrait les coussins sur canapé dans une poigne qui tarissait le sang de ses phalanges. Tout son corps était secoué de tremblements. Le sueur perlait sur son corps, il était fièvreux et se sentait glacé.
Une silhouette se posta devant luiet il leva péniblement les yeux. Severus se tenait face à lui, un autre verre à la main. Sans ménagement il lui souleva le menton et lui fit boire le liquide âpre. Les tremblements se calmèrent un peu. Mais Scorpius n'avait aucune envie de remercier Rogue pour cela.
"Je suis surpris, dit Severus d'une fois basse et méprisante, que Drago ait élevé un loup ici. Avec son propre fils." Il marqua une pause et Scorpius l'ignora. "Je l'ai observé. Il connait le manoir. Il y déambule comme s'il était chez lui. Et vous semblez proche.
- Vous savez que je ne peux rien dire, articula Scorpius. Alors passez-vous de commentaire. De toute façon ça ne vous regarde pas !
Scorpius remit la tête dans ses mains, griffant son crâne en crispant ses doigts autour de son crâne.
Il n'avait plus rien à dire à cet homme. Il ne voulait pas raconter que la mère de Sila était une folle, amoureuse des loups-garous qui avait rendu visite à Greyback en prison et en était ressorti enceinte. Il n'avait pas envie de lui dire que Drago s'était battu pour que cet enfant vive loin de sa mère qui l'élevait comme une bête, sans vêtement, aux biberons de sang. Que Drago avait réussi à l'adopter, grâce à son statut de guérisseur. Spécialisé dans la lycantropie, il était parvenu à la soulager, voire même à traiter les loups et surtout à atténuer les blessures. Non Scorpius n'avait pas envie de lui expliquer que Sila avait été recueilli dans ce château pour être sauvé et aimé… et que c'était dans ce château qu'il avait sombré… par sa faute.
Un loup ! Sila avait raison, il l'avait toujours su. Malgré l'absence de signes, de symptômes, malgré tous les examens pratiqués par son père, tous les résultat négatifs, il avait raison. C'était un loup. Sa peur était réelle et personne ne l'avait pris au sérieux, même pas Scorpius.
Il resterait avec sa douleur et ses regrets. Il ne dirait rien à Severus. Cet homme ne pouvait pas les aider, il n'avait rien fait pour eux, et ne ferait rien.
"Dumbledore veut que vous retourniez à Poudlard.
Scorpius pouffa d'un rire sinistre.
- Comment allez-vous convaincre Voldemort?
- Votre père a une mission. Il compte sur vous pour l'assister du mieux que vous le puissiez.
Je ne me fais pas d'illusion, Drago ne vous laissera surement pas faire. Pas plus que moi en tout cas.
- Et Sila ?
- Il viendra à Poudlard aussi, mais pas tout de suite.
Scorpius se dressa, scrutant Severus avec colère, les larmes menaçant de couler.
- Vous allez le garder enfermé dans cette crypte? Le gaver de sang et de chair humaine? Ou vous allez vous comporter en être humain ?
Severus l'observa, pensif, en faisant rouler son pouce contre son index. Puis il acquiesça lentement.
- Vous ne posez aucune question sur votre père. Vous connaissez la mission." Scorpius ferma les yeux et serra la mâchoire à s'en faire mal, écoeuré. "Vous savez que Drago cherche un moyen de faire rentrer les mangemorts dans l'école. Et si vous connaissez cette mission, c'est sans doute qu'elle a réussi.
- C'est tout ce qui vous importe n'est-ce pas? murmura Scorpius en plongeant son regard dans celui de Severus. Nous ne sommes rien pour vous.
- C'est tout ce qui nous importe à tous. J'en suis désolé. Pour vous.
Scorpius laissa les larmes couler librement sur ses joues, il laissait se déverser sa tristesse, sa solitude et sa culpabilité. Au dehors, il entendait les tambours, les grognements rauques et les hurlements… Il espérait que la nuit se finisse vite.
