Chapitre 1
Derrière le mur
Je ne savais plus si tu viendrais,
Et dans le doute,
La détresse
Me gagnait...
N'était-il pas tout particulièrement dangereux de se plonger dans les yeux de ce sheikah ? Il le savait pourtant. Ce visage semblait combattre de grandes passions et jouait avec son cœur à un jeu létal. Sheik. Oui, il avait un nom d'ambassadeur pour le peuple des ombres, le peuple nomade. Un nom bien significatif qui chassait encore le hasard.
Le concerné s'approcha lentement, comme si les les flammes bondissantes autour du pont l'effrayait, lui, un des virtuoses de la magie élémentaire...? Et son oeil, comme toujours, se fixait sur Link. Oh si le veut le destin, qu'il en soit ainsi ; l'œil du sheikah suivant à jamais les pas d'un Héros du Temps-
Sa voix se fit encore douce et puissante, et chantante et grave. Du moins elle le paraissait. L'était-elle vraiment ou bien était-ce une impression de son allure taciturne ?
En tous cas, la fidèle mesure de ses phrases pénétrait son cœur tel un baume, et il s'en reput, rassasié et encore affamé, le coeur désespérément accroché à ces octaves et à cette lyre - tout comme l'était son âme à la berceuse de sa Princesse... son senhal.
"Il est un fait que le temps ne peut altérer. Une amitié partagée. Un sentiment profond du cœur qui devient plus fort au fil des jours."
Le cœur du Héros enivré de ces mots, dansait avec force ; il virevoltait et battait la mesure pour la voix adorée.
"La confiance réciproque cédera sa place au pouvoir de justice, te révélant le sentiment de la victoire et de la paix."
Que désirer de plus? Une lueur éphémère scintilla en passant dans ses yeux de saphir. Des yeux au diapason de l'espoir... Ceux du sheikah n'avaient pas changé. Ils contenaient la même ambiguïté découlant de ce qui semblait être un amalgame de sentiments passionnels.
"Cette chanson est dédiée au pouvoir de l'amitié... poursuivit-il sans ciller. Écoute bien le boléro du feu..."
La harpe du ménestrel vibra avec le cœur à qui la musique se destinait. Elle l'entraîna dans des lieux de secrets où l'on scellait sur soi l'essence de l'autre par un serment qui ne souffrirait ni du temps ni de la peur, ne réclamant que dévotion.
Lorsque les notes s'atténuèrent puis moururent, la marque restait. Et dans son cœur, le 'tu' s'était gravé.
"Link... À très bientôt..."
Trop tôt, les notes s'atténuèrent, puis moururent. Dans son coeur, pourtant, leur trace s'était inscrite comme un 'tu' gravé à jamais.
"Link... À très bientôt..."
Non ! Il n'en avait pas le droit ; non ce n'était pas juste ! Il venait de lui donner une nouvelle force qu'il découvrait, et exigeait déjà qu'on s'y appuie ! Mais pauvre courage, ce n'était pas suffisant !
... Si seulement le sheikah n'était pas aussi distant. Un seul geste... Un seul mot et avec ou sans sages, il aurait su renverser Ganon !
Le devoir appelait et Link dut construire sur ce peu qu'il avait. Il affirma sa volonté et avança dans le seul désir de le retrouver. Il savait désormais qu'il serait au rendez-vous.
Et en quatre, trois, deux, un ; autant de flambeaux qu'ils rallumaient chacun, peu à peu, contentant les dieux, le Héros avançait, détruisait, restaurait Darunia derrière Volcania l'austère, guettant la mort au détour de chaque trésor...
Alliant vitesse et dextérité dans un art à son diapason, usant de l'arc de l'épée ou du bel écusson ; rien ne pouvait plus stopper l'entraînante chanson que l'hylien se construisait pourtant sans ambition. Car, une fois de trop frustré de la furtivité du jeune harpiste, Link oubliait ses craintes et plein d'un ennui discret, se défoulait volontiers sur les obstacles de son destin.
Darunia sauvé, quelques objets de plus, et voilà qu'il galopait vers le prochain prisonnier. S'éloignant de la gueule béante du dragon terrassé, descendant ce mont au péril désarçonné, il s'élançait déjà vers le domaine Zora.
Une flamme bleue délivrait le roi, que sans attendre, lui, bondissait déjà d'un îlot à l'autre vers une poche givrée, acquérait assez vite une endurance agile, puis se hissait enfin dans la grotte élevée.
Là au milieu du givre de lumières gorgé, dans les serres de ce paysage austère de silence ; Link se sentait étrangement à son aise… Peut-être ce milieu de glace rappelait-il l'âme muette d'un héros si las.
Évoluant dans cette harmonie partagée, Link gagna une pièce cachée. Et ouvrant celle-ci comme un destin, le fer légendaire à portée de main, redoutant ce qui se tapirait de l'autre côté, il pénétra dans un lieu de toute beauté...
Un décor fait de milliers d'étoiles habillait les murs d'un voile crêpé comme une nuit fabriquée dominant un sol immaculé. Là, dans l'attente, dormait un grand coffre. Et tout autour la pièce se voyait bordée de cristaux divers aux couleurs variées.
Certaines merveilles valaient le détour songeait le Héros vraiment charmé.
Farore à donc du cœur. Elle sait comment adoucir les blessures.
Il ouvrit le coffre ancien ou attendait, trésor oublié un objet sacré diffusant une puissante magie zora. Une paire de bottes si joliment travaillées !
Mais cet ouvrage permettait surtout que mouvements, sous les eaux, se passent avec même aisance qu'en surface.
Observant son trésor, il sentit une présence connue ; cet être, dans sa prestance, qui lui prodiguait chaleur vitale si raréfiée.
Un court frisson parcourut l'âme d'un Héros fatiguée, qui ferma ses yeux souriant malgré lui, et décidé à faire durer cet instant, il se retourna lentement.
Plus bas qu'un murmure et plus fort qu'un souhait, son nom traversa ses lèvres pleines d'été dans le courage renouvelé d'une jeunesse qui recommençait à pulser: "Sheik," murmura-t-il.
xxx Senhal : Objet d'inspiration amoureuse et de désir en occitan xxx
