Contexte de l'OS

Type de l'OS : ce texte répond à plusieurs prompts proposés par la Gazette des bonbons aux citrons :

- prompt of the day : se retenir

- les belles paroles : "vivre, ça n'est pas attendre que l'orage passe. Vivre, c'est apprendre à danser sous la pluie"

- la collection restreinte : ne pas utiliser le mot "dit"

Personnage : Juvia

Contexte de l'OS : pré-animé/manga (je n'ai pas encore vu le passé de Juvia (pas de spoil please) donc je l'ai imaginé à ma sauce)

Merci à Neliia et jFANGIRLd pour leur review sur le drabble précédent

Je dédie ce texte à jFANGIRLd, qui adore Juvia !


Un caillou fut lancé près d'elle et fut rapidement suivi par un ricanement :

- N'allez pas jouer avec elle ! Il fait que pleuvoir quand elle est là, c'est glauque !

- Oui, elle doit être maudite, renchérit une seconde voix moqueuse.

Le groupe d'enfant qui s'était attroupé autour d'elle repris en scandant l'accusation de leur camarade.

Maudite ! Maudite ! Maudite !

A force de l'entendre, Juvia avait fini par croire que c'était vrai. Après tout, partout où elle allait, la pluie la suivait. Ces lourdes gouttes d'eau étaient la seule chose qu'elle connaissait du ciel, si bien que le soleil était devenu un mythe lointain et inaccessible pour elle, tout comme les dragons dont on doutait de l'existence.

Et pourtant, elle savait que le soleil existait. Lorsqu'elle escaladait les montagnes qui entouraient son petit village, elle pouvait percevoir l'astre doré au loin de la perspective qui s'offrait à elle. Mais à chaque fois qu'elle courait pour le rattraper, il lui échappait. Elle n'avait pas compris tout d'abord pourquoi elle était la seule à ne jamais pouvoir sentir ses rayons chauds sur sa peau opaline – mais elle avait ensuite surpris une conversation entre deux de ses voisins, qui murmurait d'un ton désolé :

- La pauvre petite… elle a dû être maudite par les cieux…

Ses parents lui avaient appris à ne pas écouter les brimades des autres enfants (les êtres humains sont méchants lorsqu'ils sont encore petits et aiment se moquer des autres, alors n'y prête pas attention) mais si même les adultes pensaient qu'une malédiction s'était abattue sur elle… c'était que la vérité devait en être ainsi.

Elle ne savait pas pourquoi, mais elle était maudite par les cieux. Elle avait alors éclaté en sanglots en comprenant cela.

Et elle avait pleuré d'avantage en réalisant que la pluie se faisait plus dense à mesure que ses pleurs redoublaient. Les habitants lui avaient alors jetés des regards mauvais et s'étaient abrités pour échapper au ciel qui s'était couvert de nuages épais. Seule la mère de Juvia avait bravé l'orage qui menaçait d'éclater pour prendre délicatement sa fille dans ses bras. L'étreinte lui avait fait du bien, jusqu'à ce que sa mère ne lui murmure à l'oreille :

- Ma chérie… je sais que tu ne peux pas arrêter la pluie. Mais tu peux essayer de ne pas l'empirer, non ?

- Et… et comment je… je peux ? avait sangloté la petite fille en pleurs.

- En retenant tes larmes. Je sais que c'est dur. Mais essaie de ne pas pleurer, même lorsque tu es triste. Tu pourrais… essayer de sourire à la place ?

Juvia avait alors acquiescé, désireuse de plaire à sa mère. Et elle avait réussi – un certain temps. Lorsque ses parents avaient disparu dans une attaque de monstres, Juvia n'avait pas pu contenir sa rage. Le ciel s'était alors assombri comme si toute la noirceur du monde était contenu au-dessus de la petite bourgade. Et comme d'accoutumée, les regards s'étaient fait mauvais et accusateurs.

Juvia avait alors fui le village. Plus rien – plus personne – ne l'y retenait et qui sait ? peut-être que le soleil et sa chaleur l'attendaient quelque part ailleurs. Saisie d'un maigre baluchon et de ses frêles espoirs, elle s'était élancée sur la route.

.

La route avait réduit en cendres toutes ses espérances. Partout où elle allait, elle continuait d'être boudée par le soleil.

Maudite. Maudite. Maudite.

Les mots continuaient de résonner dans sa tête et la meurtrissaient un peu plus à chaque fois – mais toujours, la voix de sa mère lui parvenait. N'empire pas la pluie. Retient tes larmes, et souris. Et elle se retenait de pleurer. Mais elle ne pouvait pas sourire – elle ne pouvait plus, pas depuis que les deux seules personnes qui ne l'avaient jamais considéré comme un monstre l'avaient laissé seule avec la pluie.

Elle s'était alors contentée de rester aussi froide que l'eau l'entourant. Elle ne souriait plus, elle ne pleurait plus – elle arborait continuellement une moue impassible et distante.

Impassible et distante, comme son cœur.

Elle ne s'autorisait plus à rien ressentir – c'était beaucoup trop douloureux. Elle voulait tout oublier, se fondre dans la pluie qui était devenue avec les années sa seule compagne et amie. Et elle aurait réussi, si une once espoir ne s'était pas accroché au fond d'elle-même.

Un jour, la pluie me quittera. Et je pourrais enfin vivre.

.

- Vivre, ça n'est pas attendre que l'orage passe. Vivre, c'est apprendre à danser sous la pluie.

Gajeel avait été le seul à qui elle avait raconté son histoire, ses doutes et ses espérances. Et Gajeel étant Gajeel, il ne l'avait pas prise dans ses bras pour la réconforter. Il n'avait même pas essayé de la consoler. Il avait juste reniflé un peu hautainement, en lui assénant cette phrase qui pouvait sembler à une maxime pleine de remontrances.

Gajeel n'avait pas réagit comme elle l'aurait souhaité – et pourtant, il lui avait sauvé la vie. Ou plutôt, il lui avait offert la vie.

Après cette conversation, Juvia avait compris que rien ne pourrait changer en elle. Et qu'en définitive, rien ne l'obligeait à changer. Elle avait ardemment désiré voir le soleil, mais qu'est-ce que l'étoile avait fait pour elle, si ce n'est rejeter son admiration ? Rien. La pluie en revanche avait joué avec elle, l'avait bercé de sa mélodie régulière, l'avait protégé et défendue contre tous ceux qui avaient essayé de profiter de son isolement. Et dernièrement, la pluie avait fusionné avec elle, lui offrant sa puissance contre son corps.

Alors pourquoi Juvia devrait-elle renoncer à une part d'elle-même ? Pour satisfaire les envies de gens qui n'avaient eu cesse de la rejeter sans jamais chercher à l'aider ou la comprendre ?

Elle avait été généreuse trop longtemps. Elle allait être égoïste désormais.

Ils ne voulaient pas de sa pluie ? Tant pis. Elle s'imposerai au monde – et elle ne laisserait personne se mettre en travers de son chemin.


Note (de fin) : j'ai hésité à faire durer le texte jusqu'à sa rencontre avec Grey et finalement j'ai préféré couper ici, pour montrer Juvia pour elle-même et non par le biais de "Juvia aime Grey". C'est une femme forte, courageuse et puissante, ce qu'on a parfois tendance à oublier (moi la première) lorsqu'on la met en scène dans son rôle d'amoureuse transis.

Sinon dans mon texte elle me fait un peu penser à Elsa de la reine des neiges (ouaiiis la référence ultime) : une femme qui a brimé ses pouvoirs et qui finalement décide de vivre pour elle-même et en étant complètement elle-même.