Chapitre 4 :

Rodney se sentait bien. Il ne savait pas qui il était et encore moins où il était, mais c'était le Royaume de la Douceur et de la Chaleur. Il n'avait rien à craindre tant qu'il n'ouvrait pas les yeux. Surtout ne pas ouvrir les yeux… Pourquoi ?

Il ouvrit les yeux sur un plafond blanc et beaucoup trop lumineux, et les referma aussitôt avec un gémissement. Voilà pourquoi !

Le Dr McKay ne croyait pas que la curiosité soit un vilain défaut. C'était poussée par curiosité que l'humanité avait fait toutes ses découvertes les plus importantes : la roue, la physique quantique, ou encore la fondue au chocolat. Mais il n'en restait pas moins vrai que se montrer curieux n'était pas toujours la meilleure des idées. Lui-même se rappelait en avoir fait les frais à plusieurs reprises…

Tandis qu'il dissertait ainsi pour lui-même, les yeux toujours fermés, une main venait de saisir la sienne et la serrait fort. C'était une main d'homme, et il savait à qui elle appartenait. Il le devinait à la tendresse dont son propriétaire faisait preuve dans ce simple geste. Gardant toujours les yeux obstinément fermés, Rodney tenta de retirer sa propre main de celle de l'autre en douceur.

- Alors, McKay, ça y est ? Vous êtes enfin réveillé ?

La voix du major le fit sursauter, et il ouvrit les yeux pour de bon. John était installé à côté de son lit et le fixait avec son regard de gamin malicieux, attendant visiblement sa réaction. Comme il restait silencieux, le militaire reprit, sur le ton de la conversation :

- Vous m'avez fichu une de ces frousses, mon vieux ! Ne refaites plus jamais ça.

Une boule d'angoisse se formait lentement dans l'estomac du scientifique, à mesure qu'il prenait conscience du fait que la main du major n'avait pas quitté la sienne, et de ce que ce contact provoquait en lui. Il n'écoutait pas le bavardage incessant.

- Je suis désolé de ce qui s'est passé « là-bas », vous savez. Je n'aurais jamais cru que ça vous gênerait autant.

Sheppard se tut soudain et se leva pour se rapprocher du lit. Rodney surprit son geste et se redressa brusquement, faisant tomber sa couverture à terre. Il était nu en-dessous, à part pour le caleçon. Il se recroquevilla sur lui-même, prenant ses genoux dans ses bras, et posa sa tête dessus en se tournant vers la mur. Son cœur battait à toute vitesse et ses yeux se gonflèrent de larmes.

Nonmondieunonpasçapasmaintenant

John avait été surpris par la rapidité du Canadien. Il allait lui tendre un verre d'eau quand celui-ci s'était esquivé, se blottissant dans un coin du lit. Il voulut tenter de le calmer, mais McKay se mit à murmurer des mots sans suite sur un ton suppliant, la tête tournée de façon à ce qu'il ne puisse pas le voir. Inquiet, le major partit chercher le médecin. Lorsqu'ils revinrent quelques minutes plus tard, le patient était toujours prostré. Beckett fit sortir John pour pouvoir l'examiner.

- Bon sang, mais qu'est-ce qu'il a ?

Sheppard faisait les cent pas devant l'infirmerie. Il ne comprenait pas ce que tout ça signifiait, et il détestait l'idée de ne pas comprendre quelque chose d'aussi important. Son instinct lui disait qu'il savait ce que voulait McKay, mais il ne voyait pas. Le Dr Beckett apparut enfin, et il s'arrêta pour lui faire face.

- Je peux savoir ce qui se passe ici ?

Il avait presque hurlé au visage du médecin, mais celui-ci ne paraissait pas impressionné.

- On a un gros problème, major. Suivez-moi.

Carson ferma la porte du bureau derrière lui. Il était temps qu'il ait une petite discussion avec John Sheppard. Même si la déontologie lui interdisait en temps normal de parler à une tierce personne à propos d'un patient, il ne voyait pas à qui d'autre s'adresser. Ils étaient dans la galaxie de Pégase, Bloody Hell, alors la déontologie n'avait qu'à aller faire un tour en attendant qu'il résolve son problème. Il avait confiance dans l'affection que John portait à Rodney, qu'elle qu'en soit la nature. Le militaire l'avait veillé à l'infirmerie plus d'une fois, alors que rien ne l'y obligeait. Il avait droit à des réponses, et l'état du malade nécessitait qu'il les ait.

- Je crois savoir pourquoi Rodney vous évitait ces derniers temps, après le baiser.

- Oubliez ça ! Qu'est-ce qui s'est passé tout à l'heure ?

- Il a eu une érection.

- Quoi ?

Sheppard regardait le médecin d'un air atterré.

- Mais qu'est-ce que ça a à voir avec le reste ?

Beckett posa les mains sur son bureau et lui expliqua d'une voix unie :

- Je crois que Rodney est amoureux de vous, physiquement aussi, s'entend. Et je pense que ce n'est pas la première fois qu'il est attiré par un homme. Il devait être jeune quand ça c'est produit, et ses parents ont cru bien faire en le « traitant » pour ça.

- Vous voulez qu'ils l'ont maltraité ?

- Je veux dire qu'ils l'ont forcé à détester ça pour qu'il ne recommence plus jamais, d'une façon ou d'une autre. Et ça a marché pendant des années. Mais votre baiser à permis à ses sentiments oubliés de refaire surface, et il ne sait pas comment gérer ça. Je ne sais pas exactement ce qu'on peut faire pour l'aider. J'ai fait appel au Dr Heightmeyer, c'est plus son domaine que le mien. Mais dans l'immédiat, vous devez me promettre de ne plus vous approcher de lui sans ma permission. D'accord ?

Sheppard aquiesca silencieusement. Quel genre de monstres les parents de Rodney étaient-ils ? Comment avaient-ils pu lui laisser croire qu'il était anormal, et le punir pour ça d'une façon aussi atroce? Il serra les poings jusqu'à faire blanchir ses articulations et se jura que si quelqu'un faisait encore une fois du mal à Rodney McKay, il le paierait de sa vie.