Chapitre 9, Ned III.


Lorsque Ned Stark arriva dans la salle de réunion du conseil restreint, il remarqua deux choses qui sortaient de l'ordinaire : le roi Robert était présent et Lord Stannis Baratheon de Peyredragon, son maître des navires, était lui absent.

- Où se trouve Lord Stannis ? demanda le seigneur de Winterfell

- Le seigneur Stannis s'est retiré dans sa forteresse de pierre, lui répondit Lord Baelish

- Je vois.

Voilà qui était inquiétant, le cerf était peut-être taciturne et pragmatique mais il n'était pas lâche. Du moins, pas dans ses souvenirs, Port-Réal semblait changer les gens en pire.

- On se passera de lui, clama Robert

- Lord Main, Votre Majesté, j'aimerais proposer le poste de maître des navires laissé vacant par mon frère à Lord Tyrell.

Renly Baratheon, récemment revenu de Hautjardin et marié à Lady Margaery, essayait lui aussi de placer ses alliés, c'est-à-dire sa belle famille, à des charges prestigieuses. C'était cela Port-Réal, un chaos ambiant et des querelles intestines qui gangrenaient le pouvoir de son ami.

- Nous verrons cela plus tard Lord Renly. Votre Majesté, si vous êtes en notre présence aujourd'hui c'est pour une raison particulière. Je me trompe ?

- Daenerys Targaryen a épousé l'un de ces sauvages dothrakis. Elle doit être éliminée de la partie, définitivement.

- Si tu me reparles encore de meurtre Robert …

- Il ne s'agit pas d'un meurtre, mais de la disparition d'une nuisible.

- Ce n'est qu'une enfant !

- Aérys le fou aussi a été un enfant, intervint le grand mestre Pycelle avec sa voix lente et monocorde, et pourtant il aurait mérité de mourir.

- Je refuse de condamner une enfant innocente pour les crimes de ses parents. Les Lannister …

- Les Lannister ont gagné cette guerre pour moi ! hurla Robert en coupant une seconde fois la parole à son ami, eux ont eu le cran de faire ce que tu n'aurais pas fait.

Pris d'un geste de rage et d'exaspération, Ned prit l'insigne qui était accroché sur son torse et le jeta sur la table.

- Dans ce cas, vous n'avez qu'à faire de l'un d'eux votre nouvelle main, Votre Majesté.

Le nordien partit sur ces mots et claqua la porte en sortant. Il ne serait pas complice du meurtre d'une innocente. Et à défaut de pouvoir l'empêcher, ce serait de la trahison envers son roi, il n'y participerait pas. D'aucune manière qui soit.


Il allait rester quelques jours à la Capitale, le temps de tirer au clair les circonstances de la mort de son second père et d'envoyer Rickon à Peyredragon pour en faire le pupille de Stannis, si ce dernier était d'accord. Ensuite il rentrerait dans le Nord auprès de Cat et de leurs enfants. Et tant pis pour le mariage d'Arya, il devrait probablement faire uniquement avec ces vassaux. C'était dommage que Jon ai rejoint la garde de nuit, lui au moins elle ne l'aurait pas trop malmené. Ned sourit à cette idée, mais sa joie fut de courte durée. La porte s'ouvrit avec fracas et Robert entra avec l'air le plus furieux que Ned lui avait jamais vu :

- Je peux savoir ce qui t'as pris ?! Tu crois pouvoir partir comme ça, m'humilier et ne pas me donner la moindre explication ?

- Je te l'ai dit, je ne veux pas participer au meurtre d'une jeune fille qui n'a jamais demandé à appartenir à une telle lignée ! Je n'ai jamais été favorable au fait de tuer des enfants, et je croyais que tu étais de cet avis, avant tu l'étais !

- Je dois faire ce qui est bon pour le royaume ! Les Targaryen sont tout sauf bons pour le royaume !

- Tu deviens ridicule Robert, il y a quelques années on s'est justement rebellés contre un tyran qui voulait tuer des centaines d'enfants innocents !

- Je ne t'autorise pas à me parler ainsi, je suis ton roi !

- Tu l'es en effet, mais ça ne te donne pas le droit de faire n'importe quoi ! Je suis ton plus vieil ami et c'est pour ça que je me permets de te dire que tu vas trop loin !

Robert semblait sur le point d'exploser de colère, il ne supportait vraiment pas le fait que son ami lui dise ses quatre vérités. Ned le regarda :

- Je m'en vais, je n'ai plus rien à faire ici. Décidément cette ville vrille complètement l'esprit de tout le monde ! C'est la corruption et l'immoralité qui règnent ici, mais moi je ne mange pas de ce pain-là ! Et même si tu es mon roi et que je respecte ça, je refuse de prendre part à cette démence ! Je rentre dans le Nord, je ne suis plus ta Main, je n'ai donc plus rien à faire ici.

- Je ne peux pas te faire changer d'avis ?

- Non, j'ai fait mon choix, tu as beaucoup trop changé, et honnêtement tu me fais peur ! Je vais partir, je préfère être avec ma famille plutôt que de t'écouter planifier la mort d'une gamine.

Rickon et Arya arrivèrent au même moment. Ned leur sourit et les serra dans ses bras. Robert soupira et lança d'une voix lourde d'une tension contenue :

- Tu as de la chance d'être mon meilleur et plus vieil ami et qu'il y ai tes enfants, j'en ai fait exécuter pour moins que ça. Ne crois pas que la nostalgie de notre jeunesse te donne tous les droits Ned, un jour ton irrévérence te perdra et je ne serais peut-être plus là pour te sauver.

Les deux hommes échangèrent un regard tendu et Robert quitta la chambre de son ami.