Chapitre 17
"Ikki, viens voir… !"
L'Oiseau de Paradis tourna la tête vers son frère. Celui-ci se tenait à l'écart depuis plusieurs minutes, déjà, et fixait l'horizon d'un air absent, en direction d'une tour qu'il avait repérée peu après leur arrivée. C'était une tour massive, si imposante qu'elle semblait visible depuis tout le Sanctuaire, avec, semblait-il, un immense cadran circulaire sur chaque face, sur lequel brillaient de petites flammes bleues. En plissant les yeux, ils avaient pu voir que chaque flamme était attachée à un des signes du zodiaque.
"C'est quoi, ça ? avait demandé Ikki. Un calendrier ?
– Je dirais plutôt une horloge, vu la forme. avait répondu Hyoga. Mais je ne comprends pas comment on est supposé la lire.
– Peut-être que les flammes représentent chacune une heure. supposa Shiryu, à qui ils avaient décrit leur trouvaille. Nous verrons plus tard comment elle fonctionne, je suppose…"
Depuis, ils avaient l'impression que des heures s'étaient écoulées, et ils commençaient tous à être nerveux et à tourner en rond. Seul Shun était resté calme et silencieux, jetant régulièrement des coups d'œil aux flammes de l'horloge. Aussi, il n'était pas étonnant qu'il remarque en premier son comportement. Ses frères s'avancèrent tout juste à temps pour voir la petite flamme correspondant au Bélier vaciller brutalement, puis s'éteindre lentement, comme étouffée.
"La flamme du Bélier vient de s'éteindre…
– Si c'est effectivement une horloge… Et si une flamme s'éteignait toutes les heures ?
– Ça voudrait dire que quand toutes les flammes seront éteintes, il sera trop tard."
Les garçons s'échangèrent un regard puis, d'un accord tacite, s'élancèrent d'un seul mouvement vers la maison du Bélier. Comme à l'extérieur, l'intérieur ressemblait à un temple très ancien, dont le plafond était soutenu par des piliers en pierre. Mû se trouvait au centre de la Maison, à genoux devant les armures de bronze.
"Mû… appela Seiya. Nous vous remercions pour vos réparations mais la flamme du Bélier vient de s'éteindre. Ça doit vouloir dire que ça fait près d'une heure que…
– J'ai terminé."
Le chevalier d'or se releva et s'écarta, révélant les armures de bronze, plus éclatantes et plus belles que jamais. Seiya s'approcha d'un pas hésitant et, soudainement, les armures de bronze, semblant prendre vie, se détachèrent d'elles-mêmes, volant jusqu'à leur porteur respectif pour les couvrir. Ébahi, Shun leva sa main devant ses yeux et admira l'éclat orangé du bronze, appréciant sa chaleur contre sa peau comme une flamme délicate et rassurante. Un soupir d'aise lui échappa.
"Les armures ont repris vie, s'extasia Hyoga !
– On pourrait presque les entendre respirer.
– J'ai même un nouveau casque. Nous sommes maintenant parés pour nous battre ! conclut Seiya. Merci, Mû…
– Dépêchez-vous, vous n'avez plus de temps à perdre. N'oubliez pas ce que je vous ai dit : la puissance des chevaliers d'or est loin d'être ordinaire. Mais ne vous découragez pas pour autant, car un vrai chevalier ne tire pas sa puissance de son armure, mais de son cosmos."
Accompagnant ses paroles, le cosmos de Mû s'éleva dans la Maison du Bélier, entourant les chevaliers de bronze de sa puissance, sans pour autant les écraser. C'était une sensation étrange, de baigner dans cette force démesurée sans pour autant ressentir la moindre agressivité : Shun n'en avait pas l'habitude. Le cosmos était étonnamment doux et chaleureux.
"Il est inutile que je vous rappelle que c'est celui qui enflammera le plus son cosmos qui vaincra… reprit Mû. Et si les chevaliers d'or possèdent une force incommensurable, c'est parce qu'ils se sont éveillés à l'essence même du cosmos.
– L'essence du cosmos ?
– Vous avez certainement une vague idée sur la provenance de la cosmo-énergie : elle vient sûrement du cœur et de la vie qui est en nous, pensez-vous… Il y a du vrai en cela mais, en approfondissant un peu plus, on trouve que la cosmo-énergie naît du septième sens."
...
"Voilà la Maison du Taureau !"
Ils ne s'étaient pas attardés bien longtemps à la Maison du Bélier. Juste après les explications de Mû, ils s'étaient précipités vers la Maison suivante, plus haute encore, grimpant les escaliers interminables. Celles-ci était plus grande encore que la précédente, avec le symbole du Taureau sur la façade.
"C'est bizarre, je ne ressens aucune cosmo-énergie, remarqua Hyoga sans cesser de courir.
– On dirait qu'il n'y a personne, approuva Ikki.
– On n'a pas le temps de se poser de questions !
– Traversons directement !"
Sans ralentir la cadence, et pressant même le pas, les chevaliers de bronzes grimpèrent les dernières marches, avant de s'élancer dans la maison du Taureau… pour se heurter à un obscur rempart, qui les repoussa si violemment qu'ils atterrirent une dizaine de marches plus bas. Portant une main à sa tête douloureuse, Shun releva les yeux sur la maison avec une grimace.
"C'était quoi, ça, cria presque Phénix dans sa tête !?
– Je n'en sais rien… répondit Shun, regardant le vide à l'entrée de la maison. Je ne vois rien du tout.
– On dirait qu'il y a un mur. ajouta Seiya. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?"
Alors qu'ils se relevaient tous, un peu sonnés par le choc brutal, ils entendirent des pas dans la Maison du Taureau, et le cliquetis du métal. Levant les yeux vers la Maison de pierre, ils virent un rayon de soleil se refléter dans un éclat doré, avant qu'apparaisse un homme immense, autant par sa hauteur que par la largeur de sa musculature. Son casque rond était orné de deux cornes, de part et d'autre de sa tête, ainsi que ses épaulettes. Même hors de sa Maison, n'importe qui pourrait reconnaître aisément la constellation de ce chevalier.
"Je ne vous laisserai pas traverser aussi facilement. annonça le colosse d'une voix forte, avec un accent que Shun ne connaissait pas. Moi, Aldébaran, chevalier du Taureau !
– Il a le sens de l'accueil. commenta Phénix avec sarcasme. Même moi, j'ai mal au crâne."
Ignorant la remarque, Shun se releva à la suite de ses frères. Devant lui, Seiya proposait déjà une stratégie au groupe, à savoir attaquer avec ses météores pendant qu'ils traversaient tous, le laissant derrière… Il secoua la tête. Non, ça ne pouvait pas être aussi simple. Mû les avait mis en garde : une tactique aussi simple courrait à l'échec. Si bien que, quand Seiya lança son Météore de Pégase, il fut incapable de bouger, ne pouvant ni s'élancer avec ses frères, ni même tenter quoi que ce soit pour les retenir. Il ne put que rester en retrait, alors que Hyoga, Shiryu et Ikki couraient vers leur adversaire, qui encaissait l'assaut de Seiya sans broncher. Et c'est toujours sans bouger que le chevalier du Taureau repoussa ses frères, qui furent renvoyés plusieurs mètres plus bas.
"Ça ne lui a rien fait ?!
– Mû nous avait averti, Seiya... ! répondit Shun, enfin sorti de sa torpeur. Les chevaliers d'Or n'ont rien à voir avec les chevaliers d'argent ou même nous, ça ne sera pas aussi simple.
– Tu devrais écouter ton ami, Chevalier. enchaîna le chevalier d'or. Je ne vous laisserai pas traverser la Maison du Taureau. Il faudra d'abord me vaincre !"
C'est alors que, à leur grande surprise, le chevalier d'or croisa les bras, les regardant de toute sa hauteur. Shun fronça les sourcils sans comprendre. Est-ce qu'il se moquait d'eux, ou bien…
"Tu… Tu ne veux pas te battre, Aldébaran ? demanda Seiya, confus. C'est quoi, cette posture ?
– Il est inutile que je me mette en garde face à de simples chevaliers de bronze. répondit nonchalamment le chevalier. Je peux tout à fait vous battre ainsi !"
Seiya eut à peine le temps de répliquer que Shun sentit une puissante vague de cosmos les frôler, balayant ses cheveux devant son visage et faisant sauter son casque au sol. Ça ressemblait à une brève et puissante bourrasque, ou à un coup de poing porté juste à côté de sa tête. Derrière lui, il entendit le bruit distinct d'un rocher se faisant exploser. Il se retourna pour regarder un petit tas de pierres se former à quelques pas de ses frères sonnés.
"Shun, ça va ? Il t'a touché ?"
Le chevalier Phénix refit face à Seiya. Il semblait indemne, et avait juste l'air inquiet. Il se pencha rapidement pour ramasser son casque, et le remettre rapidement.
"Non. Il m'a effleuré, je n'ai rien.
– Tant mieux. soupira Seiya, soulagé, avant de reprendre un ton grave. Comment a-t-il pu attaquer si vite les bras croisés ?
– Je ne l'ai même pas vu bouger… Il est prêt à attaquer, même comme ça.
– Chevaliers, soyez raisonnables et partez ! Il y a une trop grande différence de forces entre nous !"
Seiya regarda à nouveau le chevalier du Taureau, les poings serrés. Soudain, sans prévenir, Shun le vit faire un saut vertigineux, s'élançant vers leur adversaire.
"Seiya, attends !" cria-t-il trop tard. Au sommet de son saut, le Pégase déchaîna à nouveau son Météore vers Aldébaran, qui resta à nouveau stoïque sous ses coups.
"Par la Corne du Taureau !"
Shun ne le vit pas bouger, même pas cligner des yeux, mais Seiya se fit balayer, filant droit dans le mur du temple, le traversant dans un fracas inquiétant de roches et de bronze, faisant voler des nuages de poussières et de graviers dans l'entrée de la Maison. Affolé, le Phénix s'élança vers la Maison du Taureau pour porter secours à son ami.
"Un pas de plus, Chevalier Phénix, et tu finiras comme lui !"
Il s'arrêta à quelques pas du colosse, se sentant minuscule, maintenant qu'il était si proche de lui. Il fallait qu'il fasse quelque chose, ne serait-ce que s'assurer que Seiya allait bien. Et puis, ils devaient à tout prix passer, ils n'avaient pas le temps de s'attarder ! Sentant une détermination nouvelle s'emparer de lui, il serra le poing et se mit en garde, concentrant son cosmos.
"C'est ça ! s'enthousiasma Phénix. Vas-y, cogne !
– Décidément, vous êtes bien têtus, les chevaliers de bronze. commenta Aldébaran avec lassitude. Tu t'es rendu compte toi-même que tu n'avais aucune chance.
– Peut-être. Mais nous devons à tout prix nous rendre au Palais du Grand Pope et nous n'avons pas beaucoup de temps. Je déteste en arriver là, mais je vais devoir passer en force."
Son cosmos irradia autour de lui, comme des flammes parcourant délicatement son bras droit sans le brûler. Il fléchit les jambes, puis sauta directement vers la tête du chevalier du Taureau, le poing brandi.
"Par l'Illusion du Phénix !"
Arrivé à sa hauteur, Shun frappa, sans le voir esquisser le moindre geste pour esquiver, ni même pour contrer. Il s'attendait à se faire projeter à son tour, comme tous ses frères avant lui, mais, à sa grande surprise, il atterrit avec grâce derrière le Taureau. Il le regarda par-dessus son épaule, cherchant le moindre indice pour savoir s'il l'avait touché ou non.
"Je ne te savais pas aussi fourbe, pour utiliser directement cette technique, commenta Phénix, presque amusé.
– Je voulais le neutraliser. murmura Shun en réponse. Mais je ne sais pas si je l'ai touché.
– Pas le temps d'hésiter, achève-le !"
Son regard se perdit sur l'énorme trou dans le mur du temple, aux côtés du chevalier du Taureau, et son cœur se serra d'inquiétude. Seiya… il avait beau être coriace, il ne s'en sortirait pas tout seul, face à Aldébaran, pas vrai ? Serrant les poings, et profitant de l'absence momentanée du chevalier d'or, Shun s'élança vers le tas de gravats, malgré les protestations énergiques de la voix dans sa tête. Il enjamba rapidement le mur percé, avant de se rendre compte que Seiya en avait traversé trois autres sous la puissance du coup, avant d'atterrir, à moitié conscient dans une autre pièce. Le Phénix le rejoignit en quelques enjambées.
"Seiya, ça va ?"
Le Pégase se redressa dans une grimace douloureuse, se massant la tête. À sa grande surprise, Shun ne vit pas la moindre trace de sang sur ses mains ou son visage, comme si son armure avait tout encaissé pour lui… et malgré tout, celle-ci n'arborait pas la moindre égratignure.
"Shun… ? Où est Aldébaran ?
– Je crois qu'il est paralysé… mais ça ne durera pas longtemps.
– Et tu n'en as pas profité pour passer ?
– Je m'inquiétais pour toi.
– Mais Shun, on n'a pas de temps à perdre !"
Surpris par sa réaction, il regarda son camarade se relever et balayer la poussière sur son armure. Il resta peut-être une seconde sans bouger, à essayer de comprendre ce qu'il avait bien pu faire de mal, avant de se relever à son tour, sentant l'agacement le gagner. Son poing se serra sans qu'il ne le contrôle.
"Écoute, Seiya. J'ai beau paraître complètement dingue, dernièrement, je reste réaliste. Pris un à un, on n'a aucune chance ! On ne s'en sortira jamais en frappant chacun à notre tour, nous devons affronter les chevaliers d'or ensemble !
– Que la corne du Taureau vous emporte !"
Brutalement, Shun sentit toute la puissance du cosmos d'Aldébaran le percuter. Il se sentit décoller du sol, avant de filer droit vers le mur, qu'il traversa avec autant de violence que Seiya avant lui, avant d'en heurter un autre. Il atterrit finalement sur le sol dallé de la Maison du Taureau, son corps entier irradiant de douleur pendant un instant, lui coupant le souffle. Les yeux entrouverts, il était bien incapable de distinguer où il se trouvait. Sa vue était floue, et les sons lui parvenaient à peine. Allongé sur le dos, il cru presque reconnaître les constellations du Monde dans le Noir dessinées sur le plafond du temple de pierre, comme si les deux Mondes se mélangeaient tant il était secoué par la violence des coups. Il n'avait pas le souvenir que ça lui soit déjà arrivé. Était-ce seulement possible ?
Un cri étouffé lui parvint, puis une voix grave à l'accent étranger baragouina quelque chose d'incompréhensible près de lui. Aldébaran et Seiya s'affrontaient encore, il ne pouvait pas rester allongé par terre. Il fallait qu'il lui vienne en aide ! Mais il n'était même pas capable de tourner la tête pour voir ce qu'il se passait, ni même de bouger une seule main. Un craquement résonna à ses oreilles et un frisson désagréable remonta son dos. Qu'est-ce que c'était ? Seiya ? Pitié, non… Une silhouette floue et dorée entra dans son champ de vision, lui cachant les constellations.
"À ton tour… crut-il discerner. Je vais abréger tes souffrances…"
La masse d'or bougea, envahit son champ de vision, et il se sentit enfin bouger, comme si les chaînes qui entravaient ses mouvements s'étaient subitement brisées. Il roula sur le côté, ravivant la douleur dans tout son être, et esquivant in extremis l'assaut du chevalier d'or. Il se releva, se sentant mal assuré sur ses jambes, et sa vue était toujours floue. Derrière Aldébaran – du moins ce qu'il devinait être le chevalier d'or – il ne vit pas la Maison du Taureau, mais les montagnes qui entouraient son jardin. C'était perturbant.
"Je suis impressionné. s'entendit-il dire entre deux quintes de toux. Ton voisin du dessous n'avait pas menti : vous êtes vraiment d'un autre niveau."
Phénix… bien sûr.
"Je pensais que tu serais paralysé plus longtemps par l'Illusion du Phénix.
– Et je pensais que tu avais abandonné. Tu aurais dû rester sagement au sol, je ne veux pas vous faire souffrir inutilement."
Les yeux du chevalier de bronze se perdirent derrière Aldébaran. Contrairement à son alter ego, lui voyait clairement les dalles de marbre de la Maison du Taureau, dans lesquelles se creusait un large trou… Seiya était-il là-dedans ? Il fronça les sourcils et reporta son attention sur leur adversaire, debout devant lui, les bras éternellement croisés.
"Il est pas question que je me laisse enterrer. Pas avant de t'avoir fait décroiser les bras. Ton petit air supérieur commence à me faire bouillir."
Sur ses mots, il se mit en garde et déploya son cosmos comme de grandes ailes de feu. Il n'était pas question de retenir un seul de ses coups, avec un chevalier de l'envergure d'Aldébaran. Cependant, alors qu'il serrait les poings, prêt à lancer son assaut, une autre énergie attira son attention, dans le dos de son adversaire. Quelques roches volèrent hors du trou dans le sol du Temple, avant que Seiya n'en sorte d'un saut, atterrissant juste au bord de celui-ci. Un sourire étira les lèvres de Phénix en constatant que son armure et lui-même se portaient bien mieux que prévu.
"Content de te revoir, Pégase.
– … Phénix, demanda Seiya après un silence hésitant ?
– Lui-même. Je te croyais enterré pour de bon !
– Pas si vite, j'ai encore des choses à te demander, avant de mourir."
Phénix se permit un rire, sans pour autant baisser sa garde, alors que le chevalier du Taureau observait leur interaction sans comprendre.
"Il me semble qu'on a plus important, pour le moment. conclut-il, levant les yeux vers Aldébaran. Je te répondrai quand on se sera débarrassé de lui.
– Et comment comptes-tu t'y prendre, chevalier ?
– Il faut lui faire décroiser les bras !"
Si le principal concerné resta impassible, Phénix lança un bref regard interrogatif à son camarade.
"Pour désamorcer la puissance de la Corne du Taureau, on doit le pousser à changer de position, comme avec un sabre en position de « iai ».
– … J'ai pas tout compris, mais je vais me fier à ton jugement, marmonna Phénix.
– Je vois… commenta simplement le Taureau. Malheureusement, connaître mon point faible ne vous avancera à rien, le fossé entre nous est trop grand."
Agacé, Phénix déploya subitement son cosmos autour de lui, prêt à attaquer. Il serra les poings, et lança directement son attaque sur le chevalier d'or.
"Je vais te forcer à bouger avec les Ailes du Phénix !"
Les immenses vagues de cosmos que dégagea Phénix firent trembler les murs et les colonnes du Temple, si bien que Seiya crut un instant que le plafond allait leur tomber sur la tête. Cependant, cela n'ébranla pas la posture d'Aldébaran, qui se contentait de le regarder.
"Tu crois vraiment qu'une attaque si lente puisse me faire baisser ma garde alors que je peux me déplacer à la vitesse de la lumière ? Tu es ridicule !
– Le Météore de Pégase !"
Un sourire en coin, Phénix resta concentré alors que, derrière le colosse d'or, Seiya avait lancé sa propre attaque. Il détestait l'admettre, mais Shun avait eu raison sur ce point : seuls, les combats allaient être difficiles, et ils n'avaient pas le temps de se battre toute la nuit. À deux, ils auraient plus de chance d'en venir à bout au plus vite.
"Et c'est avec de telles attaques sur vous comptez m'obliger à changer de position ?! Il me suffit d'infimes déplacements pour les éviter !"
Les chevaliers de bronze s'échangèrent un bref regard : il n'était pas question de se laisser abattre par les paroles du Taureau. Phénix releva les yeux sur leur adversaire, qui semblait davantage se préoccuper de Seiya. Grossière erreur. Il serra les poings, et puisa au plus profond de lui pour faire brûler davantage son cosmos. Il montrerait à cette montagne de muscles qu'il n'avait pas volé son nom. Sa cosmo-énergie était si incandescente qu'il avait l'impression d'être chez lui, dans son volcan. Il sourit davantage alors qu'au même instant, il sentit l'aura de Seiya s'intensifier également. Si ses vagues de cosmos se firent plus violentes et brûlantes, les météores de son camarade se concentrèrent peu à peu en un point, jusqu'à se rassembler en un seul coup, plus gros.
"Une comète ?" souffla-t-il avec stupeur.
Soudain, le chevalier du Taureau leva les mains pour les tendre vers eux, arrêtant brutalement leur assaut. Il réceptionna la comète de Seiya presque trop facilement, alors que les Ailes de Phénix semblèrent se briser sur sa main comme une vague sur la falaise. Mais, au moins, se dit Phénix avec espoir et une pointe de fierté, le colosse avait enfin décroisé les bras, et semblait même perdre un peu de sa belle assurance alors que son regard oscillait entre eux.
"Alors, Aldébaran ? appela Seiya. Il semblerait qu'on ait réussi à te faire dégainer ! Maintenant, nous allons nous emparer de ta corne d'or !
– Quoi ? Tu te rends compte de ce que tu prétends ?!"
Phénix baissa les yeux sur Seiya. Son cosmos dansait sur lui comme une cape battue par la brise, et il la sentait bien plus puissante que lors de leur affrontement au Mont Fuji.
"Pff… Tu veux prendre ma corne d'or ? ricana finalement le Taureau. Si par miracle vous y parveniez, je serais prêt à me rendre et à vous laisser la victoire ! Mais n'imaginez pas pouvoir me battre simplement parce que vous m'avez fait dégainer. Ce n'est pas parce que j'ai décroisé les bras que la puissance de mon attaque va changer ! Prenez ça !"
Aussitôt, Aldébaran écarta les bras, lançant son attaque sur les chevaliers de bronze, qui se sentirent décoller du sol, propulsés avec la force d'un taureau les chargeant. Phénix percuta violemment le mur, si fort qu'il crut qu'il allait à nouveau le traverser, mais il retomba directement au sol, réveillant une vague douloureuse dans tous ses membres. La vue instable, il resta au sol quelques secondes, avant de se redresser, marmonnant un juron. En relevant les yeux, le décor tanguait dangereusement, mais, au moins, il pouvait voir, à l'autre bout de la pièce, un nouveau trou dans le mur d'en face.
"Le toit va nous tomber dessus, avec ces conneries…" grogna-t-il pour la forme, avant de se remettre sur ses pieds pour rejoindre Seiya, guidé par son cosmos toujours plus intense. Il devait bien l'admettre, son camarade était un coriace. Il s'était bien rendu compte qu'il n'était pas de ceux qui abandonnent facilement, mais il en était tout de même impressionné. Et il le fut bien plus quand, franchissant le mur à moitié effondré, il le vit face à Aldébaran, contenant toute la puissance de la Corne du Taureau entre ses mains. Il vacillait, peinait à la maintenir, mais il tenait bon.
"Tu veux me la renvoyer ? s'écria le chevalier d'or. Inconscient, tu ne pourras jamais ! Tu vas être projeté avec elle !"
Dans les secondes qui suivirent, ses paroles se vérifièrent, et Seiya vola encore à travers la pièce, s'écrasant brutalement au sol quelques mètres plus loin. Phénix s'élança aussitôt pour lui prêter main forte mais s'interrompit : son ami se relevait déjà, tous cosmos dehors. Celui-ci prenait délicatement forme sous une aura blanche, qui devint un flamboyant Pégase, les ailes déployées.
"Pégase !
– Aldébaran ! Je commence à y voir plus clair ! l'interpella Seiya, le souffle court. Je perçois tes mouvements lorsque tu lances la Corne du Taureau ! Cette fois, je vais te la renvoyer !
– Qu'est-ce que tu racontes… ?
– Finissons-en, Aldébaran !
– Cette fois, tu n'y survivras pas ! Que la Corne du Taureau t'emporte !"
Aldébaran lança son attaque encore une fois et Seiya, un sourire confiant sur le visage, écarta les bras. Il réceptionna la Corne du Taureau avec une facilité toute relative, et la maintint un petit instant entre ses mains. Alors que le chevalier d'or s'attendit à le voir se faire emporter par l'assaut, il le vit bouger si vite qu'il faillit perdre ses mouvements de vue. Sa propre attaque, soudain, lui revint en plein visage, si bien qu'il se sentit décollé du sol à son tour, et projeté un peu plus loin. Il atterrit lourdement sur les dalles de marbre de son temple, un rien étourdi par le choc, et resta quelques secondes allongé, le temps de reprendre ses esprits. Quand il se redressa, ses membres tremblaient encore un peu.
"Il est vraiment parvenu à me renvoyer mon attaque… mais il n'a pas pu survivre à l'impact… marmonna-t-il en se relevant sur ses jambes. Mais… où est-il passé… ?!
– Que les Ailes du Phénix t'emportent !"
Surpris, le Taureau se retourna juste à temps pour encaisser l'attaque en traître du deuxième chevalier de bronze, la contrant aisément. Il l'avait presque oublié, celui-là ! Il le pensait encore inconscient dans la pièce d'à côté. Ces jeunes étaient décidément bien coriaces… et le petit sourire satisfait de l'oiseau de feu ne lui disait rien de bon.
"Par ici, Chevalier du Taureau !" l'appela une voix derrière… non… au-dessus de lui ? Il leva les yeux juste à temps pour voir Seiya filer vers lui, la main levée. "Je t'avais dit qu'on s'emparerait de ta corne d'or !" déclara-t-il, alors que sa main s'abattit à toute vitesse sur son casque. Il entendit un bruit sec, puis, sous ses yeux, sa corne gauche s'envola, avant de se planter dans le sol quelques mètres plus loin, si facilement que ça en été risible. D'un geste ample, il renvoya distraitement les Ailes du Phénix a l'envoyeur, qui l'esquiva rapidement, sans se départir de son sourire, comme s'il avait atteint son but… et peut-être était-ce le cas.
"Je t'avais prévenu ! annonça Seiya. Te voilà privé d'une de tes cornes !
– Tu reconnais ta défaite ? demanda Phénix. À moins que tu ne préfères qu'on te prenne la deuxième ?"
Le silence s'installa quelques secondes dans la maison du Taureau. Le regard d'Aldébaran décrit quelques aller-retour entre les deux chevaliers, avant qu'un sourire n'étire ses lèvres. Soudain, à la stupéfaction des jeunes garçons, le Taureau fut pris d'un tel fou-rire que ses épaules et son corps tout entier en tressautèrent. Ils se regardèrent, confus.
"Ça va, vous avez gagné ! déclara Aldébaran entre deux rires. Sachez que vous êtes les premiers à parvenir à prendre une des cornes du Taureau !
– Mais alors…
– Oui, vous pouvez passer tous les deux. Traversez ma demeure !
– Shun ! Seiya !"
Les chevaliers de bronze se retournèrent de concert, pour voir arriver vers eux leurs frères, l'air soulagés de les voir en un morceau – même si Hyoga resta prudemment à distance du plus jeune, qui avait croisé les bras avec une moue agacée.
"Vous avez repris connaissance…
– Désolés de vous avoir laissé faire tout le boulot, s'excusa rapidement le Dragon.
– Mais bravo à vous d'y être arrivés seuls !
– Pas de temps à perdre, allons-y!
– Je ne crois pas, non."
Fronçant les sourcils, Phénix releva les yeux vers Aldébaran, qui s'était remis au milieu du chemin, croisant les bras. Il barrait à nouveau la route et son regard était rivé sur ses camarades à peine réveillés.
"Oh, je vois… Seuls Seiya et moi pouvons passer, n'est-ce pas ?
– C'est exact. Les trois autres doivent encore me prouver leur valeur.
– Mais on n'a pas le temps pour ça ! argumenta aussitôt le Pégase. Ils doivent absolument…
– Laisse, Seiya. l'interrompit Ikki. Partez devant, on ne va pas trainer des heures ici."
Il échangea un rapide regard avec son jeune frère, qui lui rendit un petit sourire satisfait, le menton levé, avant de se retourner, attrapant son camarade par l'épaule pour l'emmener avec lui, alors que celui-ci protestait énergiquement.
"Faites attention de pas fracasser un autre mur. avertit simplement Phénix en s'éloignant vers la sortie de la Maison. Je suis pas sûr que le toit tienne en place encore longtemps, à ce rythme."
Sur ses mots, il relâcha sa prise pour presser le pas, courant vers les marches menant à l'étage suivant : la Maison des Gémeaux.
Voilà enfin le chapitre 17 !
J'ai salement galéré pour me mettre à l'écriture de la bataille dans la Maison du Taureau. J'ai facilement bloqué plusieurs jours après l'apparition d'Aldébaran, sans savoir quoi faire. Vous ai-je déjà dit que je regrette de plus en plus d'avoir ramené les cinq chevaliers de bronze en même temps ? (J'ai déconné )
Comme la montée des douze Maisons va être particulièrement difficile à rédiger, je ne vous garanti absolument pas qu'il y aura un nouveau chapitre dans deux semaines. J'essaierai de vous fournir le chapitre 3 de "L'enfant Maudit", pour compenser et j'essaierai de mettre le chapitre 18 le dernier dimanche de février. Je vais faire de mon mieux.
Si vous ne l'avez pas encore lu, je vous invite à aller jeter un œil à "Une Visite à un Ange", qui est un préquel de cette fanfiction. N'hésitez pas à m'y laisser une review. Je suis sur que vous ne verrez plus Phénix de la même manière.
Je vous dis à la prochaine pour un nouveau chapitre !
