Ron était assis à son bureau, remplissant comme à l'accoutumée, des papiers sans importance. Il savait parfaitement que ces papiers finiraient dans des tiroirs et n'en seraient jamais ressortis, vraiment, qui reviendrait sur des petits vols ou des rapports journaliers d'Aurors?
Pourtant, aujourd'hui, il y mettait une concentration extrême et son esprit était sur plusieurs fronts. Il lui fallait garder son calme car chacun de ses hommes devait être utilisé à bon escient et au bon moment. Il y avait ceux qui enquêtaient sur la nouvelle marque, d'autres surveillaient le Palais de la Reine et le reste était dispersé dans tout le pays. De tous les coins de l'Angleterre, les peuples magiques s'étaient mis en mouvement. Les centaures de Poudlard étaient partis la veille emmenant avec eux les licornes, tandis que Gringott's affichait une porte close et des mouvements suspects étaient visibles, à l'intérieur. Il savait par son frère Bill que tous les sorciers avaient été remerciés jusqu'à nouvel ordre et gentiment escortés jusqu'à l'entrée. D'après la déclaration des gobelins, ces derniers étaient « en attente », ce qui signifiait qu'il n'y avait aucun risque de ce côté-là. Mais il avait la certitude que quelque chose de gros se préparait. Sur un de ses murs il avait agrandi une carte ou chaque déplacement était signalé et vers où, et la direction était la même pour tous, le Domaine. Qui avait-il là-bas ? Cette Cloche mystérieuse ? Et quel objectif servait ce Grand Rassemblement ? Il y avait tant de questions et si peu de réponses, que c'en était frustrant.
Si ce n'était que ça, il pourrait y arriver, mais il y avait aussi le peuple sorcier à gérer. Les sorciers devenaient de plus en plus affolés, à cause de ce qui s'était produit sur le chemin de traverse. Ils étaient maintenant confrontés à l'horreur absolue, le risque de perdre leur magie. C'était une possibilité, en cas de vœu brisé, de punition extrême ou autre raison explicable par la magie, mais toujours contrôlée par eux. Aujourd'hui ils avaient en face d'eux un ennemi pouvant accomplir ce geste sans effort ni difficulté. C'était d'autant plus horrible que la Reine gardait le silence, il n'avait aucune réponse à fournir ! C'était une guerre froide qui avait commencé, une partie d'échecs ou chacun attendait le geste de l'autre. Un jeu passionnant en temps normal, un milieu où il se savait extrêmement fort, mais il savait reconnaître qu'ici, il était surclassé. Il avait l'impression de sentir la Reine en train de le regarder, assise sur son trône, connaissant tous ses faits et geste, ainsi que les actions qu'il allait entreprendre.
Il était loin d'être idiot, il savait que c'était le cas. Chaque sorcier né moldu retournant dans le monde moldu devait être interrogé voir recruté, de même que les Cracmols. Sectarisme, racisme, noblesse… il se souvenait des leçons que sa femme lui avait données. Il se rappelait très bien de cette discussion ou elle lui avait démontré par l'histoire moldue qu'un tel dénigrement causerait la perte du monde sorcier. Ce n'était pas qu'il n'y avait pas cru, il savait qu'Hermione était bien plus intelligente que lui, mais il avait nié un futur conflit car il ne voulait pas admettre que cela pouvait arriver un jour.
Dans un coin de son bureau, il y avait l'article du Chicaneur. Une page criante de vérité et effrayante par son contenu. Pourtant il ne pouvait pas nier un seul argument de l'article, c'était horrible. Pénélope avait martelé la vérité au pire moment. Ron rigola doucement en pensant à son frère Percy. Il se demandait si son frère avait compris que c'était son ex-femme qui été l'auteur de l'article. Une sang Pur, d'une lignée aussi pure que les Weasley mais bien plus riche. Elle avait quitté Percy, quand celui-ci avait voulu qu'elle arrête ses études moldues. Il se rappelait la scène au Terrier, le moment ou Pénélope avait détruit tous les arguments de Percy en vantant les écoles et université moldues. Elle été partie peu après, continuant ses études de journaliste avant de réapparaître aujourd'hui. Et quelle réapparition ! Pour Ron ce n'était pas anodin, le timing laissait peu de doute à ce sujet, la femme était-elle un agent de la Reine ? Possible…
Un mouvement le fit revenir au présent. Discrètement, une araignée en origami venait de sortir d'un trou dans le mur et se dirigeait vers lui. Charmé, le trou n'était visible que de lui, tout comme le papier utilisé. C'était Astoria qui cherchait à lui transmettre un message, il n'y avait qu'elle pour le contacter ainsi. L'ex sang pur, reniée par son père, était devenue son indic dans le monde clandestin. Grâce à elle, il avait arrêté plusieurs crimes et autres affaires illégales en échange d'argent. Une part de lui se sentait mal d'utiliser la femme ainsi, mais elle avait trop de fierté pour accepter de l'aide de sa part, il le savait.
- Brandon ! dit-il en actionnant une Rune sur le bureau. Je m'absente du bureau, prend le commandement en mon absence !
Prenant sa cape, il enfila rapidement le capuchon cachant son visage avant de saisir l'araignée. Pour sa sécurité ainsi que celle d'Astoria, c'était une obligation pour lui de la porter. Elle modifiait toute son apparence en gonflant sa corpulence et masquant son visage, la capuche avait aussi un sortilège pour modifier sa voix s'il devait parler. L'araignée n'était pas un message mais un Portoloin, l'amenant chez Astoria. Il avait confiance en la femme, cette dernière avait fait un serment sur sa vie qu'elle ne le ferait pas tomber dans un piège en l'appelant. Même aujourd'hui, il appréciait ce vœu car il n'arrivait toujours pas à saisir pourquoi la femme faisait cela ni dans quel but. Elle l'aidait mais il savait pertinemment qu'elle avait ses secrets et des objectifs bien à elle, ainsi il était toujours un peu méfiant.
Il n'eut pas le temps d'analyser son environnement qu'il entendit une voix derrière lui.
- memoriam vestri inveniet !
Il resta immobile une minute. Une minute pendant laquelle il se rappela de chaque moment qu'il perdait à chaque fois. Encore une fois il maudit ce moment douloureux. Revoir des tonnes de souvenirs d'un seul coup n'était jamais agréable.
- C'est bon Weasley ? fit la voix de Charles Roy derrière lui. On a énormément de travail et peu de temps.
- Allons-y dans ce cas, dit Ron en comprenant qu'il y avait une urgence.
Suivant l'homme, ils marchèrent pendant un moment avant d'arriver dans une grande salle de réunion. Déjà présente, Astoria le salua d'un air grave avant de lui indiquer une chaise et lui tendre des documents. Charles Roy s'installa et saisissant lui aussi des papiers il commença la réunion.
- Nous avons été… imprudents et la situation devient chaotique, peut-être même trop.
- Qu'avez-vous découvert ? demanda Ron en le regardant. Je ne savais pas que les sphères étaient terminées ni que Neville allait en obtenir.
- Il y a deux jours et c'était le premier « essai », si on peut dire. Concluant et efficace, même si l'utilisation était peut-être trop précipitée. Nous la lui avons remise lorsqu'il est parti de chez lui après avoir récupéré des affaires pour sa famille. Il avait ordre de n'en parler à personne au cas où cela s'ébruite et de ne l'utiliser qu'en cas nécessité de absolue.
- Il a suivi les consignes mais le timing était trop rapide, reprit Astoria. Nous sommes devenus les méchants et le fait qu'il y ait une nouvelle marque est insignifiant par rapport à la suppression de la magie. Et malheureusement l'inverse serait préférable.
- Ça bouge ? Demanda Ron en mentionnant le monde clandestin.
- Beaucoup, trop. Ce ne sont que des hommes de main, aucun n'a de réelle information et les chefs se cachent bien. J'ai un homme à l'intérieur qui a déniché une information capitale. Nous n'avons pas à faire à un seigneur des ténèbres, mais bien à une organisation entière. Organisée et évidemment avec les moyens pour la soutenir.
- Rien de plus ? demanda Charles en la regardant.
- Pas plus que ce que l'on sait déjà. Organisation sang pur avec plus de tact que Voldemort. Là où ce dernier cherchait à atteindre son objectif par la force, eux c'est par la ruse et la discrétion. L'article du Chicaneur frappe en plein dans leurs objectifs, c'est-à-dire créer une société élitiste avec comme critère le sang et sa pureté. Tout le reste doit dégager. Le fait que les peuples magiques s'en vont est pour eux un moyen de s'en débarrasser aussi. Encore une fois ils ont bien joué.
- Ce qui mène au point suivant, reprit Charles Roy d'une voix grave. La Cloche a sonné. La Reine l'a entendue. D'après ce qu'elle nous a dit, c'est une connaissance relayée au sein de la famille Royale. Nous n'avons pas l'histoire en tête mais c'est en somme une invitation à une grande réunion, plus communément appelée le Grand Rassemblement. La Cloche sonne huit fois pour inviter les peuples. Trois jours après, la réunion commence avec tous ceux qui ont répondu jusqu'à ce que la Cloche sonne à nouveau huit fois. La règle est trois représentant chaque jour, pas forcément les mêmes obligatoirement.
- Qui accompagne la Reine ? demanda Ron en se redressant.
- Nous tous. Evidemment vous serez présent en tant que Fantôme et garde du corps personnel de la Reine, avec moi en conseiller et Astoria en psychologue et analyse. Maintenant attendons cinq minutes, la Reine va proclamer sa présence.
Allumant la télévision, ils attendirent en silence que la diffusion commence. Ron profita de ce moment pour réfléchir. Il était quasiment certain que le gardien était Harry. Il n'avait pas de preuve mais tout portait à le croire. Neville n'avait aucune raison de connaître le Domaine autrement que par lui. S'il avait raison, il reverrait Harry dans moins de trois jours. C'était un sentiment étrange, d'imaginer le revoir mais ne pas aller le voir. Il allait devoir garder son rôle secret ainsi que son identité et cela lui faisait mal. Mal de se rendre compte que c'était de leur faute, s'il avait pris autant de distance. Harry avait de nouveaux alliés maintenant, des personnes qui les avaient remplacés. Neville devait en être un, bien sûr, mais avait-il une famille, maintenant ? Était-il resté seul ? Qu'était devenu son ami ? Hermione essayait de paraître forte, mais Ron la connaissait, elle était une épave. Elle se lançait dans son travail avec désespoir pour réparer ses erreurs. Cela allait être dur de partir en mission en la laissant ainsi, mais il n'avait pas le choix, car ce serait le début de la reconstruction, du moins il l'espérait. Il ne savait pas ce qui se passerait à la réunion, mais si la Reine et Harry faisaient front commun, tout irait pour le mieux.
Détruire pour reconstruire, voilà l'objectif qu'ils avaient.
L'écran s'anima et ils purent voir la Reine assise sur son trône avec un sceptre en bois dans la main. Non, pas un simple sceptre, un bâton magique, comme maniaient certains sorciers. C'était peu commun en Angleterre et Ron n'avait vu que Maugrey en utiliser un. Il en connaissait un deuxième qui, d'après ses vagues souvenirs ressemblait à celui de Merlin. Chacun des tableaux de l'homme, représentait le mage différemment, mais le bâton était toujours le même, c'était ce qui l'avait toujours frappé quand il en voyait. Serait-il possible que…
- Moi, Elisabeth II, Reine du Royaume Uni, Reine du peuple non magique, descendante du vœu de la Reine Guenièvre déclare par la présente ma présence au Grand Rassemblement ! Que par mes mots et ma volonté, il en soit ainsi !
D'un geste ferme, la Reine frappa le sol avec le bâton. Ron ne connaissait pas la distance qui le séparait du palais mais il ressentit l'onde magique qui le traversa. Encore deux jours, deux jours pendant lesquels ils devaient se préparer et récolter le plus d'information possible.
(*_*)
A des kilomètres de là, Harry était assis à la Grande Table, regardant les étendards prendre vie. Il était reconnaissant qu'il y ait des mots pour l'informer qui était qui, sinon il serait perdu. Gringott's répondait présent, tout comme les centaures de Poudlard. Le domaine était présent aussi, il avait vu les différents peuples annoncer leur présence, dès les premières minutes. Tellement de monde… gobelins, nains, vampires, loups garous… tout le monde répondait.
Une onde magique le traversa et un nouvel étendard s'alluma. Il ne lui fallut qu'un regard pour comprendre qui venait d'accepter de venir. Ce n'était pas un blason, ni un écusson, mais un drapeau que le monde entier connaissait. Devant lui, faisant directement face à la place du gardien, le drapeau de la Reine d'Angleterre était présent.
Il n'eut pas le temps de réfléchir, une deuxième onde le traversa, mais de la direction opposé. Se retournant, il sentit une nouvelle vague le traverser. Cela venait de chez lui. Courant, il arriva quelques minutes plus tard, dans le jardin. Il put voir les filles de Neville ainsi que Claire regarder la fenêtre de sa chambre qui brillait de mille feux.
Lily-May.
