- Au nom de la Reine, qu'est-ce que vous ne comprenez pas dans, « on peut raser votre montage en moins de temps qu'il ne faut pour le dire » ?
- J'en dis que vos hommes rencontreront nos guerriers et nos haches, humain ! tonna le Roi nain en frappant du poing sur la table.
- ASSEZ ! Cria finalement Harry, n'en pouvant plus.
La dispute entre Charles Roy et le Roi nain devenait incontrôlable, si bien que c'en était réduit à qui insultait ou menaçait le plus. Le sujet du conflit entre les deux était d'ailleurs oublié depuis longtemps, que cela soit des deux concernés ou des spectateurs.
A leur décharge, Harry n'en pouvait plus, lui non plus, car les discussions tournaient en rond sans solution. Chacun ne pensait qu'à sa petite personne et ne voyait pas qu'il fallait faire des sacrifices pour avancer. Que la plupart des souverains soient des hommes ayant atteint leurs postes par des faits de guerre ou dans le sang de leurs prédécesseurs n'aidait pas, car c'était pour eux la solution à la plupart des conflits. Celui qui était vivant à la fin avait raison, point. C'en était tellement ridicule, qu'il souhaitait qu'il y ait plus de gens… normaux, avec qui il soit possible de parler, être constructif, utile.
Et puis il y avait les autres Seigneurs, qui eux, avaient atteint leurs postes soit par héritage, soit par intelligence. Mais là aussi cela bloquait. Ceux dont la Royauté était un héritage, étaient semblables au Sang purs, se croyant supérieur et n'ayant aucun compte à rendre, ni de conseil à recevoir. Ceux dont la place était atteinte par l'intelligence étaient peut-être les plus obtus qu'il ait jamais rencontré. Par définition, être intelligent était savoir se cacher et survivre. C'était utile en temps de guerre, il l'admettait, mais ici… nullement.
Cela faisait trois jours que le Grand Rassemblement avait commencé, trois longues journées dont Harry espérait la fin, à peine levé. Il commençait à regretter d'avoir sonné la Cloche et de ne pas avoir pris une décision seulement avec le Domaine. Les différents peuples n'étaient pas contre le fait de servir d'asile, car même si c'était de sorciers dont il était question, il s'agissait de rescapés. Des personnes cherchant un abri, comme ils l'avaient un jour été, eux ou leurs ancêtres pour ceux n'ayant jamais quitté le Domaine.
La seule qui était contre était Lavande. Harry ne pouvait pas lui en vouloir et il savait qu'elle vivrait jusqu'à la fin au Domaine sans jamais ressortir. Que pouvait-il faire pour l'aider ? Rien. Son histoire était d'une cruauté absolue et ses blessures ne guériraient jamais, il le savait pertinemment. Mais pour le bien des sorciers innocents, devait-il ignorer son amie ? Il n'était pas sûr de pouvoir l'accepter, d'autant plus que ce serait ignorer l'opinion d'un résident du Domaine, même si biaisée par son passé personnel. Même ici ce n'était pas juste le passé de Lavande, nombre de personnes avaient des histoires semblables, si bien qu'il était difficile de prendre LA bonne décision.
Evidemment, recueillir des réfugiés était dans le cas, où la prise de pouvoir par le Reine prendrait plus de temps que prévu, chose qu'il avait personnellement du mal à voir. D'après Luna et celui qui se faisait appeler le « Fantôme », le Ministère de la Magie n'avait pas changé depuis la guerre contre Voldemort. Pour Harry, cela se traduisait par « ridiculement facile à faire tomber ». Ajouter à cela la peur que la Reine avait provoqué en détruisant Azkaban, Harry anticipait une prise de pouvoir sans grande difficulté.
Mais c'était cette organisation qui l'inquiétait, ou plus exactement la quantité d'adeptes, qu'elle pourrait contenir. Avec du recul, Voldemort avait réussi à prendre le contrôle de l'Angleterre magique avec très peu d'hommes, en comptant juste sur la peur et la force brute. Il n'y avait aucune finesse dans ses plans, si ce n'est les horcruxes qui étaient son atout principal. Encore ici, Harry ne comprenait pas comment la destruction de ces derniers avaient été aussi difficile. Se mettant de côté, Dumbledore était entré en contact avec les horcruxes grâce au carnet. Ce n'était que quatre ans plus tard, qu'il en avait parlé à Harry, puis s'était mis à leur recherche. Oui, Horace Slughorn avait été important pour en connaître le nombre exact, mais nullement pour leur recherche. Dumbledore était un sorcier puissant, Harry l'admettait, mais un piètre leader.
Trois poste de pouvoir, directeur de Poudlard, Président du Magenmagot et pour finir Manitou suprême de la Confédération internationale des mages et sorciers. Avec tous ces postes, organiser des mesures contre Voldemort aurait dû être assez simple, si c'était juste pour détruire les horcruxes. L'homme était intelligent, encore une fois Harry devait l'admettre, mais il ne croyait pas une seule seconde que des sorciers comme les langues de plombs ne connaissaient pas cette magie, c'était impossible.
Ainsi donc, si l'on retirait Dumbledore de l'équation, Voldemort avait pris le pouvoir avec seulement une vingtaine d'adeptes. Le reste de son armée n'était venu que plus tard et Harry avait la certitude que l'argent avait été la clef pour obtenir ces troupes.
Donc prendre le contrôle du Ministère de la magie serait un jeu d'enfants pour la Reine et son organisation, c'était une évidence pour lui. Pour être honnête, si elle était venue au Domaine, ce n'était pas pour de l'aide, plutôt pour une prise de pouvoir facile avec une suite encore plus simple. Entamer des discussions amicales avec des peuples voisins comme les gobelins par exemple, n'était pas chose aisée, il ne fallait donc pas semer la question « si je refuse va-t-elle me déclarer la guerre pour me faire plier ? ».
Plus il y pensait, plus il voyait une telle chose se produire. Entamer de bonne relation pour après, ne pas être vu comme ennemi quand elle viendrait vers eux. C'était ce qui allait se passer car l'économie sorcière était à genoux et sans l'aide des gobelins, que ce soit la baisse de leurs tarifs ou taxes, cela relevait de l'impossible. Les nains et les elfes pourraient devenir de potentiel alliés commerciaux s'ils acceptaient de sortir de leur isolement. Pierres précieuses, connaissances des runes, c'était la spécialité des nains avec la forge qu'ils avaient en commun avec les gobelins. Les elfes avaient pour eux des connaissances sur la magie impressionnante pour ce qu'en savait Harry, une utilisation de leurs dons dans plusieurs domaines était facilement envisageable.
Mais pour que cela marche il faudrait que tout le monde se calme et voie ce que pourraient apporter les autres peuples, chose que personne ne voulait faire, car tous avaient leurs propres ego ! C'en était insupportable !
- Je propose que l'on fasse une pause, ou même que l'on arrête là pour aujourd'hui, finit-il par dire une fois le silence revenu. Vous oubliez, que ce soit vous Charles Roy ou vous Seigneur Nain, que le but de votre présence n'est pas de vous faire la guerre, mais de préparer l'avenir du monde magique !
- Vous avez raison Gardien, fit le nain après un court moment. Je vous prie de pardonner mon éclat.
- Comme le mien, dit Charles Roy.
- Je clôture la Réunion pour aujourd'hui, dit Harry en soupirant, cela ne sert à rien de continuer. Seulement rappelez-vous du pourquoi vous êtes ici. Une alliance entre vous tous serait excellente pour le monde magique mais nullement le sujet. Le sujet est le monde sorcier et son avenir, point. Et je vous prierai d'arrêter les menaces de mort et de guerre, vous êtes ici au Domaine, ce n'est ni demandé ni voulu ! C'est un lieu neutre, qui héberge ce rassemblement pour cette unique raison, tachez de vous le rappelez !
Sur ces mots il partit. Ce n'était pas une très bonne attitude il le savait, mais il n'en pouvait plus. Les jours précédents il prenait le temps d'attendre que tout le monde parte avant de rentrer chez lui, afin de parler à ceux qui voulait discuter avec lui, mais pas ce soir. Il fut sorti de ces pensées par Claire courant vers lui.
- Harry ! Lily-May se réveille ! Il se passe quelque chose !
Sans réfléchir, il se mit à courir en direction de sa maison, créant une scène de déjà vu qu'il espérait être la dernière. Il remarqua qu'il n'était pas seul, Luna et Neville suivaient eux aussi et il pouvait voir que la voix de Claire avait porté, car des fées volaient vers la maison le dépassant sans difficulté.
Il monta rapidement les escaliers menant à sa chambre ou reposait toujours la petite fille, seulement pour trouver La Reine des fées déjà là, les deux mains tendues vers Lily-May qui gémissait de douleur.
- Gardien, vous voilà ! Vite, il y a une grande concentration de magie dans son dos, je pense que des ailes essaient de sortir ! Il faut la mettre sur le ventre et retirer ses vêtements !
Ne perdant pas une seconde, Harry obéit rapidement. Son geste était peut-être brutal, mais il déchira tout simplement le haut de l'enfant car l'enlever correctement relevait de l'impossible tant elle se semblait trembler de douleur. De chaque côté de sa colonne vertébrale, descendant de ses omoplates jusqu'au milieu du dos, deux lignes de sang étaient visibles, grandissantes et devenant de plus en plus sombres.
- Les ailes essaient de sortir ! Gardien, il va falloir créer les deux ouvertures sans cela le processus va devenir de plus en plus douloureux pour elle. Il va falloir que vous ouvriez sa peau, je m'occupe de la guérir et de rendre l'opération moins difficile pour elle mais il faut faire vite, les ailes forcent de l'autre côté pour sortir.
Neville, dans le salon, il y a des potions de guérison, va les chercher pour après ! Prend tout ce qui est nécessaire ! dit Harry en s'agenouillant et sortant son couteau. Reine Titiana, faites de votre mieux je vous en prie, c'est déjà dur pour moi de faire cela alors s'il vous plait faite qu'elle ait le moins mal possible.
- Je vous promets de faire de mon mieux, assura la fée. Une dernière chose, allez-y d'un coup car dès que vous allez commencer à ouvrir, la peau va se déchirer pour permettre au reste de sortir. Il vaut mieux couper que déchirer pour elle.
Se forçant à rester calme et à ne pas trembler, il posa sa main sur l'épaule de Lily-May tandis que l'autre tenait le couteau sur la plaie. Inspirant un bon coup, il fit glisser le couteau rapidement en essayant de ne pas trop l'enfoncer, son esprit étant convaincu qu'une légère coupure était plus facile à soigner qu'une profonde.
Il ne s'attendait pas à être brutalement repoussé par l'aile qui se déploya d'un seul coup. Le cri aigu de douleur remplit la chambre tandis que la Reine des fées tentait de guérir la blessure fraîche en évitant au mieux les battements violents de l'aile fraîchement apparue.
Harry lutta aussi pour les éviter car même si l'épreuve était difficile pour lui aussi, il avait une deuxième entaille à faire. L'arrivée de Neville l'aida, car ce dernier essaya de garder l'aile en dehors du chemin de Harry, chose difficile car il voulait éviter de blesser encore plus l'enfant en restreignant les mouvements. Pour Harry, la deuxième fut plus simple à faire, car il désirait maintenant soigner le plus rapidement Lily-May. Un deuxième cri retentit, encore plus aigu et horrible que le premier alors que Lily-May se cambrait sous la douleur.
- Les filles, aidez-moi à la guérir ! cria la Reine Titiana en tendant ses mains et en commençant à chanter.
Ce fut un moment magique pour ceux qui étaient présents dans la pièce. Autour de Harry qui maintenait la petite fille allongée, les fées tournoyaient autour en se tenant par les mains, chantant dans leur langue. La blessure se referma doucement, pas assez pour disparaître, car la peau devait s'habituer à la présence des ailes, mais suffisamment pour endiguer le saignement. Cela effraya Harry de voir que tant de sang était sorti et d'un geste effrayé il jeta le couteau au loin, une partie de lui s'accusant d'avoir blessé la petite fille.
- C'était nécessaire, Gardien, dit la Reine Titiana qui avait fini de guérir la plaie. Le geste peut sembler horrible mais c'était obligatoire. Nous les fées, naissons directement avec nos ailes, donc nous ne connaissons pas cette douleur. Dans le cas où tu n'aurais pas ouvert sa peau, elle aurait pu souffrir beaucoup plus. C'était la bonne chose à faire.
- J'ai mal, fit une petite voix, si petite que Harry crut l'avoir imaginée.
Mais non, de ses grands yeux bleus remplis de larmes, Lily-May le regardait, ou du moins, Harry le pensait. De ses propres expériences, on ne voyait pas grand-chose quand on souffrait autant.
- Chut, ça va aller maintenant, dit Harry d'une voix rassurante. Ce sont tes ailes qui te font mal mais c'est fini maintenant.
- J'ai des ailes ? demanda Lily-May en souriant faiblement. J'aimerais les voir mais je suis fatiguée et j'ai mal.
- Dors, dit Harry en lui caressant doucement la tête. Elles ne vont pas partir, repose-toi et tu les verras à ton réveil.
- D'accord répondit-elle d'une voix faible.
Elle s'endormit à nouveau sur ces mots, bien que ses ailes battaient doucement et qu'un petit sourire barrait son visage. Harry espérait qu'elle arriverait à dormir sans trop de douleur, il se souvenait de son bras en deuxième année après que tous ses os eurent repoussé, les nuits avaient été difficile pendant quelques jours suite à cela.
- Va te nettoyer Harry, dit Luna en s'asseyant sur le lit, nous allons veiller sur elle en attendant.
Harry aurait sûrement nié la suggestion si elle était venue de quelqu'un d'autre, ou même se serait essuyé les mains dans la pièce en appelant un elfe de maison pour de l'eau, mais il avait confiance en Luna. Il y avait aussi le fait qu'il n'avait pas la force d'argumenter, après la journée, plus cela. Sa dernière vision fut Luna en train de caresser la tête de Lily-May en chantonnant une berceuse avant de perdre conscience.
