Harry se sentait bien, en paix. L'arrivée de Teddy, ainsi que le « vrai » réveil de Lily-May y avaient beaucoup contribué. Peut-être était-ce aussi le fait d'avoir enfin dit à ses… amis, ce qu'il avait sur le cœur. Il ne savait pas comment les considérer. Il était en colère, avait été blessé plus que n'importe qui, mais il y avait trop d'histoires avec eux pour n'être plus personne, pour lui. Ce n'était pas des ennemis, il n'arrivait pas à les considérer comme tels. Meilleurs amis, famille… tout ça était sorti, avec ce qui restait de leurs relations. Mais il ne pouvait pas les voir comme des « connaissances » ou simplement les ignorer. C'était pour ça que c'était si dur pour lui, le passé faisait qu'ils seraient toujours là, qu'il ne pourrait jamais ne pas les voir, pas après tout ça. Ils étaient des points cruciaux de son passé, si bien que parler de Poudlard, Voldemort, ou même de son enfance était impossible sans parler d'eux.

C'est pourquoi il laissa Teddy parler, lui apprenant comment était Poudlard, ses années à l'intérieur du château, les cours et surtout, le plus important aux yeux de Harry, ses méfaits. Teddy avait l'esprit de son père, une intelligence remarquable et un humour pointu. Une blague, d'après lui, dans une expression identique à celle de Remus, devait être le summum d'un travail de longue haleine. Harry y avait vu le même regard et la même expression que celle de Remus quand il parlait des blagues des maraudeurs avec Sirius.

D'après Teddy, il y avait des principes à respecter. Le premier, évident bien sûr, était de ne pas se faire attraper. Le deuxième était d'innover, mais ne jamais demander de l'aide ! Chaque blague avait été le fruit de son travail, s'aidant de la bibliothèque et des cours pour apprendre de nouveaux sorts. Car quel était le but d'apprendre de nouveaux sorts, si ce n'était pour les mettre en application ! Le dernier point, même s'il était à placer au même niveau que le premier, était de faire rire et non se moquer. C'était dur, avait-il avoué, de ne pas fixer principalement une personne que l'on n'aimait pas, par exemple. Chaque blague faisait l'objet d'une profonde réflexion afin de ne pas passer pour un tyran. L'objectif était de rire, pas d'humilier. Teddy était un orateur né, réussissant avec brio à rallier trois autres élèves, chacun venant d'une maison différente, dans son groupe de blagues. Comment ce garçon, qui pouvait mentir avec une telle innocence, et être aussi rusé et courageux avait fini à Poufsouffle était un mystère pour Harry.

Il confia à Harry qu'il voyait les Maraudeurs comme des rivaux, devenant eux même des animagus, bien qu'il refusa à Harry de le découvrir. C'était un secret après tout, et aucun Adulte, même s'il en était un, maintenant, ne pouvait le voir, c'était la promesse qu'ils s'étaient faite à l'époque. Il refusa aussi la solution facile qui consistait à acheter des produits de George. Ceux qui le faisaient étaient de pâles imitateurs, qui voulaient se faire passer pour eux, les Chapardeurs ! Le nom était venu après qu'ils aient réussi à retirer tous les insignes de préfets. L'idée était venue, après que le préfet de Gryffondor les ait pris de haut et ignorés, ensuite. Pour ne pas attirer l'attention, ils avaient donc décidé de tous les enlever. La subtilité, et le brio de la farce avaient été que les insignes étaient toujours là, visibles de tous, sauf des concernés. Hormis le susmentionné, la plupart des préfets le prirent bien, surtout ceux qui comprirent après un moment et tous profitèrent du spectacle que donnait le Gryffondor. Ce dernier refusait de croire que son insigne était bien présent sur sa poitrine, allant jusqu'à s'écrier que tous étaient fous. A la surprise de Harry, outre le fait que la situation était comique, l'attitude du préfet avait été mise à jour, car il avait été jusqu'à proférer des menaces car « une personne de son statut ne devait pas être attaquée ». Il avait perdu son insigne peu après, la directrice n'ayant pas aimé voir ce genre de comportement venir d'un préfet.

Cela avait surpris Harry de voir que la situation avait pris cette ampleur, mais Teddy lui apprit que le Poudlard de maintenant était très différent de celui de son époque. D'après lui, le sang neuf parmi les professeurs y avait contribué. C'était maintenant des adultes ayant connu la seconde guerre contre Voldemort qui étaient là, et faisaient en sorte que les erreurs ne se reproduisent plus. Cela avait été dur, mais même s'il y avait toujours une légère méfiance envers les Serpentard, ça changeait doucement.

Il parla aussi du fait qu'il était LE filleul de Harry Potter et ce que cela amena. Des questions comme « où est Harry Potter ? » ou « mais tu devrais savoir où il est, non ? » devinrent courantes, ses faits et gestes surveillés dans l'espoir de trouver Harry Potter. Il avait réussi à l'ignorer après un moment, mais chaque question ramenait le fait qu'il ne connaissait pas son parrain, et ne l'avait jamais vu.

Ce fut des jours heureux, où les deux se découvrirent et apprirent l'un de l'autre. Des sujets ne furent cependant pas abordés, comme Hermione et Ron, mais cela ne gâcha nullement les histoires qu'ils se racontèrent. Puis vint le jour où Teddy partit, ne pouvant rester plus longtemps. Ils se séparèrent avec difficulté, avec la promesse de Teddy de revenir et celle choquante de Harry.

Le monde extérieur faisait peur à Harry. Le rejet, les attentes, abandonner sa paix était difficile pour lui. Il confia aussi qu'il avait peur de ce qu'il pourrait devenir, car, même si c'était un peu prétentieux de le dire ainsi, personne ne pourrait l'arrêter s'il partait en guerre contre le monde sorcier. A l'époque, il avait voulu changer les choses en passant par les gens, que se passerait-il aujourd'hui ? Les sorciers étaient désespérés à cause de la Reine et lui donneraient le pouvoir sans discuter. Mais après ? Que faire quand une personne serait mécontente, ou juste en désaccord ? Le tuer ? L'emprisonner ? A quel moment vouloir changer les choses le transformerait en tyran ? « L'enfer est pavé de bonnes intentions », disait le proverbe. « Pour le plus grand bien », disait Dumbledore. A quel moment le plus grand bien transformerait Harry en Seigneur des ténèbres ? C'était sa peur, celle de devenir un nouveau Voldemort. C'est pourquoi il ne voulait pas retourner dans ce monde, ne pas se perdre. Mais, avec difficulté, il promit à Teddy d'essayer de venir à lui. Il ne pouvait pas plus, mais promis d'essayer.

Puis il y avait Lily-May. Rien qu'y penser amenait le sourire à Harry. Elle s'était réveillée rapidement, plus vite que Harry ne l'avait imaginé. Il avait appréhendé cette rencontre plus que tout et ne savait pas comment agir. Pour la petite fille, la mort de ses parents étaient très récente vu ce qui lui était arrivé au Domaine. Premier réveil, pleurs puis sommeil. A son deuxième elle avait rencontré les fées puis tombé dans un coma magique. Maintenant, elle allait devoir non seulement faire son deuil, mais aussi faire face au fait qu'elle n'était plus totalement humaine.

Claire, la femme de Neville, avait été d'une grande aide. Elle avait vécu ce que Lily-May vivait, sans la partie fée bien sûr. Ses parents étaient morts dans un accident de voiture alors qu'elle était jeune. Des moments difficiles allaient venir pour l'enfant, mais pas insurmontables, surtout avec la découverte de la magie et des ailes pour voler qui était, d'après elle, le summum du rêve pour une petite fille. Toutes sortes de distractions qui l'empêcheraient de tomber dans la détresse. Harry avait cependant un doute. Elle n'avait pas découvert la magie de la bonne manière, mais dans un cauchemar horrible. Puis cela l'avait blessé douloureusement. Pour une introduction au monde magique, il y avait beaucoup mieux.

Le fait est, qu'il avait eu totalement tort et Claire raison. A son réveil, sa première question fut : « Ai-je rêvé ? ». Il n'eut pas le temps de répondre, car elle venait de voir ses ailes et avait sauté du lit, ignorant totalement Harry, pour pouvoir les examiner en détail. Cela permit à Harry d'avoir un aperçu du son aigu que pouvait faire un enfant excité. Mille questions avaient suivi l'examen des ailes, questions auxquelles Harry avait peu de réponse à donner vu qu'elle demandait essentiellement si elle pourrait voler et quels seraient ses autres pouvoirs.

Elle pleura aussi, se souvenant de la mort de ses parents. Cela coupa son excitation et sa joie, et ce fut dans les bras de Harry qu'elle pleura une nouvelle fois. Quand elle se fut calmée, Harry étant aidé par la fée qui avait donné son sang. C'était devenu la meilleure amie de Lily-May, répondant au nom de Mély. Lily-May était toujours triste, notamment le soir avant de se coucher par exemple. Ce n'était plus sa mère qui lui racontait des histoires. Parfois Claire lui racontait des histoires qu'elle connaissait, comme des contes, mais il y avait Harry aussi. Lui, parlait de château magique, de plafond enchanté et de fantôme blagueur. Mais la tristesse ne partait pas, et souvent le mot maman était coupé dans un profond rappel qu'elle n'était plus là.

Harry avait fait une chose exceptionnelle cependant. Lily-May, maintenant propriétaire de sa propre chambre, avait une pensine avec tous les souvenirs de ses parents disponibles. C'était un cadeau fantastique qui permit à la petite fille de pouvoir voir ses parents et d'entendre le son de leur voix quand cela n'allait pas. S'il y avait un compteur, le souvenir le plus vu était celui du coucher, où sa mère la bordait tandis que son père l'embrassait, avant de dire qu'ils l'aimaient et d'éteindre. C'était ce souvenir, qu'elle visualisait juste avant de s'endormir, qui lui permettait de dormir.

Aujourd'hui était une énième journée d'apprentissage. Sous les conseils de Mély, elle apprenait à voler sous la surveillance de Harry et des encouragements des filles de Neville. Alice et elle devenant de très bonnes amies, bien qu'Alice eut son petit moment de jalousie en apprenant que non, elle n'aurait pas d'ailes comme Lily-May.

La bonne humeur était là, et pour la première fois, Harry se sentait bien. Toute la joie et l'amour qui l'entouraient, chassaient toutes ses idées noires et pour la première fois, et à sa grande surprise, il rigola. C'était un rire sincère, un rire venant du cœur. C'était ridicule, ce qui l'avait fait rire était l'irritation de Mély, cette dernière demandant à Lily-May POURQUOI elle n'était pas né fée, apprendre à voler aurait été plus simple. Ce n'était absolument pas drôle, mais pour une raison qu'il ignorait, voir une fée grommeler était drôle.

Ce rire disparut à la minute où il vit Neville arriver avec l'AD. Il ignora les enfants qui couraient, ils n'y étaient pour rien dans cette histoire. Mais le reste… Il sentit la colère monter. Ne voulant pas perdre son calme face aux enfants, il décida de rentrer et d'attendre que tout le monde entre. Il n'avait pas envie de le faire, non sans exploser, alors il laissa Luna le faire, cette dernière comprenant parfaitement la demande.

Quand tout le monde fut entré, la femme de Justin restant dehors avec ses filles, par préoccupation pour elles en présence d'inconnus, ils trouvèrent Harry dans le salon, le dos tourné à eux regardant par la fenêtre. D'un geste de la main, sans les regarder, les chaises autour de la grande table s'écartèrent, leur permettant de s'asseoir. Il resta néanmoins debout, toujours à la fenêtre, regardant une chose qu'il ne pouvait pas voir.

- D'abord Ron, puis Hermione, maintenant vous tous, dit Harry à voix basse, juste au-dessus du murmure. Neville, je sais que tu aurais pu les amener où tu veux, pour les mettre en sécurité, mais pourquoi ici ? S'il te plait, dis-le-moi.

- Pour la même raison qu'il n'y a qu'un seul endroit où je sais que ma famille est en sécurité, Harry. Il y avait des enfants avec nous, tu les as vus, c'est le seul endroit où je peux donner ma confiance les yeux fermés. C'est l'endroit où j'amène ma famille, lié à mon sang ou pas. L'AD a toujours été une famille Harry, et je ne pouvais les emmener ailleurs.

- Famille ? Je pensais connaître la définition de ce mot, dit Harry en se retournant enfin. L'avoir vu et vécu même. Alors pourquoi ? POURQUOI ?

Tous purent voir qu'il n'y avait pas seulement de la colère dans les yeux verts qui les regardaient. Il y avait aussi de la tristesse et des larmes qui refusaient de sortir. C'était celui qui avait tout donné pour eux, et à l'instar de Ron et Hermione, ils avaient en face d'eux le résultat de leurs choix.