Les barrières n'auraient jamais dû tomber. C'était totalement impossible, pas même dans les cauchemars les plus fous, cela aurait dû arriver. Encore aujourd'hui, je ne peux que supposer sur la manière dont c'est arrivé. Je pense toujours que j'en suis responsable, ma venue sur ces terres, notre sortie, et surtout la manière dont nous l'avons fait, c'est cela qui a affaiblit les protections.
Quand les protections sont tombées, j'étais sous le choc, comme tous ceux qui avaient accompagné Morgane. C'était un sanctuaire ! Un endroit de paix ! Elle perdit notre loyauté à ce moment-là, c'était impardonnable pour nous. La bataille faisait rage, montant d'un cran avec l'arrivée des habitants d'Avalon. Ils ne comprenaient pas ce qui se passait, mais ils voyaient Morgane se faire attaquer et se mirent à la défendre. Je dois l'avouer, je n'ai rien fait, je n'ai pu regarder Morgane massacrer, alliés comme ennemis, sans distinction. Ceux qui voulaient la protéger devenaient de vulgaires pantins entre ses mains, j'ai vu une enfant partir en fumée alors que Morgane s'en servait pour se protéger. Ou étais la femme que j'étais venu à aimer ? Celle qui rêvait de voyage et liberté ? Tout ce que je voyais était un monstre rempli de pouvoir, qui n'aimait qu'elle et se voyait comme le centre du monde.
De guerrier, je suis devenu sauveur. J'ai pris sur moi les sorts qu'elle envoyait sur les innocents d'Avalon, j'ai pris dans mes bras ceux qui ne pouvaient plus marcher pour les sortir de ce cauchemar. Et je ne faisais aucune distinction, toute personne que je pouvais sauver était secourue. Je ne les emmenais pas loin, juste assez à l'écart pour ne plus être pris pour cible. Puis c'est arrivé, je me suis retrouvé devant Merlin.
Te décrire Merlin est impossible, ce serait essayer de te parler du ciel, peu importe ce que je te dirais, rien ne pourrait être proche de la réalité. D'un simple geste, il me soigna et me demanda de l'aide. Pourquoi moi je l'ignore, mais je devais mener Arthur à Morgane pour mettre fin au conflit. Ce dernier se tenait droit à coté de nous, me jetant à peine un regard, sa main ferme tenant son épée. Oui, celle-là même qui est plantée au milieu du lac. N'aie aucun doute la dessus, ce n'était pas une simple épée, c'était Excalibur, une épée pleine de magie et de pouvoir.
- Donne-moi cinq minutes Merlin, avait dit Arthur. Elle a le droit de savoir.
Sans attendre, le Roi avait pris sa femme, la Reine Guenièvre, dans ses bras et lui avait murmuré des mots à l'oreille. Quoi qu'il ait dit, la Reine vacilla, mais ne tomba pas. Une larme solitaire glissa le long de sa joue, avant qu'elle se redresse, un regard féroce dans ses yeux.
- Toi et moi, dit-elle sans lâcher le Roi Arthur du regard. Toi et moi, jusqu'à la fin, marchons ensemble.
- Ensemble, acquiesça le Roi avec un faible sourire. Pour le Royaume.
Les récits qui te parlent de Guenièvre comme une femme de palais ne sont que des mensonges, à ce moment-là, j'ai vu une femme se tenant aux côtés de son mari, se battre. Merlin avait dit qu'ils avaient besoin de moi pour atteindre Morgane, mais c'était inutile, rien ne semblait arrêter le couple. Derrière Moi, Merlin avait commencé à chanter, des mots qui me firent frissonner, des mots d'ancienne magie. Devant moi, Arthur se battait avec Morgane, épée contre sort, dans un duel dont l'issue était incertaine. Excalibur brisait les sorts qui la touchaient, mais à aucun moment Morgane ne fut assez proche pour qu'Arthur puisse la toucher avec l'épée. Le combat autour était tout aussi impressionnant, tant par son incompréhension que par sa puissance, c'était une guerre stupide, chacun désignait un ennemi et l'attaquait, juste parce que c'était un inconnu. Pour les habitants d'Avalon, ils voyaient tout ça comme une attaque contre leur sanctuaire et le défendaient de tout leur cœur. Puis il arriva, la seule personne qui pouvait déstabiliser Morgane, la seule personne qu'elle n'avait jamais pu comprendre.
Je t'en ai parlé, il s'agit du vieil homme qui ne pouvait plus marcher. Celui qui avait refusé d'être soigné et de partir. Il était là, tremblant sur ses jambes, pouvant à peine tenir debout. Il ne le pouvait pas en réalité, ce n'était que grâce à ses petits enfants, qui le soutenaient qu'il était là. Morgane s'arrêta en le voyant, et ce faisant, tout le monde s'arrêta.
- Pourquoi, Morgane ? Avait-il demandé d'une voix pleine de douleur. POURQUOI ?
Je mis un moment pour comprendre, juste le temps de le voir serrer un bracelet dans sa main. C'était un bijou simple fait des années avant pour son anniversaire, chaque pierre dessus était liée à un de ses enfants et petits enfants, afin qu'il sache qu'ils allaient bien. Mais à ce moment-là, deux étaient noir. Je n'ai pas besoin de t'expliquer plus, sans le voir ni le comprendre, deux de ses enfants ou petits-enfants, j'ignore qui, étaient mort. Lui, se tenait là, les larmes coulant librement sur ses joues, regardant Morgane avec colère et tristesse.
- Tu as vécu et grandi parmi nous, continua-t-il. Tu as mangé à notre table, tu nous a aidés et protégés. Et regarde-toi ! Es-ce ta vision de la liberté ? Faire couler le sang de ceux que tu considérais comme ta famille ? C'est dans cela que tu voulais m'amener ? Dans le sang et la tristesse ? REPONDS-MOI !
Morgane ne dit rien, ne bougea pas, ne fit rien. Je pense qu'elle réalisa à ce moment-là ce qu'elle avait fait, mais il était trop tard, elle était allée trop loin dans sa folie. Puis vinrent trois actions, je fus tiré au loin avec la Reine, Merlin cessa d'incanter et Arthur planta son épée au pied de Morgane. Le sol trembla, le ciel se couvrit, l'obscurité tomba, Excalibur brilla de mille feux, comme un phare en pleine tempête, et une voix s'entendit de partout, la voix d'un Roi.
- Par mon sacrifice, emprisonne ce conflit en ton sein ! Par ma magie et mon corps, devient la clé de cette prison, pour que tous puissent vivre en paix !
Quand la lumière revint, il n'y avait plus de trace de Morgane ou ses alliés, tout comme Merlin ou les soldats d'Arthur. Il ne restait plus que Guenièvre et moi. Devant un cratère impressionnant avec au centre Excalibur planté. Encore aujourd'hui, si tu tends l'oreille, tu peux entendre les voix de ceux qui sont emprisonnés en elle. Comment Merlin avait-il pu accomplir ce miracle je l'ignore, mais la preuve était là, sous nos yeux.
- Ils sont à l'intérieur, dit Guenièvre en s'agenouillant devant l'épée. Je voulais en être, mais Arthur m'a demandé de protéger le royaume à sa place. Tout est à refaire, le Royaume est en morceau, la peur a pris le contrôle, et lui trouve le moyen de fuir ses responsabilités, c'est vraiment un homme.
Elle n'en voulait pas à Arthur bien sûr, mais elle ne voulait pas montrer sa tristesse, un Roi ou une Reine doit se montrer fort et pleurer dans le secret. Il n'y avait que moi pour la voir, mais c'était suffisant pour elle.
- Un jour, un jour peut-être, la magie et le reste du monde vivront en harmonie, pour l'heure, ils sont ennemis. Par l'action de cette femme, toute une partie de mon peuple est mise à mal et c'est inadmissible. Merlin t'a fait confiance, je ne sais pas pourquoi, mais cela me suffit. Tu vas rebâtir Avalon, Merlin m'a laissé des notes pour le faire. Bâtis en sanctuaire pour tes semblables, peu importe la race ou son passé, protège les. Je t'enverrai ceux que je trouve, mais pour l'heure, dirige ce sanctuaire.
- Je ne suis pas digne de diriger un tel endroit ma Reine, dis-je doucement. Pas après tout ça.
- Je vais le faire alors, intervint une voix derrière nous.
Ses deux fils le tenant, il y avait ce vieil homme, un regard dur dans les yeux. Son bracelet était totalement noir à présent, avec juste deux pierres colorées.
- Je vais le faire, si tu m'aides, dit-il en me regardant. Un de mes fils va rester avec moi et me secondera, l'autre veut partir pour faire connaître le sanctuaire a tout ceux qui en ont besoin. Créons ce lieu de paix Nathan, tous les deux, et faisons en sorte que plus jamais, un cauchemar pareil se reproduise.
- Je dirigerai mon royaume de mon côté, et je fais le serment de garder le sanctuaire secret et de ne pas nuire à ce qu'il protège. Vampire, l'épée doit être protégée et ne jamais être retirée de la roche, sinon ceux qui sont enfermés, ressortiront. Le sanctuaire et Excalibur sont deux choses différentes à protéger, mais un secret ne peut pas être mieux protégé que dans un autre secret. Peut-être nous nous reverrons, peut-être pas, mais je ferai en sorte que ma lignée sache ce qu'elle doit protéger.
Sur ces mots elle s'en alla, me donnant en partant les notes de Merlin. Cela me demanda du temps, beaucoup de temps et d'énergie, mais j'ai réussi. Le Sanctuaire devint le Domaine, se transformant petit à petit en ce que tu connais aujourd'hui. Au fil du temps, il y a eu beaucoup de Gardiens, beaucoup n'ont jamais été mis au courant d'Excalibur, dont je fus le seul gardien.
Sache-le, Gardien, si l'épée est retirée, Morgane en sortira, et sa colère n'en sera que plus grande, elle voudra se venger de tant d'années d'emprisonnement.
Voilà l'histoire du Domaine, voilà ton rôle, ton devoir.
