Je me suis enfin décidée à écrire sur Fire Emblem Three Houses ! Cela a pris plus de temps que prévu et, finalement, je me contente d'écrire des drabbles mais je suppose que c'est un début… on va dire que c'est mieux que rien ? Surtout que je voulais absolument écrire quelque chose sur les Aigles de Jais donc voici chose faite.


Les Fils et Filles de l'Empire Adrestien

Jours de paix.

Byleth ne connaissait pas le repos – du moins pas sur le long terme. Il n'en avait jamais eu en tant que mercenaire et n'en avait jamais ressenti le besoin, pas même quand tous autour de lui s'affalaient après un pénible travail et se réjouissaient de pouvoir se reposer quelques temps.

À ce titre, ses débuts à Garreg Mach l'avaient déconcerté : le monastère était un havre de paix où les jours s'écoulaient avec lenteur et tranquillité.

Là-bas, Byleth n'avait pas à se battre pour survivre. Il pensait que cela lui manquerait puisque c'était l'essentiel de sa vie jusque là mais ce ne fut pas le cas. Il se surprit à aimer enseigner aux Aigles de Jais, pêcher et jardiner dans son temps libre et participer aux conversations animées de ses collèges en fin de journée dans le réfectoire.

Cette nouvelle vie était presque trop belle pour être vraie et le fit attendre avec appréhension le retour à son quotidien de mercenaire. Car il avait appris à se plaire dans son rôle de professeur, auprès de ces élèves qui lui faisaient découvrir qu'il pouvait être plus qu'une simple arme, plus qu'un démon des champs de batailles.

Alors, sachant que tôt ou tard ces jours de paix s'achèveraient, Byleth tâcha d'en profiter autant que possible.

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Un présent singulier.

Dorothea ne fut pas surprise qu'Edelgard soit la première à remarquer le bijou à son doigt.

— Je n'ai jamais vu cette bague auparavant, Dorothea. Est-ce un présent d'un prétendant ?

— Hé bien oui, si tu comptes Ingrid comme un prétendant.

La concernée, qui passait près d'elles au même instant, rougit et recula d'un pas.

— Q-quoi ? Non ! Je… J'ai juste offert cette bague à Dorothea pour la remercier de son aide, voilà tout.

— Voyons, vous n'avez pas à faire semblant, ma chère, répliqua la chanteuse en lui faisant un clin d'œil charmeur. Ce n'est pas parce nous n'avons pas encore eu de somptueuse cérémonie en mariage que nous ne pouvons pas confesser notre amour en public.

Ingrid ouvrit la bouche pour protester mais se raviva et se décida plutôt à tourner les talons et s'éloigner avec empressement, son visage plus rouge que les cheveux de Sylvain.

Edelgard soupira, compatissante.

— Tu vas vraiment finir par la faire fuir, Dorothea…

La chanteuse rit de bon coeur.

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L'Impulsion Divine.

Le Démon Cendré…

Les Aigles de Jais ignoraient pourquoi leur professeur était affublé d'un tel surnom… jusqu'à maintenant, en le voyant se déchaîner avec une fureur froide sur ces bandits, les pourfendant tour à tour avec un regard aussi vif et attentif qu'un aigle en chasse.

Après qu'il ait achevé le dernier brigand, Byleth se tourna avec vélocité vers ses élèves et les scruta un à un, avec une précipitation qui ne lui ressemblait guère. Ce fut seulement après avoir vérifié qu'ils allaient tous bien que le poids invisible qu'il portait sur ses épaules disparut et qu'il esquissa un sourire soulagé.

À la question muette qui se lisait sur leurs visages, il se contenta de répondre :

— Ils allaient vous faire du mal. Je devais vous protéger.

Ils ne manquèrent pas de remarquer qu'en prononçant ces mots, les yeux de leur professeur s'assombrirent d'une lueur hantée que seul quelqu'un familier avec la mort pouvait avoir mais qui s'estompa presque aussitôt au profil de cette expression sereine qu'ils lui connaissaient bien.

— Rentrons au monastère.

Ils décidèrent de ne pas insister et acquiescèrent.

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Trop d'entrain.

Il était tard quand les Aigles de Jais revinrent enfin à Garreg Mach, plongé dans la pénombre et un silence qui lui donnaient des airs lugubres.

— Argh, je ne sens plus mes pieds… se plaignit Caspar.

— Et moi donc ! se désola Dorothea. Les chambres me semblent si loin… Hubie, tu ne veux pas me porter ?

— Humph, je crois que la fatigue vous fait délirer.

Alors que tous se traînaient vers le dortoir, Ferdinand, devant eux, claqua des mains pour attirer leur attention. Il bomba le torse et s'exclama avec entrain :

— Ressaisissez-vous, mes amis ! Nous pouvons être fiers de nous : nous avons accompli notre devoir avec brio. Ne sentez-vous pas vos cœurs enhardis par notre victoire contre ces mécréants et…

Un soupir collectif résonna dans la cour du monastère.

— Il est trop tard pour ça, Ferdie… se plaignit Dorothea en passant devant lui.

— Je ne pense pas qu'il est le moment pour un discours de motivence, approuva Petra à sa suite.

— En clair, épargnez ce supplice à nos oreilles et taisez-vous, conclut sèchement Hubert.

Ferdinand passa une main dans ses cheveux, confus. Qu'avait-il dit de mal pour obtenir de telles réactions de la part de ses camarades ?

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Les bizarreries du professeur.

Edelgard s'était dit qu'elle ne prendrait pas part à la discussion qui animait les membres de sa maison… mais elle ne supportait plus de les entendre.

— Ne pensez-vous pas que vous exagérez ? intervint-elle donc, exaspérée. Notre professeur n'est pas si étrange que ça…

— Oh, Edie… Je crois que l'amour te rend aveugle, rétorqua Dorothea avec un sourire amusé. Notre professeur est quelqu'un de bien mais tu dois reconnaître que son comportement est pour le moins… original.

— Je ne vois pas en quoi, non.

— Hé bien déjà, y'a le fait qu'il parle souvent tout seul, argumenta Caspar.

— Il réfléchie sans doute à haute voix.

— Il ronde souvent dans tout le monastère, ajouta Petra. Je n'ai jamais vu de professeurs faire ainsi.

— Cela ne fait que prouver qu'il s'investit dans son travail – même si je ne comprends pas non plus la raison derrière ces pérégrinations…

— Il est pas très expressif non plus, renchérit Caspar.

— C'est presque une bénédiction pour compenser l'attitude enhardie de Ferdinand.

— Edie…

Sous les regards insistants de ses pairs, Edelgard finit par céder.

— D'accord, peut-être que notre professeur a quelques bizarreries... mais croyez-vous que ce soit au niveau de Manuela et de Heneeman ?

— Mmh…

Les Aigles de Jais jetèrent un coup d'œil vers la table des professeurs avant de reconnaître le bien fondé des propos de leur déléguée. Au fond, peut-être que leur professeur n'était pas si étrange que ça…

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Rêves prémonitoires.

De temps à autre, Byleth rêvait de ses élèves mais ces songes ne lui apportaient jamais ce sentiment de plénitude qu'il ressentait en compagnie des Aigles de Jais.

Ces rêves étaient des cauchemars, des visions d'horreur dans lequel la guerre et ses morts l'entouraient. Parfois, il se tenait auprès de ses Aigles devenus des adultes endurcis par les batailles et d'autres fois, il se dressait face à eux.

Mais où qu'il soit dans ces scènes macabres, cela n'y changeait jamais rien. Un de ses Aigles tombait toujours face à un soldat combattant sous les couleurs du Royaume de Faerghus, de l'Église de Seiros ou de l'Alliance de Leicester. Dorothea pleurait sous le corps inerte de Petra, Ferdinand succombait à ses blessures après avoir été écrasé sous le poids de son cheval tué et Caspar se précipitait vers une fin inéluctable face à une myriade d'adversaires.

Dans les plus terribles d'entre elles, il était celui qui ôtait la vie à un de ses Aigles et voyait, face à lui, le regard empli d'appréhension de Bernadetta, la résignation de Linhardt et l'expression déçue d'Hubert. Ses rêves prenaient fin dans ce qu'il supposait être la salle du trône du palais impérial d'Enbarr, tandis qu'il levait l'Épée du Créateur face à une Edelgard devenue impératrice, vêtue de rouge et tenant dans sa main une arme très similaire à une relique du héros.

Byleth n'en parla jamais à ses élèves. Alors lorsqu'un d'entre eux le surprenait à ruminer sur ce futur hypothétique, il se ressaisissait aussitôt et lui souriait. Car qu'importe la signification de ces étranges rêves, il ne laisserait jamais un de ses Aigles de Jais mourir s'il pouvait empêcher ça.

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Entraînement.

Le fracas des lames résonnait dans la cour d'entraînement depuis un moment quand Dimitri décida de s'y rendre et qu'il y vit Félix et Caspar en plein duel.

— Que font-ils ?

Edelgard, qui observait le combat avec une expression consternée, soupira.

— Caspar a entendu parler des talents de bretteur de Félix et l'a donc harcelé pour qu'ils s'entraînent ensemble jusqu'à ce que celui-ci cède et accepte. Depuis, ils sont ici à s'affronter.

— Je vois… Devrions-nous les arrêter ?

— Surtout pas. Si nous faisons ça, Caspar reviendra à la charge après. Laissons-les plutôt finir.

— Je dois vous prévenir que cela risque de durer encore un moment. Félix n'est pas du genre à renoncer.

— Caspar non plus. Nous n'aurons qu'à attendre que l'un ou l'autre s'écroule de fatigue – ou que la réserve d'armes d'entraînement du monastère soit épuisée, ce qui est plus probable d'arriver à ce rythme.

Dimitri hocha la tête avec dépit. Ça allait être très long…

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Supporter.

Hubert sut au premier coup d'œil que cette année promettait d'être difficile. La classe qu'allait diriger la princesse impériale d'Adrestia était pour le moins… chaotique.

Non pas qu'il soit introverti ou quoi mais tant d'excentricité le fatiguait. Il sentait qu'il ne supporterait pas les cris aigus et la paranoïa de Bernadetta, les sourires taquins horripilants de Dorothea, l'enthousiasme exagéré de Caspar, les fanfaronnades de Ferdinand…

— Ne pourrions-nous pas tenter de réintégrer Garreg Mach une autre année ? souffla-t-il à voix basse. Je crains qu'une classe aussi disparate gêne votre concentration et soit une charge de travail supplémentaire fastidieuse et inutile.

À son grand dam, sa dame semblait amusée par cette assemblée hétéroclite.

— Allons, ce n'est pas si terrible, Hubert. Crains-tu vraiment que nous ne puissions pas gérer quelques étudiants turbulents ?

Il plissa les yeux, affichant un sourire sardonique.

— Je vois que mon malheur vous amuse, Dame Edelgard. Dans ce cas, si votre choix est fait, il me faut me résigner.

Il ferma les yeux et inspira un grand coup. Ce n'était qu'une épreuve parmi tant d'autres à surmonter. Il pouvait le faire…

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Surnom.

— Est-ce que cela te dérange que je t'appelle Edie ?

Cette question prit Edelgard au dépourvue, qui la dévisagea avec confusion – et une expression quelque peu coupable qu'elle essaya de dissimuler, sans succès.

— Qu'est-ce qui te fais penser ça, Dorothea ?

— Tu réagis à chaque fois que je t'appelle comme ça.

La princesse n'allait pas jusqu'à grimacer comme Hubert quand Dorothea l'appelait par son surnom mais elle tressaillait ou se raidissait maladroitement, comme mal à l'aise.

— Tu ne l'aimes pas ? reprit la chanteuse avec regrets. Je peux arrêter, si tu préfères…

— Ce n'est pas que je ne l'apprécie pas, je t'assure, s'empressa de défendre Edelgard. C'est juste que je n'ai pas l'habitude qu'on me donne un surnom. Je n'en ai plus eu depuis mon enfance et ça me rappelle…

Sa voix se fit distante et son regard devint évasif, comme plongé dans des souvenirs lointains..

— Ça te rappelle… ? répéta Dorothea, intriguée.

Edelgard reprit ses esprits et secoua la tête.

— Rien. Quoi qu'il en soit, ce serait un honneur que tu continues de m'appeler ainsi et… pourquoi ris-tu, Dorothea ? Qu'ai-je dit de si drôle ?

— Parce que tu es bien trop solennelle pour une simple histoire de surnoms, Edie ! Enfin, me voilà rassurer : je ne me voyais pas t'appeler Edelgard ou Votre Altesse.

Edelgard eut un sourire en coin.

— Moi non plus.

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Passe-temps secret.

Edelgard était convaincue qu'Hubert était d'une discrétion étonnante, jusqu'à ce que Caspar l'aborde pendant qu'elle discutait avec Byleth et lui dise :

— Hé, qu'est-ce qu'il complote aux écuries, Hubert ? Il cherche à faire du mal aux chevaux ?

Edelgard se retint de se moquer d'une hypothèse aussi grotesque et rétorqua plutôt :

— C'est-à-dire, Caspar ?

— Je l'ai croisé près des stalles mais dès que je me suis approché, il s'est pratiquement enfui ! J'ai demandé à Marianne pourquoi mais j'ai rien entendu à ce qu'elle m'a répondu…

— Marianne aide Hubert à se rapprocher des chevaux car il veut réaliser son rêve de devenir un chevalier pégase.

Ils dévisagèrent Byleth avec de grands yeux.

— Comment savez-vous ça, mon professeur ?

— Il l'a écrit dans les lettres que je reçois des élèves qui me demandent conseil.

Edelgard soupira et se frotta l'arête du nez, consternée.

— Je ne crois pas que vous êtes censé révéler le contenu de ces lettres…

Byleth fronça les sourcils, l'air sincèrement surpris.

— Vraiment ? Je ne le ferais plus alors. Caspar, vous ne direz rien à personne à ce sujet, d'accord ?

— Euh, mon professeur…

— Bien sûr, je serai muet comme une carpe !

Sur ce, le garçon aux cheveux bleus partit à grandes enjambées sous le regard satisfait de Byleth. Edelgard soupira de nouveau.

— Vous fondez bien trop d'espoirs en Caspar si vous pensez qu'il pourra tenir sa langue, mon professeur…

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Le roi du silence.

La table des Aigles de Jais était étrangement silencieuse à l'heure du déjeuner. Tous mangeaient dans une atmosphère pesante – à l'exception de Ferdinand qui bombait le torse avec fierté et d'Edelgard qui le dévisageait d'un air consterné.

Son attention fut détournée quand Hubert apparut près d'elle et lui souffla quelques mots à l'oreille. Elle l'écouta attentivement et opina de la tête.

— Bien. Merci Hubert.

Ferdinand se leva d'un bond et pointa du doigt sa rivale. Il afficha un sourire victorieux et s'exclama :

— Ha ha ! Vous avez parlé, ce qui veut dire que… j'ai gagné !

Les Aigles de Jais poussèrent un soupir collectif.

— Ç-ça veut dire qu'on peut de nouveau parler ? demanda Bernadetta avec hésitation.

— Absolument ! confirma Ferdinand. Merci d'avoir joué le jeu, chers camarades.

— Ce n'est pas comme si tu nous avais laissé le choix, fit remarquer Linhardt. Quelle idée le Professeur a-t-il eu de proposer un duel aussi ridicule entre vous deux… C'était ennuyeux à mourir.

— Je ne suis pas d'accord. Personnellement, j'ai trouvé ça très reposant de ne pas entendre les fanfaronnades de Ferdie pendant quelques heures.

La déclaration de Dorothea fut accueillie par de nombreux hochement de tête frénétiques.

Ferdinand posa ses mains sur ses hanches et soupira. Pourquoi se liguaient-ils tous contre lui ?

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Faux-semblant.

Cela faisait bien longtemps qu'elle était devenue une adepte des faux-semblants. Chaque sourire, chaque parole et chaque geste était minutieusement calculé pour en tirer le plus de bénéfices car c'était la seule façon pour elle de parvenir à ses fins.

Edelgard ne prévoyait pas d'agir différemment une fois à Garreg Mach, au contraire : avec l'Église de Seiros dans les parages et Thales surveillant ses moindres faits et gestes, elle ne pouvait pas se permettre le moindre faux pas car bientôt, cette paix artificielle prendra fin. La vérité éclatera et Fódlan sera ravagé par la guerre. Pour le triomphe de la liberté, les rivières se nimberont de sang, les cadavres recouvriront les plaines et les innocents périront dans l'indifférence des villes envahies. Alors elle devra renoncer à cette mascarade d'étudiante ordinaire et assumer son rôle de dirigeante belligérante, être l'impératrice conquérante que le monde attendrait d'elle.

Pourtant, au fond elle, Edelgard se complaisait dans le mensonge qu'elle vivait à Garreg Mach car de tous les masques derrière lesquelles elle se dissimulait, celui qu'elle portait en compagnie des Aigles de Jais lui semblait le plus proche de celle qu'elle était autrefois, avant que sa vie ne devienne un simulacre…

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Une flamme enfin éveillée.

Ce n'était pas ce à quoi s'était attendu Byleth en venant à Garreg Mach.

Il n'était pas habitué à ressentir ce que les autres appelaient des émotions et des sentiments. Ceux-ci ne lui étaient pas complètement étrangers mais comme son père se plaisait à dire, le caractère flegmatique – voir apathique – de Byleth avait tendance à réfréner chaque ressenti qu'il pouvait avoir, faisant vaciller et éteindre chaque flamme de passion qui pouvait naître en lui plutôt que de lui permettre de s'embraser pour flamboyer comme un feu grégeois.

Il n'avait jamais pleinement compris cette métaphore liée au feu jusqu'à devenir le professeur des Aigles de Jais. Même s'il lui arrivait encore souvent d'être confus quant à quoi il ressentait et comment l'exprimer, il comprenait désormais ce qu'était ce feu qui semblait faire brûler son coeur mort, cette chaleur accueillante lorsqu'un de ses élèves souriait aux félicitations qu'il lui donnait, tout comme ce brasier destructeur qui l'animait quand un danger menaçait un de ses protégés.

La flamme au creux de son être s'était éveillée pour réchauffer son sang glacé qui lui permettrait de devenir pleinement humain et c'étaient les Aigles de Jais, ses chers élèves, qui alimentaient cet âtre nouveau en lui.