LOCKED UP
Par Myschka et BlackNemesis
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Disclaimer : L'univers de Harry Potter ainsi que les personnage n'appartiennent qu'à JK Rowling. Nous les empruntons juste le temps d'une fic, et nous n'en retirons aucun bénéfice à part celui d'être lues.
Rating : M pour le vocabulaire et certains passages. Par contre pour ceux qui attendent des lemon, vous risquez d'être déçus, nous ne comptons normalement aller que jusqu'au lime (et c'est pas pour tout de suite…c'est même pas dit qu'on en mette, en fait.)
Résumé : Après la chute de Voldemort, le Ministre de la Magie a une dernière faveur à demander à Harry Potter. Acceptera-t-il, en particulier si Draco Malfoy est au centre de l'affaire ?
Note des auteuses : Bonjour à tous ! Voici le chapitre 4 de « Locked up », avec un peu d'avance cette fois-ci, puisque je ne serai pas en mesure de vous le poster ce week-end, pour cause de Japan Expo…Ce chapitre a reçu l'aval de Bady et de BlackNemesis, je vous le soumets donc tel quel, en espérant qu'il vous plaira. Bonne lecture !
RARs : Pas de RARs cette fois-ci. J'en suis profondément désolée, mais comme vous le savez sûrement, je viens de traverser une période assez difficile, aussi n'ai-je pas vraiment eu la tête à m'occuper de FFnet. En outre, le chapitre précédent a été entièrement écrit par BlackNemesis, et elle n'a toujours pas de connexion internet…Nous essaierons de faire mieux la prochaine fois, promis.
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Cette fic est entièrement dédiée à BadAngel666.
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CHAPITRE QUATRE
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Lorsque Harry retourna à Azkaban, force lui fut d'admettre que si, concrètement, il n'était pas plus avancé qu'avant sa visite chez Théodore, les paroles de son ami l'avaient troublé plus qu'il ne voulait le reconnaître. Ebranlé serait un mot plus juste. Ebranlé dans ses convictions, mais depuis qu'il avait accepté ce stupide marché avec Scrimgeour, il lui semblait que son monde perdait peu à peu ses repères – il commençait à se faire à l'idée, même si c'était difficile.
Les mots de Théo l'avaient aussi un peu rasséréné, sans qu'il sût s'en expliquer vraiment la raison. S'il avait été objectif, il aurait dit que sa discussion avec son ami ne lui avait strictement rien apporté : Théo se refusait à l'aider – et quelque part, Harry comprenait ; après tout, les deux garçons avaient été proches depuis leur plus tendre enfance, et même s'ils n'avaient jamais vraiment été amis, il existait entre eux des liens que Harry était incapable de concevoir, tout simplement parce que lui-même n'avait jamais connu qui que ce fût assez longtemps pour expérimenter ce genre de choses. Pas même Ron ou Hermione.
Comme toujours, le souvenir de ses deux meilleurs amis lui fit ressentir cette douleur au cœur à laquelle il ne parvenait pas à s'accoutumer – il n'était pas sûr de vouloir s'y habituer, cela dit. Cela lui aurait sans doute donné le sentiment qu'il trahissait leur mémoire. Alors, il préférait – voulait ? – continuer à souffrir, si cette souffrance impliquait de ne pas les oublier.
Le jeune homme secoua la tête pour tenter de chasser ses idées noires alors que la barque qui le menait vers Azkaban achevait de traverser la nappe de brouillard magique qui entourait la prison pour aborder les côtes déchiquetées du sinistre îlot. La silhouette massive de la forteresse se dressait, menaçante et noire comme de l'encre, telle une gigantesque ombre chinoise qui se découpait sur un ciel bas et alourdi de nuages gris sombre. Harry soupira. Même si les Détraqueurs avaient déserté la prison, le seul fait de se trouver face à cette immense bâtisse aurait suffit à plonger n'importe qui dans la déprime la plus profonde. Azkaban paraissait annihiler, par il ne savait quel maléfice et de par sa seule existence, toute pensée un tant soit peu positive.
Lorsque la minuscule embarcation accosta au bout de la misérable jetée de planches de bois branlantes et battues par les vagues, Harry se sentit une fois de plus comme s'il venait de traverser de Styx et qu'il atterrissait en Enfer – même le passeur qui l'avait conduit jusqu'ici semblait cultiver la ressemblance avec Charon avec une méticulosité malsaine. Harry se demanda brièvement si c'était un fait exprès, puis haussa les épaules, soupira de nouveau, et s'avança vers les lourdes portes de la prison sans un regard en arrière. Le paysage était tellement morose qu'il avait presque hâte de retrouver le confort relatif de sa petite cellule – même si cela devait impliquer de se retrouver coincé dans moins de six mètres carrés avec Draco Malfoy. Au moins le jeune homme, s'il était franchement imbuvable, était-il au moins plus…vivant.
Il repensa à la conversation qu'il avait eue à son sujet avec Théodore, et une brusque bouffée de honte l'envahit subitement, enflammant ses joues. Comment avait-il pu penser ne fût-ce qu'une seule seconde que son ami sous-entendait qu'il pourrait tomber amoureux de Malfoy ? Sur le coup, il s'était senti complètement idiot d'avoir réagi de cette façon, et le rire de Théo avait encore accentué son embarras et sa colère. Mais à présent, tandis qu'il marchait lentement vers la cellule qu'il partageait avec Malfoy, il s'interrogeait sur les raisons d'une telle réaction.
Lors de leur sixième année à Poudlard, Hermione et Ron avaient laissé entendre que la fascination qu'il éprouvait pour le garçon blond n'était pas normale – oh, bien sûr, Harry ne croyait pas qu'ils aient pu imaginer que cela impliquait une quelconque attirance, mais…Aujourd'hui, il se demandait si son obsession ne s'était pas mêlée d'une certaine fascination, en quelque sorte. Il fallait bien se l'avouer, Malfoy l'avait toujours intrigué, bien plus qu'il ne voulait le reconnaître. Et il l'intriguait toujours, car il ne parvenait pas à comprendre comment fonctionnait cet homme qu'il avait longtemps considéré comme son ennemi.
Il ne connaissait pas le vrai Draco Malfoy, et c'était sans doute pour cette raison qu'il n'arrivait pas à trouver un moyen de le faire parler. Il repensa à ce que lui avait dit Théo. Etre lui-même…Le problème était de savoir si, avec la guerre, Harry ne s'était pas perdu en route.
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Draco accueillit le retour de Harry avec le regard le plus noir qu'il put lui lancer, mais c'était plus par automatisme que par réelle conviction. Certains mécanismes avaient la vie dure, de plus le jeune homme, bien que trop fatigué pour être vraiment en colère, se sentait tout de même mécontent, sans qu'il sût exactement pourquoi. La présence de Potter l'agaçait, c'était un fait indéniable – après tout, il venait envahir son maigre espace personnel sous des prétextes idiots, et cette mascarade durait depuis bientôt deux semaines. Mais son absence de cet après-midi l'avait également contrarié, et ne pas le retrouver dans la cellule après sa sortie quotidienne l'avait déstabilisé et mis en colère.
Sans doute était-ce parce que Potter, lui, pouvait aller et venir à sa guise, songea-t-il avant de se renfoncer dans les épaisses couvertures qui recouvraient le lit. Le Survivant était cinglé, cela il n'en avait jamais douté, mais il fallait l'être sacrément pour venir s'enfermer ici volontairement. Enfin, pas si volontairement que cela, nota-t-il, puisqu'il avait visiblement du mal à rester confiné en permanence dans la petite cellule. Draco crispa ses poings sur les couvertures en avisant les joues du jeune homme brun, rosies par le grand air et la petite promenade qu'il venait manifestement de faire. Bon sang, ce qu'il pouvait l'énerver !
─ Alors, Malfoy, tu ne t'es pas trop ennuyé pendant mon absence ? demanda Harry, un désagréable petit sourire aux lèvres. Désolé, j'étais chez Théodore Nott, ajouta-t-il plus sérieusement en déposant son manteau sur le dossier de sa chaise.
─ Au risque de briser à jamais tes espérances, Potter, répliqua Draco d'un ton furieux et en croisant les bras sur sa poitrine, je me fous éperdument de l'endroit où tu as pu aller cet après-midi.
─ Ah bon. Je pensais pourtant que tu aimerais avoir des nouvelles de Théo, remarqua le jeune homme brun en haussant les épaules, ce qui fit retomber Draco dans son mutisme.
Evidemment qu'il avait envie de savoir comment se portait son ancien camarade. Depuis sa fuite avec le professeur Snape à la fin de sa sixième année, il n'avait pas eu le moindre contact avec le monde extérieur, ou pas assez en tout cas pour se tenir au courant de ce qu'étaient devenus les gens qu'il connaissait. Et Azkaban ne proposait pas d'abonnement à la presse quotidienne avec le petit déjeuner trois étoiles, pensa-t-il cyniquement. Mais il n'allait très certainement pas s'abaisser à demander à Potter des nouvelles de Théodore – cela lui ferait trop plaisir. Cependant, il n'eut pas besoin de le questionner.
─ Il va bien, reprit Harry tout en arrangeant les couvertures pour qu'elles recouvrent mieux le jeune homme blond, qui se laissa faire sans un mot. Et il pense que la peine qu'on t'a infligée est excessive.
─ Ca me fait une belle jambe, grogna Draco, même s'il était secrètement soulagé de savoir que Théo allait bien, et touché qu'il s'inquiète de son sort.
─ Il faut reconnaître que le Ministère a été incroyablement sévère avec toi, nota Harry d'un ton léger. A moins bien sûr que le commun des mortels soit tenu dans l'ignorance de ce que tu as réellement fait ?
─ Je ne vois pas en quoi ça te concerne, renifla Draco, méprisant. Mais pour ta gouverne, Potter, et puisque tu sembles incapable de réfréner ta curiosité – comme d'habitude – sache que le Ministère m'a bien condamné à dix ans de réclusion pour avoir utilisé l'Imperum, et rien d'autre. Satisfait ?
─ Non, gronda Harry en se reculant, l'air mécontent. Non, je ne suis pas satisfait et surtout, je ne te crois pas. Pourquoi s'encombrerait-on d'un criminel minable, logé et nourri pendant dix ans aux frais de l'Etat, s'il n'a rien fait de plus que lancer un misérable Imperum ? Tu m'excuseras mais ça me paraît franchement surréaliste.
─ Crois ce que tu veux, soupira Draco. Ca m'est égal, de toute façon ce n'est pas comme si ton avis avait une quelconque importance pour moi. Après tout, ajouta-t-il d'une voix venimeuse, toi non plus tu ne me dis pas les véritables raisons de ta présence ici, pourtant ça n'a pas l'air d'écorcher ta conscience plus que ça…
─ Je t'ai dit pourquoi j'étais ici.
─ Tu m'as surtout pris pour un con, Potter, siffla dangereusement le jeune homme. Tu pensais vraiment que j'allais gober ton histoire débile de recherches pour ton prochain roman ? Bien essayé, vraiment, renchérit-il méchamment, ça aurait peut-être pu marcher avec quelqu'un d'aussi naïf que Weasley, mais –
Il regretta ses paroles à l'instant même où il les prononça, au point qu'il fut incapable de terminer sa phrase. Harry se tenait au milieu de la pièce, les poings serrés convulsivement, comme s'il s'empêchait de se jeter sur Draco pour le rouer de coups. Le jeune homme pouvait sentir les puissantes vagues de magie qui s'échappaient de son vis-à-vis et qui s'écrasaient contre les murs de la cellule. Les yeux verts lancèrent des éclairs et une bouteille d'eau explosa brusquement, faisant sursauter Draco. Ce n'était pas la première fois qu'il voyait Potter perdre le contrôle de sa magie, et chaque fois cela avait été impressionnant – mais aujourd'hui, c'était encore pire. Parce que sous la colère dévastatrice, Draco pouvait clairement sentir la douleur. Une souffrance indicible, violente et désespérée. A une certaine époque, cela l'aurait sans doute empli d'une joie mesquine, mais pas aujourd'hui. Pas alors qu'il savait désormais ce que c'était de perdre quelqu'un à qui l'on tient.
La porte de la cellule s'ouvrit brusquement, grinçant sur ses gonds de métal rouillé, et les vagues de magie refluèrent instantanément, laissant un désordre indescriptible dans la pièce – Clint était là, suivi de plusieurs hommes armés. Le gardien avait brandi sa baguette, mais il sembla à Draco qu'il la levait plus en signe de réflexe défensif que pour parer à une éventuelle attaque – l'homme avait peur, et le jeune homme blond pouvait presque sentir l'odeur âcre de la transpiration qui perlait sur son front et probablement le reste de son corps.
─ Que se passe-t-il ici ? demanda Clint d'une voix légèrement tremblante. Les capteurs de magie se sont brusquement affolés – Monsieur Potter, vous allez bien ? Malfoy ne vous a rien fait ?
─ Que voulez-vous qu'il me fasse ? rétorqua Harry d'une voix agacée et étrangement fatiguée. Malfoy n'a pas sa baguette et il est malade, il ne ferait pas de mal à une mouche même s'il le voulait. Je me suis juste…un peu emporté.
Clint hocha la tête, éberlué, puis il fit signe aux autres gardiens de reculer. En refermant la porte, il se contenta de préciser d'un air gêné qu'il reviendrait dans une heure pour apporter le repas du soir. Harry fit un vague geste de la main comme pour lui signifier de partir, et la cellule fut de nouveau plongée dans le silence. Le Survivant tourna alors lentement vers Draco un regard triste et las, et lui dit d'une voix basse, bizarrement douce :
─ Je t'avais prévenu Malfoy. Ne parle plus jamais de Ron ou d'Hermione.
Draco acquiesça silencieusement, incapable de prononcer le moindre mot. Il n'y avait rien à dire de toute façon – manifestement, que la mort de ses deux meilleurs amis fût récente ou non, Potter n'était pas parvenu à l'accepter. Il ne savait que trop bien ce qu'une telle perte pouvait représenter, aussi préféra-t-il ne rien dire. Après son avertissement, Harry se tut et lui tourna le dos, retournant à son travail et à ses livres sans s'occuper de lui, et Draco fit de même. Ils n'ouvrirent la bouche que pour avaler le dîner que leur porta Clint une heure plus tard, prirent leur douche chacun leur tour, puis se couchèrent l'un à côté de l'autre sans échanger le moindre mot. Ni l'un ni l'autre n'avaient apparemment très envie de veiller ce soir.
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Harry n'arrivait pas à dormir. Sa dispute avec Draco l'avait rendu inexplicablement nerveux, et il n'arrivait pas à se calmer. Bien sûr, c'était dû à l'évocation de Ron durant leur altercation, mais il y avait autre chose, comme un malaise qui ne s'atténuait pas malgré les heures passées dans le silence le plus complet. Il savait, étrangement, que Malfoy n'avait pas volontairement appuyé là où cela faisait mal – pourtant, il en avait été blessé, terriblement, bien plus qu'il n'aurait pu l'imaginer.
Cette idée de les confronter pendant un mois sans interruption était vraiment une idiotie sans nom. Alors qu'il pensait avoir trouvé une certaine sérénité depuis la fin de la guerre – toute relative, et bien moindre que ce qu'il s'était plu à clamer en public – il se rendait compte à présent que tout cela n'avait été que mensonges. Une belle paire d'œillères sur-mesures, pour ne pas voir ce qui clochait, pour ne pas voir la vérité en face. Il pensait en avoir terminé avec son ressentiment envers Snape, mais rien n'avait changé, il haïssait toujours autant l'homme. Il pensait avoir trouvé la paix intérieure en vivant tranquillement à la campagne, il s'apercevait qu'en réalité, il s'était volontairement coupé du monde pour ne pas avoir à l'affronter. Il pensait que rien de ce que pouvait lui dire Draco Malfoy ne pourrait plus jamais l'atteindre, qu'il était désormais bien au-dessus de ces querelles adolescentes. Et pourtant. Pourtant, les mots de Malfoy faisaient toujours aussi mal, peut-être même plus qu'à l'époque où ils étaient encore à l'école.
─ Tu ne dors pas ?
La voix de Draco résonna soudain dans le silence de la pièce, faisant légèrement sursauter Harry – il était tellement absorbé par ses pensées qu'il ne s'était pas rendu compte que son compagnon de cellule était éveillé.
─ Toi non plus, manifestement, répondit-il, surpris, en se retournant pour regarder Draco. Qu'est-ce qu'il y a, la potion de sommeil ne marche pas ?
─ Apparemment, non, fit la voix de l'ancien Mangemort. Ce n'est pas la première fois…
Allongé sur le dos, un bras replié sous la tête et l'autre reposant mollement sur son ventre, il fixait le plafond lézardé d'un air absent, et Harry se surprit à l'observer attentivement – il ne l'avait jamais vraiment fait depuis son arrivée à Azkaban, hormis pour se rendre compte qu'il était malade, et très mal en point. A vrai dire, Harry n'avait que rarement regardé Draco. Pas avant leur sixième année, en tout cas. Et après, il avait fait en sorte de l'occulter complètement de ses pensées, la recherche des Horcruxes et la lutte contre Voldemort requérrant toute son attention. S'il fallait se montrer honnête, Harry n'avait finalement que très peu de souvenirs du Draco de Poudlard, en dehors de sa voix traînante qui l'avait si souvent horripilé, et des coups bas qu'il lui avait fait subir.
Ce soir pourtant, il le regarda vraiment, avec plus d'attention encore que lors de leur sixième année. A l'époque, il l'avait découvert vulnérable et cette faillibilité l'avait dérangé parce qu'elle bousculait tous ses préjugés. A présent, que voyait-il ? Un homme fatigué, désabusé, qui s'accrochait à son cynisme et au peu de dignité qu'il lui restait avec l'incroyable force du désespoir. Quelqu'un qui paraissait à la fois trop vieux pour son âge parce qu'il avait vu trop de choses, et curieusement jeune parce que finalement, comme l'avait dit Théo, il n'était finalement qu'un gamin qui s'était laissé entraîner dans une situation qu'il ne maîtrisait pas. Simplement parce qu'il n'avait pas eu le choix.
Harry se rendit compte qu'il se souvenait avec une acuité étonnante de la fois où il l'avait surpris en train de pleurer dans les toilettes du deuxième étage et de ce qu'il avait ressenti alors. De combien il s'était senti désemparé devant tant de souffrance. Puis plus tard, du désespoir insondable du garçon blond quand il avait hurlé à Dumbledore qu'il n'avait pas le choix, de sa détresse lorsque le vieil homme lui avait répondu qu'il n'était pas un assassin. Harry se souvenait de tout cela et ce furent les yeux de Draco qui lui revinrent alors en mémoire. Si pleins de douleur. Pas encore tout à fait vides, pas encore tout à fait froids. Il ne s'était pas rendu compte qu'il avait volontairement oublié tant de choses. Puis la voix de Draco brisa le silence à nouveau, basse et rauque, et sans comparaison aucune avec celle qu'il possédait trois ans plus tôt.
─ Potter, chuchota-t-il d'un ton étrangement gêné, pour tout à l'heure, je…Il s'interrompit un instant, et Harry devina à quel point cela devait être embarrassant pour lui – il ne fit rien pour l'aider, cependant. Je suis désolé, acheva-t-il dans un souffle.
─ D'accord, dit simplement Harry.
Il aurait pu être plus magnanime. Il aurait pu lui répondre que ce n'était rien, lui dire que ce n'était pas grave. Mais ça l'était, et il ne pouvait pas lui pardonner si facilement. Pour autant, il ne voulait pas non plus envenimer le débat. Draco Malfoy qui s'excusait volontairement, et surtout sincèrement, c'était trop rare pour ne pas l'accepter – même si cela faisait déjà deux fois depuis qu'il était ici. Et puis, ainsi qu'il se l'était dit avant de s'apercevoir que Draco ne dormait pas, il était convaincu que le jeune homme n'avait pas réellement voulu le blesser – pas à ce point, en tout cas. Après tout, lui aussi devait avoir perdu des êtres chers durant la guerre, lui aussi devait savoir ce que c'était d'être confronté à la mort de quelqu'un qu'on aime. Cela expliquait d'ailleurs sans doute sa réaction lorsque Harry lui avait appris la mort d'Hermione – il réalisa qu'il ignorait si Draco avait été en contact avec quelqu'un d'autre que Snape durant leurs trois années de cavale.
─ Dis-moi, Malfoy, finit-il par dire d'une voix hésitante. Au risque de me faire rembarrer – comme à chaque fois que j'essaie d'avoir une conversation civilisée avec toi, voulut-il ajouter, mais il préféra s'abstenir – il y a quand même quelque chose qui m'intrigue…
─ Quoi donc ?
─ On m'a dit que tu étais en cellule d'isolement, que tu n'avais pas le droit d'avoir le moindre contact avec les autres prisonniers ici…
─ Et je ne veux pas en avoir, le coupa Draco, sèchement. Je trouve déjà que je suis trop entouré, crut-il bon de rajouter avec perfidie.
Harry soupira faiblement, mais ne releva pas. Ca ne servait à rien d'amorcer une nouvelle dispute, et il était fatigué de tout le temps se prendre le bec avec Malfoy. D'ailleurs la réciproque semblait vraie : sa dernière réplique paraissait singulièrement manquer de conviction
─ Depuis que tu es ici, tu n'as eu aucun contact avec qui que ce soit en dehors de Clint, alors ? demanda-t-il simplement.
─ Non, pas avant ton arrivée. Pourquoi ?
─ Je pensais qu'on te ferait au moins parvenir ton courrier, murmura Harry, déconcerté.
─ Potter, ta naïveté me surprendra toujours, soupira Draco. Tu pensais sincèrement que quelqu'un à Azkaban se soucierait de me faire parvenir une quelconque lettre ? De toute façon, fit-il avec une surprenante honnêteté, je ne vois pas qui pourrait bien m'écrire…Et je m'en fous, ajouta-t-il par pure bravade, mais le dépit qui perçait dans sa voix ne trompa pas Harry une seconde.
─ Tu veux dire que tu n'as cherché à avoir des nouvelles de personne ? demanda Harry d'un ton incrédule.
─ Eh bien, tu m'as dit toi-même que Théodore Nott se portait comme un charme et qu'il était même devenu ton ami, grand bien lui fasse. Quant aux autres Serpentard…
─ Ils n'ont pas tous rejoint Voldemort, tu sais, l'interrompit calmement Harry.
Les muscles de Draco se crispèrent imperceptiblement et le jeune homme se figea un très bref instant, à peine assez pour que Harry puisse le remarquer. Sa voix, quant à elle, était comme à son habitude parfaitement maîtrisée lorsqu'il répondit.
─ Tiens donc, tu m'apprends quelque chose…Encore que, ça ne m'étonne pas vraiment. Beaucoup de Serpentard tenaient avant tout à leurs propres intérêts – je suppose que beaucoup d'entre eux sont restés neutres ou ont fui les combats…
Aucun sentiment ne filtrait à travers cette voix calme et indifférente, mais malgré tout, Harry crut y percevoir une question. Peut-être Malfoy voulait-il savoir, en fin de compte…Il se demanda vaguement à qui il pensait en ce moment.
─ Pansy Parkinson est restée neutre, effectivement, dit-il d'une voix songeuse. Elle a fui en Allemagne avec sa famille lorsque la guerre a été officiellement déclarée, du moins c'est ce qu'on m'a dit. Elle est revenue il y a peu en Angleterre. Je ne sais pas ce qu'elle devient, mais à vrai dire, je n'ai pas vraiment cherché à savoir…
─ Ca ne me surprend pas de la part de Pansy, murmura Draco, pensif. Elle s'en sortira, elle a toujours été très opportuniste…Je me demande ce qu'est devenue sa copine, Bulstrode…
─ Tu ne sais pas ? fit Harry, surpris. Elle est ici, à Azkaban, dans l'aile des femmes. Elle a été arrêtée il y a un an, je crois.
Il n'ajouta pas que la jeune femme en avait pris pour moins longtemps que lui, alors que les charges qui pesaient contre elle étaient bien plus lourdes. Il ne le dit pas, parce qu'une question venait brusquement de poindre dans son esprit. Draco savait-il pour ses parents ?
─ Comment aurais-je pu le savoir ? répliqua la voix ironique et désabusée du jeune homme blond, et Harry sursauta – il avait cru un instant que Draco parlait de ses parents. Le bottin mondain des Mangemorts n'est pas fourni avec la chambre, pas plus que l'abonnement à la Gazette des sorciers, ajouta-t-il encore d'un ton mordant.
─ Tu aurais pu l'apprendre au moment de ton procès, objecta Harry, ce qui provoqua un bref ricanement de la part de son compagnon de cellule.
─ Tu veux parler du simulacre de justice qui en a fait office ? railla-t-il. Je n'avais jamais vu mon avocat avant le jour de l'audience, et qu'il ait été là ou pas n'aurait pas changé grand-chose, à mon avis…
Cette dernière phrase fit violemment se serrer les poings de Harry. Il savait que Malfoy avait raison, car l'ancien Mangemort n'avait aucun intérêt à lui mentir et n'avait très certainement pas envie de l'apitoyer – c'était inutile, avec Harry plus qu'avec n'importe qui d'autre et le jeune homme le savait très bien. Néanmoins, s'entendre confirmer, de la bouche même de celui qui avait permis la mort d'Albus Dumbledore, que le Ministère était corrompu et sa justice expéditive, était quelque chose que Harry supportait difficilement. Malfoy était censé être le salaud, pas le Ministère, du moins voulait-il encore s'en convaincre – et plus il en apprenait sur cette affaire, moins il en était convaincu. Harry se détestait d'éprouver de la sympathie pour le garçon blond allongé à côté de lui. Pourtant, il avait l'impression qu'il se serait encore plus haï s'il n'avait rien ressenti.
─ Potter ?
La voix de Draco brisa une nouvelle fois le silence – à peine un souffle, pourtant Harry l'entendit parfaitement.
─ Quoi ?
─ Est-ce que tu sais ce que sont devenus Vincent Crabbe et Grégory Goyle ? l'interrogea le jeune homme d'une voix presque trop détachée pour être honnête. Harry en fut surpris, il n'imaginait pas que Draco pût réellement s'inquiéter de leur sort.
─ Eh bien, hésita-t-il, ils ont rejoint l'Ordre du Phénix peu après ta fuite. Je pense, ajouta-t-il en réponse à l'exclamation étouffée de Draco, que l'attaque de Poudlard leur a ouvert les yeux – et à vrai dire je crois qu'ils t'étaient plus fidèles, à toi, qu'aux idées de Voldemort. Grégory Goyle est mort lors d'une attaque de Mangemorts à Gringotts, et Vincent Crabbe est toujours en vie.
Puis il ajouta, avec prudence, comme s'il craignait une réaction violente de la part de son vis-à-vis :
─ Malfoy…tu ne veux pas savoir ce que sont devenus tes parents ?
─ Et Blaise Zabini ? demanda Draco en ignorant délibérément la question de Harry. Il a dû suivre le Seigneur des Ténèbres, lui…
─ Il est mort, répondit doucement le jeune homme brun. Peu après son intronisation en tant que Mangemort. Voldemort avait découvert qu'il fournissait des informations aux Aurors.
─ Il était espion pour l'Ordre du Phénix ? s'étonna Draco.
─ Non, personne n'était au courant. Ce n'est que lorsqu'il est mort qu'Alastor Maugrey a appris que l'un des Aurors qu'il avait sous ses ordres recevait des informations – Terence Higgs, il faisait partie de ta Maison…J'avoue que moi aussi, j'aurais cru qu'il rejoindrait Voldemort.
─ C'était un type tellement secret, murmura Draco comme pour lui-même. On ne savait jamais ce qu'il pensait réellement – manifestement ça n'a pas suffit à lui sauver la vie. Alors comme ça, Terence est Auror, hein ?
─ Il l'était. Harry balaya l'air de la main d'un geste désabusé. Il est devenu invalide à cause d'un sort qu'il a reçu lors d'une mission. Malfoy, soupira-t-il, tu ne veux vraiment pas savoir ce que sont devenus tes parents ?
─ Tiens, et ce bon vieux Longbottom ? éluda encore une fois Draco d'un ton léger. Je parie que c'est un héros de guerre, maintenant…Après tout ce que tu viens de m'apprendre, plus rien ne saurait me surprendre, je crois…
Harry ne répondit pas tout de suite. Il crispa les poings sur les draps, parce que Neville faisait partie des souvenirs douloureux qu'il voulait occulter. S'il ne voulait jamais oublier Ron et Hermione et entretenait la douleur comme on s'occupe d'une plante rare, Neville était l'une de ces nombreuses blessures de trop, mal refermées parce que trop vite mises de côté.
─ Oui, c'est devenu un héros de guerre, souffla-t-il douloureusement. Il est dans la même section que ses parents, à Sainte Mangouste. Il est comme eux, maintenant. Et comme…
─ Oh. Désolé, Potter, le coupa nerveusement Draco, sans aucune sincérité, et Harry eut l'étrange impression qu'il ne voulait pas entendre la fin de sa phrase.
─ Comme ton père, acheva-t-il très doucement.
Il ne savait pas bien pourquoi il ressentait le besoin de prendre des précautions avec Malfoy – mais le fait était là, cela ne lui faisait pas particulièrement plaisir de lui apprendre cette nouvelle. Même s'il avait haï Lucius Malfoy avec presque autant de force qu'il avait haï son fils, il pouvait comprendre.
─ Comment est-ce arrivé ? chuchota Draco, si faiblement que Harry crut l'avoir imaginé, qu'il crut aussi avoir imaginé l'infime tremblement de sa voix.
─ Voldemort a fait attaquer Azkaban il y a deux ans, pour faire libérer des Mangemorts qui y étaient emprisonnés. Il avait les Détraqueurs avec lui, et l'un d'entre eux s'est attaqué à ton père, sur ordre de Voldemort.
─ Le Baiser, évidemment…
Ce n'était pas une question, juste un constat formulé froidement, par une voix atone. Pourtant, Harry répondit.
─ Oui. Je suis désolé, Malfoy, je pensais que tu le savais.
─ Non, tu ne l'es pas, grogna Draco. Tu haïssais mon père. Ce que tu éprouves, ce n'est pas de la compassion, c'est de la pitié, tout au mieux. Et je n'en veux pas, surtout pas de ta part.
Il avait tort, c'était bien de la compassion que Harry ressentait pour lui – parce qu'il comprenait, tout comme d'autres que lui pouvaient comprendre, à présent. Mais il ne le dit pas. Parce que Malfoy ne le croirait pas, et parce que lui-même se refusait à éprouver ce genre de sentiments. Alors, plutôt que de le contredire, il préféra aborder un autre sujet, épargnant à Draco la peine de le faire.
─ Ta mère s'est enfuie, dit-il à voix basse. Toi en cavale avec Snape, Lucius toujours enfermé ici sans qu'elle ait le moindre espoir de l'en tirer, elle a préféré se réfugier en France et se mettre à l'abri. Le Ministère a perdu sa trace à Paris mais a priori, elle est toujours vivante puisque ses comptes bancaires étaient toujours actifs, bien après qu'elle ait disparu.
─ Le Ministère ne les a pas utilisés pour la retrouver ? Si elle retirait de l'argent ou qu'elle se le faisait envoyer quelque part, ça ne devait pas être bien difficile, nota Draco avec sarcasme.
─ Apparemment, elle utilisait plusieurs prête-nom. Et puis, au bout d'un moment, notre bien-aimé Ministre a préféré abandonner les recherches et mettre tous les biens de ta famille sous tutelle – soit disant pour financer les réparations des dégâts causés par la guerre, mais en réalité, c'était pour financer sa campagne de réélection…et pour traquer Snape. Quelle ironie, n'est-ce pas, Malfoy ? murmura Harry en plongeant ses prunelles vertes dans celles de Draco. C'est l'argent de ta famille qui a permis ta capture, mais pour Snape, il n'aura servi à rien…
Draco ne répondit rien, et Harry n'insista pas. Il n'y avait rien à répondre, de toute façon. Toute cette guerre n'avait été qu'un immense gâchis, pour tout le monde ou presque. Draco soutint son regard quelques secondes, de ses yeux au gris insondable, le visage lisse et sans expression. Puis, sans un mot, il lui tourna le dos. Alors Harry se tourna lui aussi et fixa longtemps le plafond tandis que son compagnon de cellule s'endormait enfin, d'un sommeil nerveux et agité.
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L'une des nombreuses incommodités de la cellule d'isolement était qu'elle ne possédait pas de fenêtre – ou plutôt, la seule fenêtre tenait en une mince ouverture très haut dans le mur, aussi étroite qu'une meurtrière. Par conséquent, qu'il fît jour ou non, la pièce exiguë était toujours plongée dans une semi-pénombre inconfortable pour les yeux (encore que depuis que Potter était arrivé, il pouvait désormais bénéficier d'un peu plus de lumière en journée, le Survivant ayant besoin de travailler), et il était très difficile de déterminer l'heure de la journée sans posséder d'horloge. Les seuls repères auxquels Draco pouvait se fier étaient les heures de repas, apportés avec une ponctualité de métronome par son gardien. Et au bout d'un mois, son corps avait appris à se réveiller précisément une demi-heure avant l'arrivée de Clint le matin, qu'il fût fatigué ou non, malade ou pas.
A part les premiers jours où Potter l'avait obligé à dormir dans son lit, il n'avait jamais dérogé à cette habitude, et il s'était aperçu que le Survivant avait quant à lui un sommeil beaucoup plus erratique. Lors de son arrivée à Azkaban, Harry dormait très peu, se couchant largement après Draco et se levant bien avant lui. Puis, très rapidement, il semblait s'être fait au rythme particulier de la vie carcérale – Draco s'était vite rendu compte que dormir était la seule activité qu'on lui laissait exercer tout son soûl. Cela tombait bien, il avait trois ans de sommeil à rattraper, ou presque. Quant à Potter, si son sommeil était toujours irrégulier, et s'il était toujours sujet aux insomnies, Draco s'était aperçu qu'il dormait désormais plus longtemps le matin, et qu'il se réveillait toujours après lui.
Cet état de fait l'arrangeait plutôt, car cela lui permettait de prendre sa douche et d'aller aux toilettes sans que personne ne fût témoin de ses activités – sans parler du fait qu'il pouvait goûter à quelques minutes de tranquillité avant le réveil de cet homme horripilant. Mais surtout, cela lui permettait de s'extirper en silence et en toute discrétion de l'étreinte du jeune homme brun, dans les bras duquel il se retrouvait systématiquement enlacé depuis quelques jours. Aujourd'hui ne fit pas exception à la règle, et Draco grogna d'exaspération lorsqu'il se réveilla une fois de plus, fermement serré contre Potter qui dormait comme un bienheureux – enfin, qui dormait un peu plus calmement qu'en début de nuit. Et une fois de plus, il prit toutes les précautions nécessaires pour sortir du lit le plus silencieusement possible et filer sous la douche.
Il détestait cette situation. La première fois, il avait failli hurler en se réveillant entre les bras du Survivant et avait manqué de le frapper en l'abreuvant d'injures – avant de se rendre compte que Potter n'avait pas bougé de là où il était, et que c'était lui, Draco, qui s'était rapproché durant la nuit. Et il ne savait pas exactement pourquoi, c'était ça, le vrai problème. Le manque de chaleur dans la cellule ? Depuis que Potter était arrivé et que Draco était tombé malade, il y faisait beaucoup moins froid. Alors il ne savait pas, et il ne voulait pas savoir. Quelque part au fond de lui, une voix lui soufflait qu'il avait cruellement manqué de contacts physiques ces trois dernières années, mais il refusait de l'écouter. Draco n'avait pas besoin qu'on le touche – il ne voulait pas avoir besoin qu'on le touche. Du moins, c'était ce qu'il avait toujours pensé.
Ce n'était même pas le fait que ce soit Potter qui l'horrifiait – même si cela n'arrangeait en rien la situation – c'était surtout le fait que son corps ressentait le besoin d'en toucher un autre, autrement que pour provoquer ou subir une douleur physique. Sa mère avait cessé ses étreintes affectueuses presque dix ans auparavant, même si elle l'aimait profondément. Son père…Draco pouvait compter sur les doigts de la main les fois où il l'avait touché pour autre chose que lui infliger des punitions – d'ailleurs, il pouvait compter aussi sur les doigts de la main les fois où il lui avait infligé des corrections. Les autres Serpentard, à Poudlard, ne l'approchaient que rarement. La seule fille avec qui il avait eu un contact physique avait été Pansy Parkinson – et cela s'était limité à danser avec elle lors du bal de Noël en quatrième année, et à la laisser lui caresser les cheveux de temps en temps. Elle avait d'ailleurs été la seule à qui il avait permis de le faire – la seule en qui il avait suffisamment confiance pour cela. Elle avait beau être incroyablement exaspérante, elle avait finalement été ce qui s'approchait le plus d'une amie lors de leur adolescence. Elle, et dans une moindre mesure, Théo.
Il y avait toujours eu une distance entre lui et les autres – physique comme mentale, mais surtout physique. Etait-ce pour cela qu'aujourd'hui, son corps se rebellait, réclamait en quelque sorte justice ? Draco avait du mal à l'accepter – non, il ne voulait pas l'accepter. Surtout si cela impliquait Potter – même si en l'occurrence, cela ne pouvait être que lui, puisqu'il n'y avait que lui à proximité.
Lorsque Harry s'agita dans le lit aux draps défaits et se redressa lentement sur le matelas, les yeux embués de sommeil, Draco lui jeta un regard courroucé puis se jeta à corps perdu dans la lecture.
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La deuxième semaine de son séjour à Azkaban venait de s'achever et Harry n'avait toujours pas fait le moindre progrès. Du moins, pas en ce qui concernait l'endroit où Snape se cachait – mais Harry n'avait pas vraiment essayé de le savoir non plus. A vrai dire, il avait essayé de suivre les conseils de Théo, mais cela s'était avéré plus difficile qu'il ne le pensait. Il n'avait pas envie d'être insupportable avec Draco – ou plutôt, il n'avait plus envie. Il n'avait plus envie de lui mentir, non plus ; toute cette mascarade le fatiguait. Il voulait rentrer chez lui, retrouver la tranquillité de sa maison, et ne plus avoir à se poser de questions dérangeantes sur la façon dont il avait géré l'après-guerre. La présence de Draco le confrontait à ses propres problèmes, le faisait réagir d'une manière qu'il n'arrivait pas à contrôler, il n'avait pas envie de ça.
Et il n'avait plus envie non plus de devoir supporter Scrimgeour. Le Ministre exigeait un rapport hebdomadaire sur ses avancées avec Malfoy, et plus le temps passait, plus Harry se retenait de l'envoyer paître, lui et ses idées stupides, lui et ses méthodes douteuses. Malgré tout, il restait ici – parce qu'il avait promis, parce que malgré tout, il ne voulait pas que le Ministère utilise les mêmes méthodes que les Mangemorts. Et surtout, parce qu'il voulait que Snape soit arrêté. Si seulement il pouvait trouver un moyen de faire parler Malfoy, toute cette histoire se terminerait, et il pourrait rentrer chez lui. Mais il ne savait pas comment faire.
Et Théodore avait raison, il commençait à apprécier ce qu'il découvrait sur Malfoy – du moins, il ne le trouvait plus aussi insupportable qu'avant. C'était vrai, Draco était remarquablement intelligent, il avait pu le constater plus d'une fois. Les deux fois où il lui avait parlé de ses livres, Harry avait été surpris par la justesse de ses remarques – en réalité, il était probablement le seul qui avait su percevoir tout ce que Harry avait voulu faire passer dans ses récits, ou presque. Et les deux fois où ils avaient réellement discuté, ces deux soirs où ils avaient parlé sans se jeter des insultes à la figure, il avait vu que Draco était effectivement bien plus sensible qu'il ne le laissait paraître, même s'il essayait de toutes ses forces de le cacher – il fallait dire qu'il y parvenait plutôt bien, mais dans une cellule de six mètres carrés, même l'acteur le plus endurci aurait du mal à garder le masque en place en permanence.
Harry n'aimait pas ça. Il ne voulait pas de ça – quelque chose en lui se rebellait, refusait qu'il éprouve autre chose que du mépris pour Draco Malfoy. C'était comme s'il trahissait tout ce en quoi il croyait – même si au fond, il savait que c'était faux, même si au fond, il savait que Malfoy ne méritait pas autant de haine. C'était d'autant plus difficile de continuer à l'entretenir, de continuer à essayer de jouer la carte du rival désagréable. Bien sûr, son compagnon de cellule était toujours cet homme hautain et arrogant, mais plus le temps passait, et plus Harry commençait à deviner le Draco dont Théo lui avait parlé, celui qu'il était lorsqu'il se sentait en sécurité. Celui qui se cachait derrière le masque. Harry se rendait compte qu'il avait en quelque sorte apprécié de discuter avec Malfoy – et définitivement, il n'aimait pas ça.
Lorsqu'il revint de son deuxième entretien avec Scrimgeour, Harry était de mauvaise humeur. Le Ministre lui avait clairement fait comprendre qu'il était très mécontent que les choses n'avancent pas assez vite et Harry s'était une fois de plus emporté – il avait toujours du mal à admettre qu'il défendait un ancien Mangemort contre les agissements de la plus haute figure d'autorité du monde sorcier. Il avait besoin de prendre l'air, de jouer avec son chien, de boire un thé avec Théodore. A la place, il alla fumer une cigarette sur les remparts de la prison, et il constata avec dégoût qu'il n'y avait même pas pris plaisir – c'était bien la première fois qu'il fumait pour se calmer, et non parce qu'il en avait envie. Et le paysage morose qui s'étalait sous ses yeux ne fit rien pour arranger son état d'esprit.
Mais les choses pouvaient encore être pires, c'était une constante qu'il avait appris à connaître ces dernières années. Quand il regagna la cellule, il trouva Draco debout au milieu de la pièce, et l'expression qui se peignait sur son visage mince ne laissait rien présager de bon.
─ Dis-moi, Potter, fit-il de son agaçante voix traînante. Ton prochain bouquin se déroule bien dans l'univers carcéral, n'est-ce pas ?
Harry hocha la tête silencieusement, sans comprendre où le jeune homme voulait en venir. Puis il vit la liasse de papiers que Draco tenait à la main, et le désagréable sourire qui se formait sur ses lèvres.
─ Dans ce cas, aurais-tu l'amabilité de m'expliquer pourquoi, dans tes notes de travail, n'y a-t-il pas la moindre allusion à la prison en général, et à Azkaban en particulier ?
Le Survivant soupira. Ce n'était définitivement pas une bonne journée.
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A suivre…
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Comme d'habitude, la suite dans un mois, normalement. En attendant, n'hésitez pas à nous laisser des reviews pour nous dire ce que vous avez pensé de ce chapitre, et à venir faire un tour sur notre blog commun (adresse dans notre profil). A bientôt !
