Chapitre XII : Carte Piège

Lorsque Ron arriva à l'appartement prêté par le ministère, il trouva Harry et Malefoy en train de prendre leur petit déjeuner à la même table et dans un silence religieux. Depuis leur réveil, ils ne s'étaient pas adressés la parole. Le blond, de son côté, était mal à l'aise d'avoir ainsi enlacer la main de son rival. C'était involontaire, instinctif, et cela l'inquiétait car en dehors de quelques sujets traumatiques, il avait une parfaite maîtrise de lui-même. Seulement à cet instant, devant les ruines de la maison, il avait entrevu l'espoir de soigner les plaies que la guerre avait laissé en lui, des plaies que ses talents de médicomage, n'avait jamais soigné et que Potter semblait être capable de faire taire.

Pour Harry, les choses étaient plus basiques, il ne savait tout simplement pas quoi dire.

Ron, pour sa part, ne chercha pas à comprendre le pourquoi du comment de ce sentiment de malaise, et décida, pour lui-même, que ce silence était la conséquence d'une énième dispute. Après une seconde d'hésitation, il salua son ami et signala sa présence à l'autre, d'un neutre et simple : « Malefoy ».

-Weasley, répondit le blond sans détourner le regard de son journal, visiblement français d'après les lettres gothiques qui indiquaient « Le Monde : Édition Sorcière ».

-Harry, j'ai une bonne nouvelle. J'ai croisé Neville, au ministère. Nous avons rendez-vous avec le chef des potionnistes demain, à dix heures.

L'Auror fit la moue.

-Je ne suis pas sur que ce soit une bonne nouvelle que nous soyons convoqué si rapidement, soit ils ont découvert un truc inquiétant, soit ils n'ont pas grand chose d'exploitable. Dans les deux cas, ça ne me plaît pas.

-Tu es si pessimiste, fit Ron en mimant son exaspération.

-Je suis simplement réaliste. Moi, je veux surtout savoir à quoi sert cette potion. Si le sang de licorne doit servir à éviter la mort de la victime, c'est quoi l'objectif final ?

-Le plus étrange, c'est que ce poison me soit totalement inconnu, fit Malefoy, en refermant son journal pour finir sa tasse de thé.

Ron fronça les sourcils, cette fouine était parfaitement incroyable ; même pour dire une chose simple, il ne pouvait pas s'empêcher d'être arrogant.

-Comment ça ? Demanda Harry, trop intrigué pour faire une remarque.

-Je suis médicomage, énonça le blond comme une évidence. Nous avons eut un semestre entier sur les différents poisons magiques et cette chose est, ou trop nouvelle pour être enseignée, ou trop ancienne pour être connue.

-J'espère que nous aurons les informations avant qu'une catastrophe n'arrive en tout cas.

-Ne t'inquiète pas Harry, tout le monde fait de son mieux, assura Ron, optimiste.

-Je n'ai plus d'affaire de rechange, constata celui-ci, en changeant de sujet. Je dois passer chez moi, tout à l'heure. Malefoy, tu restes avec Ron pour l'aider à remplir le rapport, ou tu viens avec moi ?

-Je préfère me tailler les veines que de rester avec Weasmoche pour faire quoi que ce soit, il faut juste que j'aille me changer.

Drago ne voulait vraiment pas rester avec Weasley, mais il était surtout très curieux de voir l'endroit où vivait Potter. Lors de son retour, il avait imaginé le Sauveur dans une immense maison avec quelqu'un qui aurait fait la décoration à sa place pour éviter un massacre, et qui ressemblerait au foyer idéal avec des mini-Weasley partout. Leurs quelques échanges lui avait fait réviser son jugement, pas de nains roux à l'horizon, et cet Potter là semblait rechercher le calme et la sérénité.

Malefoy ayant disparu dans sa chambre, Harry en profita pour se changer, tandis que Weasley buvait un thé, en commençant à rédiger un rapport.

-Ron, concernant les interventions de Mal...

-Je sais faire mon métier, Harry. Cette fouine est peut-être détestable en tout point, mais ce n'est pas une raison pour foutre en l'air un rapport d'enquête. Surtout depuis que quelqu'un à révéler à ma chère épouse qu'on les bousiller pour qu'elle arrête de nous les faire remplir ! Je te remercie pas pour ça !

-Si tu veux l'a calmer, tu peux toujours lui faire une demande en mariage. Tu dois le faire depuis des mois, qu'est ce que tu attends ?

-Je vais le faire dans quelques jours, ne t'inquiète pas. J'attends juste que tout s'organise correctement. J'ai décidé de faire une demande façon moldu, je l'ai entendu dire que c'était beaucoup plus romantique. Seulement pour ça, il faut que je trouve un restaurant chic ! Tu n'aurais pas une idée ? Moi, je n'y connais rien.

-Si tu demandes à Potter ce qui est chic, tu vas finir par dîner avec Granger dans une niche pour chien, fit une voix froide et traînante derrière lui. Emmène-là au Saint Jacques sur Saint James's Street, et arrête de nous raconter tes histoire de cœur. C'est aussi ennuyeux que pathétique.

Ron resta bouche bée. Était-ce bien Malefoy qui venait de lui donner un conseil ? Hésitant entre la reconnaissance et la méfiance, il choisit finalement la suspicion, et alors qu'il s'apprêtait à répondre ce fut Harry qui riposta le premier.

-Quand on sera chez moi, tu seras assez aimable de ne pas critiquer tout ce que tu vois, rétorqua t-il en s'agaçant des remarques du blond sur ses goûts.

-Je critiques les gens pour qu'ils s'améliorent, Potter, et dans ce domaine tu as encore de la marge.

-Si vraiment c'est pour s'améliorer, alors je peux le faire aussi ?

-C'est inutile, fit Malefoy. Sur la plupart des domaines, je suis absolument parfait, et les autres sujets ne m'intéressent pas.

-Donc ça ne te déranges pas si je dis que tu es trop lent quand tu lances des sorts ? Lança Potter, perfide.

-Je pourrais te signer que tu es incapable de faire une potion convenablement.

-C'est vrai que moi je n'étais pas le chouchou du prof, donc forcément...

-Tu n'étais pas non plus le chouchou des coiffeurs pour avoir un nid de pie à la place des cheveux ! Rétorqua l'ancien Serpentard.

Ron regarda la scène avec étonnement, les deux ennemis commençaient à enchaîner les insultes mais le ton ne montait pas, ça ne ressemblait pas à une dispute mais à une sorte de jeu malsain. Ils se lançaient des horreurs au visage avec le sourire. Le roux avait surtout l'impression d'être subitement devenu invisible, voir même d'être de trop.

-C'est plus facile quand on passe deux heures dans la salle de bain, c'est sûr !

Harry termina sa phrase et immédiatement, en voyant le sourire carnassier de Malefoy, il comprit que celui-ci, Serpentard dans l'âme, ne reculerait devant rien pour gagner cette joute verbale.

-Oui, c'est sûr que vu ton état, tu y passes pas plus de cinq minutes. Je devrais peut-être te montrer comment prendre une douche, Potter, Malefoy avait appuyé le nom de son rival pour maintenir l'ambiguïté, mais le brun n'était pas dupe.

Des flashs de Drago, en train de le frotter de haut en bas, les cheveux humides, le corps couvert d'eau chaude, troublèrent soudainement l'esprit d'Harry qui devint rouge pivoine. Il sentait son bas ventre s'échauffait et préféra s'enfuir récupérer son linge sale et ses affaires, avant que son meilleur ami n'arrive à comprendre leur manège. Après cela, il sortit en grognant des choses incompréhensibles sous les yeux abasourdis de Ron.

-C'était quoi ça ?! Demanda le roux.

-C'est ton meilleur ami, pas le mien. Je crois qu'il m'attends en tout cas, fit le blond, en prenant son sac pour rejoindre Harry dans le hall d'immeuble.

-Je t'assure que tu me payeras ça ! Murmura Potter.

-Si tu n'as pas prévu d'assumer tes désirs en public, je n'ai rien à craindre, Potty.

-Tu avais raison finalement, j'ai très mauvais goût.

Harry lui pris le bras un peu brutalement et transplana juste à l'entrée du square Grimmaurd.

-Je n'arrive pas à croire, que tu es fait ça devant Ron ! Lança t-il, une fois sur le trottoir.

-Ce n'est pas ma faute, Potter, si tu n'as aucun courage devant tes amis.

-Évidemment, tu n'es pas vraiment le genre de personne que j'embrasse habituellement !

Malefoy s'interrogea soudain sur la nature des réticences de Potter. Était-ce parce qu'ils étaient tous deux des hommes ? Le fait qu'il soit un ancien mangemort était-il un sujet ? Finalement, c'était peut-être leur antipathie mutuelle qui continuait de retenir les pulsions du brun, ou ses trois raisons à la fois.

Ils étaient tous les deux si absorbés l'un par l'autre, qu'ils ne virent pas qu'une vielle femme avec un élégant chapeau et un châle rose pâle sur le dos, s'était approchée d'eux, canne à la main.

-Excusez-moi ? demanda la grand-mère.

Elle avait le visage caché par des énormes lunettes et un immense sourire.

-Oui ? Demanda Harry.

-Je sais que c'est un peu étrange de dire cela à des inconnus, mais vous êtes très courageux de vous assumer, déclara t-elle, visiblement émue.

-Je ne comprends p...

-Oh, vous savez mon petit ami est un peu timide, coupa Malefoy, il n'ose pas toujours.

La mâchoire d'Harry se décrocha en sentant la main de Malefoy glissait dans la sienne. Il voulait la retirer mais en voyant le sourire tendre de la grand-mère, il se ravisa. La vengeance auprès du blondinet ce ferait plus tardivement.

-Vous avec un beau petit ami, dit-elle à Harry. Si vous ne faites pas ce qu'il faut, on finira par vous le voler.

Harry était à présent rouge carmin, il hésita quelques instants. Cette femme était-elle folle pour croire qu'il formait un couple ? Ils s'étaient embrassés de manière intense certes, mais ça ne voulait rien dire ! Harry décréta que finalement, oui, cette femme était une démente et qu'il fallait éviter de contrarier ce genre de personne. Il délaissa la main de Drago et glissa les bras le long de ses épaules jusqu'à son torse pour l'enlacer et avec une étrange tendresse, l'embrassa sur la joue avant de poser la tête sur son épaule.

-Ne vous inquiétez, c'est ma chasse gardée, déclara t-il d'une manière étrangement naturelle.

Cet élan de tendresse perturba profondément Malefoy. Les règles de son jeu, c'était de rendre Potter honteux et mal à l'aise, pas lui. Quelques secondes durant, il tenta de déterminer pourquoi le geste inattendu du brun l'avait fait rougir à son tour ? Et la réponse l'horrifia, il aurait voulu que cela continue, que Potter l'enlace encore, et sentir son ventre chaud, et musclé, son odeur sucré, contre lui. Les baisers brutaux de son rival l'excitait, et sa tendresse commençait également à lui plaire. Drago était sur une très mauvaise pente.

-De mon temps, ce n'était pas comme ça, résuma la vielle femme avec une sorte de regret. C'est bien que les choses changent ! Termina t-elle avec un sourire, avant de repartir.

Potter délaissa Malefoy, non sans un regret puis d'un geste l'invita à prendre la direction du 12, Square Grimmaurd.