Chapitre XVIII : Sur le Chemin de Traverse

Lorsqu'ils touchèrent le sol, dans le coin le plus sombre de l'Allée des Embrumes, Harry et Drago, se collèrent l'un à l'autre contre un mur afin de rester dans l'ombre et de ne pas être reconnu. Le souffle chaud d'Harry contre Drago l'enivrait mais il se ressaisit bien vite.

-Tu comptes faire comment pour atteindre Gringotts sans être reconnu ? Demanda Harry, en chuchotant.

-Granger ne devrait pas tarder à annoncer des mesures de restriction pour éviter que quelqu'un soit empoisonné, cela devrait suffire à attirer l'attention des journalistes qui rodent dans le coin.

-Je trouve ça imprudent, et même si en dehors des périodes de vacances scolaires, le Chemin de Traverse est plus calme, il suffit d'un civil qui te reconnaît et tout le monde dans la rue sera au courant.

-Tu n'as qu'à m'embrasser en public, et tout le monde saura que je suis de retour sans oser me faire du mal, s'amusa Malefoy.

-Arrête de détourner le sujet, tu n'as pas du polynectar dans ta sacoche ?

Malefoy regretta un instant que Harry ne soit plus aussi rouge que les premières fois qu'il évoquait leurs baisers.

-C'est un nécessaire de médicomagie, pas un kit d'infiltration. Par contre, les Aurors devraient en avoir sur eux pour ce genre de situation. Tu devrais suggérer l'idée à ton supérieur mais ne t'inquiète pas, j'ai une idée pour compenser.

Le blond tira sa baguette de son pochon et tout en pointant ses cheveux blonds, il prononça la formule en chuchotant : « Colovaria ! » et ses cheveux devinrent châtain. Il posa ensuite sa baguette sur les verres d'Harry et enchaîna : « Gemino ! ». Une réplique exacte des lunettes tombèrent dans sa main libre et il les glissa sur le nez. Il ouvrit finalement la sacoche et en sorti un miroir pour admirer le résultat.

-J'ai l'air d'un professeur d'Arithmancie, déclara t-il en rangeant sa baguette et sa glace.

-On peut y aller, professeur ? Ironisa Harry.

Toujours l'un contre l'autre, Harry vit le sourire de Drago apparaître.

-Je vous conseille d'être sage, Potter, où je devrais vous administrer une punition, murmura t-il d'une voix pleine de stupre.

-Il me semblait que c'était moi le futur professeur, s'indigna le brun, surtout pour repousser les images perverses que Drago faisait naître en lui.

-Pas avec moi, j'ai des tas de chose à t'apprendre.

Cette phrase intriguait Harry autant qu'elle l'effrayait. Malheureusement, ce n'était pas le moment de se draguer au beau milieu d'une mission, dans une ruelle sombre et malfamée. Heureusement pour eux, depuis la fin de la guerre, l'allée des Embrumes s'était dépeuplée.

Ils sortirent finalement vers le Chemin de Traverse, en direction de Gringotts. C'était la première fois que Drago revenait ici depuis des années, et l'endroit semblait avoir retrouvé le calme de ses jeunes années. Durant la guerre, la rue était cruellement déserte, et régulièrement, pour une raison ou une autre, les commerces étaient attaqués par les mangemorts. Certains artisans avaient même fait l'objet, auprès du ministère, de dénonciation, ce qui justifiait toujours l'attaque mais surtout le pillage qui suivait systématiquement.

Après la guerre, une autre ambiance avait habillée la rue principale, forgée par un désir de reconstruction, et de vivre à nouveau. C'était une euphorie, une sorte de fête permanente qui épuisait tout le monde mais qui camouflait les plaies de la guerre, et même Harry en avait pris sa part. De cette époque, il restait « Le Dragon De Jade », la première discothèque pour sorcier, qui remportait encore un franc succès, même des années après. Ron, Hermione et Harry avaient passé de longues nuits sous les lumières et les basses, à fêter tout et n'importe quoi, pour oublier, pour se retrouver, pour ne plus penser.

Pour Drago, les choses étaient différentes, il n'avait rien à fêter. Enfermé dans son cauchemardesque manoir, plongé dans les ennuis administratifs et judiciaires de sa famille, il avait juste disparu avant de reparaître en France.

-Cet endroit n'a pas beaucoup changé, finalement, constata celui-ci.

-On a toujours besoin de baguette et de balais.

-Cela fait des années que je n'ai pas fait de Quidditch, regretta Drago.

-Tu adores ça pourtant. Comment ça se fait ?

-Je n'avais pas le temps, les études de médecine magique en France sont très éprouvantes. Et puis, soyons honnête, je n'ai plus assez d'amis pour faire deux équipes. Tu as continué, toi ?

-Je joue un match un dimanche par mois avec les Weasley et quelques amis de la famille. Le reste, c'est des entraînements avec les collègues quand on n'est pas en mission.

-Tu as toujours ton éclair de feu ?

-C'était un cadeau de Sirius donc oui, je l'ai toujours mais j'utilise la nouvelle version qui est sortie il y a deux ans. Pourquoi tu veux à nouveau m'affronter sur un balais ?

-Non, répondit le blond. Je ne tiens pas à me faire, à nouveau, humilier devant du public. Si on doit s'affronter, je préfère faire un duel, mais avec nos baguettes, c'est impossible.

-Si tu veux, je peux toujours te rendre ton ancienne baguette, ça ne me gène pas.

Drago se figea sur place, devant les portes de Gringotts.

-Tu l'as toujours ?

-Bien entendu ! J'hésitais à t'en parler, car je ne savais pas comment tu réagirais. Mais maintenant qu'on s'entend mieux. Elle est dans mon coffre à Gringotts, c'est l'occasion ou jamais.

-Pourquoi est-ce que tu l'as gardée ? Demanda l'ancien Serpentard en se retournant pour lui faire face.

-Je voulais te l'a rendre. Il y a des années, je me suis rendu au manoir, et ta mère m'a dit que tu avais quitté le pays.

-Tu pouvais lui donner, Potter. Est-ce que tu voulais me revoir ? Le blond semblait soudain très intrigué.

Harry hésita un instant, puis il décida de courageusement tout dire.

-Oui, cela faisait partie de ma thérapie de régler les anciennes querelles, et nous n'avons jamais pris le temps de discuter de nous et même maintenant que nous arrivons à discuter, je n'ose pas aborder ce sujet.

-Harry, tu sais pourquoi je ne veux pas, n'est-ce pas ?

Bien entendu que Harry le savait, les traumatismes qui remontaient à la surface à la moindre évocation de Voldemort. Pourtant depuis quelques jours Malefoy semblait supporter beaucoup mieux ces douloureux souvenirs. Il tremblait encore, sa respiration était haletante par moment, mais ce n'était plus aussi grave qu'à son arrivée. Seulement sans cette foutue discussion, Harry n'arriverait jamais à oublié l'ancien Malefoy, cruel et obséquieux.

-Je le sais, mais ça ne change rien. Comment veux-tu que j'arrive à te faire confiance si je n'arrive pas à tirer un trait définitif sur la personne que tu étais.

-Tu vois bien que j'ai changé, ça devrait te suffire, répondit froidement Malefoy pour ne pas que leur dispute soit remarquée par les quelques passants.

-Je pense que ça pourrait suffire si j'avais simplement été témoin de tes conneries, mais j'étais la première de tes victimes.

-C'est faux, c'était moi, la première victime. Tu sais très bien les regrets que j'ai pour tout ça. Tu me dis que je n'ai pas à m'en vouloir pour ça et ensuite tu me repousses pour la même chose. Est-ce que tu crois à tout ce que tu m'as dit hier ?

-Évidemment, mais ce n'est pas...

-Alors rajoute ça à la longue liste de tes réflexions : J'ai fait de nombreuses rencontres, j'ai appris de nombreuses choses, je me suis éloigné de ce qui me retenait ici. J'ai changé, que ce soit par choix, ou parce que c'était ma destinée, comme tu l'as dit hier. Le Drago que tu as connu est mort, tout comme le Harry que j'ai connu ! Si tu n'es pas capable de faire ton deuil, alors toutes tes théories fumeuses ne sont que du vent.

Harry esquissa un sourire, qui s'étira alors que le ton de Malefoy était de plus en plus froid et cassant. Drago était le premier à le prendre en défaut sur ses propres préceptes de vie. Hermione et Ron l'aurait contredit sur le principe même. Ginny n'aurait rien compris. Pour la première fois, depuis longtemps Harry n'était plus seul, cette petite bataille avec Drago le lui confirmait autant qu'elle le reconfortait.

-Très bien, excuse-moi, répondit finalement le brun, tout sourire.

-Comment ça, très bien ?

Drago avait du mal à comprendre les réactions du brun qui venait de s'avouer vaincu sans la moindre résistance.

-Nous en discuterons, plus tard, si tu veux bien ? Il avait dit cela en pointant les trois sphères de lumière blanche qui descendaient du ciel. Une fois à un mètre du sol, la sphère la plus proche projeta le visage d'Hermione au dessus d'elle.

-Ici la Ministre de la Magie, Hermione Granger, s'annonça t-elle. Des mesures urgentes viennent d'être prises par l'administration en accord avec le Magenmagot, suite à la découverte d'une menace terroriste. Un sorcier encore inconnu de nos services menace la sécurité et la paix de notre monde avec une potion aussi dangereuse que puissante. En raison des caractéristiques de cette potion, nous conseillons à tous les sorciers d'éviter de sortir par temps de pluie, ou d'utiliser un parapluie moldu plutôt que leur baguette. Pour l'hygiène et l'alimentation, nous vous conseillons d'utiliser les sortilèges appropriés plutôt que l'eau provenant des canalisations. Ces mesures sont préventives et si elles ne sont pas respectées, nous serons amenées à les durcir. Je suis sincèrement désolé de ces contraintes, et je vous promets de tout mettre en œuvre pour arrêter ce dangereux criminel le plus rapidement possible, afin d'obtenir un retour à la vie normale.

Harry n'écouta pas un mot du discours d'Hermione. Tout le long, il fixa Malefoy, en détaillant les courbes de son dos. Le petit crétin était devenu un garçon beau, élégant, intelligent, et même attachant. Leur dernière dispute venait de faire prendre conscience au brun que son ancien rival était tout ce qu'il cherchait. Il voulait marché à ses côtés et même lui tenir la main en public. Seulement les choses n'étaient pas aussi simples. Désormais sur que ces sentiments naissants pouvaient être nourri avec un minimum de risque, il restait à convaincre le reste du monde. Harry allait devoir discuter avec Hermione et Ron.

La sphère disparut finalement dans une petite explosion silencieuse.

-J'imagine qu'étant ton ami, les situations de crise, c'est son quotidien, constata Drago.

-C'est elle, la plus maligne, de notre trio. Moi et Ron, on avait toujours la tête dans le guidon. Hermione était capable d'anticiper les choses.

-En parlant de ces deux-là, je crois que la demande en mariage de Ron, vient de tomber à l'eau.

Harry eut un petit rire.

-Je ne crois pas. Il va faire sa demande, elle va dire que ce n'est pas le moment. Il va trouver une pirouette pour dire que c'est justement le bon moment, et elle va trouver ça beaucoup trop mignon et dire oui.

-Tu es médium, maintenant ?

-Je connais ces deux-là par cœur. Je sais comment ils fonctionnent. De tout façon, Hermione ne pourra rien faire de plus, aujourd'hui. C'est à Zabini et aux chefs de département de faire le nécessaire maintenant.

-Je ne me fais aucun soucis pour Blaise, c'est un bourreau de travail.

-Je sais, j'ai vu comment il travaillait pendant la campagne d'Hermione. C'est étonnant, il ne donnait pas cette impression à Poudlard.

-La mère de Blaise est une femme avec une certaine réputation. Il ne voulait pas être réduit a son nom de famille. Malheureusement, le travail ne fait pas tout et il n'a jamais été doué pour les enchantements.

-Je ne l'aime pas, répondit simplement Harry. J'ai du respect pour lui, et pour ce qu'il fait, mais je n'aime pas ses méthodes. En plus, j'ai l'impression qu'il utilise Hermione par moment.

-Ce n'est pas qu'une impression,. La famille de Blaise était méprisée par les autres Sang-purs, y compris mon père. En aidant Granger, il obtient une forme de vengeance.

Alors qu'il disait cela, Drago entra dans le hall de la banque des sorciers. Immédiatement, les sortilèges de métamorphose tombèrent et il retrouva ses cheveux blonds. La sécurité avait sans doute été renforcée. Avec Harry à ses côtés, ils s'avancèrent parmi les nombreux gobelins, jusqu'au pupitre d'accueil.