Attention, rien ne m'appartient. Les personnages appartiennent à J.K Rowlings
Ratings : R
Correctrices : AnthaRosa et Ishtar205. N'oubliez pas de les remercier pour leur travail. Sans elles, la fic ne serait pas aussi lisible
Avertissement: Il y a dans l'histoire une référence à une grossesse mâle. Ce n'est absolument pas le sujet de l'histoire, mais on en parlera de temps à autre.
Attention, c'est un slash (relation entre deux hommes): SS/HP
Chapitre deux : le Refuge
Harry se décida finalement à aller voir cette maison qui l'attirait tant. Il avait trouvé le cadeau de mariage parfait pour ses amis, mais il lui fallait un nouveau logement et si cette demeure était aussi déserte qu'elle le paraissait, il pourrait peut-être convaincre le propriétaire de lui louer une chambre ou de la lui vendre. On ne sait jamais, pensa-t-il.
Planté devant, il se demanda à quelle porte il devait sonner. Il avait effectivement devant un problème : il faisait face à trois portes. J'ai l'impression d'être dans Alice au pays des merveilles. Les plantes sont démesurées, des animaux bizarres se baladent dans les fougères, certaines herbes ont de drôles de formes et il y a ces trois portes.
Et pourtant, il ne pouvait s'empêcher de trouver cet environnement familier. Son cœur battait la chamade comme si sa vie se jouait là maintenant, tout de suite et rien n'y faisait, il ne parvenait pas à faire taire ses palpitations. Je ressemble à un petit garçon qui fait sa première rentrée scolaire, tout lui paraît beau et nouveau.
Et bien, sonnons ! Il avait envie de frapper à droite ou à gauche, mais il n'y avait qu'une sonnette sur la porte du milieu, par contre, pas de nom !
Il attendit un peu mais rien ne se passa. Peut-être que la sonnette ne marche pas. Déçu, il frappa. Toujours rien.
Il se dirigea donc vers la porte de droite. Elle portait les initiales S.S. Et bien frappons ! Mais encore une fois personne ne répondit. Les propriétaires sont peut-être absents ! Tentons notre chance à la dernière porte !
Il soupira. Comme la précédente, la porte portait des initiales. Cette fois c'était H.P. Ce n'est peut-être pas la même maison ou les mêmes propriétaires après tout. Il leva la main, mais avant que son poing n'ait le temps de la toucher, la porte s'ouvrit.
Surprit, il regarda à droite et à gauche, mais il n'y avait personne. Il appela : « Y'a quelqu'un ? » Aucune réponse.
Il entra donc. Il lui fallut un peu de temps pour s'habituer à la différence de luminosité entre l'extérieur ensoleillé et cette pénombre. L'entrée formait une sorte de porche et s'ouvrait sur trois autres salles. Un tableau représentant un personnage imposant gardait chacune des portes d'un œil peu amène.
Cette première pièce était suffisamment grande pour faire office de salle d'attente. Voir de salle de jugement, pensa-t-il en jetant un coup d'œil vers les portraits.
Ne voyant personne, il décida de tenter sa chance dans une autre salle. La porte n'avait pas pu s'ouvrir toute seule. Il y avait donc quelqu'un dans cette maison et il était bien décidé à rencontrer le propriétaire d'une si étrange demeure.
Il jeta un coup d'œil vers le gardien. Le personnage d'aspect sévère avait les bras croisés sur sa poitrine. Son costume rouge était celui d'un bourgeois du XIIème siècle. La barbe noire lui donnait un air aussi féroce que le chien qui était à ses pieds.
Lorsqu'il s'approcha, le tableau bougea légèrement et la porte s'ouvrit d'elle-même sur un vaste salon. Il avançait avec précaution dans cette nouvelle salle lorsque la porte se referma brusquement derrière lui dans un claquement sonore avant de disparaître complètement... Mais qu'est-ce que cette…
Pris par surprise, il chercha l'ouverture qui lui avait permis d'entrer, en vain.
Se retournant, il examina la salle dans laquelle il se trouvait enfermé.
Un canapé se trouvait au milieu de la pièce, devant un meuble supportant une petite télé, un magnétoscope vieillot, un lecteur de dvd neuf, une console de jeu ? Et une platine ou une stéréo. Il regarda les disques, il n'y avait là que de la musique classique : Bach, Hendel, Strauss, Beethoven, Mozart…Mais apparemment rien de moderne ou du moins de récent.
Les étagères habillaient chaque mur de livres, d'objets divers et de bibelots tandis que la cheminée contrastait par son ancienneté avec le reste de la pièce.
Des lunettes rondes semblaient attendre leur propriétaire sur le manteau de la cheminée. Isolée, elles contribuaient à donner un air abandonné et misérable à cette pièce qui semblait dénuée de vie.
Pas de photos, pas de tableaux, comme si la salle était en état de veille, comme si elle dormait, attendait son réveil… Comme s'il existait une autre salle semblable à celle-ci.
Mais sur la table, se trouvait une tasse brûlante… Il s'approcha pour regarder de quoi il s'agissait : du café.
Ca ne pouvait pas être pour lui, si ? Il n'avait vu personne.
Il fit le tour de la pièce, cherchant une sortie, une âme vivante à qui serait destiné ce café mais une force invisible le contraignit à rester dans le salon.
Il retourna vers la table sur laquelle se trouvait un mot :
Un café pour un voyageur longtemps perdu.
Qu'est-ce que cela signifie ? Mais où était-il tombé ? Dans une maison ensorcelée, il en était maintenant de plus en plus convaincu
Et bien, autant mettre le temps que je suis obligé de passer ici à profit, non ?
Il se dirigea vers une étagère et s'intéressa aux livres : classés par périodes, par genre…. Il y avait de tout, dans toutes les langues. Harry était on ne peut plus impressionné. Il prit un livre et s'installa confortablement en attendant que le maître des lieux revienne et lui explique tous ces phénomènes étranges.
Mais au lieu de se sentir coupable ou terrifié d'être entré dans une propriété privée sans permission, Harry était étrangement serein, comme s'il avait hâte de rencontrer ce H.P ou ce S.S.
Hpsshpss
Severus avait été convié à la dernière réunion du personnel avant les congés d'été. Ils devaient rendre leurs dernières copies et décider qui pouvait passer et qui devait redoubler. Ce n'était jamais facile, parce que les directeurs de maison se battaient toujours pour leurs élèves.
C'est donc à l'issu d'une longue et fastidieuse après-midi que Severus sentit quelque chose changer dans sa magie, une légère sensation qu'il n'avait pas ressentie depuis des années, depuis cinq ans, depuis que Harry avait disparu.
Ils avaient décidé, au début de leur vie commune, de jeter un sort sur la maison pour prévenir l'autre de son retour. Il ne pouvait pas le croire, c'était impossible. Il essaya de vérifier le lien psychique, mais celui-ci était aussi ténu que ces derniers temps, bien qu'il ressentit une légère excitation qui pouvait tout aussi bien provenir de son propre espoir. Espoir ? Le mot était un peu fort. Comment réagirait-il maintenant si son mari revenait ? Il avait peur de se mettre en colère et de le rejeter.
Il avait peur de sa propre réaction.
« Severus ? »
« Severus ? » Quelqu'un lui toucha le bras.
« Oui ? Quoi ? » Dit-il sur un ton rogue et agressif.
Minerva pinça les lèvres. « Je vous demandais simplement si tout allait bien. Vous êtes soudain devenu tout blanc. »
« J'ai une affaire urgente à régler et vous écouter faire l'éloge de vos chérubins m'ennuient au plus haut point. Ce ne sont que des gamins, de petits imbéciles gâtés qui ne savent pas faire la différence entre une potion curative et un poison, alors si vous voulez bien m'excusez, je vous laisse régler ces trivialités. » Sur ce, il se leva sans leur adresser d'autre regard. Il fit tourbillonner sa cape et sortit à grandes enjambées pour retourner à ses cachots. De là, il pourrait utiliser la cheminée et voir si Harry était revenu.
Hpsshpss
Un homme aux cheveux noirs et au nez crochu entra dans la pièce vêtu d'une robe sombre. Harry venait de terminer son café et lisait tranquillement. Il fut surpris par cette prompte arrivée et se mit rapidement debout. Quand il croisa le regard de l'homme, sa tête vacilla. Il entendait des voix, des cris, un professeur criant contre un élève, des paroles cruelles, réconfortantes, des mots d'amour, des disputes, de la tendresse, de la musique, douce et mélancolique, qui parlait avec le cœur, bien plus éloquente que les mots ne l'étaient.
Leur regard ne s'était pas quittés, mais ni l'un ni l'autre n'eut le temps de dire quoi que ce soit. Harry tomba dans les pommes.
Hpsshpss
Quand il se réveilla, il était dans une chambre bleue. Au moins elle n'est pas verte, pensa Harry. Sans savoir pourquoi, le vert exerçait sur lui une étrange fascination. Couleur de la pourriture et de la mort, elle semblait, dans son cas, liée à la douleur et à une crainte qu'il ne parvenait pas à formuler. Il avait le sentiment qu'elle le poursuivait et conduisait sa destinée, l'emportant dans les eaux calmes et profondes de la paix et de la sérénité. Elle revêtait pour lui une valeur symbolique qu'il parvenait difficilement à identifier.
Le bleu et le violet lui apportaient l'apaisement. La course du temps oubliée, elles lui laissaient entrevoir l'éternité du moment.
Confus, il détacha son regard du mur, s'assit et fit le tour de la salle des yeux, cherchant à comprendre ce qui s'était passé et où il était.
Son estomac se contracta. Lorsqu'il avait plongé dans les yeux si noirs de cet homme un monde s'était entrouvert sous lui. Il ne parvenait pas à se souvenir de ce qu'il avait vu. Les images se cristallisaient et se brisaient sans qu'il ne puisse en attraper une seule.
Sa tête était douloureuse.
Il inspira et ferma les yeux, vidant son esprit de toutes pensées. Il allait revenir.
Il rouvrit les yeux, se sentant déjà beaucoup plus calme. Le bruit des pas, celui du froissement de tissu lui firent accélérer son pouls.
Il ouvrit la porte, faisant entrer le soleil dans la pièce ombragée, soleil qui le réduisait à l'état d'une silhouette informe et sombre.
Il fit quelques pas et ils se retrouvèrent face à face.
La gorge sèche, la voix rauque, Harry prit la parole et dit la première chose qui traversa son esprit. « Je vous prie d'excuser mon impolitesse. Je n'avais aucun droit d'entrer chez vous de la sorte. »
Ses yeux noirs se durcirent et Harry le vit serrer les dents sous l'effet d'une colère contenue. Une veine pulsait au coin de ses yeux, seule preuve de sa nervosité.
Il aurait voulu pouvoir effacer sa tension sans comprendre quels sentiments l'animaient. Cet homme n'était qu'un inconnu pour lui.
Il chassa ces pensées incohérentes et essaya de se reprendre. L'homme n'avait toujours pas ouvert la bouche et continuait à le dévisager.
Il esquissa un sourire qui s'estompa rapidement. Sa présence le déstabilisait. « Nous nous connaissons, n'est-ce pas ? » Sa question ne lui était pas vraiment destinée et il la regretta aussitôt. Il ne lui laissa pas le temps de réagir. « J'ose espérer que vous accepterez mes plus plates excuses. J'entre chez vous sans permission, je m'installe dans votre salon, je tombe dans les pommes et maintenant je vous dévisage ouvertement. Mon comportement est des plus impolis, croyez-moi, ce n'est pas dans mes habitudes. »
Il se leva, s'approcha de lui et lui tendit la main. « Je m'appelle Harry Evans. Je crois que nous nous sommes rencontrés brièvement dans un café. »
L'homme étrécit ses yeux qui se réduisirent à deux lignes noires. Les émotions qui l'étreignaient devaient être violentes. Il serra les poings. « Ne joue pas ce petit jeu avec moi, Harry. »
Harry baissa la main que l'homme avait négligée, « Pardon ? »
Ses prunelles insondables le scrutaient avec intensité, comme s'il essayait de lire dans son esprit. La migraine qu'il avait déjà ressentie en sa présence le relança et il détourna les yeux, incapable de soutenir son regard.
Les mots qui sortirent des lèvres de l'homme étaient susurrés, son ton méprisant. « Vous dites vous appeler Harry Evans ? »
Le mépris qu'il affichait aurait pu attiser sa colère, mais Harry ne sentit qu'un immense courant d'air froid le parcourir. Cet homme souffrait.
« Oui.»
Son regard d'acier reflétait la démence de son âme. La douleur l'avait rongé. Il étouffa un sanglot. Il aurait voulu l'atteindre et calmer son angoisse. « Le nom de Potter ne vous dit rien ? » La colère ou était-ce le chagrin ? faisait vibrer sa voix.
« Potter ? » Harry réfléchit, mais son mal de tête s'accentuait et la douleur de son interlocuteur était insupportable. Il la ressentait comme si elle était sienne. Une petite voix sarcastique lui murmurait que ce sont les gens qui n'ont pas l'habitude de réfléchir qui ont mal à la tête. Il répondit donc en grimaçant, « Non, ce nom ne me dit rien. Pourquoi ? »
L'homme continuait à le regarder avec insistance, le détaillant comme s'il était une bête curieuse et Harry se sentait maintenant vraiment mal à l'aise. « Puis-je vous demander votre nom ? »
Severus se renferma dans sa coquille, oblitérant ses sentiments à ses sens. Un mur était tombé entre eux. Il s'était retranché derrière un masque. Plus rien ne lui permettait de deviner ce qu'il pensait.
« En quoi cela vous regarde-t-il ? Et que faites-vous chez moi ? » Severus était déstabilisé. Cet homme était bel et bien Harry, il n'avait aucun doute la-dessus. La cicatrice en forme d'éclair sur le front, les yeux verts, la mince cicatrice sur la joue et ses mimiques étaient autant de preuves. C'était bien lui.
En homme précautionneux, il étudiait avec soin le comportement de ses interlocuteurs. Harry réagissait comme le jeune homme qu'il avait connu. Impétueux, téméraire et imprudent. Il l'avait soupçonné de se moquer de lui. La douleur liée à l'absence avait aiguisé sa méfiance et il s'était crée une carapace pour échapper à la douleur.
Ses yeux d'un vert lumineux qui ne le quittaient pas rouvraient les plaies qu'il avait crues cicatrisées. Sa première défense était l'attaque. La seconde résidait dans la connaissance. Si cet homme était bien son mari, il devait comprendre pourquoi il agissait comme s'il ne se connaissait pas.
Il sentait en lui un grand trouble. Ses muscles crispés et sa nuque raide lui donnaient l'image d'un petit soldat. Ses mains avaient trouvé un point d'appui : il tenait fermement le dos d'une chaise comme si elle était sa bouée de sauvetage.
« Je voulais savoir si vous louiez des chambres ? »
Il ferma les yeux et balaya de son esprit ses doutes, ses peurs et sa méfiance. Si c'était Harry, comme il le soupçonnait, il devait lui laisser une chance de revenir dans sa vie.
Maudit sois-tu Harry, pourquoi joues-tu ainsi avec moi ? « Des chambres à louer ? » Son ton se voulait froid et indifférent, il était sarcastique et mesquin.
Harry commençait à sortir de son hébétude et l'énervement menaçait de le submerger. Cet homme n'était ni civil, ni poli. L'attirance et l'empathie qu'il avait ressenties pour lui s'estompaient doucement au profit d'une colère froide qu'il ne retenait que par égard pour ses yeux qui effaçaient toutes ses belles résolutions. « Oui, des chambres à louer ! »
« Ce qui n'explique pas ce que vous faites ici ? » Peu affable, le propriétaire croisa les bras.
« Vous ne pourriez pas être un peu plus aimable ? » Harry soupira. Il avait entièrement repris ses esprits.
« Je pourrai très bien vous jeter un sort, vous clouant votre misérable bouche définitivement ! » La menace à peine voilée le fit sourire bien que la situation ne s'y prêtât guère.
« Vous ne le feriez pas ! » Sa réponse automatique lui fit lever les sourcils. « Quel drôle de commentaire ! »
L'individu sans vergogne chez qui il se trouvait soutint son regard, son expression ne révélant rien de ce qu'il pensait. Harry soupira à nouveau. En tant qu'intrus, il ne pouvait que s'expliquer. « Cette maison m'attire comme un aimant. Elle est fascinante et d'une rare beauté. Je me suis souvent demandé si elle était habitée. Je suis à la recherche d'un nouvel appartement. J'ai commencé mes investigations en venant ici. Je ne pensais pas être accueilli de la sorte. » Il fusilla du regard son interlocuteur ce qui sembla le détendre. Il crut déceler un sourire derrière son visage de marbre.
« Vous aimez donc cette maison ? » Son hôte haussa un sourcil.
« Oui, beaucoup. Elle a quelque chose de familier, comme un retour chez soi après de longues vacances -» Harry avait retrouvé son entrain. L'attitude brusque et peu amène de son interlocuteur ne le dérangeait plus. Il était ainsi, c'est tout. « Vous devez me trouver gonflé, mais je suis venu voir si je pouvais l'acheter ou au moins louer une chambre. »
L'homme semblait se détendre. Ses lèvres s'étirèrent et il sourit ouvertement. Il marmonna inintelligiblement quelque chose qui ressemblait à « Griffe en or. » Ne comprenant pas, Harry le fit répéter, « Vous avez dit quelque chose ? »
« Venez retournons au salon, nous serons plus à l'aise pour discuter ! » Faire ce genre de choses sans réfléchir lui ressemblait tellement, sue Severus dut réprimer un sourire. Sa tension s'atténuait en sa présence. Il était un baume contre sa mauvaise humeur. Harry était enfin revenu chez lui.
Il ne semblait plus savoir qui il était. Mais était-ce un mal ? Il entrevoyait déjà les choix qu'il devrait faire si tel était le cas et son estomac se noua à nouveau.
Ce n'était pas encore l'heure des choix.
« Entendu ! »
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Severus ne pouvait s'empêcher de le regarder, d'observer les changements qu'il avait déjà remarqués au Café. Harry n'était plus un jeune homme, mais un homme. Il avait abandonné ses lunettes au profit de lentilles moldues qui rendaient ses yeux plus brillants. Il décela facilement un vide en eux, une tristesse cachée qui n'avait rien à voir avec l'opacité qui les caractérisait à la fin de la guerre.
Il avait laissé pousser ses cheveux pour les dompter et c'était presque réussi. Tombant librement sur ses épaules, ils faisaient ressortir le vert de ses yeux lui donnant l'air d'un seigneur de la guerre.
Son visage était plus carré. Des cernes sous ses yeux montraient qu'il ne dormait pas suffisamment. Il avait une belle musculature, à en juger par ses biceps.
« Voulez-vous une bière ? Un jus d'orange peut-être ? »
« Je, non m -»
« Un jus d'orange, après tout vous vous êtes évanoui, il n'y a pas une demi-heure. » Il avait pensé mettre dans sa boisson trois gouttes de veritaserum pour s'assurer de ses réponses et vérifier que ce n'était pas un piège. La guerre était terminée depuis longtemps, mais il était un homme prudent.
Ils s'assirent tous les deux près de la table et Severus finit par se présenter. « Je suis Severus Snape et je suis le propriétaire de ces lieux, ou plutôt de l'aile est et d'une partie de l'aile centrale. » Il lui tendit la main que le jeune homme serra. Il sentit une petite secousse électrique qui fut suivi par un intense sentiment de bien-être. S'il devait en juger par la manière dont Harry regardait sa main, il devait lui-aussi l'avoir ressenti.
« Alors, si cette partie ne vous appartient pas, est-elle habitée? » Demanda Harry, visiblement surpris.
« Non, pas vraiment, pas depuis cinq ans. » Ses paroles véhiculaient sa douleur et il l'entendit tout comme son interlocuteur qui le dévisageait maintenant, une main sur les yeux comme pour réduire un mal de tête.
« Si vous pouviez m'aider à rencontrer le propriétaire, je pourrais peut-être le convaincre de me la louer ou de la lui acheter. Ce serait vraiment parfait ! »
Severus hésita à répondre et regarda Harry dans les yeux. Celui-ci soutint son regard, comme si de rien n'était.
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Finalement, après ce qui lui parut une éternité, Severus Snape eut un sourire en coin et lui répondit, « Mais cette aile vous appartient, monsieur Evans ! » Il insista bien sur le mot Evans, l'enveloppant d'un sarcasme mielleux.
Harry le regarda avec des yeux ronds, incapable de comprendre ce qu'il venait de lui dire, « Pardon ? Je crois que je n'ai pas compris ce que vous veniez de me dire. » Sa migraine lui jouait des tours.
« J'ai dit que cette aile vous appartient déjà ! » Il avait sur le visage une expression satisfaite, qui faisait bouillir le sang de Harry.
Severus l'empêcha de répliquer en levant une main et dit sur un ton froid et détaché qui cachait une grande douleur. « Le propriétaire de cette aile, Harry Potter, a disparu, il y a cinq ans. On lui avait assigné une mission de laquelle il n'est jamais revenu. Tout le monde le pense mort. »
« Mais pas vous ? » Lui demanda Harry avec une nuance de défi dans la voix, mais la réponse passionnée le surpris. « Non, jamais ! »
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Harry se demandait de plus en plus, si c'était possible. Cette maison, pouvait-elle être sienne ?
Cet homme ne faisait que de le surprendre depuis qu'il l'avait rencontré. On aurait dit qu'il savait sur quel bouton appuyer pour l'agacer ou pour le faire réagir. Il ressentait une… connexion avec lui qu'il ne comprenait pas.
Ses mécanismes de défense ne l'effrayaient pas. Il avait détecté en lui la même tourmente que celle dont il était actuellement la proie. Elle ne se manifestait pas de la même façon, mais c'était la même. Lui aussi se sentait perdu. Il détourna simplement le regard et soupira.
« Je ne sais pas. Il est possible que je sois cet Harry Potter. Je n'ai plus aucun souvenir de ma vie d'avant. J'ai eu un accident il y a cinq ans. Je ne connais que mon nom Harry Evans, parce que j'avais des papiers sur moi et qu'un ami était là. » Parler de son amnésie n'était jamais facile, mais il parvint à lui sourire doucement. Seule la lueur de tristesse dans ses yeux aurait pu trahir la déception qui l'avait envahie le jour où il avait compris que son passé resterait à jamais lettre morte.
Severus était une fois de plus surpris par sa force de caractère. Harry avait traversé bien des épreuves au cours de son existence et pourtant, il n'en voulait pas à la vie de l'avoir ainsi rudoyé. Il serait toujours un amoureux de la vie.
Lui-même était en colère de le voir subir autant de coups du sort. Il avait voulu le protéger des aléas de la vie, mais il avait échoué et se rendait responsable de cette nouvelle mésaventure. Mon dieu Harry, quand vas-tu enfin pouvoir jouir d'un peu de paix et de tranquillité ? Pourquoi le sort s'acharne-t-il contre toi ?
Il voulait le prendre dans ses bras, effacer de ses baisers la rudesse de sa vie et rendre à ses yeux l'éclat de la joie.
L'antagonisme qu'il avait ressenti à son égard avait disparu. Le ressentiment et la rancœur d'avoir été abandonné laissèrent naturellement place à l'inquiétude.
Il le regarda longuement, et lui dit gentiment, « Est-ce que je peux demander à une amie de venir vous voir. Elle est médecin, un très bon médecin et je suis certain qu'elle pourra vous venir en aide. »
« J'ai déjà vu de nombreux médecins et ils m'ont tous dit d'être patient. Ma mémoire reviendra d'elle-même. Je ne dois pas la brusquer. » C'était les paroles d'une personne qui a peur de la déception et Severus le comprit, mais prit une expression déterminée. « Ecoutez, vous ne perdez rien à la voir et ainsi nous saurons si vous êtes vraiment Harry Potter, puisqu'elle était son médecin. Et elle pourra soigner cette migraine. Vous avez un peu de temps ? »
« Vous savez ? » Harry ne pouvait pas détacher son regard de cet homme. Ses yeux… il y avait quelque chose dans ses yeux de familier… encore une fois, il avait l'impression d'être chez lui… Mais cette douleur… Pourtant les yeux caverneux étaient reposants. Plus il les contemplait, plus il voulait s'y réfugier et oublier le reste. Alors pourquoi son mal de tête persistait-il ?
« Ne bougez pas, je reviens. Et n'hésitez pas à prendre des gâteaux ou du jus d'orange si vous le désirez. Dobby sera heureux de se sentir utile. » Severus se leva et passa dans une autre salle. Apparemment la porte avait réapparu. Et même plus que La porte puisqu'il y en avait maintenant trois.
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Severus se rendit dans l'aile centrale qui était connectée au réseau de cheminées. Il prit un peu de poudre et la lança dans la cheminée, en criant, « Manoir Malfoy ! » Il passa ensuite sa tête dedans.
« Severus ! » Le salua gaiement Drago Malfoy, « Que me vaut cet honneur ? Il y a longtemps qu'on ne t'avait vu ici ! »
« Drago, je suis venu chercher ta femme, est-ce qu'elle est là ? » Le sérieux de Severus alerta Drago.
« Que se passe-t-il ? Est-ce grave ? Un problème au château ? »
Severus fit claquer sa langue d'impatience. « Non, non, ne t'inquiète pas. Je vais vous expliquer. Est-ce que vous pouvez venir tous les deux chez moi, maintenant. Dites simplement 'Le Refuge' »
Drago était curieux. Il ne l'avait pas vu ainsi depuis très longtemps. L'homme d'habitude froid et sarcastique avait l'air perturbé, « Oui, nous arrivons. Je vais chercher Ginny. »
« Merci Drago. » Il allait partir quand il le rappela. « Oh, et Drago, peux-tu demander à ta femme de prendre son matériel médical ? »
Drago acquiesça et partit.
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Severus faisait les cents pas dans le salon. Mais que faisaient-ils donc ? Harry allait certainement commencer à trouver le temps long. Il commençait à perdre patience lorsqu'une jeune femme aux cheveux roux sortit soudain de la cheminée, suivit de près par un jeune homme blond râleur, « J'ai toujours détesté les cheminées ! Regarde dans quel état je suis maintenant ! » Il leva les yeux et croisa ceux de Severus. « Nous voilà, comme promis ! »
« Et bien ce n'est pas trop tôt. Je vous attends depuis presque vingt minutes. Pourquoi avez-vous été aussi longs ? » Quand il les vit rougir, il préféra ne pas savoir. « Laissez tomber. Je préfère me passer des détails. » Son ton cinglant les surprit.
« Que se passe-t-il Severus ? » Lui demanda Ginny inquiète, « Es-tu malade ? »
« Non, je vais très bien. J'ai – reçu une visite à laquelle je ne m'attendais pas. » Son hésitation les interpella. Severus Snape n'était jamais incertain.
« Nous te suivons. » Ginny étudia son visage. Il portait son masque d'indifférence, mais il y avait quelque chose de différent. Il paraissait agité, comme en proie à un démon. Il évitait de les regarder et il serrait un poing. Elle était persuadée qu'il ne s'en était pas rendu compte.
Ginny, comme Drago s'attardaient sur tout ce sur quoi se posait leur regard. Ils n'étaient jamais venus dans cette maison. Le décor était chaleureux et instinctivement, ils s'y sentirent bien. Elle ne ressemblait guère au tempérament froid et dépressif de leur ami. Elle était le reflet du bonheur.
Drago fixait le dos de Severus. Son attitude le désarçonna. Pourquoi faire tant de mystère ?
N'étant pas homme à s'inquiéter pour rien, il haussa les épaules et le suivit.
« Vous devez quand même savoir quelque chose. » Dit-il comme s'il marchait sur des œufs. « Je pense que mon hôte est Harry Potter et qu'il a perdu la mémoire. » Il s'était arrêté devant une porte dont il tenait la poignée.
« Harry ? » Ginny eut un sursaut de surprise.
« Oui, Harry. » Il acquiesça sans jamais se retourner. Son ton dur égratigna leurs oreilles.
« Pourquoi serait-il venu ici, Severus ? Une idée » Drago avait toujours soupçonné l'existence d'un lien entre ses deux amis. Il souriait d'un air satisfait tandis que Severus se raidissait.
« Les questions seront pour une autre fois, Monsieur Malfoy. Pour l'instant, nous avons plus important à faire. » Severus reprit une attitude hautaine et froide, refusant de leur laisser entrevoir ses émotions.
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« Monsieur Evans, laissez-moi vous présenter Ginny Weasley et Drago Malfoy. » Ginny regarda Severus avec des yeux noirs. « Ginny Malfoy! » Elle était persuadée qu'il l'avait fait exprès.
Harry serra les mains des nouvelles personnes. « Bonjours, je suis Harry Evans. J'espère ne pas trop vous déranger. Je n'avais pas compris que vous veniez ce soir. Sinon j'aurais insisté pour repasser plus tard. »
« Ne vous inquiétez pas, vous ne nous dérangez nullement. Severus m'a parlé de votre problème de mémoire, est-ce que je peux vous ausculter ? » Ginny observait l'homme devant elle, n'osant croire qu'il s'agissait de son ami. Ses yeux verts, si rares, étaient indéniablement les siens.
Elle le dévisagea des pieds à la tête, faisant fi du malaise qu'elle pouvait provoquer à son futur patient. Elle aurait voulu le prendre dans ses bras, mais l'incertitude qu'elle lisait dans son regard l'arrêta.
« Je suppose que si vous vous êtes déplacée c'est pour ça. Ce serait très impoli de ma part de vous dire non maintenant. Allons-y. » Il était évident qu'il n'aimait pas les médecins et sa réticence la mit mal à l'aise. Elle ne voulait pas le forcer à subir un examen s'il ne le souhaitait pas.
« Vous pouvez aller dans la chambre à l'étage ! » Drago suivait tous les mouvements de Severus et ne perdit pas son regard préoccupé lorsqu'il leur fit cette proposition.
« Allez-y. Je vous rejoins. Je voudrais dire deux mots à Severus et à mon mari. »
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Harry les regarda d'un air curieux. Il avait l'impression qu'on lui cachait quelque chose. Il n'avait pas accepté cet examen médical de gaieté de cœur. Il avait toujours détesté les hôpitaux et les médecins. Heureusement que cette jeune personne avait l'air…. Il se rendit alors compte que son nom et sa physionomie ne lui étaient pas inconnus, pas plus que ceux de ce Drago Malfoy. Ils les avaient déjà vus. Il les avait même peints. Ils avaient certes vieilli, mais c'était eux. Son mal de tête devenait insoutenable.
Il monta à l'étage et s'allongea sur le lit en fermant les yeux. La lumière s'était alliée à sa migraine pour amplifier sa douleur.
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Drago se tourna vers Severus, « C'est lui, il n'y a aucun doute. »
« C'est ce que je pense aussi Monsieur Malfoy mais j'attends confirmation des examens. »
« Severus, pourquoi Harry est-il venu ici ? »
« Comment voudriez-vous que je sache pourquoi ce gamin impudent serait venu chez moi ? » La colère de Severus était palpable. Ses émotions étaient à fleur de peau.
« Non, Severus. Cette fois-ci je ne te laisserai pas te cacher derrière cette façade. Pourquoi personne n'a-t-il jamais entendu parler de cette maison ? Est-ce là que tu te caches pendant les vacances scolaires ? » Ginny refusait de lui laisser la moindre échappatoire. Elle se rendait compte que son ami avait des informations concernant Harry qu'il n'avait jamais partagées avec personne et qui aurait peut-être pu les aider à le retrouver.
« Ginny, je t'en prie, calme-toi ! » Essaya de l'apaiser Drago ce qui lui valut un regard mauvais.
« Je vais voir Harry, mais si c'est bien lui, prépare-toi à répondre à pas mal de questions, Severus ! »
Et elle tourna les talons.
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« Ta femme a décidément mauvais caractère, Drago ! Elle s'emporte bien vite ! » Severus s'était raidi. Il était familier des attaques de la jeune femme. Elle était franche et disait toujours ce qu'elle pensait. Il était pourtant blessé par sa réaction. Il n'avait eu aucunement l'intention de blesser qui que ce soit.
« Je crois que cette fois, elle a raison. Tu es bizarre depuis la disparition de Potter. Et elle comme moi savons que vous étiez plus proches que vous ne le laissiez paraître. Après tout, nous avons fait la même guerre et nous sommes passés par les mêmes épreuves ! »
« Drago… » Il était fatigué, si fatigué. Harry. Il ferma les yeux un instant.
« Non, écoute-moi. Nous nous sommes, Ginny et moi, mariés secrètement. Peu de personnes sont au courant. Je crois et j'ai toujours cru qu'il y avait quelque chose entre toi et la célébrité du monde sorcier. Vous avez peut-être voulu le garder secret, mais si c'est bien Harry qui est là, je crois qu'il va avoir besoin de notre soutien à tous. Prépare-toi donc à nous raconter cette histoire ! »
« Si c'est Harry, je vous raconterai. Allez viens, tu boiras bien un café en attendant que ta femme ait ausculté mon invité et qu'elle nous dise ce qu'elle a trouvé. » Severus n'avait plus la force de se battre. La carapace qu'il s'était forgée s'effritait. Cet homme avait le don de chambouler sa vie. Il retint le rire nerveux qu'il sentait dans sa gorge.
« Un simple café ? Tu n'aurais rien de plus fort ? »
Les lèvres de Severus s'étirèrent dans l'ébauche d'un sourire. « Je croyais que tu n'avais pas le droit de boire d'alcool. Ordre de ta femme bien aimée ? »
Drago grimaça, « Oh tu sais, quand le chat n'est pas là… »
Hpsshss
En montant, Ginny trouva Harry allongé sur le lit, un bras sur les yeux. D'un coup de baguette, elle diminua la lumière de la pièce, la laissant dans la pénombre. Elle s'approcha de son ami et posa sa main sur son bras.
« Est-ce que t-vous allez bien ? » Elle vit tout de suite qu'il avait les traits tirés. Il ouvrit les yeux avec difficulté.
« Ne vous inquiétez pas. Les médecins disent que c'est lié à mon amnésie. Raison pour laquelle, je ne dois pas forcer mon esprit à se souvenir. Ca va passer d'ici quelques minutes. » Il ébaucha un sourire qui ressemblait davantage à une grimace qu'à un sourire. Elle était étrangement intimidée. Harry avait vieilli. Il avait mûri. Elle cherchait à voir l'enfant alors qu'elle avait devant elle un adulte.
De la mallette qu'elle avait emmenée, elle sortit une petite fiole qui contenait un liquide violet et le lui tendit. Il prit la fiole et la fixa avec un mélange de méfiance et de curiosité. « Buvez, ça devrait vous soulager rapidement. Je pourrais ensuite procéder à l'examen, si vous êtes d'accord. »
« Je n'ai jamais rien vu de semblable. » Murmura-t-il de sa voix grave. Il vida le contenu et grimaça de dégoût. Elle sourit tristement. Harry avait toujours eu cette réaction face aux potions. Presque aussitôt, il se détendit.
« C'est efficace. Il faudra que vous me donniez la recette de cette potion magique. » Son teint mate, ses cheveux sombres et son menton mal rasé faisaient ressortir la luminosité de ses yeux.
Elle posa sa main sur ses tempes et ferma les yeux, cherchant à sonder son esprit. Harry ne sentirait rien, normalement.
Elle chercha à visualiser son aura magique, cherchant une défaillance quelconque. Elle fut surprise de sa faible luminosité. Sa magie semblait avoir disparu et elle sentit une autre présence en lui.
Ebranlée, elle s'éloigna de son patient qui suivait ses moindres mouvements. « Ce n'est pas possible, » Murmura-t-elle.
Elle sortit sa baguette et lança le sort qu'elle avait déjà jeté sur ce même homme plus de cinq ans auparavant. Quelques jours avant sa disparition. Les symptômes étaient exactement les mêmes. Rien n'avait changé. Sauf…
Elle referma les yeux et se concentra sur son ventre. La magie de Harry formait une aura de protection au niveau de son abdomen. Techniquement il n'était qu'un moldu : il avait enfermé sa magie en lui-même, créant une barrière inébranlable pour arrêter le temps, suspendre l'évolution de ce qui grandissait en lui et le protéger.
Elle se concentra pour découvrir la raison de ce trouble, ce qui avait provoqué ce vacillement. Elle posa à nouveau ses mains sur sa tête, l'obligeant à fermer les yeux. Il y avait effectivement une rupture de son énergie magique au niveau de son cerveau. Elle murmura une formule, mais rien ne se produisit.
Elle allait se retirer quand elle vit quelque chose d'inhabituel, c'était une petite boule grisâtre qui semblait obstruer une petite partie de son esprit. Il était facile de comprendre pourquoi Harry avait aussi mal à la tête chaque fois qu'il essayait de se rappeler son passé. Elle se concentra sur la tache, posa sa main à plat à l'emplacement de la boule et récita une formule. Il y eut un vacillement dans sa magie et Harry fut libéré. Elle sentit la fluidité revenir dans son esprit et le peu de magie qu'il pouvait utiliser s'écoula plus naturellement
Quand elle rouvrit les yeux, elle se sentait épuisée. S'asseyant à côté de Harry, elle jeta un dernier sort qui entoura son ami d'une aura bleue. Lui, continuait à s'attacher à ses moindres mouvements, mais il ne bougea pas, lui laissant faire son métier.
« Vous êtes une bien étrange femme. »
Elle rit de bon cœur. « Je veux bien vous croire. » Elle hésitait sur la marche à suivre. « Je -» Elle inspira profondément, « Vous êtes bien Harry Potter. »
Il acquiesça. La réponse ne l'avait pas surpris. « Est-ce que vous- pourrait-on se tutoyer ? Ca me fait vraiment un drôle d'effet de vouvoyer un ami d'enfance. »
Ses traits se détendirent. « Bien sûr. Vous- pardon- tu t'appelles Ginny Malfoy Weasley, c'est ça ? »
Elle acquiesça. « Tu as cinq frères tous plus âgés que toi. Vous êtes tous roux. Bill, Charlie, les jumeaux Fred et Georges et Ron, c'est ça ? »
« Tu t'en souviens ? »
Il lui sourit tristement. « Non. Vous faites juste partie de ma galerie de portraits. Je vous ai tous nommés. Toi, tu es la petite Ginny. Tu es médecin. Gentille, douce et attentionnée, tu n'hésites pas à venir en aide aux autres. Au milieu des flammes, au milieu de la douleur, tu n'hésites pas à soigner les plus démunis malgré la souffrance qui te consume le cœur. » Il leva les yeux vers elle d'un air contrit.
Elle posa sa main sur son menton hirsute et dit doucement, « Non, tu as raison. Il – Tu as toujours su lire dans le cœur des autres, Harry Potter. » Elle secoua la tête et éloigna sa main, « Que te rappelles-tu d'autre ? »
« Je ne sais pas. Tout est si confus. Jusqu'à aujourd'hui, je croyais que vous-tu étais un personnage issu de mon imagination et te voilà. » Dit-il doucement. Il passa une main dans ses cheveux, leur redonnant cet aspect sauvage dont elle se souvenait. « Ce que je dessine n'a souvent aucun sens. Ca ne correspond pas à notre vie. Ils montrent une vie qui ne peut-être. La guerre, la douleur, la souffrance en sont les thèmes dominants. Et si ma vie se résume à ça, alors je préfère ne pas m'en souvenir. » Son regard était dur, tranchant. On sentait que la tragédie qu'il avait vécue conservait une place importante dans son cœur. Il avait refoulé ces sentiments qui s'exprimaient dans ses peintures.
La longue chevelure rousse de Ginny tombait en cascade sur ses épaules renforçant les ombres qu'il voyait dans son regard. « Ta vie n'a pas toujours été facile, mais j'ose espérer que tu as été heureux avec nous. »
Elle lui sourit tristement, « En tant que médecin, je ne peux que faire le même diagnostic que les autres. Ne force pas ta mémoire. Tes souvenirs reviendront d'eux-mêmes. Ils ont commencé à réapparaître et maintenant que tu es revenu parmi nous, ils vont revenir plus facilement, tu verras. »
Il acquiesça simplement d'un air incertain. Elle était repassée en mode médecin. C'était plus facile.
« Je ne peux pas te dire grand-chose, ça risquerait de créer un blocage. Quant à la cause. On a essayé d'effacer tes souvenirs. Le sort n'a pas aussi bien fonctionné qu'il aurait dû. A mon avis, tu as dû chercher à protéger ton – à te protéger et en le faisant, tu as perdu ta magie et une partie de tes souvenirs. Tes souvenirs réveilleront ta magie. »
Il écarquilla les yeux, « Pardon ? Tu parles de magie ? » Sa voix grave avait une note de raillerie qu'elle n'était pas sûre d'apprécier. Elle pinça les lèvres et poursuivit.
« Tu es un sorcier Harry. Un puissant sorcier. Du moins, tu l'étais avant ton amnésie. »
Il se leva et passa ses mains dans ses cheveux dans une geste nerveux qu'elle l'avait vu faire des centaines de fois dans le passé. « Vous plaisantez, n'est-ce pas ? » Elle secoua lentement la tête, un air désolé « De la magie ? » Il rit nerveusement. « Et vous vouliez me laisser le découvrir ? » Elle se leva et voulut poser une main sur son bras mais il se dégagea rapidement. « La magie n'existe pas. Ce ne sont que des fariboles pour les enfants. »
Elle sortit sa baguette et fit léviter la lampe de chevet. »
« Un trucage ? » Il s'approcha et chercha des fils.
« Tu n'es pas obligé de me croire pour l'instant. Je te l'ai dit, tes souvenirs reviendront d'eux-mêmes. Il me semblait qu'il était important que tu le saches. »
Son air suspicieux la blessa. Elle comprenait, mais il ne lui faisait plus confiance. « Tu veux peut-être rester un peu seul ? Je descends parler à Severus et à Drago. »
« Ginny ? »
Elle se retourna vers lui.
« Merci. » Dans ses yeux verts, elle retrouvait le petit garçon qu'elle avait connu.
Il s'effondra dans un fauteuil et passa sa main dans le col de sa chemise, agrippant un petit bijou. Elle le laissa.
Hpsshpss
Deux paires d'yeux étaient posés sur elle alors qu'elle descendait les marches qui menaient au salon. Elle s'assit à la table et se servit une tasse de café. Elle avait besoin d'un remontant.
Elle ancra ses yeux dans ceux de Severus et lui dit, « Je vais avoir besoin de réponses Severus. Tout est beaucoup trop confus pour moi. »
« Comment va-t-il ? »
« Aussi bien que les circonstances l'exigent. » Elle soupira. « On lui a délibérément effacé la mémoire et on a fait en sorte qu'il ne puisse pas se souvenir. Il avait une sorte de caillou qui provoquait des maux de tête à chaque fois qu'il se rappelait quelque chose. Celui qui a fait ça est doué. Il a fait en sorte de ne pas laisser d'indices. Il n'y a aucune trace de sa magie. »
« Il est bien amnésique alors. » Murmura Severus. Il ne s'en était pas aperçu, mais sa main tremblait. « Pourra-t-il un jour retrouver la mémoire ? » Ginny posa gentiment une main sur la sienne et récolta un regard venimeux mais elle ne la bougea pas. « Il faut que je te pose une question. Réponds-moi franchement. »
Severus était déstabilisé. Il n'aimait pas se sentir aussi vulnérable. « Je vais essayer. » Il serra les dents. Ginny lâcha sa main et le regarda durement. Du coin de l'œil, elle aperçut son mari plisser les yeux. Elle sentit son regard sur elle, mais elle ne bougea pas. « As-tu eu une relation sexuelle avec Harry avant son départ et sa disparition ? » Severus se referma. Elle sentit immédiatement un changement dans son comportement. Elle insista. « C'est important Severus. »
Il la scruta un long moment. Drago croisa les bras sur sa poitrine et observa la scène avec une vive attention. Il en avait longuement discuté avec sa femme et ils étaient d'accord : ils n'avaient aucune raison de se mêler de leurs affaires. Alors pourquoi insistait-elle autant aujourd'hui?
« Oui. » Finit par avouer Severus à contre-cœur, livide.
Les yeux de Ginny s'adoucirent et tout en continuant à le regarder dans les yeux, elle lui dit doucement, « Severus, tu dois savoir qu'Harry attend un enfant. Ton enfant ! »
Il se leva brusquement, faisant tomber la chaise sur laquelle il était assis. « Ce n'est pas possible. Nous -»
Elle poursuivit calmement, « Il y a cinq ans, quelques jours avant la disparition de Harry, j'ai été appelée aux Etats-Unis pour l'ausculter. Comme tu le sais, il était en mission. Personne ne devait savoir ni où il était ni ce qu'il faisait, mais il n'allait pas bien. Il avait à nouveau des problèmes avec sa magie. Elle n'était pas stable. Le Ministère avait craint qu'il n'ait fait une rechute après -» Elle s'arrêta. Une boule dans la gorge l'empêchait de parler. Ca avait été une période difficile.
Drago prit la main de sa femme et déposa un baiser sur sa paume. Elle se retourna vers lui et rencontra ses yeux gris. Tendre, sûrs d'eux, réconfortants. Elle inspira et continua.
« Severus, Harry attendait déjà un enfant. Je n'ai pas été surprise quand il a disparu parce qu'il avait l'intention d'en parler immédiatement à l'autre père. Au début j'ai pensé que c'était toi mais comme il s'était évaporé, j'ai pensé qu'il avait rencontré quelqu'un d'autre- Je suis désolée. »
Severus ne semblait plus l'écouter. Il lui tournait le dos, se servant un verre de cognac. Ses doigts étaient crispés sur le verre.
« Je sais que les grossesses mâles sont extrêmement rares. Les deux sorciers doivent être très puissants et ils doivent tous les deux le désirer. Je sais que voir Eva et David grandir, vous avez donné envie de fonder une famille. »
Elle s'approcha de son ami et posa une main sur son épaule. « Severus -»
« Il voulait une famille. » Murmura-t-il les yeux dans le vide, plus sombres encore qu'à l'ordinaire, « Mais pour lui, vous étiez sa famille. Il n'attendait qu'une chose, que vous ayez vos enfants, qu'Eva ait une petite sœur -»
Il la regarda dans les yeux et sourit, « Il adorait ces enfants. »
« Ils vous aiment toujours, Severus. Il est vrai qu'Eva ne se souvient plus de Harry. Son visage s'est effacé et » Elle rit légèrement, « Elle n'est absolument pas physionomiste. Je crains Severus qu'elle ne soit jamais douée en potions. Elle ne reconnaîtra pas les ingrédients. »
« Ne le dis à personne, mais je sais de source sûre que David lui a déjà appris tout ce qu'elle doit savoir. » La légèreté de son ton contrastait dramatiquement avec son visage sévère.
Elle reprit un visage sérieux, « Severus, sois-en certain, Harry t'aime. Qu'il ait gardé cette vie en lui toutes ces années, qu'il se soit battu pour la protéger le prouve. Il va avoir besoin de ton soutien. Revenir dans le monde sorcier ne sera pas facile. »
Il ferma les yeux, « Que sait-il ? »
« Pas grand-chose. Il n'a presque plus de magie. Je pense qu'il s'en sert comme protection pour l'enfant qu'il porte. Je pense que sa magie reviendra avec ses souvenirs.
« Il dessine beaucoup. Apparemment, il a peint des galeries de personnages nous représentant. C'est un bon point. Ca veut dire qu'il n'a pas tout oublié. »
« Saint Potter sachant tenir un crayon ? On en apprend tous les jours. » La remarque de Drago arriva à point nommé pour détendre l'atmosphère.
Severus le regarda de son air le plus mauvais.. « Il savait plus que dessiner. Je vous montrerai un jour. »
« Alors c'est ici que tu te caches quand tout le monde te cherche ? »
Il ne daigna pas répondre, mais son regard aurait rendu muet tout autre. « Allons Severus, ne fais pas ton monsieur Mystère. Maintenant que nous sommes là, nous voulons tout savoir. »
« Monsieur Malfoy, je ne vous savais pas aussi amateur de ragots. » Dit-il séchement. Il se tourna vers la jeune fille qui ricanait de la pique lancée à son mari, « Autre chose ? »
« Ah oui, je lui ai parlé de la magie, il n'a pas très bien réagi. Il lui faudra un peu de temps pour se faire à cette idée. N'insiste pas trop sur ce thème. Je ne lui ai pas non plus parlé de son enfant. Il ne comprendrait pas. Laisse-lui du temps. »
« Un enfant ! » Murmura Severus.
« Ne le cajole pas trop Severus ! Il reste Le Héros de notre monde !» Railla Drago.
Les lèvres de Severus se resserrèrent en une fine ligne. « C'est un impudent Gryffondor sans cervelle et cette affaire le prouve une fois de plus. » Grogna-t-il. « Je te rappelle par ailleurs que tu 'cajolais' ta petite femme quand elle était enceinte d'Hortense. »
« Ne m'en parle pas, » intervint la principale intéressée, « Je ne pouvais rien faire. Il avait peur de tout. Si je l'avais écouté je serais restée couchée pendant neuf mois, comme si j'étais malade. » Elle leva les yeux au ciel et rit. « Entre lui et David, j'étais très bien entourée. » Elle regarda l'heure. « Je crois qu'on va rentrer. Eva la garde aujourd'hui. Je pense que son frère est là aussi, mais je préfèrerais ne pas trop tarder. »
« Nous pourrons revenir maintenant que nous avons mis les pieds dans l'antre du sarcastique professeur Snape ? »
« Malfoy, je crains que tu ne vives entouré de trop de Gryffondors. » Susurra-ce dernier en plissant les yeux.
Ginny fit la bise au professeur rigide, « Nous reviendrons dans quelques jours voir comment il va. Envoie-nous de ses nouvelles régulièrement d'accord ? Pour l'instant, nous gardons l'information secrète. Il n'est pas nécessaire que le monde sorcier sache que son héros est de retour. »
Il acquiesça simplement. En une après-midi, sa carapace d'homme sans cœur, inaccessible et sarcastique s'était brisée. Il était certain que le regard de ses deux amis allait considérablement changer après aujourd'hui.
