Attention, rien ne m'appartient. Les personnages appartiennent à J.K Rowlings
Ratings : R
Correctrices : AnthaRosa et Ishtar205. N'oubliez pas de les remercier pour leur travail. Sans elles, la fic ne serait pas aussi lisible
Avertissement: Il y a dans l'histoire une référence à une grossesse mâle. Ce n'est absolument pas le sujet de l'histoire, mais on en parlera de temps à autre.
Tome 1 à 6 pris en compte
Attention, c'est un slash (relation entre deux hommes): SS/HP
Chapitre 5
« Tu te trompes! » La voix paniquée interpella Severus qui se réveilla brusquement. Le Serpentard se leva vivement, regardant autour de lui, cherchant la source de l'appel. Il n'y avait personne, mais le lien qui l'unissait à Harry était entièrement ouvert. Il ne l'avait plus ressenti dans son cœur et dans son âme de cette manière depuis qu'ils avaient été séparés.
« Non, ne fais pas ça. Je t'en prie. »
Severus se hâta dans la chambre de Harry, inquiet qu'il lui soit arrivé quelque chose.
Il trouva le Gryffondor endormi. Il se tortillait dans son lit, le drap était à terre et le t-shirt avec lequel il dormait était remonté au-dessus de sa taille, laissant voir son ventre ferme et son caleçon.
« Je sais que ce n'est pas vraiment toi. Reprends-toi. »
Severus entendait ces mots comme s'ils étaient prononcés à voix haute. Harry rêvait ou plutôt faisait un cauchemar. Il se demanda vaguement s'il n'était pas en train de se remémorer une scène de son passé. Il y avait eu tant de violence et de massacre !
Il s'assit sur le lit à côté de lui, comme il l'avait si souvent fait dans le passé et posa une main sur son front, le caressant doucement, s'attardant sur les mèches rebelles, si douces sous ses doigts et descendit jusqu'à sa joue, évitant la tentation de ses lèvres.
Harry s'était immobilisé dès qu'il avait senti sa présence. Il ne se réveilla pas malgré l'attention particulière de Severus. Mais inconsciemment, il inclina la tête pour accentuer la pression de sa main.
L'atmosphère avait changé. Il ne semblait plus prisonnier de son rêve mais au contraire conscient de la présence de l'autre homme.
« Je t'attendais. » Severus s'immobilisa. Il regarda la forme endormie qui n'avait pas ouvert les yeux.
« Harry ? » Celui-ci ne répondit pas.
Les yeux de Severus dérivèrent de ses lèvres fines à son cou. Il descendit la main vers la peau duveteuse dans une impulsion subite et s'arrêta avant d'atteindre le délice interdit. Il regrettait déjà son geste. Il s'apprêtait à faire demi-tour lorsque l'anneau que Harry portait autour de son cou attira son attention. Severus le prit dans sa main avec révérence. Il n'avait pas pensé que Harry puisse tenir sa promesse malgré son amnésie et pourtant, il avait gardé précieusement son alliance. Il savait que ce bijou contribuait à renforcer le lien qui unissait leurs cœurs. Mais Severus ne voulait pas le rendre prisonnier de ses sentiments. Harry devait avoir le choix de son avenir.
Severus reposa délicatement l'anneau et fronça les sourcils en apercevant un autre pendentif. Il paraissait beaucoup plus ancien. Il ne s'agissait que d'une sorte d'écrin doré gravé d'arcs de cercle et de courbes qui prit vie lorsqu'il le toucha. Il l'ouvrit. A l'intérieur se trouvait la photo d'une jeune femme dont les longs cheveux noirs tombaient gracieusement sur le cadre.
Il regarda longuement la photo inerte de la femme dont les yeux étaient si semblables aux siens, incertain des émotions qui le traversaient en ce moment.
D'une main tremblante, il referma le médaillon et le reposa effleurant la peau halée de celui qui fut son partenaire. Si Harry n'avait pas de souvenirs, les siens étaient à vif.
Severus enleva le pendentif qu'il portait autour du cou et le mit autour de celui de son amant. Harry voulut l'enlever mais il l'en empêcha. « Je te promets de ne pas te suivre comme je l'ai fait jusqu'à présent si tu gardes ce pendentif. Il est ancien et puissant, il saura te protéger. »
« Garde-le. »
Il avait le visage si grave, qu'Harry mit simplement ses mains autour du pendentif, « J'en prendrai soin. »
« Je sais que tu le feras. »
La gorge nouée, il voulait quitter la pièce. Il allait se lever quand la main de Harry se posa sur la sienne pour l'arrêter. « Je suis revenu aussi vite que j'ai pu. » La paume large et carrée n'était pas contraignante. C'était une douce torture. Un simple touché. Il renifla. Il était vraiment tombé bien bas.
Harry le retenait. Il avait apparemment conscience de ce qui se passait malgré ses yeux fermés et sa léthargie.
« Tu es vraiment un emmerdeur Potter. » Sa voix rauque transforma l'insulte en compliment. Les lèvres de Harry se retroussèrent en un sourire.
Severus prit sa main dans la sienne avec une grande douceur et se pencha pour déposer un léger baiser sur sa cicatrice en forme d'éclair, réprimant le désir d'embrasser son sourire.
« Je sais. » Severus sourit amèrement.
Il sentit un objet métallique contre sa paume. Autour de l'annulaire de Harry s'enroulait une bague rouge et noire qui semblait le défier tout aussi bien que l'interpeller. Curieux, Severus l'observa de plus près.
Severus posa son verre, prit le paquet et l'ouvrit avec précaution. Dans un écrin, se trouvait un pendentif en forme de Serpent. Ses yeux d'émeraudes rappelaient ceux de Harry. Le Gryffondor souffla quelques mots et le bijou se transforma pour s'adapter au cou de Severus. Les doigts de Harry défirent son col et touchèrent le pendentif et la peau. Il murmura, « Il assure la protection de l'être aimé et lie les âmes de deux personnes. Je n'ai acheté que cette moitié. Tu es libre de la garder ou de l'enlever. » Il ne le regardait pas dans les yeux, se concentrant sur le pendentif.
Severus repoussa doucement sa main et se leva. Harry ferma les yeux. Il ne supporterait pas un rejet. Pas maintenant. Le canapé s'affaissa doucement et une main se posa sur sa joue. Il leva les yeux et rencontra ceux d'onyx. Severus l'embrassa tendrement, comme pour le rassurer et lui donna le paquet qu'il avait entre les mains.
« Je voulais te l'offrir pour Noël. Comme tu le vois, il est resté dans un tiroir. » Il observa Harry ouvrir le paquet. C'était un griffon aux yeux noirs. Comme le serpent, le bijou se fixa de lui-même en pendentif.
« Le vendeur m'avait dit que son 'compagnon' avait été vendu. » Murmura Harry.
« Acceptes-tu de t'unir à moi ? »
« Je-Oui. » Harry l'embrassa, mais Severus n'approfondit pas leur baiser.
« Tu as gardé en pendentif le bijou qui lie nos cœurs et en alliance, celui qui lie nos âmes. » Murmura-t-il en touchant la bague qu'il embrassa.
Il en aurait ri si la situation ne lui avait pas paru aussi ironique et aussi triste. « Espèce de petit morveux. Tu parviens à détourner mes désirs, même quand j'agis pour ton bien. » Les yeux sombres du griffon semblaient le fixer. Severus ne s'en formalisa pas. La main de Harry se resserra autour de la sienne. « Aide-moi à revenir. »
De son autre main, Severus caressa sa joue et son front. « Je ne sais pas si retrouver tes souvenirs est une bonne idée. »
« C'est à moi de décider. »
Severus porta la main de Harry à ses lèvres et embrassa les doigts qui relâchèrent leur étreinte. Il les reposa sur le drap tandis que l'autre se refermait d'un geste machinal sur son propre pendentif : un ouroboros.
Il tourna la tête et se leva. Arrivé à la porte, il se tourna vers l'homme endormi dont l'esprit était plus puissant que le sortilège qui l'enfermait, « Je te crois plus heureux sans tes souvenirs. »
« Ne décide -» Severus coupa le lien. « Parce que je t'aime, je ferai en sorte que tu sois heureux. » Il sortit.
Hpsshpss
Harry s'était installé au Refuge depuis plus d'une semaine et il commençait à se poser des questions. Il n'avait pas vu l'ombre de Severus depuis son emménagement. Ils vivaient sous le même toit, mangeaient dans la même pièce sans jamais se croiser. Il avait l'impression que son colocataire l'évitait délibérément et ça le mettait mal à l'aise. Il ne comprenait pas pourquoi il ferait une chose pareille mais il était bien décidé à l'affronter face à face pour lui demander ses raisons.
De plus, il avait parfois l'impression d'être observé. Les tableaux paraissaient si réels que s'en était effrayant. Si on lui avait posé la question il aurait pu jurer les avoir entendu parler. Heureusement, dans ses appartements, ils étaient très peu nombreux et il se rendait rarement dans l'aile centrale. Il adorait le petit salon, mais il n'aimait pas y être seul. Il avait toujours l'impression d'attendre quelqu'un et il se doutait que cette personne était justement celle qui essayait de l'éviter – et y réussissait.
Son pouls s'accélérait sans raison ces derniers temps. Il avait des impressions de déjà-vu. Parfois il se retournait avec l'absolue certitude de savoir ce qu'il allait découvrir. Certaines salles abritaient des éléments qu'il pensait trouver ailleurs. Une horloge n'était pas à sa place. Un tableau ne représentait pas la scène qu'il avait imaginée. Une étagère aurait dû être plus large, une petite armoire plus petite aurait dû ouvrir sur une grande baie vitrée et non sur un mur blanc. C'était déconcertant. Il avait la sensation que ses souvenirs revenaient et la déception était amère quand il se rendait compte que tout n'était qu'un effet de son imagination.
Vivre dans cette maison était loin d'être reposant.
Les images qui l'avaient hantées les premiers jours l'avaient quitté mais la sensation que son passé était juste à portée de mains mais toujours hors d'atteinte le frustrait.
Heureusement, il ne passait pas tout son temps libre au Refuge. Il avait décidé de continuer à donner ses cours de dessin et de sports pendant les vacances d'été. Les élèves étaient moins nombreux, mais pour lui c'était une source infinie de détente.
…
Bien décidé à trouver le maître des lieux, il ouvrit la porte qui le conduirait à l'aile centrale et se retrouva malgré lui propulsé dans un laboratoire. Severus se tenait devant un chaudron bouillonnant, coupant diverses herbes.
Perdu, Harry regarda devant puis derrière lui, essayant de comprendre ce qui se passait. Il finit par s'avancer dans la pièce d'un air incertain.
« M. Potter, que me vaut cet honneur ? » Railla Severus sans lever les yeux de ce qu'il faisait.
La scène qui se déroulait devant lui était de celle que Harry caractérisait comme du déjà-vu.
L'odeur d'herbes et d'épices mélangées entre elles, l'atmosphère d'attente, la tension latente qui régnait dans cette salle, il la connaissait. Ici, cet homme était un démon de rigueur et d'ingéniosité.
Severus le regardait de toute sa hauteur, les bras croisés et les yeux noirs.
Malgré l'étrangeté de l'image qui venait de lui traverser l'esprit, il sourit. Se trouver dans cette pièce avec Severus lui paraissait familier et juste.
Il croisa les bras sur sa poitrine et imitant la posture de l'homme dans sa vision, il lui dit, « Pourquoi m'évitez-vous, Severus ? »
« C'est vous donner trop d'importance que de penser que je perdrais mon temps à trouver des subterfuges inutiles pour vous éviter. Je suis simplement un homme occupé et nos emplois du temps ne concordent pas. Maintenant, si vous voulez m'excuser, j'ai beaucoup à faire. »
Harry avait été congédié mais son esprit restait focalisé sur les herbes devant lui. « Vous faites une potion calmante. » Dit-il doucement. « Tout est là. La camomille, la verveine… » Severus leva vivement les yeux vers lui et le regarda prendre un couteau et éplucher la racine d'asphodèle. Ses mouvements étaient fluides et sûrs. Il la coupa ensuite en morceaux, regarda le chaudron, prit la place de Severus, réduisit le feu, versa l'asphodèle dans le chaudron bouillant et tourna dans le sens des aiguilles d'une montre.
« Alors puis-je vous aider ? »
Le regard de Severus était soupçonneux. « Vous avez retrouvé des souvenirs ? »
« Non, je ne crois pas. En vous voyant faire, j'ai compris que je savais. » Les yeux de Severus brillaient d'un éclat métallique. Il acquiesça.
« J'ai besoin de potions contre la migraine, de potions de sommeil sans Rêves et de potions curatives diverses. Faites celles que vous pensez pouvoir réussir. Je n'accepterai pas que vous gâchiez des ingrédients pour rien M. Potter ! » Dit-il sur un ton incisif.
« Vous n'avez pas toujours été aussi dur avec moi, professeur. »
« Non, mais je n'ai pas non plus toujours été aussi patient. »
« C'est vrai. »
Les seuls bruits que l'on put entendre ensuite furent les bouillonnements de l'eau, les claquements du couteau, les cliquetis du métal et du verre. Les deux hommes restaient silencieux, concentrés sur leur tache.
Severus observait chaque mouvement de Harry qui avait la précision et la rigueur qu'il lui avait inculquée.
Il lui avait menti. Il avait effectivement cherché à l'éviter. Jouer la froide indifférence n'était pas facile, même pour une personne aussi versée que lui dans l'art de la dissimulation et du mensonge. Il sentait sa présence. Il ressentait son trouble et sa confusion. Il savait que ses souvenirs avaient plus de chance de remonter en sa présence et il préférait que Harry garde l'innocence de sa vie actuelle. Que les souvenirs de l'enfer qu'il avait vécu lui revienne le rendait malade. Pour Harry, il valait mieux rester amnésique.
Mais il recouvrait la mémoire et il en avait la preuve sous les yeux. Il n'était pas certain qu'il en soit conscient, mais son assurance dans la préparation des potions était celle qu'il avait apprise avec lui.
L'heure passa excessivement vite. Les deux hommes travaillèrent en silence et ils en firent plus que Severus ne l'avait escompté. Il inspecta le travail rigoureux de Harry.
« Je dois avouer que je suis surpris, M. Potter. Vous avez de bons restes malgré votre amnésie. »
Harry eut l'impudence de lui sourire.
« Pourquoi m'appelez-vous toujours M. Potter. J'ai un prénom vous savez. »
« Vous ne pourriez pas arrêter avec vos monsieur Potter par-ci, monsieur Potter par-là ? Je ne suis pas mon père et je ne l'ai jamais été. Je ne l'ai même pas connu alors mettre tant de haine dans un nom, c'est perdre beaucoup d'énergie pour rien, si vous voulez mon avis. »
La lueur qui illumina le regard émeraude fit comprendre à Severus que lui aussi avait été victime de cette soudaine vision. Un souvenir. Il serra les dents.
« Je croyais que nous étions d'accord pour nous appeler par nos prénoms, Severus. »
« J'ai un prénom, alors utilisez–le ou appelez-moi comme vous le souhaitez, mais pas Potter ! »
Severus eut un petit sourire. « Alors je peux vous donner n'importe quel nom ? Idiot, imbécile, gamin me semble parfaits et je peux facilement en trouver d'autres.. »
La fiole que Harry venait de remplir éclata.
« Je -»
« C'est votre magie. Elle se régénère. A chaque souvenir qui revient vous risquez de vivre une expérience similaire. » Severus prit un chiffon et épongea les résidus de potions, évitant de regarder les yeux d'un vert si vif.
« Comment savez-vous que je me suis rappelé quelque chose ? »
Il répondit avec réticence. « Vos yeux. Ils étaient dans le vague. »
« Nous nous connaissons depuis longtemps, n'est-ce pas ? »
« J'ai été le professeur du petit inconscient que vous êtes pendant huit ans. » Dit sèchement Severus Il ne voulait pas avoir ce genre de conversation avec Harry. Il ne voulait pas revenir en arrière. Il ne voulait pas-
« Je n'ai pas d'ordre à recevoir de vous ! »
Harry le regarda longuement comme s'il essayait de faire le lien entre l'homme dont il commençait à se souvenir et celui qui était devant lui.
Il ne comprenait pas ce qu'il ressentait. Il était indéniablement attiré par ses yeux sombres, son teint pâle, ses longs doigts effilés et ses lèvres fines si rarement égayées par un sourire. Severus n'était pourtant pas beau. Il avait mauvais caractère et n'hésitait pas à le rabaisser.
Il savait que Severus essayait de créer de la distance entre eux. Et il le refusait. Il sentait qu'il y avait quelque chose de plus entre eux, quelque chose qu'il voulait découvrir et qu'il devrait chercher par lui-même parce que l'autre homme ne l'aiderait pas.
« Ouch ! Désolé. » Dit-il en souriant. « Ca n'a pas dû être facile. » Depuis qu'il avait commencé les potions, il se sentait dans son élément. Il avait la sensation d'être dans un brouillard magique. Il ne savait pas où il mettait les pieds ni ce qu'il devait faire, mais ça ne lui faisait pas peur. Tout se passerait bien.
Les yeux plissés, Severus le regarda avec méfiance. « Effectivement. Apprendre n'était pas sur la liste de vos priorités. »
Ils se trouvaient à présent dans un cimetière obscur, envahi par la végétation…Scrutant l'obscurité, ils distinguèrent la silhouette d'un homme qui s'approchait d'eux en marchant parmi les tombes d'un pas assuré. (J.K.Rowlings, Harry Potter et la Coupe de Feu)
Harry ferma les yeux. Il refusait de se souvenir de ça. La pensée l'effleura et les images se dissipèrent comme si on le leur avait ordonné.
La pression qu'il avait soudain ressentie s'étiola mais ne disparut pas totalement. La crispation de ses lèvres, l'éclat de ses yeux laissaient transparaître ce qui venait de se passer.
« Il est quatre heures professeur. Et si nous suivions pour une fois la mode anglaise. Un thé, ça vous tente ? Nous pourrons discuter plus à notre aise. »
Severus acquiesça. Ils rangèrent le tout et se dirigèrent vers le petit salon.
Hpsshpss
Harry était fatigué de ce jeu, fatigué de devoir se battre pour récupérer ce passé controversé. « Vous savez des choses sur mon passé que j'ignore -»
« Vous savez très bien que vous dévoiler votre vie risque de provoquer de grave lésions qui pourraient réprimer le processus de recouvrement de votre mémoire. » Son corps entier trahissait la tension qui l'habitait.
Harry ferma les yeux et se frotta les paupières. « Je vous en prie Severus. J'ai besoin d'avancer. Je me sens si impuissant. » Il soupira. « J'avais perdu l'espoir de recouvrer mes souvenirs, mais ils reviennent c'est indéniable. Seulement, seul, je ne peux rien faire. Ils se dérobent sous mes pieds avant que j'aie pu les comprendre. Ce ne sont que des images fugaces. Je n'ai rien sur quoi m'appuyer. »
« Harry -»
« Non, écoutez-moi. J'ai des tableaux par dizaines qui décrivent une réalité qui a existé. Je le sais maintenant, mais ce ne sont que des scènes que je suis incapable de replacer dans un contexte. Vous pouvez m'aider. »
Les traits tirés, Severus se servit un verre de scotch. Les sentiments qui l'animaient étaient contradictoires. Voir Harry aussi désemparé était un supplice. L'aider était plus qu'il ne pouvait en supporter. « Je ne pense pas être la personne la plus appropriée pour vous venir un aide. » Laisse-moi ! Quitte cette maison ! Reste près de moi ! Ne me quitte plus jamais ! Les injonctions contradictoires restèrent coincées dans sa gorge.
« Comment avez-vous perdu la mémoire ? » Sa voix était rauque comme s'il venait de fournir un grand effort.
Harry s'affaissa dans son fauteuil, abattu et les yeux dans le vide. Sa voix avait l'accent du reproche. Le maître des potions essaya de ne pas le prendre personnellement.
« D'après les premiers témoins, j'ai été victime d'un banal accident de la route. Mes premiers souvenirs sont ceux d'une chambre blanche. Des inconnus tout aussi vêtus de blanc se pressaient autour de moi. Pendant un temps, j'ai cru que j'étais mort. » Harry rit jaune.
« Je crois que c'était bien pire. Jour après jour, on venait prendre de mes nouvelles. Les regards blessés ou ceux pleins de pitié étaient ceux qui me faisait le plus de mal. Ma fiancée venait me voir tous les jours et restait à mon chevet pendant des heures. Elle repartait le visage baigné de larmes. »
Malgré la tristesse et la rancœur qui lui étreignait le cœur, il continua, « Ils m'ont montré des photos, m'ont fait visiter mon ancien appartement mais rien ne m'est revenu. Ma mère me surveillait sans cesse comme si elle avait peur de moi.
« Je suis allé vivre avec ma fiancée et je suis resté avec elle six mois. C'était une idée des médecins. Ils espéraient déclencher une secousse pour que mes souvenirs reviennent. Ce n'est jamais arrivé. Je suis parti avec mon meilleur ami sans prévenir personne. La vie aux Etats-Unis n'était pas faite pour moi. »
Severus l'écoutait raconter son histoire la rage au cœur. Il était aux Etats-Unis pendant tout ce temps. Une fiancée, des parents ! Comment pouvait-il accepter de le priver de cette vie à laquelle il avait si souvent aspirée.
« N'étiez-vous pas heureux d'avoir autant de personnes auprès de vous ? Pour vous soutenir et s'occuper de vous ? » Severus essayait de paraître indifférent mais sa voix était rêche.
« Je me sentais étouffé. Ce n'était pas mon milieu. Ce n'était pas vraiment ma vie. J'avais le sentiment de vivre celle d'un autre. Je n'étais pas à ma place. » La rancœur égrenait ses paroles d'amertume. Il buvait à petites gorgées comme si boire lui était difficile, comme si la boule qui obstruait sa gorge était trop serrée pour laisser passer le liquide.
« Pourquoi ? »
Harry le regarda surpris. « Pourquoi quoi ? »
« Pourquoi n'avez-vous pas continué à vivre cette vie dans laquelle vous auriez pu être heureux. Vous aviez tout ce que vous avez toujours désiré. Vous aviez une chance d'être heureux ! » Le ton de sa voix était monté au fur et à mesure. Sa colère était immense.
« Ce n'était pas ma vie. » La réponse douce contrasta avec la fougue de Severus.
Muet, le Serpentard quitta la pièce. « Excusez-moi. »
« Severus -»
« J'ai besoin d'être seul ! Vous pouvez comprendre ça, non ? » Sa voix était cinglante et laissa Harry blême.
Hpsshpss
Il devait se calmer. Il devait se calmer.
Harry ! La douleur qui entourait ce prénom était telle que toute ses résolutions s'envolèrent en fumée.
De rage, il renversa potions, ustensiles et chaudrons qui se trouvaient à sa portée.
« Pourquoi es-tu revenu me hanter ? Pourquoi ne pouvais-tu pas me laisser en paix ? » Cria-t-il.
Il s'assit. « Et moi je ne suis qu'un homme, Harry, un homme faible. Je ne peux pas te laisser. Pas si tu reviens vers moi. »
« Tu mérites tellement mieux. » Sa voix était cassée et il se sentait las.
Il se prit la tête entre les mains et respira profondément pour reprendre contenance. Il finit par se relever et jeta un sort pour nettoyer la salle. Il devait refaire les potions. Il se remit lentement au travail sans volonté, sans force, uniquement mû par son sens du devoir. Penser à autre chose. Ne plus penser à lui.
Des heures plus tard, Harry vint le trouver. « Comment allez-vous ? »
Au lieu de lui répondre, Severus lui demanda simplement, « Qu'avez-vous fait une fois revenu en Angleterre? »
Harry lui répondit sans se faire prier « J'ai acheté un appartement et j'ai cherché du travail dans le seul domaine que je connaissais. »
« Lequel ? » Concocter une potion était vraiment délassant. Il parvenait à apprécier la conversation et la présence du Gryffondor ne lui était même plus douloureuse. Il appréciait sa présence à ses côtés même s'il ne pouvait pas le toucher. Il était là. Il devait s'en contenter pour l'instant.
« La physique-chimie. Faire des expériences, trouver de nouvelles combinaisons est un bon moyen pour ne pas penser. Prouver mes compétences n'a pas été difficile puisque j'étais déjà professeur aux Etats-Unis. » Il avait pris place sur un tabouret et éminçait un cœur d'artichaut pour la potion.
« Je n'aimais pas vivre seul. L'appartement était trop grand, le silence assourdissant, le passé inexistant trop présent, j'ai donc demandé à Maelyn qui venait d'intégrer le collège de venir vivre avec moi. Elle n'arrivait pas à trouver d'appartement. »
L'amertume crispa les traits du Serpentard. Harry aurait pu faire beaucoup de choses. Il aurait été un excellent médecin. Un très bon sportif. Un parfait consultant, mais non, il s'était inconsciemment rapproché de lui et de ce qu'il faisait avant.
Les motivations obscures qui l'avait poussé à choisir cette voie ne lui était pas inconnues. Il cherchait à rattraper son passé. Maelyn lui avait dit qu'il cherchait des hommes qui lui ressemblaient. Une fiancée. Il renifla mentalement.
Il le regarda et leurs yeux se croisèrent.
Le désir de le toucher fut si grand qu'il détourna immédiatement les yeux et reprit son travail sans remarquer qu'il s'était coupé.
Harry se leva, s'approcha, lui prit la main et mit son doigt dans l'eau fraîche avant de faire un pansement d'un mouchoir.
Sa présence était enivrante. Severus voulait le prendre dans ses bras et le garder dans cet endroit qui n'appartenait qu'à lui, mais de peur de faire une bêtise, il se recula.
« Pourquoi réagissez-vous ainsi à mon contact Severus ? Vous fuyez à chaque fois que je m'approche. »
Il posa une main sur sa joue. « Vous êtes innocent, Harry. Sans vos souvenirs, vous avancez dans le noir sans crainte du danger. » Il rabaissa sa main. « Je ne veux pas profiter de votre faiblesse. »
« Quel danger ? »
« Celui que représente la communauté sorcière pour celui qui est considéré comme leur héros. » Il soupira. « Ne m'en demandez pas plus, je refuse de vous répondre. »
Le silence retomba. Le Gryffondor avait repris sa place, mais ses yeux lançaient des éclairs dans sa direction. Il n'avait pas apprécié la rebuffade.
Severus voulait lui poser la question qui le taraudait depuis que Harry était revenu au Refuge mais il refusait de s'y abaisser. Les mots qu'il avait sur le bout de la langue le brûlaient comme de l'acide. Il garda les lèvres closes.
Harry le regarda longuement comme s'il entendait la question muette de Severus. Leur lien n'était pourtant pas ouvert. Il n'avait aucun moyen de savoir ce qui se passait dans sa tête. Commençant à se sentir mal à l'aise sous ce regard scrutateur, Severus allait faire une remarque lorsque son compagnon ferma les yeux et se massa le front.
« Quelque chose ne va pas ? »
« Si, excusez-moi. Depuis que je suis ici, j'ai parfois l'impression d'entendre des voix et des images me traversent l'esprit comme si je revoyais un film. »
« Ca vous arrive souvent ? »
« Non, mais ça arrive sans prévenir. » Il changea de sujet. « Et si on parlait de vous professeur. Jusqu'à présent, je n'ai rencontré que les Malfoy et seulement brièvement, où en sont vos relations sentimentales ? » Il lui fit un sourire et un clin d'œil.
Maudit Gamin, pensa Severus amèrement.
« Ma vie sentimentale ne vous regarde aucunement. »
« Ce qui signifie que vous n'en avez pas. »
« Gamin impertinent. »
« Bâtard têtu. » Harry se mordit la joue pour éviter de prononcer cette phrase qui lui était venu si facilement à l'esprit. Les yeux de Snape étaient emplis de malice et il semblait rire intérieurement. Il répondit plus sérieusement, « Moi aussi, je suis seul. Depuis mon amnésie, je suis incapable de me lier avec qui que ce soit. J'ai essayé de sortir avec des hommes, mais je ne suis jamais allé très loin. C'est un sujet de dispute récurrent entre Maelyn et moi. »
« Pourquoi n'avez-vous trouvé personne ? Je suis certain que vous aviez de nombreux prétendants et prétendantes. »
« Oui, c'est vrai. Je ne me sentais pas à l'aise avec eux. J'ai toujours été déçu. Il y avait toujours quelque chose qui n'allait pas. Cela qui venait peut-être de leur caractère. Tous de vieux ronchons. »
Severus grimaça. « Vous auriez dû profiter de votre liberté pour vous construire une nouvelle vie. » La douceur de sa voix contrastait avec son aspect si sévère.
« C'est ce que j'ai cru pendant longtemps. J'ai quitté les Etats-Unis pour cette raison. Maintenant, je sais que je ne pourrais retrouver le goût de vivre qu'en retrouvant ce que j'ai perdu. »
Severus serra les dents. Décidément, il ne comprenait rien à rien.
Sentant la tension s'alourdir, Harry décida de prendre les devants. « Lorsque vous m'avez fait visiter, j'ai vu cette partie d'échecs commencée. Je suis plutôt doué. Si vous voulez un adversaire de taille -»
La tension quitta le corps du maître des potions qui eut un sourire en coin. « Vous comptez me battre, M. Potter ? »
« Hm, oui. »
« Je connais tous vos trucs, Harry et c'est moi qui vous ai appris à jouer. Jamais vous ne me battrez. »
« Vous croyez ? »
« Venez petit impertinent. »
