Attention, rien ne m'appartient. Les personnages appartiennent à J.K Rowlings
Ratings : R
Correctrices : AnthaRosa et Ishtar205. N'oubliez pas de les remercier pour leur travail.
Avertissement: Il y a dans l'histoire une référence à une grossesse mâle. Ce n'est absolument pas le sujet de l'histoire, mais on en parlera de temps à autre.
Tome 1 à 6 pris en compte
Attention, c'est un slash (relation entre deux hommes): SS/HP
Chapitre 7
Harry avait besoin de faire de l'exercice pour se changer les idées et évacuer ses tensions. Il voulait chasser ces images de sa tête, ne serait-ce que momentanément. Ne plus voir son regard braqué sur lui au moment où il jetait le sort mortel, ne plus entendre les paroles accusatrices, ne plus se sentir coupable.
Il était écartelé entre le désir de se souvenir précisément de ce qui s'était passé et celui de tout effacer de sa mémoire.
Les images qui lui revenaient n'étaient que tueries et tortures. Le visage d'inconnus le hantait et il se retenait de crier.
La seule personne capable de l'aider semblait être Severus mais il ne voulait pas le déranger constamment et pleurer dans ses bras comme le ferait un enfant. Il ne voulait pas qu'il le voit comme une âme perdue incapable de faire face à son passé.
Harry s'accrochait à Severus, à sa force de caractère pour ne pas couler, ne pas s'effondrer.
Severus n'avait pas besoin d'être là pour qu'il le sente près de lui, pour qu'il le voie. Harry esquissa un sourire. Il lui suffisait de fermer les yeux pour le voir : penché au-dessus d'un chaudron, le maître des potions jetait de fines herbes dans l'eau frémissante. L'homme sévère leva la tête comme s'il l'avait senti et l'espace d'une seconde, Harry eut le sentiment que leurs yeux s'étaient vraiment croisés.
Son estomac se contracta.
Il devenait accro à cet homme comme d'autres le sont à une drogue.
Sentir ses bras autour de sa taille, enfouir son visage contre sa poitrine lui avait paru si… familier.
Il s'arrêta un instant pour regarder où il se trouvait. La pièce était semblable à toutes celles que la Maison lui avait montrées jusqu'à présent : de très vieux meubles, des tableaux aux murs qui le dévisageaient accrochés, une plante d'intérieur ou une vieille horloge familiale la décoraient. Dans celle-ci, le meuble le plus imposant était une armoire massive dont un pied avait été maladroitement rafistolé. Elle menaçait de s'écrouler à tout instant.
Harry ne s'en préoccupa pas, ne lui jetant qu'un bref coup d'œil. Abaissant la poignée, il entra dans une autre pièce.
Il ne savait plus où il se trouvait. La maison s'était une fois de plus jouée de lui, mais ça n'avait pas d'importance.
Déambuler dans les couloirs l'aidait à occuper son esprit.
Se souvenir. Oublier.
Il ne savait plus ce qui était bien pour lui.
Severus avait peut-être raison. Et pourtant, il ne pouvait s'empêcher de refuser cette idée et de la faire taire. Il devait se souvenir. C'était primordial.
Serrant sa lèvre inférieure entre ses dents, il ressassait encore et encore la même question : Que s'était-il vraiment passé ? La grange avait brûlé entraînant la mort de dizaines d'innocents. Mais avant ?
La jeune fille était là. Brûlée. Seul l'anneau qui devait sceller ses fiançailles brillait encore.
Incapable de faire quoi que ce soit, il regardait l'anneau. Une boule s'était formée dans sa gorge et son estomac était noué.
Du bruit le tira de sa paralysie. Autour de lui, on commençait à s'activer. Ginny était elle aussi entrée. Les yeux plein de larmes, elle jetait des sorts de préservation sur les corps pour que les familles puissent les identifier. Elle n'acceptait l'aide de personne, pas même celle de Drago. Il était là et elle le savait, ça lui suffisait.
Il serra les dents. Se vider l'esprit. Ne plus y penser. C'était trop douloureux. Il n'était pas à même de faire face à ce passé. Pas tout de suite.
Il ouvrit une porte puis une autre, franchissant les pièces sans s'intéresser à elles, sans réellement les voir. Elles étaient toutes peuplées par les mêmes fantômes qui le poursuivaient depuis qu'il commençait à se souvenir.
Des visages blêmes dont les yeux révulsés le fixaient avec reproche.
Il inspira profondément. Il devait se vider l'esprit. Les scènes qu'il voyait étaient émaillées de ses peurs. Tout n'était pas réel, non !
Il ouvrit une nouvelle porte et s'arrêta net. La salle dans laquelle il allait entrer se trouvait dans l'obscurité. Elle n'était pratiquement pas éclairée contrairement au reste de la maison. Il s'approcha prudemment et tâtonna contre le mur afin de trouver un interrupteur. Mais au moment où il franchit le seuil, la salle s'éclaira d'elle-même.
Elle était absolument immense et un appareil étrange la meublait.
Il s'avança près de ce qui ressemblait à une machine et, lorsqu'il posa sa main dessus, elle se mit à briller, comme si elle se réveillait d'un long sommeil.
Curieux, il monta sur une sorte de tapis qui vibra sous ses pieds, le forçant à accélérer l'allure. Surpris, il voulut descendre, mais la machine avait déjà décidé qu'il devait continuer. Un mur invisible le retenait au centre.
« Mais qu'est-ce que c'est que ce merdier ? » Jura-t-il à voix haute.
Une fléchette sortie de nulle part l'attaqua par derrière. Il l'évita de justesse.
« Oh Potter, j'avais oublié. » L'homme sévère souriait de satisfaction, « A chaque fois que vous prononcerez un sort à voix haute, un ennemi vous attaquera. Plus vous crierez et plus l'attaque sera puissante. Le but de cet exercice est assez simple : vous devez atteindre l'autre bout de la pièce. Même vous, en êtes capables, non ? »
« Et merde ! »
Le sol trembla mais il parvint à rester stable. Des boules de feu l'attaquaient de tous les côtés.
Il sautait, courait, prononçait des sorts qu'il ne connaissait pas, jurait pour échapper aux attaques de plus en plus nombreuses. La pièce n'était pas seulement immense, elle n'avait pas de fin. Jamais il ne parviendrait à atteindre l'autre bout. Il était essoufflé, trempé par la sueur, mais rien ne semblait arrêter le déluge de pièges.
Une fléchette l'avait touché à l'épaule et il se sentait nauséeux. Il baissa la tête pour éviter une nuée d'oiseaux qui disparut avant de l'avoir atteint.
Levant la tête, il vit Severus. L'homme se tenait bras croisés à quelques mètres de là.
« Vous avez beaucoup perdu. Je vous ai connu bien plus fort. » Commenta-t-il simplement.
Harry descendit du tapis en chancelant. Ses jambes tremblaient sous le poids de l'effort.
Severus lui tendit une serviette qu'il accepta avec reconnaissance et s'assit part terre, contre le mur.
« J'ai failli me faire tuer ! » Grogna Harry.
« Ne dites pas n'importe quoi. Vous vous êtes entraînés sur cette machine des mois durant et vous n'en êtes pas mort ! » Lui répondit Severus sèchement.
« Alors Potter, déjà fatigué ! Le célèbre Gryffondor n'est pas capable de repousser une petite attaque ? » Railla-t-il en portant un nouveau coup.
« Si vous faisiez les mêmes exercices que moi, espèce de bâtard graisseux, peut-être que nous serions à égalité. »
Severus souriait méchamment, « Vous osez m'insulter, petit idiot, vous allez voir ! » Il fondit sur son adversaire qui réussit à l'éviter pour tomber tout de suite après. Quand Harry essaya de se relever, il se rendit compte qu'il ne pouvait pas.
Le maître d'armes, s'assit à côté de lui, lui tendit du chocolat, attendit un peu et lui dit, « Alors Potter, prêt à recommencer ? » Severus souriait légèrement, comme s'il ne pensait pas que son élève serait effectivement capable de se relever et de continuer.
Harry leva les yeux vers Severus. « Nous étions en guerre. »
« Nous étions en guerre et vous étiez le seul espoir du monde sorcier. » Severus se détourna, refusant de plonger son regard dans les yeux émeraudes.
Une lumière éclatante frappa le prisonnier dont les pupilles se dilatèrent et blanchirent. Il cria, mais aucun son ne sortit de sa gorge. Il se mit à cracher des limaces. Harry regarda le geôlier et le vit sourire malicieusement. Il essaya d'entrer dans la tête du tourmenteur. Par légilimencie ou en tentant de retrouver le lien qu'ils avaient partagé, mais rien n'y fit.
Des yeux du jeune homme coulaient maintenant des larmes de sang.
« Est-ce que vous vous sentez mieux ? »
Harry regardait fixement la scène qui se déroulait devant lui seul, assistant impuissant à la torture de cet homme innocent.
Il ferma les yeux et serra le poing. « Je ne sais pas. Je ne sais vraiment pas. »
Severus le scruta un instant. « Vous devriez choisir une activité plus calme. Vous n'êtes plus au niveau pour vous servir de ça » Il désigna la machine de la tête, « et il serait plus prudent de ne pas vous en servir sans supervision. »
« J'avais besoin de me défouler. » Harry serra obstinément les lèvres.
« Pour effacer les souvenirs dont vous ne voulez pas ? » Railla Severus
« Pour me donner le courage d'y faire face. »Répondit doucement Harry.
Severus le regarda longuement avant de déclarer, « La prochaine fois, allez à la bibliothèque, prenez un livre et lisez. Vous constaterez que la lecture est plus propice à la réflexion. »
Il tourna les talons mais avant de partir, il lui dit, « Je vous conseille de prendre une douche et de mettre des vêtements propres. Je sais de source sûre que Mme Malfoy ne va pas tarder à arriver et elle vient vous voir. »
Il referma la porte, laissant Harry face à lui-même.
Hpsshpss
Lorsque la jeune femme arriva, Harry était assis dans un fauteuil et feuilletait les pages d'un livre qu'il ne lisait pas vraiment.
Ginny posa une main sur son épaule, « Qu'est-ce qui ne va pas ? »
Il leva les yeux vers elle et répondit, « A part l'évidence ? »
Le visage de la jeune femme se durcit. Penser à ces moments n'était pas plus facile pour elle que pour lui. « Tu sais que ce n'était pas de ta faute. »
« Non, je ne le sais pas. Je revis sans cesse la scène et j'essaie de savoir ce que j'aurais pu faire pour les sauver. Savais-tu qu'il m'aurait été facile d'éteindre l'incendie à l'aide d'un sort ? J'aurais aussi pu transplaner avec chaque personne présente pour éviter un affrontement direct ou ne pas -»
Elle mit ses mains sur ses épaules et les serra, « Harry! Ca n'aurait permis que de retarder que l'inévitable. Tu ne pouvais rien faire ! Rien ! Te faire souffrir ainsi ne sert à rien ! »
Il la regarda dans les yeux. « Nous avons fait ce que nous avons pu, tu m'entends. Je t'interdis de dire le contraire. » Il y avait des larmes dans les yeux chocolat.
« Tu étais là toi aussi. »
Ginny et Drago aidaient les blessés à sortir, portant les infirmes, déplaçant magiquement les plus démunis. Il fallait aller vite.
Harry fut obliger de stupéfier Ron qui refusait de partir. Le feu les encerclait. Les flammes atteignaient déjà le corps de la jeune fille.
Il transplana avec Ron, il aurait peut-être le temps de revenir la chercher. Il aurait peut-être le temps de sauver d'autres vies.
Il y avait encore du monde à l'intérieur. Il voulait y retourner, il devait au moins récupérer son corps. Pour Ron… Pour lui… Pour être certain qu'ils ne pouvaient rien faire pour la sauver. Qu'elle était bien morte…
Il allait retourner à l'intérieur quand deux bras puissants s'enroulèrent autour de lui. Il se retourna, Severus était là, du sang coulait sur son visage. Il secoua simplement la tête. « C'est trop tard. »
« NOOOOOnnnnnnnnn ! Lâche-moi Severus, lâche-moi ! Je dois aller les sauver, je dois aller la sauver ! »
Il essaya de se dégager mais ne put que regarder la grange brûler.
« Harry, c'est trop tard, c'est trop tard. » Harry continuait de se tortiller dans ses bras. « Harry, regarde-moi ! Regarde-moi ! »
Elle acquiesça simplement. « Ce qui s'est passé était horrible. Mais c'est du passé, nous étions en guerre. » Les larmes roulaient maintenant sur ses joues.
« Pas pour moi Gin. J'ai l'impression que c'était hier. » Il essuya ses larmes et lui prit une main, la forçant à s'asseoir à côté de lui..
« Mais ce n'était pas hier. C'était il y a des années et tu as survécu. Tu es un survivant Harry. C'est ce qui fait ta force. Ne laisse pas tes souvenirs prendre le meilleur de toi. » Elle appuya sa tête contre l'épaule de Harry.
« C'est difficile. J'ai l'impression qu'ils m'entraînent vers le fond et que je vais me noyer. Je ne me souviens que de certains moments. Je ne sais pas ce qui est arrivé avant que l'incendie ne se déclare et je crois que je ne veux pas le savoir.» Il la regarda dans les yeux. « J'ai peur Gin. J'ai peur de ce qui va remonter à la surface. »
« Il y a des événements enfouis là-dedans, » Elle frappa doucement sa tête de son poing, « dont le souvenir te fera beaucoup, beaucoup souffrir, mais il y en a d'autres. Ne laisse pas les événements les plus douloureux prendre le dessus. »
« Tu ne me diras rien, n'est-ce pas ? »
« Je ne peux pas, Harry. Peut-être ne te rappelleras-tu jamais de ce qui s'est passé ce jour-là. »
« Ai-je tué de nombreuses personnes ? »
« Oh Harry ! » Elle posa une main sur sa joue. « Tu étais en état de légitime défense. »
Il prit sa main dans la sienne et la serra, « Pas toujours ? »
Elle tourna la tête pour ne pas rencontrer ses yeux. « Non, pas toujours. » Murmura-t-elle. Il lâcha sa main, « Mais nous étions en guerre. » Cria-t-elle.
« Etre en guerre ne signifie pas avoir le droit de tuer des innocents ! »
Elle soupira. « Je n'ai jamais dit que c'était des innocents. Bon sang Harry, tu nous as tous sauvés. »
Il renifla mais ne dit rien de plus.
Un silence s'installa entre eux.
Elle releva la tête pour le regarder. « Et Severus ? Je pensais qu'il serait avec toi.»
Harry grimaça. « Je ne sais pas où il se trouve. Il a des réactions parfois imprévisibles. Il- »
La jeune femme réprima un sourire. « Harry, Severus n'est pas un homme qui se livre facilement et il a ses humeurs. »
Et il est très difficile à percer et à faire parler, pensa-t-elle.
« Nous sommes unis. De cœur et d'esprit. » Severus se tenait droit et raide.
« Pardon ? »
« Avez-vous besoin de consulter un O.R.L M. Malfoy? J'ai le sentiment que votre ouïe ne fonctionne pas très bien. »
Ginny mit une main sur le bras de son mari et poursuivit, « Depuis quand ? »
L'homme sévère se mit à faire les cents pas dans le salon, « Nous nous sommes unis d'esprit après le Noël qui a scellé son retour à Poudlard. De cœur avant son départ. »
« Pourquoi ? »
« Je ne voulais pas le perdre ! Fin de la discussion. »
« Mais -»
« Le reste ne vous regarde aucunement ! »
« Il faut savoir franchir ses barrières. »
Il ferma les yeux. « Une muraille infranchissable, oui. »
Elle éclata de rire. « Tu as raison. Il est plus solide qu'un roc. »
Le visage de Ginny reflétait la tristesse qu'elle ressentait. Harry avait le regard dans le vide, plus tourné vers le passé que vers l'avenir. Cette espèce de léthargie l'inquiétait.
« Tu sais, tu as vécu autre chose que la guerre. Ne pense plus aux atrocités que l'on est forcé de commettre pour se défendre. » Elle lui prit la main qu'il regarda fixement. Sa voix devenait lointaine. Il était une nouvelle fois entraîné dans le tourbillon de son passé.
Elle prit sa main et lui demanda, « Pour nous, il n'y a aucune chance, n'est-ce pas ? »
Il la regarda dans les yeux un moment avant de répondre. « Non. Tu seras toujours une sœur pour moi. Je t'adore mais je ne pourrai pas t'aimer comme tu le souhaites. Je suis désolé Gin. »
« Ne le sois pas. On ne contrôle pas ses sentiments. Et je préfère que tu sois franc. Je parviendrai plus vite à passer à autre chose. » Il y avait des sanglots dans sa voix.
Il leva doucement la tête vers elle. « Y avait-il quelque chose entre nous ? »
« C'était il y a bien longtemps. Je suis très heureuse aujourd'hui avec Drago. »
Harry tendit la main vers lui. Sous le regard insistant de Ginny, Drago serra sa main et grommela, « Potter ! »
Le jeune homme brun lui fit un sourire fatigué. « Drago, je suis content de te voir ici. »
« Ce n'est pas réciproque, crois-moi ! » Grinça le jeune homme blond.
Au moment où Ginny allait le réprimander, Harry éclata de rire. « Content aussi de voir que certaines choses n'ont pas changé. J'avoue que j'étais un peu inquiet. »
« Harry ? Est-ce que tu vas bien ? »
« Oui, ne t'inquiète pas. Je revivais une scène du passé. » Il lui fit un léger sourire mais ses yeux étaient toujours dans le vague.
« C'est perturbant de te voir ainsi dans les nuages. On a l'impression que tu n'entends plus rien, que tu ne vois plus rien. On dirait presque que tu es en transe. »
« Tu as raison. Je suis si concentré sur la vision que l'ici et maintenant disparaît totalement. Je revis la scène qui se déroule devant moi, sans arriver à déterminer ce qui s'est passé avant ou après. Si c'est bizarre pour toi, imagine ce que c'est pour moi. » Il posa un coude sur le bras du fauteuil pour la regarder les yeux plissés.
« Alors, de quoi viens-tu de te rappeler ? »
« Ma réconciliation avec Drago Malfoy. » Il éclata de rire. « C'était un sacré emmerdeur ! »
Son visage s'égaya d'un véritable sourire. Elle retrouvait le jeune homme enjoué qu'elle avait connu. « Hé ! Je te prierais de ne pas parler ainsi de mon mari. D'ailleurs tu as tort. »
« Ah oui ? »
« Oui. C'est toujours un sacré emmerdeur. »
« Tu n'as pas peur que je lui répète cette conversation ? » Harry lui fit un clin d'œil.
« Non. Il sait très bien ce que je pense de lui. » Ses yeux chocolat brillaient de malice. « Te rappelles-tu du jour où nous t'avons trouvé en train de changer la couche d'Eva ? »
'Je ne me suis jamais autant amusée. Tu avais l'air d'avoir été pris en faute. Drago-'
Harry ne l'entendait déjà plus, emporté vers d'autres rives.
Lorsque la jeune fille arriva accompagné de son mari, le Survivant, terreur des mangemorts était en train de changer un bébé qui riait et se tortillait comme pour rendre sa tache plus difficile encore. Harry grognait et essayait de laver les fesses sales de l'enfant.
Un rire franc le fit se retourner. Drago était tordu de rire et Ginny le dévisageait ouvertement.
« Si on m'avait dit que Celui Qui a Tué Vous Savez Qui serait un jour ridiculisé par un môme, je ne l'aurais jamais cru. » Malgré ses paroles, ses yeux reflétaient de la tendresse.
« Harry ? Est-ce que tu m'écoutes ? »
« Oui. Je me remémorais simplement cette fameuse scène. Savoir qu'il y a eu des moments où j'ai été heureux m'aide beaucoup. Je commençais à croire que je ne savais que tuer et de torturer.» L'amertume de sa voix fit frissonner la jeune femme.
« Non Harry. Tu es bien loin d'être le monstre que tu décris. Bien loin. »
Hpsshpss
Sa conversation avec Ginny avait épuisé Harry émotionnellement. Il se sentait vide.
Il ne ressentait plus rien mises à part une immense fatigue et une tendresse particulière envers la jeune femme qu'il considérait maintenant comme sa sœur.
Elle n'avait pas apaisé les tourments de son cœur, mais elle avait essayé et grâce à elle, des souvenirs plus agréables étaient revenus. Tout n'était pas sombre dans son passé.
Avant son départ, elle l'avait examiné et prévenu : ses souvenirs revenaient par vagues. Ce qui s'était passé la veille pouvait se reproduire. Il devait essayer de les contrôler.
Il soupira. Ce n'était pas facile.
Ils étaient maintenant constamment aux abords de son esprit, cherchant la moindre opportunité pour s'épanouir. Les repoussant, il décida de suivre le conseil de Severus et se dirigea vers la bibliothèque de l'aile centrale dans laquelle il n'avait pas encore mis les pieds.
…
Harry regarda longuement les livres. Effleurant les volumes en cuir d'un doigt, il cherchait un thème intéressant et attractif.
Les sujets traités étaient si variés qu'il ne parvenait pas à faire un choix. Il s'était arrêté un instant sur un livre de Quidditch, attendant le défilé d'images qui ne tarderait pas à se manifester, mais fut déçu de constater que ce sport ne provoquait en lui qu'un sentiment de plénitude. Les sensations qu'il éprouvait sur un balai ne devaient pas être suffisamment fortes pour déclencher un souvenir.
La salle était petite et il en fit rapidement le tour. Soupirant, il s'arrêta devant l'une des quatre statues qui encadraient la pièce. Il posa sa main sur celle d'un vieillard d'aspect jovial : les livres s'écartèrent doucement pour laisser apparaître une petite porte qui s'entrouvrit légèrement.
Il y avait maintenant en face de lui une salle immense, bien plus illuminée que la précédente. Une grande baie vitrée s'ouvrait sur le jardin. Des étagères remplies de livres et séparées par des portraits couvraient trois des quatre murs.
Il s'avança lentement vers la table centrale.
« Bonjour M. Potter. Il y a bien longtemps qu'on ne vous avait vu ici. »
Harry se retourna brusquement. Il se retrouva face à face avec un portrait. Le personnage d'aspect bourgeois lissait ses favoris. « Ernest » Murmura le jeune homme.
« Ernest Dumbledore ! Vous devez être Harry Potter et Severus Snape ? Les nouveaux propriétaires. »
Severus le regarda avec des yeux noirs et croisa les bras sur la poitrine. « Je croyais que c'était un endroit calme ? »
Harry retint un rire en entendant son professeur réagir ainsi, comme s'il boudait.
« C'est le cas monsieur Snape. Je suis le 'documentaliste. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, je suis à votre disposition. »
« Je suis enchanté que vous vous souveniez de moi, M. Potter. J'ai entendu parler ce qui vous est arrivé. J'en suis navré. Vous étiez un jeune homme charmant, un vrai Gryffondor. »
Harry le détailla minutieusement. Il était moins surpris qu'il aurait dû l'être. Discuter avec un portrait ne lui arrivait pas tous les jours et pourtant c'était familier.
« Je vous en prie. Je ne suis pas encore mort et mes souvenirs reviennent, ne vous en déplaise. Vous êtes le documentaliste, c'est ça ? »
« Oui, » Répondit-il de son air hautain. « Mais je crains que sans magie, vous ne parveniez pas à avoir accès à la plupart des livres de cette salle. »
Frustré, Harry grogna. « Ce n'est pas grave, je vais tout de même jeter un œil. »
Il s'assit derrière la table sur laquelle étaient posées deux plumes. La première semblait ordinaire, la seconde était plus étrange. D'aspect filiforme, il était impossible d'écrire avec. Il la toucha et elle se redressa sur elle-même avant de retomber brutalement.
Il s'intéressa davantage au livre volumineux. Il le connaissait, il en était persuadé. Il avait étudié ce livre plus qu'aucun autre. Il savait qu'il ne devait pas forcer ses souvenirs, mais c'était plus fort que lui. Il ferma les yeux, essayant de retrouver les sensations perdues. Un sentiment d'exaltation, de peur mêlée de joie, le saisit.
« Harry, où as-tu trouvé ce livre ? Je ne l'avais pas encore vu. » Severus fronçait les sourcils.
Harry haussa les épaules. « Je suis allé faire un tour du côté de la section interdite. »
Severus fronça d'autant plus les sourcils, « Gryffondor idiot, t'es-tu dit qu'il était peut-être ensorcelé ? »
Il le dévisagea, « Voyons Severus, pourquoi serait-il ensorcelé ? »
« Parce qu'il vient de la section interdite. On ne range pas ce genre de livre dans ces rayonnages par hasard. »
La grosse couverture en cuir ne lui révéla rien de plus. Il l'ouvrit. Les pages parcheminées étaient jaunies par le temps. L'écriture cursive était difficile à déchiffrer. Il fronça les sourcils et se concentra. Les mots prirent sens et bien vite, il parvint à lire sans mal.
Il le feuilleta rapidement jusqu'à ce qu'il tombe sur une série d'illustrations. Il s'arrêta net. C'était important.
Un médaillon épais au centre duquel était gravé le symbole de Serpentard était représenté. Il était considéré comme l'un des artefacts les plus puissants du moment.
Il ouvrit la grande armoire fourre-tout et trouva rapidement le lourd médaillon qu'il avait vu dans la pensine de Dumbledore. Comme l'avait soupçonné Severus, RAB était bien Regulus, le frère de Sirius. Il mit le précieux médaillon dans un mouchoir, sur lequel il jeta un sort de protection et le mit dans sa poche. Il ne voulait pas y toucher sans son mentor. C'était lui le spécialiste.
Il ne parvenait pas à se rappeler de ce que tout cela signifiait. Ses maux de tête recommençaient. Il inspira profondément et tourna la page.
Sa main s'arrêta en plein mouvement lorsqu'il aperçut l'illustration suivante : une boite à musique. Elle était capable de remonter le moral de son auditeur, lui redonnant ainsi le courage de continuer sa quête.
C'était la sienne. Elle en était l'exacte copie.
Ils se rapprochaient de l'horcruxe. Harry le sentait. Sa cicatrice commençait à le brûler. Il entendait la musique. Severus jeta un coup d'œil vers Harry : il avançait maintenant comme un somnambule, la tête inclinée pour écouter la musique et la suivre.
Un horcruxe. Il se prit la tête entre les mains tant la douleur était insupportable. Fermant les yeux, il se focalisa sur sa respiration. Inspirer, expirer. Inspirer, expirer.
Une main fraîche se posa sur son front. Une sensation de bien-être l'envahit. La douleur disparut complètement.
« Gryffondor idiot, » Entendit-il avant de sombrer dans le sommeil, « Toujours en train de mettre son nez où tu ne devrais pas. »
Hpsshpss
Harry se réveilla dans sa chambre. Le soleil commençait à se coucher. La chaleur de l'après-midi était tombée. Il n'avait plus le souvenir précis de ce qui s'était passé.
Il fronça les sourcils et retourna à la bibliothèque. Le tableau du documentaliste était immobile comme tous les autres et le livre n'était pas plus sur la table que les plumes.
Horcruxes
Sa pensée n'alla pas plus loin.
Il avait le sentiment qu'ils n'existaient plus et cela le rasséréna.
Décidé à se dépenser physiquement sans créer de catastrophe ou risquer sa vie, il descendit se promener dans le jardin et profiter du soleil. Il avait sorti pelle et pioche afin de planter les herbes dont Severus aurait besoin pour ses potions. Le maître des potions lui en avait parlé et Harry avait proposé de s'en charger. Le grand air lui faisait du bien et l'empêchait de trop s'appesantir sur son passé.
Il leva les yeux vers le ciel sans nuages. Ses amis revenaient demain et il était heureux de les revoir. Il espérait que leur cadeau de mariage leur plairait.
Ses amis. Ils faisaient partie d'une normalité, d'une réalité tangible à laquelle il pouvait s'accrocher. Ces derniers temps, il lui devenait de plus en plus difficile de différencier le réel de ses souvenirs. Se fier à sa mémoire n'était pas chose aisée. Surtout quand on était amnésique.
Severus observait Harry de l'une des fenêtres. Il avait l'air d'aller beaucoup mieux et ses traits se détendaient avec l'exercice physique. Il avait toujours eu besoin de se dépenser pour chasser ses idées noires. Autrefois, il courait se défouler sur la machine performante, alliant magie et force physique. Il s'écroulait ensuite de fatigue.
Sa performance de ce matin avait été décevante. Harry lui avait pourtant dit continuer le sport. Il avait certainement utilisé sa magie encore erratique, ce qui l'avait épuisé physiquement.
Harry paraissait plus à son aise dans ce jardin.
Il avait enlevé sa chemise et portait un short. Ses cheveux trop longs lui tombaient dans la figure alors qu'il plantait et piochait. Les yeux de Severus s'attardèrent malgré lui sur les muscles fermes de son ventre et de ses pectoraux, sur ce teint hâlé par le soleil. Il refusait de se laisser aller à ce genre de pensées. Il ne voulait plus rêver de ce corps ondulant contre le sien, de sa peau si douce…
Il s'éloigna de la fenêtre et se plongea dans la fabrication d'une nouvelle potion. Il ne devait pas avoir ce genre de pensées. Tant que Harry n'aurait pas retrouvé sa mémoire, il était hors d'atteinte. Il était plus que jamais opposé à ce qu'il recouvre ses souvenirs. Ce qui se passait depuis quelques jours ne prouvaient-ils pas que ses craintes ne s'étaient-elles pas Harry ne devait pas se souvenir de leurs deux années de bonheur. Pas si ça devait faire ressurgir tous ses vieux démons.
Hpsshpss
Ce n'est que longtemps après que Severus descendit dans le jardin. Harry était appuyé contre un arbre, comme il l'avait fait si souvent dans le passé.
« Comment allez-vous ? »
« Bien mieux. » Le soleil commençait à se coucher, laissant des ondes irisées dans le ciel rougeoyant. Harry avait les yeux fermés mais sentait le regard de Severus sur lui.
« Pourquoi me surveillez-vous toujours aussi étroitement? »
« Je ne vous surveille pas, monsieur Potter. » Le ton était dur et rêche mais Harry ne s'en formalisa pas.
« Si tu prenais soin de ta vie, je ne te surveillerais pas. »
Le souvenir resta tendu entre eux comme un fil que ni l'un ni l'autre ne voulait couper. Ils savaient tous les deux qu'ils avaient partagé ces images. Ils le sentaient.
« Ce n'est peut-être pas le terme adéquat. Pourquoi vous inquiétez-vous tant pour moi ? »
« Parce que vous êtes incapable de prendre soin de vous tout seul peut-être. »
Harry ouvrit les yeux et les verrouilla dans ceux d'onyx, « Pourquoi voudriez-vous prendre soin de moi, Severus? Qu'y avait-il entre nous avant ma disparition ? Et surtout ne me dites pas qu'il n'y avait rien. Je sais qu'il y avait quelque chose. Je sais ce que j'éprouve à votre contact. Je vous cherche autant que vous me cherchez. J'ai parfois tellement envi de vous toucher que ma main s'avance vers vous malgré moi. » Il rit mais ce n'était pas de plaisir.
« Je ne me sens vivant que lorsque tu es là. »
Severus détourna le regard et s'apprêtait à se repartir lorsque la voix de Harry l'arrêta. « Vous me fuyez. »
« J'essaie simplement de te faciliter la vie. »
« Je ne veux pas de votre pitié. » Le ton était mordant. Severus l'avait blessé.
« Ce n'est pas de la pitié. C'est de la protection. Je continue à croire que la perte de tes souvenirs est une bénédiction pour toi -»
« N'y avait-il donc que des moments de douleur ? »
« Non mais ils étaient plus nombreux que ceux où vous étiez heureux. »
« N'est-ce pas la douleur qui permet d'apprécier les joies de la vie ? Dites-moi Severus Snape pourquoi avez-vous si peur que je retrouve ce que j'ai perdu ? » L'amertume faisait vibrer sa voix.
Severus eut l'impression de recevoir une gifle. Il avança doucement sa main sur la joue du jeune homme et, du bout des doigts, suivit le contour de sa mâchoire. Il murmura contre son oreille, « Je ne suis pas un homme gentil. J'ai de nombreux péchés à mon actif. Celui que vous étiez dans le passé l'a appris à ses risques et périls. N'essayez pas de construire des sentiments inadéquats en vous fondant sur des images approximatives ou sur ce qui a pu être il y a longtemps. »
« Je me fonde sur ce que j'éprouve aujourd'hui et sur ce que j'ai cherché ces cinq dernières années. Demandez donc à Maelyn de vous décrire le genre d'homme que j'ai fréquenté. Aucun n'était aussi renfermé que vous et votre langue acérée vaut toutes les autres, mais je suis certain de ne pas me tromper dans mes affirmations. »
«Ne poursuis pas une chimère, Harry, tu risquerais de te brûler les ailes et de souffrir. »
« Pourquoi ai-je l'impression que nous avons déjà eu cette conversation ? »
« Peut-être simplement parce que tu es entêté et que tu ne comprends pas que je ne veux que ton bien. » Severus était fatigué de cette conversation qui ne menait à rien.
« Alors laissez-moi me rappeler. »
Il soupira. « Comme tu voudras. » Et il partit sans un mot de plus.
Hpsshpss
Lorsque Harry retourna à l'intérieur, il fut attiré par la musique. Severus extériorisait ses démons. Il entrouvrit la porte, s'assit et écouta. Il pouvait rester des heures à l'écouter déverser sa colère, sa tristesse, sa frustration dans les notes qui s'envolaient et atteignaient son cœur. Oui, il n'avait pas menti. Cet homme l'attirait et le fascinait. Il pourrait passer sa vie à essayer d'explorer toutes les couches qui composaient la personnalité de Severus à condition que celui-ci le lui permette.
Harry n'attendit pas la fin du morceau. Il monta dans son atelier et fit comme son colocataire : il déversa tout ce qu'il avait sur le cœur dans un dessin en noir et blanc. Tout y était représenté. Les doigts blancs à peine plus foncés que les touches ivoires de l'instrument sombre. Des yeux passionnés aussi sombres que son humeur, lui, dans l'ombre, l'espionnant discrètement.
Il reposa son crayon et regarda ses autres dessins. Une silhouette informe, cachée dans l'ombre du dessin revenait régulièrement. Il était maintenant persuadé que cet homme était Severus Snape.
