Attention, rien ne m'appartient. Les personnages appartiennent à J.K Rowlings
Ratings : R
Correctrices : AnthaRosa et Ishtar205. N'oubliez pas de les remercier pour leur travail.
Avertissement: Il y a dans l'histoire une référence à une grossesse mâle. Ce n'est absolument pas le sujet de l'histoire, mais on en parlera de temps à autre.
Tome 1 à 6 pris en compte
Attention, c'est un slash (relation entre deux hommes): SS/HP
Chapitre 8
Severus et Harry lisaient en silence. Ils n'avaient pas reparlé de ce qui s'était passé la veille. Tous deux faisaient comme si de rien n'était. C'était plus facile ainsi.
Harry jetait de fréquents coups d'œil à sa montre, incapable de se concentrer sur quoi que ce soit. Il avait l'impression que le temps le narguait. Tic tac. Tic tac. Tic tac. Il avait la sensation d'essayer de lire ce livre depuis des heures alors que seules quelques minutes s'étaient écoulées.
Il soupira et reposa son livre.
« Que vous arrive-t-il ? » La voix de Severus le sortit de sa rêverie. L'homme avait lui aussi posé son livre et le regardait de ses yeux perçants. Harry frissonna sous son regard brûlant.
« On dirait que le temps s'est figé ! » Murmura Harry. Ses doigts tapotaient machinalement le bras du fauteuil d'un geste impatient.
Le maître des potions haussa un sourcil et le jeune homme lui sourit. « Mes amis reviennent aujourd'hui. » Répondit-il simplement. « J'ai l'impression qu'ils sont partis hier. » Harry regarda par la fenêtre. Il pleuvait. L'arbre pleurait vraiment pour une fois. Ses branches plus inclinées qu'à l'accoutumée cherchaient à atteindre l'étendue d'eau sur laquelle tombaient les unes après les autres les gouttes de pluie. Il tourna à nouveau les yeux vers Severus. « Et pourtant, la perception que j'avais de ma vie a entièrement changé. Je ne suis plus tout à fait sûr de vivre dans le même monde qu'eux. »
Harry lui sourit tristement.
Severus avait le regard glacial lorsqu'il lui répondit, « La vie n'est faite que de changements. Acceptez-les ou non, c'est votre affaire. Mais vous avez encore le choix. Deux mondes vous tendent les bras : celui des moldus et celui des sorciers. Vous seul pouvez faire ce choix. » Ses mots étaient durs mais il ne pouvait pas prendre de décision à la place de Harry et son cœur saignait à l'idée de ne jamais retrouver son mari.
Il fut surpris de voir naître un vrai sourire sur le visage de son colocataire.
« Vous avez raison, Severus. Comme toujours. Cependant, je ne crois pas pouvoir effacer de ma vie les événements qui me reviennent en mémoire aussi durs soient-ils. Et je ne suis pas sûr non plus de le vouloir. » Les yeux émeraude s'ancrèrent dans ceux d'onyx.
Ce fut au tour de Severus de tourner la tête. Faisant fi des derniers commentaires de Harry, il répondit. « J'ai toujours raison, gamin insolent. » Malgré lui, Severus se détendit et réprima un sourire lorsqu'il vit la grimace qui se dessinait sur le visage du jeune homme.
Harry éclata d'un rire franc. Le Serpentard fut envahi par une vague de nostalgie. En cet instant, il ne désirait qu'une chose : prendre Harry dans ses bras, poser sa tête au creux de son cou, humer son odeur et déposer de petits baisers le long de sa mâchoire. Il se composa un masque d'indifférence et lui demanda, « A quelle heure atterrit leur avion ? »
« A15h. Ils arrivent dans deux heures. »
Severus haussa un sourcil. Il prit sa baguette et jeta un sort. « Je crois que vous commettez une erreur, Harry. Il est 14h30. Si vous voulez arriver dans les temps, vous devriez partir maintenant. »
« Pardon ? »
Harry regarda sa montre et vit que la trotteuse était arrêtée. Il toucha le verre de la montre qu'il portait au poignet et la petite aiguille reprit sa course. « Merde. » Il se leva brusquement « Je vais être en retard. »
Il ne vit pas le sourire rempli de tendresse de Severus, pas plus que la tristesse qui emplissait ses yeux noirs. « Harry, tu ne changeras jamais. » Murmura-t-il en reprenant son livre.
Hpsshpss
Harry sortit précipitamment du Refuge, le sourire aux lèvres. Il essaya de ne pas rouler trop vite, mais il était si impatient que respecter les limites de vitesse était vraiment difficile.
Il s'était arrêté de pleuvoir, mais les routes étaient encore gorgées d'eau et il voyait encore ici et là des personnes abritées sous de grands parapluies colorés.
Il était vraiment heureux de revoir ses amis. Ils lui avaient manqué. Ils étaient pour l'instant le seul élément stable dans sa vie chaotique. Leur départ avait coïncidé avec le retour de ses souvenirs qui l'avaient été plongé au cœur d'un monde qu'il ne connaissait pas dans lequel il était privé de tout point d'ancrage et où son ancienne vie semblait disparaître.
Ils n'étaient partis que deux semaines, mais ça lui avait semblé durer une éternité. Les revoir lui mettait du baume au cœur.
…
Il les vit arriver main dans la main. Harry observa le couple qui ne l'avait pas encore aperçu. Le tableau qu'ils représentaient aurait pu symboliser l'amour tel que Harry le concevait. La confiance et la tendresse se lisaient dans leur comportement, dans la manière dont ils se regardaient et dont ils se touchaient. Une boule se forma au fond de sa gorge mais il n'en comprit pas immédiatement la raison.
Sebastian pencha la tête vers sa femme, lui glissa quelques mots à l'oreille et en profita pour déposer un baiser sur sa joue. Maelyn rit aux éclats et le frappa gentiment avant de presser ses lèvres contre les siennes.
Harry ne pouvait détacher son regard du couple. Et il comprit : il était jaloux. Jaloux de leur bonheur. De leur amour.
Il fit rapidement taire cette pointe de jalousie qui s'était insinuée dans son cœur. Ils étaient heureux et ils le méritaient. Il n'avait pas le droit de leur envier cela.
Il soupira. Severus.
Il pensait beaucoup trop à cet homme qui d'apparence était si froid.
« Que dois-je comprendre, Severus ? Que mes talents de joueur d'échec ne sont pas à votre niveau ? »
« Je me suis simplement dit qu'un petit peu d'aide pour vous aider à gagner votre pari ne serait pas de refus. » Répondit celui-ci, ses lèvres légèrement relevées dans un très léger sourire.
Harry éclata de rire. « Ainsi, vous voulez me voir gagner. Pourquoi ne pas me laisser faire alors ? Perdez simplement. Ou mieux, déclarez forfait. »
Le Serpentard le regarda sérieusement. « Je ne perds pas Potter. Je ne veux pas non plus vous voir gagner. J'ai simplement pensé que ce serait plus juste. »
Le Gryffondor plissa ses yeux émeraude et rencontra ceux d'onyx. « C'est ce que l'on dit en général quand on a peur de perdre. »
Severus éclata alors de rire. Un vrai rire, le rire grave et chaleureux d'un baryton. « Harry, vous ne cesserez jamais de m'étonner. Vous et moi savons que même avec ce livre, vous ne gagnerez pas. Je suis un Serpentard, vous un Gryffondor. Jamais vous ne pourrez me battre. »
Il sourit malgré lui. Severus paraissait si détendu dans cette vision que c'est à peine s'il avait pu reconnaître l'homme cynique et froid qu'il côtoyait tous les jours. Et ce rire… Il voulait l'entendre à nouveau.
Il ferma les yeux afin de visualiser son visage et le graver définitivement dans sa mémoire. Les sentiments qu'il éprouvait pour cet homme étaient de plus en plus fort.
Il inspira profondément. Ce n'était pas le moment d'avoir ce genre de pensées. Ses amis l'attendaient.
Il s'avança vers eux pour qu'ils l'aperçoivent.
Ce fut Sebastian qui le remarqua le premier. Prévenant sa compagne, il la vit tourner les yeux vers lui et leur regard se croisa un instant avant qu'elle ne se jette dans ses bras, lui ébouriffant les cheveux dans un geste amical et fraternel.
….
Réuni avec ses amis, Harry se sentait léger. Maelyn racontait leurs vacances de rêves. Assise à l'arrière de la voiture, elle se penchait en avant pour être sûre que les deux hommes l'entendent. Harry riait de bon cœur. Sebastian levait les yeux au ciel et critiquait les exagérations de sa femme qui le tapait gentiment avant de l'embrasser pour se faire pardonner.
Ils étaient arrivés. Le silence tomba entre eux. Harry ne voulait pas gâcher leur surprise en divulguant son secret trop tôt. Maelyn fronça les sourcils et posa une main sur son bras, le forçant à se retourner. « Quelque chose ne va pas? »
Il lui prit la main et sourit, « Tout va bien. Venez, je dois vous donner votre cadeau de mariage. Je sais que je suis un peu en retard, mais j'espère que l'attente valait le coup. »
« Que -»
Il fit un clin d'œil à Sebastian qui ne dit rien. Il prit la main de Maelyn qu'Harry avait lâchée et ils le suivirent vers l'appartement. Avant d'entrer, il leur tendit à chacun une clef, « C'est la clef de l'appartement. Je n'en ai plus l'utilité. »
La lueur de tristesse dans son regard ne leur échappa pas, mais ils entrèrent en silence, ne comprenant pas la remarque de leur ami.
Rien ne semblait avoir changé. Harry n'avait presque rien emporté. Il avait tout ce dont il avait besoin au Refuge, même des vêtements, quelques peu désuets il est vrai, mais des vêtements tout de même.
« Bienvenue chez vous. » Il les entraîna vers son ancienne chambre. « Je ne savais pas si vous vouliez qu'elle devienne une chambre d'enfants ou d'amis, un bureau ou autre chose alors je l'ai laissé telle quelle en attendant votre retour. Mais vos désirs seront des ordres. » Il se mit au garde à vous en finissant sa phrase. Ses yeux brillaient maintenant de malice et il irradiait de fierté. Ses amis étaient abasourdis. Maelyn avait les larmes aux yeux. Elle était partagée entre le rire et les pleurs.
« Mais- et toi Harry ? Où vas-tu aller ? C'est ton appartement, tu étais là bien avant moi. »
Il baissa sa main et sourit pendant que Sebastian enroulait son bras autour de la taille de sa femme. « Plus maintenant. Vous aviez besoin d'un appartement, d'un lieu qui soit bien à vous et rien qui me retenait ici. » Sebastian ouvrit la bouche pour parler mais il poursuivit, « J'ai retrouvé mes racines et mes souvenirs reviennent lentement. Je vis maintenant dans une grande maison. » Il rit à gorge déployée, « Vous verrez, elle est absolument immense. Je ne suis pas le plus à plaindre, croyez-moi. »
« Tu vis avec Severus ? »
Harry écarquilla les yeux et ouvrit grand la bouche, imitant ainsi un poisson. « Pas dans le sens où tu l'entends. Nous vivons sous le même toit, c'est tout. »
Le regard de la jeune femme le transperça. Elle essayait visiblement de lire en lui. « Mais il t'intéresse, non ? »
Il passa nerveusement une main dans ses cheveux d'ébène. Son amie lisait en lui comme dans un livre ouvert. « Je ne sais pas. Je me sens attiré par lui, c'est indéniable, mais il me repousse dès que je m'approche un peu trop près de lui. Il m'empêche d'entrer dans son monde. C'est comme s'il avait peur de moi. C'est assez déconcertant. »
« Et tes souvenirs ? »
« Lyn, il n'a pas besoin de subir un interrogatoire -» Sebastian essaya d'intervenir, mais sa femme ne le laissa pas faire.
« Je veux juste savoir s'il va bien ! » Murmura-t-elle. Son mari déposa un baiser sur sa joue. Elle lui sourit chaleureusement.
Harry comprenait son amie, mais ne pouvait pas la regarder dans les yeux. « Je me rappelle certaines choses que j'aurais préférées oublier. » Murmura-t-il si bas que le couple dut tendre l'oreille pour l'entendre. Il poursuivit plus fort. « Je n'ai pas de souvenirs précis. Simplement quelques évènements importants dont j'aurais préféré ne jamais me rappeler. » Il s'appuya contre la porte de son ancienne chambre et observa la pièce dans laquelle il avait passé tant de temps. « Severus pense que retrouver mon passé est une mauvaise idée et je ne suis pas entièrement certain qu'il ait tort. Certaines choses sont si- effroyables -» Il frissonna. « Mais- J'ai besoin de me rappeler. »
« Tu sais que nous serons toujours là pour toi. » Maelyn posa une main sur son bras comme pour lui redonner de la force. Il leva les yeux vers elle et vit de l'inquiétude dans son regard.
« Oui, je sais. » Je ne crois pas que vous puissiez m'aider dans ce monde de magie, mais je sais que vous serez toujours là pour moi.
« A part Severus, as-tu rencontré d'autres personnes de ton passé ? »
« Non, simplement le couple dont j'ai fait la connaissance ce premier jour. J'ai discuté avec Ginny et j'arrive à me recentrer par rapport à elle. » Il regarda Sebastian d'un air entendu puis se tourna vers la jeune femme, « Elle te ressemble beaucoup Lyn. Pas physiquement, mais elle a un peu les mêmes réactions que toi. » Ses yeux riaient.
Sebastian réprima un sourire et le regard soupçonneux de la jeune femme oscilla de l'un à l'autre.
Elle allait répliquer lorsqu'on sonna à la porte. « Tiens! Tu attendais quelqu'un Harry ? »
Harry s'éloigna de la porte et jeta un œil en direction de l'entrée, « Non, c'est peut-être pour vous. »
Sebastian se dévoua pour répondre, laissant ses deux amis discuter. Lorsqu'il ouvrit la porte, il tomba nez à nez avec un jeune homme qui devait avoir le même âge que lui. Son visage s'éclaircit. Il lui tendit la main et lui sourit, « Rob ? Ca fait une éternité, comment vas-tu ? » Le nouvel arrivant serra la main tendue.
« Bien, mais je suis sûr que tu n'as rien à m'envier, vieux frère. » Il lui donna un petit coup sur l'épaule ce qui fit grimacer son interlocuteur. « Je suis navré de ne pas avoir pu assister à la cérémonie. »
« Ce n'est rien. Je sais que tu es très occupé. Allez entre, Harry a une grande nouvelle à t'annoncer. » Sebastian s'écarta pour le laisser entrer.
Harry discutait toujours avec Maelyn dans le couloir, regardant la chambre vide lorsqu'ils entendirent la voix du jeune homme. Harry sourit et s'approcha de son ami. « Rob, enfin de retour ? »
Ils s'embrassèrent comme de vieux amis qui ne se sont pas vus depuis très longtemps. « Oui et pour un moment. Je devrais pouvoir rester à Londres plusieurs semaines. Alors, quelle est cette grande nouvelle ? »
Harry tressaillit légèrement et s'écarta de son ami lorsqu'un violent mal de tête se déclencha. Il se massa le crâne pour essayer de faire taire la douleur naissante.
Rob fronça les sourcils roux et plissa ses yeux marrons, « Quelque chose ne va pas Harry ? » Sa voix froide était dénuée de compassion.
« Si tout va bien. Ca me lance, c'est tout. Ca m'arrive de temps à autre, il n'y a pas lieu de s'inquiéter. » Répondit Harry en plissant les yeux et en grimaçant.
Le jeune homme roux ne se départit pas de son expression méfiante. « Quelque chose a changé. » Grommela-t-il mais personne ne releva.
Maelyn scruta Harry, inquiète. Malgré son déni, il avait considérablement pâli. Elle fit la bise au jeune homme qu'elle n'avait jamais vraiment aimé et regarda son mari dans les yeux qui acquiesça à son appel muet. La jeune femme se plaça à côté de Harry et passa son bras sous le sien pour le soutenir.
Elle fit comme si de rien n'était, laissant le temps à son ami d'essayer de se reprendre.
« Harry nous a fait le plus beau des cadeaux de mariage. » Son sourire le désarçonna. « Il nous laisse son appartement avec les meubles en prime. » Elle se tourna vers Harry. « Je ne sais pas comment nous pouvons te remercier. »
Harry lui fit un sourire forcé, « C'est à moi que ça fait plaisir. » Il avait de plus en plus mal à la tête.
« Toujours à jouer les héros, pas vrai Harry ? »Renifla Rob avec dédain.
Sebastian fronça à son tour les sourcils. Rob cherchait encore à blesser leur ami. Ce n'était pas la première fois qu'il leur montrait son cynisme et qu'il s'en prenait ouvertement à Harry. Celui-ci ne disait jamais rien. En sa présence, il agissait comme s'il était sous l'emprise d'un sort. Bien qu'en cet instant, Harry semblait avoir davantage sa tête que les fois précédentes.
« Venez, ne restons pas plantés dans le couloir, nous serons mieux dans le salon et tu pourras nous raconter ce que tu as fait ces derniers temps, Rob. » Sebastian décida qu'il était temps qu'Harry s'asseye. Il chancelait.
Rob s'assit confortablement sur le canapé du salon, les dents serrées, le visage crispé, il regardait son ami d'un air peu amène. Harry se laissa tomber sur le fauteuil. Il avait commencé à plisser les yeux et tenait sa tête d'une main comme si elle était trop lourde pour tenir sur ses épaules.
…
Maelyn posa une main sur son épaule ce qui le fit sursauter.
Il ferma les yeux. Il était fatigué, si fatigué et sa tête dodelinait. Il sentait une présence malfaisante s'insinuer en lui. Il essayait de la combattre mais il était si las. Et la présence prenait de plus en plus de place cherchant quelque chose qu'elle ne devait pas trouver.
Maelyn le toucha à nouveau et il sursauta une fois de plus. Il ouvrit les yeux et rencontra un verre dont le liquide trouble faisait de petites bulles à la surface. Il ne pouvait détacher ses yeux de ce mélange étrange. On parlait à côté de lui, mais les mots ne l'atteignaient pas. La jeune mariée lui mit le verre dans les mains et l'aida à boire. Le froid et la sensation de l'eau salée dans sa bouche l'aidèrent à reprendre conscience et il se rendit compte que la présence réconfortante qu'il avait déjà ressentie à plusieurs occasions se battait à sa place pour faire fuir l'autre.
Ayant repris des forces, il chassa l'intrus.
Il termina son verre et levant les yeux, remercia Maelyn d'un sourire. Harry avait souvent des migraines. En particulier lorsque Rob était là. En général, une solution effervescente suffisait à soulager ses maux de tête.
Tout cela n'avait certainement pas duré plus de cinq minutes, juste le temps que Sebastian revienne avec les rafraîchissements.
Rob grimaça. Ses yeux lançaient des éclairs. « Alors, où vas-tu vivre ? »
Ce n'est pas Harry qui répondit, mais Sebastian, « Il nous a dit tout à l'heure qu'il vivait désormais comme un pacha dans une grande maison, histoire de nous faire comprendre que dorénavant nous n'étions plus du même monde. » Il fit un clin d'œil à Harry qui poursuivit. Son mal de tête avait diminué et il avait les idées plus claires.
« Tu as raison. Je vis dans un véritable palace. J'ai trouvé un véritable havre de paix. » Il leur fit en clin d'œil.
« Tu vis tout seul ? »
« Nous avons rencontré son colocataire au mariage. Il est grand, d'aspect sévère… Tu te rappelles du type avec lequel il est sorti quelques jours l'année dernière ? Comment s'appelait-il déjà ? Bi -»
« C'était Greg ma chérie. »
« Ah oui, et bien, il lui ressemble un peu. Il a l'air inabordable mais il est très gentil. Il s'appelle Se-»
« Serge ! » Harry préféra intervenir. Il ne savait pas pourquoi, mais il ne voulait pas donner tous ces détails à Rob qui continuait à le regarder avec cet air de défi. Il aurait pu jurer que c'est lui qui avait essayé d'entrer dans son esprit un peu plus tôt. Il ne savait pas pourquoi ni comment, mais aujourd'hui, il voyait son ami différemment.
« Tu commences à te souvenir, n'est-ce pas Harry ? » Rob parlait lentement comme pour l'évaluer.
« Me rappeler ? » Il rit nerveusement. « Non, ma vie passée reste une énigme pour moi. Je crains que pour réussir à récupérer ce que j'ai perdu, je ne doive retourner aux Etats-Unis, ce dont je n'ai aucune envie. Je suis très heureux ici. » Harry le fusilla du regard.
« Ainsi, tu ne te souviens de rien ? » Les traits de Rob se détendirent mais dans sa voix, il y avait toujours la nuance d'une menace.
« Tu ne peux pas nous quitter. »
« Je le fais parce que je le dois. Nous avions un accord. »
…
« C'est à cause de lui ? »
« De quoi parles-tu ? »
« Comment as-tu osé ? »
« Je ne te dois rien Ron. Absolument rien. C'est ma vie. »
Il repoussa les images. Ce n'était pas le bon moment. Rob ne devait se douter de rien.
Harry soupira et regarda son ami dans les yeux. Il lui répondit aussi sincèrement qu'il le pouvait « Non, pas plus que la dernière fois que tu es venu. Je te l'ai dit, les médecins ne sont pas très optimistes alors si tu voulais bien éviter de me poser la question à chaque fois que je te vois, je t'en serais reconnaissant. »
Rob sembla se détendre légèrement et Harry sentit à nouveau une intrusion qu'il repoussa avec force.
« Des choses peu ordinaires se seraient-elles produites autour de toi ? » Rob plissa les yeux
« Des choses peu ordinaires? Qu'entends-tu par-là ? » Harry passa une main dans ses cheveux. Il commençait à être exaspéré par l'attitude de son ami. Il ne l'avait pas vu depuis des semaines et ils ne parlaient que d'une chose : son amnésie.
Maelyn et Sebastian observaient l'échange sans comprendre ce qui se passait entre eux.
« Je ne sais pas, un verre qui se casse sans que tu le touches, un objet que tu ne retrouves pas alors que tu l'avais sous la main. Ce genre de petites choses. »
Il sait. Il a su pendant tout ce temps et il ne m'a jamais rien dit. Il serra les dents. « Non, je ne crois pas. »
« Est-ce que tu fais des rêves bizarres ? » Rob avait plongé ses yeux marron dans ceux d'émeraude cherchant la vérité derrière ses paroles, essayant d'ouvrir son esprit.
« J'ai toujours fait des rêves bizarres. Seulement je ne m'en rappelle pas à chaque fois. » Une nouvelle poussée. Harry le rejeta violemment et il vit son ami grimacer et se masser le front. « Tu vas bien Rob ? » La question paraissait métallique et tranchante.
« Oui, un léger mal de tête. Je vais vous laisser. Tu m'inviteras dans ta nouvelle demeure Harry ? » Rob prit un ton léger mais on pouvait sentir son désir d'entrer dans la vie de l'autre homme et de découvrir ses secrets.
« Bien sûr. Tu seras toujours le bienvenu chez moi, tu le sais. » Il n'était plus certain de croire une telle chose. Il devait retrouver ses souvenirs et savoir ce que son ami lui cachait pour pouvoir lui faire à nouveau confiance.
Les deux hommes se serrèrent la main mais la poigne n'était pas aussi fraternelle que d'habitude. Harry était mal à l'aise en sa présence et une angoisse sourde lui avait noué l'estomac jusqu'au moment de son départ.
« Pourquoi ne lui as-tu pas dit la vérité, Harry ? Je croyais qu'il était l'un de tes meilleurs amis. »
« Moi aussi je le croyais, mais je n'en suis plus aussi sûr. Il me cache quelque chose sur mon passé et je veux savoir quoi. Qui plus est, ce qu'il m'a dit sur mon passé n'a été que mensonges. Mes souvenirs sont de plus en plus nets. Je crois que je n'ai aucun lien avec ce petit village dans lequel je suis censé avoir grandi. Je l'ai cru quand il m'a dit que je m'appelais Harry Evans. Je l'ai cru quand il m'a dit que j'avais vécu en Amérique… Il m'a menti et n'a pas arrêté depuis que je le connais. » Il serrait les dents et les poings. Ses yeux flamboyaient de colère. Il n'acceptait pas les trahisons, en particulier des gens en qui il avait placé toute sa confiance.
Hpsshpss
Harry rentra chez lui relativement tard. Il avait prévenu Severus qu'il ne dînerait pas avec lui mais n'avait pas pensé revenir aussi tôt sur le matin.
Il montait les escaliers qui le conduiraient à sa chambre lorsqu'il l'entendit. Les sons montaient en crescendo, rouvrant les blessures du passé. Il eut l'impression que le vent tourbillonnait autour de lui. Il soufflait dans les branches et murmurait son nom à ses oreilles.
Le sifflement était amer. C'était un cri du cœur. Il avança lentement cherchant Severus qui il le savait jouait de son instrument, libérant son âme de tout ce qui l'empêchait de respirer.
Doucement, Harry entra dans la pièce et s'assit sur le canapé pour le regarder jouer, comme le faisait encore le portrait suspendu au-dessus du piano.
Severus dut le sentir car le vent de détresse retomba, le son devint plus mélodieux tel un chant d'oiseaux ou un bateau navigant sur une mer calme. La douleur était partie et il ne restait plus qu'un vide immense.
« Que faites-vous ici ? » Lui demanda-t-il sans ambages. Dans sa voix perçait la fatigue et l'indifférence.
« Je suis attiré par votre musique comme un papillon par la lumière. L'entendre me fait venir. Vous avez l'air fatigué, Severus. Peut-être devriez-vous aller vous coucher. »
« Je vous remercie pour votre sollicitude M. Potter mais je n'ai pas besoin d'une nounou. » La réponse amère était une façade.
Severus se sentait fatigué, vide et une froideur s'insinuait en lui, entre ses membres et dans son cœur. L'amertume l'avait gagné depuis longtemps. Dépouillé d'amour, il glissait lentement vers l'aigreur et devenait acariâtre.
Seule la présence de Harry freinait le processus. Ce soir, il n'avait pas la force de le repousser ou de se montrer méchant. Il voulait être seul et ruminer en paix.
« Severus, ce dont vous avez besoin maintenant, c'est de dormir. » Harry le regarda attentivement. Des cernes noirs entouraient ses yeux sombres, ses traits étaient tirés et ses lèvres n'étaient plus que deux fines lignes.
« Ce dont j'ai besoin ne vous regarde absolument pas, Potter. » Il ferma les yeux. Il voulait se débarrasser de sa présence obsédante.
Harry s'assit à côté de lui, sur le banc du piano, comme il l'avait fait ce premier jour.
« Que faites-vous debout aussi tard, Potter ? » Demanda-t-il rudement.
« Je viens de rentrer. J'ai passé la soirée avec Maelyn et Sebastian. » Penser à cette soirée le rendait mal à l'aise mais être à côté de cet homme était un réconfort et le malaise qu'il ressentait encore s'envolait doucement. Il effleura les touches ivoire du piano sans appuyer sur aucune.
« Potter, pensez un peu aux autres et laissez-moi. » Son ton exaspéré ne représentait pas le fond de sa pensée et Harry le ressentit lui aussi puisqu'il rit doucement. Son rire cristallin réveilla d'autres rires partagés.
« Vous n'avez pas plus envie de dormir que moi, alors si nous allions faire une partie d'échecs. A 3h du matin, nous n'avons rien d'autre à faire. »
« Vous êtes vraiment insomniaque et gryffondor jusqu'aux bouts des ongles. » Ronchonna Severus.
En se levant, Harry le vit grimacer et se masser le front. La tension avait envahi son corps qui était maintenant contracté et douloureux.
« Rasseyez-vous. »
L'ordre de Harry surprit l'homme le plus âgé qui le dévisagea. « Je n'ai pas l'habitude de suivre des ordres de n'importe qui. »
« Arrêtez de ronchonner et faites ce que je vous dis pour une fois. » Le ton était sans réplique et Severus s'exécuta.
Severus se raidit en sentant des mains froides sur sa nuque. « Que faites-vous ? »
« Vous avez besoin de vous détendre. Un massage vous fera le plus grand bien. »
« Je n'ai pas besoin de vos massages. » Il essaya de se lever mais Harry l'en empêcha. « S'il vous plaît Severus. Je vous promets que je n'ai aucunes arrière-pensée. »
Les doigts de Harry continuaient à glisser sur la peau nue de son cou et Severus en oublia ses réticences premières. Il ne sentait plus que la fraîcheur de ses doigts qui le brûlaient comme de la glace, envoyant des traînées électriques dans tout son corps, ravivant des sensations qu'il avait oubliées depuis longtemps. Comme il était Severus Snape, il parvint à contrôler les sons qui ne demandaient qu'à sortir. Il réussit à ne pas se retourner pour prendre possession de ces lèvres qui lui appartenaient depuis toujours et à ravir ce corps qui n'avait été fait que pour lui.
Harry sentit ses muscles se détendre sous ses doigts. La peau de Severus était douce et chaude. Ses cheveux qui tombaient délicatement sur sa nuque étaient de satin. Il se laissa guider par des sensations qu'il connaissait depuis l'aube des temps. S'il n'avait pas eu peur de se faire rejeter, il aurait embrassé la peau tendre, goûté la peau salée.
Ses mains remontèrent vers son crâne et entreprirent de masser le cuir chevelu si contracté. Il voulait embrasser ce point derrière l'oreille mais se retint au dernier moment.
Le souffle court, il se recula finalement. Il allait parler, dire n'importe quoi pour alléger l'atmosphère qui s'était soudain réchauffés lorsqu'il entendit une succession de notes qui bientôt formèrent une mélodie.
La musique qui s'éleva doucement ne venait pas du piano. Severus n'avait pas les mains dessus.
Il suivit le son, sachant que Severus s'était retourné et qu'il le regardait s'avancer vers la musique, incapable de l'arrêter. Mais pourquoi le voudrait-il ?
Il ouvrit la petite bibliothèque. Une main se posa sur son épaule. Il se retourna vers l'autre homme qui s'était silencieusement levé pour l'empêcher de découvrir la provenance de la mélodie.
Il avança la main vers une petite boite qui ressemblait traits pour traits à sa propre boite à musique. Une petite fille dansait. Sa main tremblait lorsqu'il la souleva pour la regarder de plus près. Tout était si semblable. Les dessins, la couleur, la danseuse, la musique…
Il la referma et la rouvrit. La main de Severus n'avait pas quitté son épaule. La musique changea et la petite fille ne réapparut pas. L'homme le lâcha. Hypnotisé par la mélodie, il avait oublié sa présence. Ce n'est que lorsque le froid le gagna qu'il remarqua qu'il était seul. Severus se servait un verre de scotch de l'autre côté de la salle.
« Pourquoi ? »
« Idiot, tu ne sais toujours pas te servir de ta baguette à ce que je vois. » Il déposa un baiser sur son nez et jeta un rapide sort sur la boite et prononça un mot.
Quand Harry l'ouvrit, il entendit la première musique que Severus avait composée. Une petite danseuse tourbillonnait au centre de la boîte.
Harry jeta le même sort, et la mélodie changea. La danseuse avait disparu et des images holographiques de lui et d'Harry pendant la guerre apparurent. Ce thème correspondait bien à la chanson, « Souviens-toi ! »
Harry en avait les larmes aux yeux. Il voulait une autre mélodie : 'ma vie avec toi'. Les images se modifièrent : Harry et Severus étaient ensembles, riant, plaisantant dans leur vie quotidienne.
« Merci Severus. C'est le plus beau cadeau que tu pouvais me faire. » Il posa la boite sur la table.
Severus prit la petite boite à musique et la dupliqua.
Les deux boites jumelles jouaient un air de Severus. Harry entraîna l'autre homme et malgré le peu de place, ils dansèrent enlacés l'un contre l'autre. Harry murmurait parfois quelque chose à l'oreille de Severus qui souriait légèrement.
La musique continuait, une mélodie après l'autre.
Torse contre torse.
Harry avait la tête posée contre son épaule et sentait l'odeur de fumée et d'épices. Severus. Les bras autour de sa taille le tenaient serré. Le souffle contre son oreille le faisait frémir. De temps à autre Severus le torturait en suçant le lobe de son oreille. Douce torture.
Sur cette musique, ils étaient seuls au monde.
Severus ne le regardait pas, semblait avoir oublié sa présence, mais la ressentant en réalité dans toutes les fibres de son corps.
La musique continuait, les hypnotisant, les rendant dépendant de leurs sensations. Severus connaissait ses effets. Il les avait déjà subis. Cet ancien horcruxe était certainement l'un des plus puissants. Il éveillait naturellement les sensations au point de ne plus pouvoir lutter contre.
Il ferma les yeux pour résister et but une gorgée de scotch avant de prendre la boite et de la refermer. Le silence s'abattit entre eux.
Harry avait les yeux dans le vague. Il était perdu dans ses souvenirs. La main de Severus se posa sur la joue de Harry et ses lèvres se posèrent sur les siennes dans une douce caresse. Juste des lèvres sur des lèvres. Il essaya de ne pas approfondir le baiser, mais la tentation était énorme.
Severus sentit Harry s'éloigner de lui. Mais contrairement à ce à quoi il s'attendait, le corps de Harry se serra contre le sien et ses mains se posèrent sur son dos mimant une étreinte. Les cheveux de Harry sous son nez, sa bouche collée contre sa tête annihilaient toutes ses résolutions et malgré lui, ses bras se refermèrent autour de sa taille, resserrant son corps contre le sien. Il ne s'était pas senti aussi bien depuis longtemps. Il devait se tromper. Il avait finalement dû s'assoupir.
La main de Severus remonta le long de son corps et se posa sur sa joue. Les yeux émeraudes s'ouvrirent finalement.
« Tu devrais aller te coucher Harry avant de prendre des décisions que tu risquerais de regretter. Que nous risquerions de regretter tous les deux. »
Dans cet état semi-hypnotique dans laquelle l'avait plongé l'horcruxe, Harry ne put qu'acquiescer. En regardant Harry partir, Severus soupira. Ils étaient passés près de la catastrophe. La prochaine fois, il savait qu'il ne pourrait pas lui résister. S'il y avait une prochaine fois.
