Alors c'est ça, l'épreuve pratique ? pensa Akira en se tenant les côtes, et gémit de douleur. Bordel, c'est pas possible ! Non, ça peut pas être aussi dur !
- Le temps est écoulé ! fit Present Mic en tapant des mains. Allez les jeunes, on pose son stylo !
Akira soupira de soulagement ; l'examen d'anglais avait été particulièrement retors, mais c'était le dernier. Tandis qu'il fit fit passer sa copie et celles de ceux derrière devant, il croisa le regard de Momo, qui lui adressa un message muet : "Comment ça s'est passé ?". Akira lui répondit par un signe "OK", et lui demanda la pareille. Elle haussa les épaules, un peu indécise, mais le garçon lui fit une moue sceptique, ce qui la fit rire.
Bien sûr qu'elle allait réussir ; elle était géniale et c'était impossible pour une fille comme elle de se faire marcher dessus.
Bon... Fallait quand même parler du plus étonnant, n'est-ce pas ?
Shoto Todoroki... Enfin, Shouko désormais, mais le changement avait quand même été très brut. Le lycée avait été prévenu que Shouko avait subi une attaque de vilain inconnue, mais ça ne l'avait affecté de façon négative ; comme Shouko était tout à fait d'accord pour rester sous cette apparence jusqu'à qu'il... enfin qu'elle décide de changer.
C'était assez étrange de voir à quel point les élèves s'étaient vite accommodés de la nouvelle identité de leur camarade ; dans son monde d'origine, il y aurait eut des regards d'évitement, des questions curieuses, et, dans le pire des cas, des insultes ou des moqueries. Mais là, c'était presque comme si Shouto avait changé de look.
En vérité, Akira saisissait parfaitement le "coeur du non-problème" : l'altérité dans ce monde poussait les gens à se respecter au mieux les uns les autres, enfin en théorie. Et puis Shouko ayant conservé l'alter de son ancien lui... enfin elle, mais bref ; elle n'était pas vraiment différente de l'ancien.
C'était surtout les filles qui s'étaient accommodé le plus rapidement à cette métamorphose ; elles avaient organisé une soirée exprès en son honneur, pour célébrer son entrée dans "leur cercle". Oui, se dit Akira en souriant tristement, la stigmatisation existait toujours, mais sous une forme moins néfaste quand même. C'est déjà ça.
- Il faut dire que Todoroki-chan est canon, commentait Sero tandis qu'Akira, Rikido, Jiro, Denki et Izuku mangeaient ensemble. Se rappelant d'une présence féminine à table, il voulut s'excuser : Sans offenses !
Mais la caractérielle apprentie héroïque haussa des épaules, ce qui en étonna plus d'un. Confuse, elle se justifia :
- Bah quoi ? Shouko-chan était déjà un beau gosse ; normal qu'elle le soit toujours.
- On parle de moi ? fit une voix faussement innocente.
La scène qui avait suivi avait failli faire étouffer de rire Akira : Shouko avait commencé à taquiner les garçons, en particulier Midoriya qui ressemblait à une tomate, pendant que Jiro et le jeune brun se lançaient des regards complices, conscients du fait que leur camarade bicolore ne faisait que s'amuser.
Mais là était le hic. Shouko était différente de Shoto sur ce point : elle n'était pas crédule.
Certes, elle gardait le traditionnel air déplacé de Shoto. Certes, elle avait ce même regard embrasé, parfois, à l'entraînement. Cependant, le petit détail turlupinait Akira au point où celui-ci se demandait bien si la Transmutation Génitalohormonique Complète pouvait affecter la psyché.
Et comme l'examen pratique arriverait dans deux jours, il devait les appeler eux.
Dans sa petite chambre à Yuei, le soir, il ferma la porte, tira ses rideaux et s'assit en tailleur sur le sol. Petit à petit, la tension dans ses muscles s'évanouit tandis que son souffle se faisait ténu, subtil. Ses épaules se relâchèrent, et rapidement la sensation d'avoir des fourmis dans tout le corps survint avec une timidité embarrassante.
La méditation, contrairement à ce que racontent tous les abrutis qu'Akira connaissait, ne servait pas seulement à se détendre ou quoi que ce soit ; c'était un exercice plus profond et hautement complexe qui consistait à vous plonger dans un état où votre âme se rapproche le plus de votre corps. Normalement, une âme est imaginaire et immatérielle, contrairement au corps rationnel et massique. Les deux sont incompatibles, mais arrivent à coexister via l'esprit, qui traduit les besoins du corps à l'âme, et les produits de l'âme au corps. Si l'un consomme de la matière pour produire de l'énergie, l'autre consomme de l'énergie pour produire des émotions matérielles, des sentiments.
Car oui : les émotions sont matérielles et basses. Mais c'est parce qu'elles sont produites à partir de rien (l'énergie) qu'elles sont si incroyables. Bref, nous discuterons de théorie plus tard.
Akira utilisait ce qu'on appelait le "Phasage", un état d'inconscience absolu qu'il avait déjà usé pour déceler les âmes multiples d'Izuku. Et c'était dans cet posture qu'il était le plus à même de cerner les contours de la sienne, englobant les trois lueurs différentes qui la peuplait : bleue, rouge et obsidienne.
Il sonda les tréfonds de son être, et tomba sur eux.
- Du jus de fruit ? proposa Yannis en lui présentant un verre rempli de jus de pomme.
- Merci, fit Akira en prenant le verre, et but. Mmh... Il est bien frais !
- N'est-ce pas ? sourit l'humain Porteur de Vérité. Je l'ai moi-même conçu, ça m'a pris deux siècles ! Ah, que le temps passe vite, ici !
- Qu'il nous informe de la raison de sa venue, qu'on en finisse, gronda Synnaï sur un trône formé de nébuleuses et de galaxies. Je suis las d'assister à vos enfantillages.
- Je vais faire vite : est-ce vous pouvez m'aider à trouver où se cache le nouveau Porteur de la Connaissance ?
- Non.
Akira cligna des yeux, avant de secouer sa tête, choqué.
- Mais... Vous voulez autant que moi le trouver pour le vaincre !
- Plus maintenant, intervint la voix éthérée de Laura. Notre existence commence à s'éteindre, car celui qui est le véritable maître du Pouvoir est bientôt revenu du Royaume des Limbes.
- Quoi ? Le Mage... n'est pas mort ?
- Surprise ! fit Yannis l'humain en agitant ses mains, tout sourire. On voulait pas te le cacher plus longtemps, c'est pour ça qu'on t'a laissé venir ici. Donc maintenant, plus besoin de jouer aux héros-héros, tu peux rentrer dans la capsule, et zoubida-pouète !
Akira n'en croyait pas ses oreilles : son corps avait été créé à partir des trois cadavres de Yannis, Laura et Synnaï pour remplacer le Mage pendant la bataille contre l'Empire et Ugo. Mais ce dernier revenait dans la réalité, les trois fragments qu'étaient ses colocataires s'échapperaient de son corps.
Qui sait ce qui adviendrait d'Akira par la suite...
- Tu as peur, décela le mournien sur son trône spatial avec un sourire narquois. N'aie crainte : la mort n'est qu'une étape de plus vers ta transcendance ultime.
- Du jus d'orange, en attendant ? proposa Yannis.
- J'en veux pas, de ton jus de merde ! (Akira le repoussa, puis se tourna hargneux vers le faux monarque) Et toi, je te signale que votre transcendance de merde, je m'en tartine les couilles avec le pinceau de l'indifférence.
- Eh, copyright !
- Tu dois nous comprendre : ton petit jeu était amusant pendant un temps, mais tu oublies que tu n'es qu'un reflet de nos âmes, rien de plus, rien de moins.
Reflet mon cul ! pensa-t-il en lui faisant un doigt. Cependant, il fallait avouer que leur comportement était étrange... Peut-être que...
- Je vois... En fait, quand vous serez partis, j'existerais toujours, hein ?
Les trois parasites se regardèrent furtivement, mais Akira les abritait au sein de son âme, son domaine ; personne n'était à l'abri de son regard, il était littéralement le dieu de ce monde.
- Voyez-vous ça... En fait, c'est vous qui avez peur ? (il tapa dans ses mains) Bien, je vais trouver un moyen de vous faire virer plus vite !
- Irrémédiablement idiot : tu ne pourras plus utiliser la magie.
- M'en fout : ça m'a jamais servi dans ce monde, alors maintenant. Allez, je serais sympa, je vous demanderais pas de payer le loyer en retard. Salut !
Shota approcha de la porte de la chambre de l'étudiant, et s'apprêta à toquer, avant de s'arrêter. Devait-il lui dire ? Ou non ? Le proviseur lui avait conseillé de le faire au plus tôt, mais lui ne voyait pas vraiment l'intérêt de lui donner une information pareille. Comment aurait-il lui-même réagi, si, d'un jour à l'autre, on lui avait annoncé qu'il allait mourir avant même que débute sa carrière de héros ?
Même Oboro ne l'aurait pas supporté...
Du moins, c'était son opinion. Akira devait savoir, quoi qu'il en coûte. Cet élève était devenu fort en très peu de temps, Hound Dog lui avait confié que leurs séances s'étaient nettement améliorées, qu'il n'était plus si imprudent et tenait à son existence autant qu'à celle des autres.
Il toqua une fois.
Rien.
- Akira, j'ai à te parler, maugréa-t-il en toquant une nouvelle fois. C'est important.
Toujours aucune réponse.
Surpris, sachant qu'il l'avait vu monter après avoir dit bonne nuit à tout le personnel de l'école proche, il ouvrit la porte. À l'intérieur, le jeune homme était assis en tailleur, le visage couvert d'une fine pellicule de sueur et tiré par l'effort. Tout autour lui, Shota vit le même phénomène qu'il avait observé il y a de cela plusieurs mois dans le gymnase :
Les formes géométriques lumineuses et dansantes. Et celles-ci tournoyaient autour de son élève.
Il crut d'abord que c'était l'Alter de ce dernier, mais connaissant sa nature, c'était trop peu probable. Et là, il se mit en tête que c'était un vilain qui tentait d'utiliser son pouvoir pour entrer dans la tête du jeune homme. Ne sentant son sang ne faire qu'un tour, le professeur se précipita pour secouer son élève.
- Réveille-toi, bon sang !
Et il se réveilla en inspirant comme après une longue apnée. Son regard passa du sol au plafond, puis revint fixer les yeux de jais de son professeur.
- Ai...Aizawa-sensei, vous m'avez fait peur !
- C'est toi qui m'a fait peur, gamin ! (il désigna les formes de lumière d'un signe de tête) Et c'est quoi, ces machins ?
- Vous arrivez à les v... Oh, ça ? se reprit-il maladroitement sous le regard sceptique d'Eraserhead. C'est juste mon Alter qui fait des siennes.
D'un simple coup d'œil, le héros activa son Effacement, l'éclat rouge sang se reflétant dans les yeux de son élève. Malgré le fait qu'il sache que son Alter le maintenait en forme, il fallait tout même plusieurs heures pour tomber dans un état déplorable. Les lumières, elles, ne disparurent pas.
- Ah... fit son élève avec une mine déconfite. Eh bien, c'est vraiment en train de se passer.
- De quoi ? s'énerva le professeur en désactivant son Alter, ses cheveux longs retombant sur ses épaules. Qu'est-ce qui est en train de se passer.
- Monsieur, je dois vous avouer une chose : mon monde est en train d'entrer en collision avec le vôtre.
Aizawa mit quelques secondes à raccrocher les deux bouts, quand son élève sourit et bondit vers l'interrupteur ; un "clic" plus tard, le professeur put constater avec amusement que la salle était remplie de cristaux d'ambre, de quartz et d'autres dorés et blancs.
- Surprise ! rigola l'élève. Avouez que je vous ai eu !
- Tss... Un vrai gamin à problèmes.
Seulement, Shota se doutait bien qu'il lui cachait quelque chose. Il secoua sa tête ; au moins, se dit-il tristement, nous avons tous deux des secrets à garder.
Le devoir d'un héros était de protéger les gens en danger, après tout.
Akira se retrouva seul.
Seul contre le héros le plus violent en lice.
- Ah ! Si un jour j'avais cru que Yuei m'aurait demandé d'intervenir dans un examen...
Knucleduster lui jeta un regard amusé.
Akira releva, couvert d'hématomes et se mit en position de combat. Le héros aux coups de poings d'acier haussa ses épaules, avant de lancer deux rafales du droit vers lui. Instinctivement, Akira ouvrit deux portails pour envoyer les poings derrière lui, mais le brutal lui balança un du gauche avec une force démesurée.
- Tes profs m'ont dit que t'étais un combattant plus efficace sans Alter. Allez, montre-moi que tu n'es pas là pour me faire perdre du temps !
Pow pow !
Des petits chocs puissants percutèrent Akira dans son dos, et il tomba au sol. Derrière lui, il entendit une voix beaucoup moins rocailleuse que la première, et tourna la tête : un type en hoodie d'All Might sombre avait sa paume tendue vers lui, le visage traversé d'un sourie :
- Il est redoutable, sensei ! Faites gaffe ! cria The Crawler.
Les ennuis s'amoncelaient de seconde en seconde...
