Akira retira son costume, tandis que ses camarades discutaient en faisant de même. Bien que le combat dantesque du duo Explobras et la magnifique performance de Momo l'ait impressionné, il y avait toujours cette chose en lui qui sautillait quand il avait regardé Jiro-chan se défendre férocement contre Present Mic aux côtés de Koda.
C'était étrange, comme sensation ; mais ce fut Kirishima qui le remarqua en premier, en lançant d'un ton étonné :
- Tout va bien, Arata-san ? T'as les oreilles toutes rouges...
- Hmm ?
- Tu es sûr que tu dors assez ? le mit en garde Iida-kun en le regardant avec inquiétude. Le sommeil est aussi important que l'entraînement, ne l'oublie pas.
- Je dors bien ! Je vois pas vraiment où est le problème...
Elle dansait sur le son de son coeur, tandis qu'elle donnait coups de poings et pieds avec une technique misérable. Mais son entrain et son regard brillant se tournèrent vers la caméra...
- Oh ! (Izuku, qui s'était tourné vers la conversation, fit une autre remarque : ) Tu es rouge comme une tomate, maintenant.
C'était dans ces moments-là qu'Akira aurait préféré que Denki soit long à la détente.
- Il a un crush !
- Je... Tu ne sais pas de quoi tu parles !
Sa réaction avait été aussi spontanée qu'excessive, Akira s'étant retourné d'une traite avec le visage en feu. Kirishima, Denki et Sero éclatèrent de rire, tandis qu'Izuku avait l'air gêné. Pourquoi réagissaient-ils de cette façon ? Et quelle était cette sensation tordue qui trépignait dans son ventre ?
- Mec, c'est viril comme réaction, ça ! assura le rouge en souriant de toutes ses dents.
- Même dans les ténèbres les plus sombres, une flamme discrète peut nous réchauffer.
Arrête de parler, supplia intérieurement Akira à Tokoyami.
- Alors, c'est qui ? demanda Sero en s'accoudant au mur, glissant un regard complice à Denki, qui ricanait.
- C'est pas vos oignons... maugréa le jeune brun en rangeant son costume pour enfiler sa tenue de cours. Déjà que vous m'avez pas rendu mon manuel de sciences, vous pensez que je vais vous le dire ?
- Oh, mais tu vas pas nous le dire ! glissa Denki avec un air malveillant. C'est l'heure...
Sero et Denki prirent des poses façon Detective Conan, leurs mains mimant des loupes en direction d'Akira, qui soupira d'exaspération.
-...de l'investigation ! compléta Sero.
- Cessez vos enfantillages, tous les deux, dicta Iida en agitant ses mains. Arata-kun est dans une période de stress intense et il faut le ménager !
- Merci de ta sollicitude, Iida-kun, et Akira inclina sa tête, le visage traversé par un désert de déception : Mais je ne pense pas que ces deux vont lâcher l'affaire de sitôt !
- Oh, mais qui te dit qu'on ne sera que deux ?
Tandis qu'ils sortaient fraîchement habillés des vestiaires pour les garçons, le groupe de filles débarqua dans le couloir quasiment au même moment. Téléphone à la main, Mina-chan semblait curieusement plus excitée qu'à l'ordinaire (ce qui était vraiment inquiétant ; une crise cardiaque survenait fréquemment chez les jeunes de nos jours). Quand elle vit le groupe de garçons arriver, son regard se glissa par dessus l'épaule d'Akira, et elle eut un sourire diabolique.
Craignant le pire, ce dernier se retourna, et constata avec consternation les deux visages de ses futurs interviewers. Avec un soupir supplémentaire, le brun rajusta son sac sur ses épaules, pendant que le groupe des filles et celui des garçons se remélangeait pour former la classe 1A. Et il la vit.
Ses cheveux violets qui flottaient sous l'humidité d'une douche récente, ses deux mèches avant qui s'étaient rebellées, qu'elle réajustait avec cette petite moue désabusée mais légèrement souriante. Puis, elle coula un regard brillant vers Momo, et ses joues rosirent quand elle rit à une de ses remarques, sans malice, juste ce qu'il fallait. Soudain, elle tourna légèrement la tête.
Leurs regards se croisèrent.
Le coeur d'Akira s'emballa comme jamais ; il y avait quelque chose d'innomable dans ce regard, mais il voulait... non, désirait avec une faim dévorante de se plonger à l'intérieur, de s'enfuir dans ce secret étrange et fugace.
Un clignement de paupières.
Il reprit ses esprits, et tourna la tête vivement ; heureusement, Mina et ses confrères n'avaient rien remarqué à cause de la petite foule qui se remplissait d'élèves d'autres classes ayant fini leurs cours. Qu'est-ce qui s'était passé ? Le temps s'était comme arrêté, pourtant la sensation qu'il avait ressenti était nettement différente d'une exhalation guerrière ou d'un danger fatal imminent.
Il s'ébroua ; l'important, c'était d'aller à sa séance quotidienne. Il dit au revoir à ses amis, sous les regards méfiants et vicieux des trois lascars qui hésitaient à le suivre pour découvrir une éventuelle conquête ; un regard noir les avertit de ne pas pencher vers cette décision. Une fois qu'il fut éloigné, il continua à marcher jusqu'au couloir menant au bureau de Hound Dog. Devant la porte, il toqua, entendit un "Entrez" grommelé, et suivit l'invitation.
L'air aussi hargneux qu'à l'ordinaire, l'assistant social et celui qui détenait toutes les informations des élèves, des plus banales aux plus sombres. D'un grognement canin, il se tourna vers Akira, qui ne sursauta pas, habitué de ce comportement, et puis Hound Dog avait du le sentir de loin.
- Eh bien, tu as fait vite, aujourd'hui ! (Akira haussa ses épaules, et se posa tranquillement sur la chaise en face du bureau) Ta journée s'est bien passée ?
- Je me suis fait matraqué par un vieux dur et un gars super rapide, mais j'ai été rejoins par un type que j'avais pas revu depuis le Championnat. Vous savez, Shinso-san ?
- Ah oui, le jeune aux cheveux violets, confirma Hound Dog. Je l'ai reçu pendant trois séances le temps de faire son profil psychologique pour voir s'il était apte à devenir un héros.
- Laissez-moi deviner : il a pas une haute estime de lui-même ?
Le chien éclata de rire, mélange entre étranglements et aboiements bruyants, avant de taper sa main violemment sur la table, grondant :
- Si je ne te connaissais pas aussi bien, j'aurais pensé que tu avais fouillé dans mes dossiers ! (Akira lâcha un sourire en coin) Toujours aussi empathique, à ce que je vois. C'est bien, c'est bien...
- Un problème ? s'enquit Akira, ayant remarqué le ton soucieux de sa fin de phrase.
- Pas de quoi t'inquiéter : un de tes professeurs était venu me voir pour me dire que tu semblais plus violent que d'ordinaire, et avec l'incident de ce matin, je m'inquiétais.
Akira soupira ; depuis qu'il avait fait des progrès en matière de respect de soi-même, les gens avaient vécu ce changement comme une sorte de nouveau trait de personnalité du jeune homme, qui pour sa part se sentait plus "libéré" que "violent". Néanmoins...
- Il l'avait cherché, expliqua-t-il simplement, arrachant un haussement de sourcils au conseiller.
- Ah oui ? Et pour quelle raison, si je puis m'y permettre ?
- C'est juste qu'il m'a tenu des propos assez insultants, soupira Akira, dépité de sortir un mensonge aussi honteux. Et je n'aime pas qu'on me traite de la sorte.
- Je l'avais remarqué... (Hound Dog prit un stylo, et nota quelque chose sur un papier ; probablement un rapport qu'il donnerait à M. Aizawa pour "tirer l'affaire au clair") Autre chose de négatif aujourd'hui ?
- Euh...
Devait-il se lancer sur le sujet du "crush" ? C'était quelque chose qu'il ne saisissait pas bien, sachant qu'il était un clone créé pour le combat et la guerre, qu'on l'avait bourré de connaissances militaires et des souvenirs d'expérience des trois cadavres parasitant sa tête. Mais pour ce qui était des expériences de lycée et "l'amour", ça lui était complètement inconnu.
- Si tu ne veux pas en parler, je ne te forcerais pas, ajouta Hound Dog, levant ses mains en signe d'abandon.
- Vous êtes surprenamment moins insistant. Il vous est arrivé quoi ?
Le chien sourit, laissant apparaître des dents capables de déchiqueter une pièce de boeuf bien épaisse en un coup de mâchoire. Pourtant, ce sourire trahissait un amusement bien visible dans son regard.
- N'est-ce pas mon travail de te poser des questions pour que tu me répondes ?
- Ouaip, mais si je vous aide à devenir plus efficace dans votre travail, c'est tout bénéf' pour moi, rétorqua le jeune homme en haussant ses épaules.
- Toujours sur la défensive dans ton petit rôle de "marchand de services", ricana le chien, avant de continuer : Très bien, on va jouer sur ton terrain en récompense de tes progrès sur nos nombreuses séances - il croisa ses mains - mais je ne sais pas si cette info va te servir : ton camarade Bakugo a récemment commencé des séances avec moi.
Bakugo ? C'était... étonnant. Bien que l'explosif ait clairement des problèmes sociaux et une personnalité invivable, la persective de le voir venir de lui-même voir Hound Dog... Non, c'est pas logique : il est trop orgeuilleux pour ça. Y avait qu'à voir son combat avec Altaïr ; une démonstration de force brute juste pour montrer qu'on doit pas lui chercher des noises.
Soit il était si ravagé qu'il avait fini par s'envoyer lui-même dans ce programme, soit c'était une cause extérieure qui l'avait poussé. Et connaissant l'ego surdimensionné du bougre, c'était la seconde possibilité qui était la plus probable...
- À ton visage, je sais déjà que tu as déjà trouvé une utilité à cette information... et le chien soupira : Sérieusement, je serais d'avis de plier les règles de Yuei pour que tu fasses un stage sous ma tutelle de conseiller ; tu as un vrai talent pour déceler le problème des gens et le régler à sa source.
- Je suis un héros, déclara Akira après une minute de silence.
- Cesse de te dévaloriser ; un "héros", selon la loi, sauve les gens des vilains et des catastrophes. Mais un héros selon les cœur de chacun, c'est quelqu'un qui chasse la noirceur dans leur vie.
- Et on en fait quoi de la noirceur dans la vie de ces héros ?
- Tu fais avec.
Court, simple, brut. Telle était la réponse à cette question complexe et presque morbide. La séance dura encore une quinzaine de minutes, où ils travaillèrent sur des exercices de relaxation, de discussion et de maîtrise de soi. Mais le jeune homme n'aborda pas le problème du "crush" sur le tapis, puisque c'était sûrement son corps de jeune homme qui répondait à ses hormones de manière agressive, l'énergie constante de son Alter était sûrement la cause de cette expérience évidente.
C'était forcément ça.
Oui, c'est juste ça, se dit Akira en quittant le bureau et en marchant à travers les couloirs ; de toute façon, quel que soit le problème lié à Jiro-san, cela finirait par un oubli simple et elle resterait une camarade distante qui le regardait avec son regard noir parfois, mais on y décelait une pointe lumineuse et espiègle, quelque chose de...
Arrête de penser ! pensa Akira en se mettant une gifle, quand il entendit.
- On joue les Roméo à sa Juliette ?
Il se retourna, pour voir Mina, sourire aux lèvres et téléphone à la main l'agitant comme un phare devant un bateau perdu dans une brume langoureuse et indivisible. Quand Akira vit enfin ce qu'affichait l'appareil, ses oreilles atteignirent des températures si hautes qu'il se demandait quand est-ce que des flammes jailliraient d'elles.
Une photo. Un simple assemblage de pixels lumineux et colorés, qui individuellement n'avaient aucune saveur. Ensemble, ils formaient un réalité si percutante que l'adolescent en eut le souffle coupé.
Lui, regardant Jiro-san comme un morceau de viande.
Hound Dog rangea le dossier d'Akira dans son tiroir, et soupira ; le gamin avait énormément de potentiel, mais il continuait encore et toujours à le réprimer derrière un masque d'arrogance ou de violence.
Soudain, quelqu'un entra dans la pièce.
- Ah, Katsuki, te voilà enfin ! Assieds-toi, mets-toi à l'aise...
D'une certaine manière, le blond et le brun étaient très similaires.
