— Quelqu'un a vu le nerd ? grommela Katsuki en tournant la tête vers la chaise vide en bas de la scène.
Kirishima haussa des épaules, occupé à aider Ojiro à monter les projecteurs. Le blond pesta face à la nonchalance de ses camarades de classe. D'accord, Izuku quittait l'école ! Et alors ? Ils n'étaient pas là pour faire de lui un bouc émissaire ; si le nerd avait trouvé sa place chez son maître de stage, alors grand bien lui fasse.
Malgré son antipathie sévère pour celui qui avait fait irruption au pire moment, Katsuki souhaitait quand même ne pas l'envoyer paître la veille d'un spectacle. D'accord, il ne participait pas, mais il pouvait tout de même rester aider et regarder ! Résolu à trouver la tête de brocoli, il bondit de la scène et partit dans le couloir.
Peu de temps passa avant qu'il n'entende les cris. Déchirants, qu'ils étaient. Katsuki sentit son échine frémir, chose qui n'arrivait que pendant les séances avec Hound Dog… ou quand Aizawa-sensei le convoquait. Mais là, c'était plus… primal ? Une sorte de frayeur qui agrippait sa peau comme de la vieille sueur.
Il pressa le pas. C'était plus qu'un mauvais pressentiment. Un présage, presque. Soudain, une explosion ! Puis une odeur de brûlé et de la fumée qui léchait les fenêtres du couloir. Bordel, qu'est-ce qui se passe ? Katsuki fit fi des règles, ouvrit la fenêtre et sauta.
Une roulade pour atterrir (il avait compris qu'il ne devait pas se reposer uniquement sur son Alter pour se déplacer), et il traversa la fumée en courant. Les cris étaient distincts, désormais, et… il glissa pour éviter un éclair. Quoi ?
Des gerbes de foudre partaient dans tous les sens. Soudain, une bandelette jaillit et agrippa son bras. Une torsion, et le blond fut projeté au sol. Aizawa-sensei jaillit de la fumée, ses lunettes de héros sur ses yeux. Katsuki sentit son Alter refluer, et le professeur s'écria :
— Mais qu'est-ce que tu fais là ?
— J'vous r'tourne la question ! C'est quoi tout ce bordel ?
Le professeur voulut répondre quand un nouvel éclair perça la fumée, la dispersant. Il l'esquiva, emportant le blond dans son sillage qui alla s'écraser lourdement sur le côté. La fumée dissipée, Katsuki put enfin constater l'horreur : Denki massacrait des élèves à coup d'éclairs.
Le sang du blond ne fit qu'un tour.
— Arrête ça ! et il se propulsa d'une explosion sur le Survolté.
Le type tourna la tête, et malheur : des yeux mordorés. Un éclair fila vers Katsuki, qui l'esquiva d'une petite détonation, tout en se retrouvant derrière Denki. La fumée et la lumière l'empêcha de voir la prochaine attaque de l'Explosif, qui lui fracassa le dos sans ménagement. Le Survolté s'effondra au sol.
Katsuki vit son professeur en prise avec d'autres élèves, et même d'autres profs ! Tous aux regards dorés… Paniqué, le blond chercha des yeux…
— eLlE n'A jAmAiS éCoUtÉ mEs AvErTiSsEmEnTs !
Au dernier moment, il se retourna pour esquiver une main aussi douce que dangereuse. Katsuki sentit son cœur s'arrêter en voyant le regard torve et brillant d'Ochako le regarder avec une haine non dissimulée.
— La Réponse ? fit-il en s'écartant d'un bond.
— pErDu ! ricana la voix, qu'il reconnût enfin.
— Mineta, gronda Katsuki.
Ochako fit craquer son cou, le tordant dans des angles inhumains, avant de rire ; sa voix fut plus maîtrisée quand le nabot parla à travers elle :
— On dirait que je commence à prendre le coup de main. C'est difficile de contrôler autant de personnes à la fois.
— LIBÈRE-LA, CONNARD !
Il fonça sur elle en hurlant, ses mains fumantes et ardentes… mais un rayon noir le frôla. Ce moment d'inattention permit à Ochako d'esquiver l'explosion qui suivit. Katsuki tourna la tête pour voir qui était le tocard qui lui avait balancé la sauce.
C'était Akira. Ses yeux suintaient d'énergie noire et violettes, qui coulait sur ses joues pour atteindre ses épaules, atteignant ses bras. Des tatouages étranges se formaient à l'aide de ce fluide qui semblait, à en juger par le visage luisant de sueur et tordu, devait provoquer une souffrance inouïe.
— Je ne te ferais pas le plaisir d'affronter ta bien-aimée, ricana Mineta depuis la bouche d'Ochako, perchée sur un réverbère. Je veux tester ma nouvelle arme contre le plus fort de cette école qui ne soit pas tombé sous mon emprise.
Un nouveau rayon noir jaillit, et le blond l'esquiva. Il avait eu raison de s'entraîner bien plus avec son nouveau corps ! Mais quelque chose dans la froideur de ces rayons lui hurlait d'en aucun cas se laisser toucher.
Le Akira contrôlé continua d'arroser abondamment Katsuki, qui faisait exploser ses mains pour échapper à la pluie noire. Katsuki finit par remarquer un détail : les rayons noirs ne causaient aucun dommage au sol, aux bancs ou aux lampadaires. En revanche, dès qu'ils touchaient de la verdure ou des plantes, celles-ci se noircissaient à vue d'œil. Avant, il pouvait détruire les trucs pas vivants sans faire de mal au vivant… Maintenant c'est l'inverse !? Et c'était pire, parce que dès que le blond se cachait derrière un panneau ou un mur, le rayon traversait ce dernier comme un tison dans du beure.
— Arrête de fuir, et combats ! jappa Akira avant de bondir en faisant exploser le sol sous ses pieds.
Il parvint à Katsuki en un battement de cils, et attrapa son poignet pour le balancer violemment contre le bâtiment, si ce dernier ne l'avait pas anticipé ; il lâcha quelques explosions pour ralentir sa projection et plus encore pour foncer tête la première vers Akira. Ce dernier rit et des flammes noires jaillirent de ses pieds pour s'envoler vers le blond.
Les deux bataillèrent dans les airs, un démon en furie de feu et de fumée contre une tornade noire et violette. Katsuki esquivait chaque rayon, et le rendait bien en en le pulvérisant de son Alter. Le corps d'Akira encaissait chaque détonation, des cloques larges se formant sur son corps rougi et roussi. Ses cheveux vibraient d'étincelles, mais son regard, malgré le dessèchement provoqué par les explosions consécutives, brillait d'un éclat maladif qu'aucun mortel ne pouvait comprendre : l'éclat d'un héros, un vrai, qui tuait des gens sans discontinuer pour un but plus grand, plus haut.
Akira attrapa le col de Katsuki et lui fila un coup de poing dans la mâchoire. Ce dernier absorba le choc en inclinant sa tête sur le même côté que le coup, avant de tourner sur lui-même à l'aide d'une explosion pour donner un coup de pied dans les reins du type. Lourd. Solide. Aucune réflexion ne permit à Katsuki d'expliquer pourquoi il ressentait cela, mais il savait que ce coup n'était pas assez.
Il fallait faire plus. Beaucoup plus pour vaincre un type qui venait de débloquer une toute nouvelle dimension à son Alter, un type qui vous surpassait de loin quand il devenait sérieux.
Il fallait PLUS.
PLUS. PLUS. PLUS. PLUS !
Quelque chose se brisa dans le corps de Katsuki. Puis se reforma, se remodela en l'espace d'un Big Bang. Et alors que la science elle-même l'aurait démenti, Katsuki la mit en défaut. Son pied implosa, et transforma l'air en volcan, provoquant un cataclysme dans les airs. Le recul fut tel qu'il sentit son bassin se déboîter, et le son fit éclater ses tympans et les fenêtres de tout le lycée. Le garçon sortit du nuage de fumée, à moitié sonné, et s'écrasa sur un terrain calciné non loin.
Non, pas fini… Katsuki tenta de se relever, mais ses jambes, elles… elles ne bougeaient plus du tout. Il résista encore quelques instants, avant de sombrer dans l'inconscience.
Depuis les fenêtres brisées du lycée, Mineta observa le nuage s'étioler… et Akira en sortir ; il avait l'air mal en point, son corps à moitié en charpie. Il traînait du pied qui était tordu de façon peu conventionnelle. Mince, je croyais qu'il serait plus solide ! Tant pis… Mineta se détourna avec un soupir déçu, délaissa son contrôle sur Akira, qui tourna de l'œil et s'effondra au sol.
Le détenteur du Savoir se tourna alors vers le champ de bataille. La police et d'autres héros avaient débarqué, mais ça ne servait à rien ; la moitié de la ville était sous le contrôle du cerveau génial. Chaque petit neurone, dopé de Vérité, contrôlait un habitant de Musufatu. Pour peu que l'armée intervienne dans les plus brefs délais, le chaos s'instaurerait bien assez vite et bientôt, ce monde serait plus facile à conquérir…
Que… ? Cette pensée, ce n'était pas lui ! Mineta se concentra pour chercher de quoi il s'agissait, mais plus il le faisait, plus l'impression grandissait, prenait de la place : il devait affaiblir ce monde pour que… d'autres viennent ? Non, c'est MON monde, pas le vôtre !
— Allez-vous en ! cria-t-il pour lui-même en se tournant dans tous les sens.
Malheureusement, celui qui détenait la Vérité n'avait pas lu la notice qui allait avec ; on ne joue pas impunément avec l'Ossature de l'Univers.
— Partez, partez ! Laissez-moi tranquille, vous avez des infinités de mondes à conquérir, laissez-moi le mien !
— Qu'est-ce que tu baragouines, encore ?
Il se retourna, et ses yeux s'écarquillèrent de surprise : Momo, un couteau à la main, se tenait dans le couloir. Quoi ? Quoi, quoi, quoi ? Il leva les yeux : son regard n'exprimait ni haine, ni colère, ni peur. Juste… une simple évidence. La peur la plus primale l'enserra.
Elle va me tuer !
Momo marcha vers lui, lentement. Mineta secoua sa tête, des larmes lui vinrent au yeux. Il était désemparé ; la Vérité lui avait caché la vérité. L'arroseur arrosé !
TU N'ES PAS DIGNE DE NOUS
— Noooon ! Non, non, non ! pleura-t-il en se mettant à genoux, joignant ses mains.
Il ne savait pas qui il implorait. Il sentait la Vérité qui s'étiolait, échappait à son contrôle, le rendant plus bête, plus animal, plus égal aux autres… Un sentiment insupportable d'impuissance.
— Tu l'as cherché, annonça Momo, s'arrêtant devant lui.
Elle leva son arme, le soleil crépusculaire se reflétant sur la lame.
— Je t'en supplie, je… il m'a contrôlé ! La Réponse m'a contrôlé !
Les yeux de Momo frémirent. Elle se mordit la lèvre inférieure, et sa main trembla. Ce fut l'occasion ou jamais ! Mineta sortit lui-même un couteau et le planta dans le flanc de Momo, qui cria de douleur.
— Trop tard, idi…
La lame se planta dans son cou, et un brusque mouvement brisa sa clavicule.
Les ténèbres finales l'engloutirent.
Au moment même où Momo accomplit son geste funeste, l'adrénaline partit pour de bon ; la douleur revint à elle et la ramena à la réalité. D'un cri, elle plaqua sa main contre sa plaie qui saignait abondamment. La jeune fille tituba et se laissa glisser contre un mur. Elle respira en sifflant.
Petit à petit, les cris et les explosions, les autres bruits de batailles, s'arrêtèrent.
Sa conscience vacillait, elle…
—...va bie… vais te sortir…
Une voix dans les ténèbres. Quelqu'un la souleva, la banda et la plaça sur un brancard. La voix continua de parler, une ancre protectrice qui l'empêchait de sombrer. C'est sûrement Akira, se dit-elle, rassurée. Après quelques instants sans grande temporalité, elle laissa sa conscience flotter dans le doux bain de l'inconscience.
Izuku serrait la main de son ancienne déléguée, l'observant avec inquiétude, tandis que les secours faisaient rouler le brancard.
— Elle perd beaucoup de sang ! cria l'un d'eux.
— On transfuse ! s'écria une autre, qui se tourna vers Izuku : Quel groupe ?
— Je… (il hésita, avant de répondre) O positif. Comme moi.
— C'est parfait ! fit un autre brancardier, avant de prendre un air soucieux : Vous acceptez ?
Izuku hésita de nouveau.
Dès qu'Akira s'était révélé être, comme l'avait prédit M. Yokoshima, le nouveau détenteur du pouvoir de la Réponse, il avait fait valdingué Izuku à travers les murs, et ce malgré le One For All ! Heureusement, Kacch…tsuki avait été si incroyable qu'il avait vaincu Akira. Peu de temps après, les gens avaient été libérés du contrôle d'Akira.
On aurait pu déplorer aucun mort, y compris Akira qui, d'après la police et les héros, était toujours en vie, mais…
Izuku tenait la main d'une meurtrière. Fier de la découverte de la supercherie d'Akira, Mineta avait tenté de combattre son ancien camarade corrompu, secret qu'il avait confié à Izuku avant de se jeter à l'eau. Malheureusement, il n'avait pas prévu que, malgré toute l'intelligence du monde, on se fait écraser face aux gens froids comme Akira.
Et pour se venger de cette trahison, ce dernier avait ordonné à Momo de le tuer. Il la contrôlait, bien entendu… Et c'est ce qui poussa Izuku à éprouver une haine immense envers Akira.
Tout comme All Might avait eu son All For One, Izuku avait eu son Akira. Mais contrairement à son prédécesseur, ce n'était pas le vert qui l'avait vaincu. Je me rachèterais en traquant chaque vilain dans chaque ville, chaque pays. Je ferais de ce monde un havre de paix où tous souriront.
Il jura sur sa vie, et sur son sang qu'il offrit à Momo pour sauver la sienne.
— Sensei !
Shota s'arrêta brusquement ; Kirishima, qu'il combattait dans l'instant d'avant, s'était mis à genoux, les mains levées. La fille était redevenue garçon, et pleurait à chaudes larmes. Le professeur, choqué, baissa les bras. Il haletait ; autour de lui, ses élèves, déboussolés, esseulés, en larmes et couverts d'hématomes, de brûlures et d'éraflures.
Mais il se pétrifia quand la police débarqua… et menotta Akira qui ressemblait à un cadavre ambulant.
— Je…
Les secours arrivèrent, mais il ne bougea pas. Il était en état de choc. Le professeur principal, qui avait juré de protéger ses élèves devant chaque père, chaque mère, chaque parent… Il avait failli de nouveau à son devoir. Il n'y aurait pas de retour en arrière. Les secours le secouèrent, mais il ne répondit pas.
Il regarda ses mains : calleuses à force de serrer les bandelettes, rouges et suintantes de sueur. D'autres gouttes se formèrent…
Pour la première fois de sa vie, il pleurait.
— Ce qui nous est arrivé, annonça Nezu devant ses élèves valides, est une tragédie. Chacun d'entre nous a pâti de ce désastre, et certains plus que d'autres. Il est de ma responsabilité, que dis-je, de mon devoir de directeur de vous annoncer que ce tragique événement aura une conséquence sans retour : je suis dans le regret de vous annoncer que l'académie Yuei ferme ses portes (le directeur s'arrêta pour laisser les élèves digérer l'information) Nous nous y attendions depuis longtemps, Musufatu et même le Japon n'était plus sûr sous la menace de la Réponse. Nous avions crû en notre victoire, en notre salut quand nous l'avions capturé. Mais désormais, nous payons le prix cher de notre orgueil. Moi le premier, en pensant déléguer l'avenir du monde à des jeunes comme vous. Vous n'étiez pas prêt, je vous ai lancé dans le torrent trop vite.
Le directeur marqua une pause. Il n'avait aucune envie de pleurer, mais il voulait arracher le papier peint des murs.
— Je… n'ai pas été honnête avec vous ; je vous ai caché des informations confidentielles concernant la sécurité de l'école, en pensant vous protéger. Ce fut mon erreur fatale : je vous considérais comme des adultes d'un côté, de l'autre je vous traitais en enfants. Ce qui, finalement, ne m'écarte pas du fait que je me suis comporté comme l'un d'entre eux, à jouer avec vous comme un général avec ses soldats. Vous n'êtes pas des soldats : vous êtes de héros (il sortit une liasse de documents de sa chemise) et vous méritez que le monde vous offre une chance de parfaire votre rêve. J'ai ici une recommandation pour la N.I.H, la Nouvelle Institution Héroïque fondée par Kei Yokoshima. le PDG d'Herolutions. Il pourvoira à vos besoins, vos bourses et vos enseignements. C'est tout ce que je peux faire… même si c'est loin de me racheter.
— Vous vous êtes racheté !
C'était Mashirao Ojiro qui s'était levé, les larmes aux yeux. Nezu sentit une bouffée de courage monter en lui, lui rappelant All Might quand il levait le poing dans ses jours glorieux. Mais il ravala cette fierté et dit d'un ton solennel :
— Vous êtes jeune, M. Ojiro, alors je ne m'attends à ce que vous puissiez comprendre comment un adulte rachète ses fautes.
— Je…, mais le directeur l'arrêta en levant la main. C'est alors qu'une élève de la classe C se leva :
— Et les professeurs, qu'est-ce qu'ils vont devenir ?
— Mes collègues, contrairement à moi qui démissionne de mon poste de directeur, iront faire cours à la N.I.H. J'ai passé un accord avec M. Yokoshima : en échange qu'aucune poursuite ou harcèlement ne soit encouru envers vous, il récupère mon corps enseignant et en disposera comme bon lui semble, sauf si ces derniers démisionnent.
— Et Aizawa-sensei ?
C'était Shoto Todoroki qui s'était levé. Redevenu garçon, il semblait encore plus froid qu'à l'ordinaire.
— Je suis dans le regret de vous annoncer que votre professeur…
