23-Les cicatrices du passé

Après avoir fait un rapide rapport au capitaine Clancy et confié la bombe à Adam, au laboratoire des empreintes, Jessie amena Flack et Stella aux vestiaires et finit par retirer son blouson sous leurs regards interrogateurs et curieux.

Jessie (leur tournant le dos) Stel', tu peux m'aider. J'dois retirer mon bustier.

Don (embarrassé et se raclant la gorge) Heu…Je suis là, je te signale…

Jessie : J'dois t'montrer quelque chose, Donnie Boy…Et j'ai un soutien-gorge, donc pas d'panique, ok ?

Don (avec une moue incertaine) Si tu le dis…

Haussant les épaules, Stella aida donc Jessie en défaisant les lacets de son bustier de cuir jusqu'à ce que la jeune détective puisse enfin le retirer facilement. Lorsqu'elle l'enleva totalement, Don et Stella écarquillèrent les yeux face à ce qu'ils voyaient : le dos de la jeune femme était parcouru d'une longue cicatrice d'une vingtaine de centimètre, qui partait du bas de l'omoplate gauche pour s'arrêter au-dessus du rein droit.

Stella (tendant la main puis la retirant, n'osant pas y toucher) Jessie…Que…

Jessie (les regardant par-dessus son épaule) Tu peux y toucher, Stel', j'en mourrais pas.

La scientifique glissa doucement deux doigts sur la cicatrice bien rose, presque intriguée par sa texture un peu rugueuse et douce à la fois. Comment une si jeune fille pouvait avoir une telle trace sur le corps ?

Don ne quittait pas le dos de sa partenaire des yeux. Lui qui était si sûr qu'elle ne pouvait le comprendre…Mais peut-être que si, au final…

Stella : Jessie…Comment… ?

Jessie : D'où me vient cette cicatrice ? D'une bombe…

Don (surpris) D'une… ! Comme moi ?

Jessie (avec une petite moue comique) D'une certaine façon…J'avais mis un grand ponte de la drogue colombien sous les verrous. Mais pour qu'il y reste, mon témoignage était vital. Alors, ses fidèles collaborateurs ont décidé de me descendre…En piégeant ma voiture. Heureusement que j'ai entendu le déclencheur…J'ai eu le temps de m'éloigner…Mais pas suffisamment…Un bout de carlingue de ma voiture s'est planté profondément dans mon dos…

Stella : Et ?

Jessie : J'suis une chanceuse. Un peu plus et ça m'aurait sectionné l'épine dorsale, me tuant sur le coup…

Don déglutit avec difficulté en l'entendant, mais était déconcerté par sa manière de raconter ce tragique évènement : aucune peur, aucune crainte, juste de l'objectivité avec quelques notes d'humour de son cru…Comment faisait-elle ?

Stella (atterrée) Mon Dieu…Quand était-ce ?

Jessie : Il y deux ans. Quand je pense qu'les toubibs craignaient que j'reste paralysée…Mais c'était vraiment très mal me connaître…

Don : En effet…

Jessie (ravie de l'entendre enfin parler) Par contre, je suis passée par les mêmes phases que toi, Donnie Boy…C'est pourquoi Clancy nous a mis ensemble…Pour que je puisse t'aider… C'est vraiment un bon chef…

Don (grognant et buté) Je…Je n'ai pas…

Jessie (se tournant enfin vers eux) Ne m'dis pas qu'tu n'as pas besoin d'aide, Donnie Boy, car tu t'mens à toi-même. Tu as besoin d'aide ! (jetant un rapide coup d'œil discret vers Stella) Je n'serai peut-être pas la mieux placée mais j'vais t'aider à mettre cet évènement dans un coin de ta tête. T'as déjà bien progressé en rentrant dans cet immeuble. Maintenant, tu vas nous montrer ta cicatrice…

Don (surpris) Quoi ! Tu l'as déjà vue !

Puis le détective grimaça en se rendant compte de ce qu'il venait de dire…Bravo, il venait d'avouer, devant la femme dont il était follement amoureux, qu'une autre l'avait déjà vu nu…Il venait de ruiner ses chances déjà infinitésimales…

Voyant le regard noir de Stella posé sur eux et soupirant face à la gaffe de Flack, Jessie leva les yeux au ciel et fit un sourire rassurant à la scientifique pour calmer sa colère muette mais visible…Enfin, pas pour un certain grand benêt de détective qui avait, certes, de magnifiques yeux bleus…

Jessie : C'était involontaire…de sa part. J'suis allée prendre une douche chez les hommes et j'y ai trouvé Donnie Boy. Alors…Et bien, j'ai fait comme d'habitude…

Don (grognant) Ha, parce que c'est une habitude chez toi de mater tes collègues sous la douche…

Jessie (haussant les épaules) J'fais toujours c'que j'pense, j'te l'ai déjà dit, Donnie Boy. Et puis, y a pas mal de filles ici qui aurait tellement aimé être à ma place… (faisant un court silence stratégique) N'est-ce pas, Stella ?

En entendant la détective prononcer son prénom, la scientifique sursauta et se mit à rougir violemment, admettant intérieurement que la jeune détective avait raison. Combien de fois s'était-elle surprise à essayer d'imaginer le corps nu et musclé de Flack ? De trop nombreuses fois, surtout depuis ces derniers morts, après l'explosion…

Don haussa les sourcils, surpris de voir Stella virer au rouge vif face aux dernières paroles de Jessie. Nooon…

Jessie (s'amusant de leurs réactions) Passons. Ta cicatrice, Donnie Boy.

Don (revenant à Jessie) Non. C'est…

Jessie : Hideux ? Douloureux ? Un signe de ta faiblesse ?

Flack grimaça, détestant de se faire percer à jour aussi facilement. Et par Jessie en plus ! Depuis qu'il était sorti de l'hôpital, le jeune homme ne mettait plus que des chemises foncées, n'allait plus à la piscine, évitait de se déshabiller devant ses collègues et même de prendre une douche dans la salle d'eau commune de la police, sauf en cas extrême. Mais la montrer à Stella…Il s'y refusait…

Jessie (les mains sur les hanches) Tu veux vraiment qu'j'utilise la manière forte, Donnie Boy ?

Ouch ! Là, le détective hésita et finit par capituler. Il retira sa veste puis sa cravate et commença à déboutonner lentement sa chemise en partant du col. Et plus il s'approchait de sa cicatrice, plus ses mains hésitaient et tremblaient. Il ne regardait même plus les jeunes femmes….Il avait honte…

Stella, très attristée, se demandait pourquoi Jessie imposait ça à Flack mais comprit peu à peu en voyant les mains tremblantes du détective. Il fallait l'encourager…Le rassurer…

Stella (gentiment) Attendez Flack, je vais vous aider…

Don leva la tête et regarda la scientifique, surpris, tandis que Jessie était aussi étonnée que lui par la réaction de Stella. Elle ne s'attendait pas du tout à ce qu'elle agisse… Mais d'un certain côté, ça faisait un peu avancer son opération Cupidon…

La chemise du détective enfin ouverte, Stella put voir l'énorme cicatrice ornant l'abdomen de Flack et, tout comme Jessie la veille, ne put s'empêcher de la toucher avec une extrême délicatesse. La scientifique sentit d'ailleurs le jeune homme frissonnait sous ses doigts et leva doucement son regard émeraude vers lui, le plongeant dans ses très beaux yeux bleus. Elle devait lui dire quelque chose…

Bon ! Sur ce coup-là, Jessie se sentait un peu de trop là…Mais, en principe, elle avait pensé à ce stratagème-ci pour l'aider à dépasser son dégoût de lui-même, sa honte. Pas à le faire avancer vers Stella…Décidément, rien ne se passe jamais comme elle le prévoyait…

Stella (avec douceur) Tout va bien, Flack. Cette cicatrice ne changera jamais qui vous êtes, ce que vous êtes : un homme doux et courageux. Pour moi, vous resterez toujours Don Flack Jr, l'un de mes meilleurs amis et l'homme qui m'a aidée, soutenue après Frankie…

Jessie fronça doublement les sourcils : déjà, le terme « meilleur ami » devait disparaître pour devenir « amant » voire même « meilleur amant ». Mais bon, n'allons pas trop vite. Et qui était ce Frankie ? Vraiment, Jessie détestait les mystères… Puis, une idée lui vint. Une merveilleuse idée…Oui, demain, elle saurait…La phase Deux devait être mise sur pieds dès ce soir…Reste plus qu'à convaincre une certaine personne…

Alors que Stella continuait à toucher, voire caresser avec légèreté et douceur l'horrible cicatrice et que Jessie les observait d'un regard protecteur, Danny débarqua dans les vestiaires et se figea net face à ce qu'il voyait : Jessie en soutien-gorge, affriolant en plus, Don la chemise totalement ouverte et Stella entrain de toucher son meilleur ami. Où était-il tombé ? Dans la quatrième dimension ?

Danny : Heu…Je dérange peut-être ?

A l'arrivée de Danny, Stella retira vivement sa main du torse de Don tandis que ce dernier se recouvrit le corps avec rapidité, tous deux très embarrassés.

Jessie (malicieuse) Non, Danny. Tu tombes bien, en fait. Tu viens nous rejoindre ?

Danny (s'étouffant, interloqué) Pardon ?

Et devant le visage déconfit du jeune expert, Jessie ne put s'empêcher de rire aux éclats. Vraiment, c'était trop facile de démonter ce petit monde…