67-Oxygène
Le niveau de l'eau avait considérablement augmenté, obligeant Flack et Stella à nager pour garder la tête hors de cette eau glaciale. Enfin…Plus exactement, c'était surtout Flack qui nageait…Pour deux. En effet, la scientifique était littéralement frigorifiée et le moindre mouvement la faisait souffrir, crispant ses muscles, provocant ainsi des crampes très douloureuses. De plus, seul le corps de Don collé au sien lui donnait un peu de chaleur et le détective ne comptait pas la lâcher de sitôt. Flack s'était fait une promesse et il comptait bien la tenir…
Stella était surprise par la surprenante détermination de Don. Sa claustrophobie et toutes ses peurs liées à l'explosion dont il avait été victime étaient supplantées par sa forte volonté de survivre. Ce que la scientifique ignorait, c'était que cette volonté inébranlable était accrochée à une seule pensée : sauver Stella. Et Flack comptait bien y arriver…
Le jeune homme ne cessait de réchauffer l'experte, frottant ses mains sur ses bras, resserrant son manteau épais et sa veste sur son corps svelte tout en continuant à se mouvoir pour que tous deux restent à la surface. Mais bientôt, la fraîcheur de l'eau ne fut plus leur principal problème…
Maintenant, une vingtaine de centimètres séparait la surface de l'eau au plafond de la buanderie et Don savait exactement ce qu'il devait faire à cet instant précis, le prévoyant depuis le moment même où l'eau avait atteint le niveau du lave-linge où ils s'étaient installés quelques minutes auparavant, pour que Stella vive. Le détective n'avait rien dit de son idée à Stella car il savait qu'elle refuserait qu'il la mette à exécution. Mais Flack ne voulait pas perdre l'experte…
Nageant avec précaution, maintenant toujours Stella contre lui, le jeune détective se plaça sous le conduit d'aération, continuant à la réchauffer un maximum, et se stabilisa comme il put. Heureusement qu'il était bon nageur…
Regardant vers le haut discrètement, Don se mit à respirer calmement malgré le froid qui envahissait son corps. On aurait vraiment dit que des milliers d'aiguilles lui transperçaient la chair et malgré ses mouvements pour nager sur place, la chaleur ne voulait manifestement plus l'habiter…
Continuant ses réflexions en observant la gaine d'aération, le détective pensa à ce qu'il allait faire d'une minute à l'autre. La manœuvre n'allait pas être simple mais c'était la seule idée qu'il avait pour le moment…
Stella se tourna soudain dans ses bras, reportant son attention sur elle, et noua ses bras autour de son cou, se positionnant pour ne pas gêner ses mouvements actuels.
Stella (claquant des dents, de la buée sortant de sa bouche) Je…Je…suis désolée, D… Don…
Don (dans le même état que Stella, surpris) P…Pourquoi ?
Stella : De…De ne pas…t'a…t'avoir parlé…de mes…sen…timents…plus tôt…
Don (avec un sourire rassurant) Tu…n'es…p…pas la…seule fautive…tu sais…Moi au…ssi, j'aurais dû…me déclarer…depuis long…temps… (roulant des yeux de façon comique) Di…Disons que nous…sommes deux…idiots…
Stella (pleurant doucement) Je…Je suis…navrée que…ça se finisse…comme ça…
Don (son regard bleu déterminé) Ça ne se…finira pas comme ça, Stella ! Je te le promets ! (bas pour qu'elle ne l'entende pas) Du moins, pas pour toi…
Finalement, l'eau les submergea complètement et Flack put alors commencer sa manœuvre. Attendant un peu qu'il n'ait plus d'air, il remonta ensuite le long du conduit métallique, atteignant la surface, prit une bonne goulée d'air avant de replonger et rejoignit rapidement Stella, qui commençait à couler lentement. Don l'attrapa par la taille et la ramena vers le haut puis posa enfin ses lèvres sur les siennes, à la grande surprise de la scientifique. Mais à quoi jouait-il ?
Bientôt, Don la força à ouvrir la bouche et ouvrit en même temps la sienne pour lui insuffler l'air qu'il avait récolté auparavant. Quand il termina la manœuvre, il sourit à Stella avec confiance et amour et repartit vers le conduit pour reprendre une nouvelle grande bouffée d'oxygène. La scientifique le regarda, totalement atterrée, comprenant ce que Don comptait faire, et refusa ce nouvel oxygène qu'il lui ramenait, le visage exprimant toute sa tristesse. « Non, Don ! Ne fais pas ça ! Ne fais pas ça pour moi ! » hurlaient son cœur et son âme. Mais Flack était quelqu'un de très têtu et la saisit fermement mais doucement par les épaules, plongeant son beau regard bleu dans le sien, ne lui laissant aucune alternative.
« Je ne veux pas que tu meurs, Stella ! Tu dois survivre ! Ne m'oblige pas à employer la force… » pensa Flack, essayant de faire passer le cri de son âme à travers son regard. Et Stella comprit. Elle sut qu'elle ne pourrait pas l'empêcher de se sacrifier pour elle, qu'elle ne pourrait pas l'empêcher de lui donner tout son oxygène et, finalement vaincue, elle le laissa faire, gardant la sensation agréable de ses lèvres sur les siennes dans sa tête comme un précieux souvenir. « Tu es fou, Don…Tu es fou… » pensa-t'elle irrationnellement. Pourquoi s'entêtait-il autant ? Elle l'aimait tellement ! Alors, l'idée de le perdre la tuait…À cette pensée, Stella leva les yeux vers le détective, de nouveau reparti dans le conduit. Lui aussi devait avoir la même pensée qu'elle. La perdre le tuerait…Et il se sentait trop faible pour tenir sans elle, alors que Stella était forte, plus forte que lui…Du moins, c'était ce qu'il pensait…
Flack réitéra l'opération une bonne demi-douzaine de fois jusqu'à ce que le conduit soit devenu trop étroit pour une prochaine remontée. Ainsi, il fit son dernier voyage vers Stella, se laissant envahir par le froid au passage, cessant tout mouvement inutile dès qu'il rejoignit Stella. Il donna une dernière fois son oxygène, en y mettant une certaine tendresse, et lui sourit une nouvelle fois, ses yeux bleus parlant pour lui : « J'ai fait ce que j'ai pu, Stella. Tu vivras. Je jure bien que tu vivras ! » Le détective laissa le froid de l'eau s'emparer de son corps lentement. Si on les trouvait, les secouristes auraient plus de chances de le sortir d'une hypothermie que d'une noyade…
Stella vit avec horreur le grand corps de Flack se crisper, signe évident d'une crise hypothermique, et fut surprise de voir le jeune homme continuer à lui sourire malgré la douleur, rassurant et aimant. La scientifique aurait voulu crier, hurler sa souffrance, son refus de son sacrifice, mais si elle le faisait, tout ce que Don avait fait pour la maintenir en vie n'aurait servi à rien. Son cœur et son âme pleurèrent à sa place, criant toute sa peine : « Don ! Non ! Pourquoi ? Pourquoi as-tu fait ça ! Qu'est-ce que je vais faire sans toi ! Ne me laisse pas toute seule ! Je ne suis pas aussi forte ! Doooooon ! »
Stella ignorait si elle pleurait ou pas avec l'eau qui l'entourait de toute part mais son beau visage exprimait toute sa douleur, toute sa tristesse et elle sentit son cœur se briser en mille morceaux, comme du cristal. Pourquoi Don avait-il fait ça ?
La dernière pensée de Flack, maintenant totalement glacé, avant que tout ne devienne noir autour de lui fut « Stella… ». Son corps atteignit ensuite doucement le sol de la buanderie sous les yeux horrifiés et malheureux de Stella.
Mais une colère s'empara de l'experte. Elle refusait que Don meure, elle ne voulait pas le perdre comme ça, à cause d'une bombe qui avait déjà failli le lui arracher ! Cherchant un objet lourd, Stella aperçut un extincteur et s'en saisit avant de commencer à en frapper la porte avec le plus de force qu'elle pouvait, avec une seule pensée en tête : « Tu ne mourras pas, Don ! »
