Titre : « Vivre »
Auteur : Mokoshna
Manga : Naruto
Crédits : Naruto est la propriété de Masashi Kishimoto et de Jump. Je ne reçois pas d'argent pour cette fic, je ne risque pas d'en donner à qui que ce soit (vu l'état de mes finances ça n'irait pas loin de toute façon).
Avertissements : Spoilers du manga jusqu'au volume 26, chapitre 233. Après ça n'a plus vraiment d'importance puisque la fic suit sa propre voie. Par conséquent l'histoire risque d'être un peu (beaucoup ?) AU. Du Yaoi avec du SasuNaru, du Het avec du NejiHina, du LeeSaku, et bien d'autres encore mais ça vous verrez bien...
Commentaires artistiquement idiots de l'auteur : Pas grand-chose... Vu le perso et les circonstances, c'est encore moins actif que le dernier chapitre... Enfin... Ah, pendant que j'y pense, je ne sais pas si je l'ai déjà dit mais la fic est basée sur le manga exclusivement. Je n'ai jamais vu l'anime et je ne le ferais pas, je crois. Donc il se peut que certains détails que je donne aient déjà été développés et d'une manière différente. Ce serait gentil de les oublier, dans ce cas-là... Merci. Et j'espère que ma fic continuera à vous plaire jusqu'au bout.
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Chapitre 6 / Adolescence : Hinata
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Naruto se mit à trembler des pieds à la tête. Il pouvait sentir le regard brûlant de Sasuke sur son corps nu. Il avait tellement honte ! Il aurait voulu se cacher, cacher ce corps que son ami désirait avec tant de force... Le petit ricanement qu'émit Sasuke glaça un peu plus son coeur. La main qu'il fit glisser doucement, lentement sur sa peau le fit frissonner. Elle lui caressait le ventre avec tendresse, mais le sourire qu'avait le garçon brun n'avait rien d'aimable. Il était... carnassier. Naruto avait l'impression d'être une proie fragile entre ses griffes. Sasuke parut surpris ; d'un geste, il essuya la larme solitaire qui avait coulé de l'oeil droit de son ami. Puis il l'avala avec un air satisfait.
- Tu as peur ? chuchota-t-il à son oreille.
Naruto hocha la tête.
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- Hinata ?
Elle ouvrit les yeux. La lumière du jour l'aveugla un court instant, puis elle aperçut les contours du visage de son cousin. Des larmes brillantes, comme des perles blanches mises à la lumière, coulaient de ses paupières closes. Neji la contempla avec perplexité, ne sachant trop quoi faire.
- Je vais bien, murmura-t-elle doucement. J'ai juste fait un autre rêve.
- Encore ?
Il avait sa voix des jours de réunion avec le Conseil. Elle se dépêcha de le rassurer.
- Mais ça n'était pas aussi grave que les autres fois ! Au moins, tu m'as réveillée à temps...
Ca ne l'empêchait pas de pleurer. Neji la prit dans ses bras, en prenant bien soin de ne pas la serrer trop fort. Hinata ne bougea même pas. Le kimono en soie fine qu'elle portait glissa un peu, révélant une épaule blanche et la courbure délicate de sa nuque. Neji rougit et détourna la tête. D'un geste vif, il remit son vêtement en place, sans quitter des yeux la porte en papier de riz de sa chambre.
- Tu ne devais pas partir en mission aujourd'hui ? demanda-t-elle malgré la source qui s'écoulait de ses yeux.
- Peu importe. Je vais annuler. Ils trouveront quelqu'un d'autre.
- C'est ce que tu as dit la dernière fois. Tu devrais y aller.
- Mais...
- Je vais bien. Oui, je vais bien.
Mais ni elle ni lui ne semblaient convaincus par les mots qu'elle venait de prononcer. C'était trop tôt. Son coeur était comme une plaie vive au soleil ; elle s'ingéniait à essayer de la recouvrir mais elle n'avait ni baume, ni pansement... Juste ses mains nues et celles de son cousin. Elle leva ses bras affaiblis, qui entourèrent en tremblant la taille de Neji. Le sanglot qu'elle poussa alors qu'elle avait la tête enfoncée dans l'ouverture de son yukata résonna dans le coeur de son nouveau fiancé ; il sentit un flot puissant et incontrôlable de haine l'envahir. Il en voulait à tous ceux qui avaient fait du mal à sa Hinata, d'une manière ou d'une autre. Naruto qui lui avait imposé une telle épreuve, malgré l'amour qu'elle éprouvait pour lui. Sasuke qui avait emmené Naruto loin d'elle. Sakura qui l'avait convaincue de l'accompagner dans une si périlleuse quête. Le Conseil qui la gardait loin de tous ceux qu'elle aimait, afin de préserver une image illusoire de leur clan. Hiashi qui avait une nouvelle fois abandonné sa fille à son sort. Hanabi qui regardait sa soeur comme une étrangère, un poids mort. Kurenai Yuuhi qui avait pris Hinata comme élève et l'avait menée à la voie du combat. Kiba Inuzuka et Shino Aburame qui venaient sans cesse l'importuner en lui posant des questions sur sa vie actuelle et qui souhaitaient l'emmener avec eux. Il en voulait même à son équipe qui l'avait laissé partir sans essayer de l'arrêter, engoncés qu'ils étaient dans leurs propres problèmes ! Il méprisait le village qui avait permis à Naruto de rester entre ses murs. Et plus que tout, il se haïssait pour ne pas avoir pu protéger sa Hinata.
- Non ! cria-t-elle, paniquée. Il ne faut pas !
Et elle tirait sur les vêtements de Neji, elle secouait la tête en offrant un visage peiné... Il finissait toujours par oublier sa rancoeur pour se concentrer sur elle. Elle, sa cousine bien-aimée, la personne à qui il avait décidé de dédier sa vie...
- Je suis là, dit-il doucement. Et cela me suffit.
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Naruto avala goulûment le bol de ramen que Sasuke lui avait apporté. Il devait être de bonne humeur, aujourd'hui. Il l'avait emmené au village, il lui avait acheté un masque de renard qu'il avait remarqué sur un stand, accroché au milieu des autres. Sa forme et l'expression coquine de son sourire lui avait tout de suite plu ; à sa grande surprise, Sasuke l'avait détaché et avait payé le prix que lui réclamait le marchand. Puis il le lui avait remis avec le sourire.
- Ca t'irait bien, avait-il dit avec affection.
Par la suite, il avait eu droit à des dango, un ramen et il aurait peut-être des takoyaki un peu plus tard... Une jeune femme potelée leur avait dit que les meilleurs se trouvaient sur la Grand Place du village, près de la fontaine. Il avait hâte d'y aller. Mais pour l'instant, son ramen réclamait de l'attention.
Le nez plongé dans la soupe, il ne remarqua pas l'expression dure que prit le visage de Sasuke à ce moment. Il regardait autour de lui en souriant d'un air étrange.
- Bientôt, murmura-t-il. Il sera temps de voir de quoi tu es capable, mon Naruto.
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La première fois que Hinata s'était réveillée, après des mois plongée dans un état statique peu engageant, elle avait hurlé de toute la force de ses poumons en réveillant la maisonnée. Il fallait dire qu'il était tard ; Neji vit que la pendule de sa chambre affichait presque deux heures du matin. Elle était belle, cette pendule, couverte de fines dorures ouvragées. Ce n'était pas son style mais il n'avait pas vraiment choisi la décoration. Il avait réussi à convaincre le Conseil de le laisser emménager dans la chambre faisant face à celle de Hinata ; il n'allait pas se plaindre d'une pendule un peu trop richement décorée, c'était absurde. Il se leva en hâte et se précipita au chevet de sa cousine. Hinata avait besoin de lui !
Il la trouva en larmes, les mains crispées sur ses yeux. Personne ne viendrait la voir : les serviteurs avaient leur chambre à l'autre bout du domaine et aucun membre du clan à part lui ne se dérangerait pour elle, sauf si elle faisait trop de bruit et les empêchait de dormir... Il réfréna le pincement haineux qu'il ressentit au coeur pour se baisser devant la silhouette frêle de sa cousine. Elle tremblait ; il voulut la prendre dans ses bras, comme à son habitude lorsqu'elle faisait un mauvais rêve ou qu'elle ne se sentait pas bien, mais elle leva alors des yeux paniqués vers lui et le repoussa.
Il fut surpris ; d'habitude, elle ne réagissait à aucun stimulus extérieur... Le regard confus qu'elle lui lança était conscient. Il n'osait pas trop espérer...
- Hinata ? C'est toi ?
- Ne... Neji ?
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- Non, je ne peux pas, fit la voix brisée de Naruto.
Sasuke lança vers lui un regard empli de mépris. Le garçon blond détourna les yeux ; il avait devant lui l'image de la Grand Place, minuscule du fait de la hauteur à laquelle ils étaient... Il vit plusieurs familles qui s'amusaient, des femmes avec l'homme qu'elles aimaient, des enfants qui couraient en riant. Une petite fille aux couettes blondes, dont les grands yeux verts n'étaient pas sans lui rappeler ceux de Sakura, se précipita vers sa mère en lui tendant le jouet que son père venait de lui offrir.
- Tu m'abandonnerais, alors ? Tu trahirais ta promesse ?
- Bien sûr que non ! Mais pas ici ! Pas avec tous ces gens !
- Où, alors ? Quand ? Il n'y a pas de meilleur moment ! La créature est prête ! Toute cette agitation a dû lui donner faim, elle n'attend plus qu'on la libère...
- Mais pourquoi dans ce village ? On n'aurait pas pu l'emmener loin d'ici ?
- Ne sois pas stupide. Comment tu voudrais faire ça ? C'est ici que se trouve son repaire, sous le village Hotaru !
- Je...
Sasuke secoua la tête d'un geste rageur. La mine furibonde qu'il arborait peina Naruto ; mais il y avait tellement d'innocents qui risquaient d'être blessés, ou pire... Il braqua son regard sur la famille de la petite fille qu'il avait aperçue. Elle semblait tellement heureuse, et ses parents la portaient comme le plus précieux des trésors... Que leur arriverait-il s'ils lâchaient le Tsuchigumo sur eux ? C'était une créature féroce et de surcroît, affamée. Si le plan de Sasuke ne marchait pas, c'en était fait de ce village et de ses habitants.
Ses yeux s'écarquillèrent brusquement de surprise. Son visage, jusqu'alors d'une belle teinte rosée due au vent fort qui soufflait au sommet du bâtiment, prit un aspect cireux. Il venait d'apercevoir trois jeunes filles en kimono qu'il connaissait bien, trois filles qui savouraient des takoyaki avec délice, bien tranquillement assises sur le rebords de la fontaine. Hinata parlait doucement avec Ino, celle-ci agitant ses longs cheveux devant elle en les montrant avec fierté. Sakura paraissait bien un peu pâle, mais la coiffure simple qu'elle s'était faite et le kimono au motif fleuri qu'elle portait lui allaient à ravir. Il sentit son coeur battre un peu plus fort à la vue de la fille qu'il aimait.
Derrière lui, Sasuke avait tracé un sceau gigantesque sur le sol. Le toit de l'immeuble sur lequel ils se trouvaient se mit à trembler légèrement ; Naruto se retourna à temps pour voir son ami activer l'invocation, un sourire fou sur les lèvres. Une gerbe de lumière rouge flotta autour du sceau et l'enveloppa.
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Hinata adorait lorsque ses anciens camarades de l'équipe huit venaient la voir. Kiba apportait des fleurs sauvages cueillies dans la nature avec Akamaru et Shino avait toujours quelques bonbons à lui donner, bien cachés dans ses vêtements amples. Elle savait que Neji s'inquiétait à chacune de leurs visites mais elle aimait tellement ses amis, elle n'aurait voulu se séparer d'eux pour rien au monde... Ils étaient ses frères bien-aimés, sa famille. Elle regrettait un peu que Kurenai ne les accompagne pas, comme au bon vieux temps... La mystérieuse équipe huit, réunie autour de son professeur. Elle aimait bien cette appellation. Cela leur donnait un côté intéressant, elle avait toujours espéré que Naruto la remarquerait ainsi. Même s'il se contentait d'envisager le tout et non sa personne seule, au moins il aurait eu le regard braqué vers l'endroit où elle se trouvait...
Elle avait été tellement naïve. Mais c'était fini, maintenant. Elle accueillait ses amis avec son plus beau sourire, celui qu'elle leur réservait spécialement. Ils partaient insatisfaits, même si elle leur affirmait avec toute l'énergie dont elle était encore capable qu'elle était bel bien heureuse, dans sa famille, aux côtés de son futur époux... Sa famille qui n'appréciait pas la venue de ces intrus au clan, mais pas pour les mêmes raisons que Neji. Ils voulaient surtout garder leur prise sur la précieuse fiancée du futur chef du clan, leur monnaie d'échange contre la coopération totale de son cousin...
Kiba et Shino passaient outre les regards mauvais et les murmures peu avenants qui les accueillaient à l'entrée. Il fallait bien plus pour les intimider, et leur Hinata valait bien toute cette peine... De toute façon, leurs familles respectives étaient derrière eux pour les soutenir. Les Inuzuka et les Aburame exerçaient une influence certaine au village. Elle n'égalait certes pas celle du clan Hyuuga mais ces deux familles étaient indispensables à Konoha, surtout en ces temps troublés. Les contrarier pour un tel sujet n'était pas une très bonne idée. Un seul mot à la mère de Kiba ou au père de Shino, et le clan Hyuuga aurait eu de sérieux problèmes sur le dos.
Quelquefois, le Hokage elle-même apparaissait à la porte de sa chambre, et elle était immanquablement accompagnée de Kurenai. Ces visites formelles étaient bien les seules fois où elle pouvait espérer apercevoir son ancien maître. Hinata accueillait ces illustres visiteurs avec cérémonie en leur servant le thé comme il se devait. Kurenai la fixait alors longuement sans un mot, et cela dérangeait presque la jeune fille qui rougissait un peu devant le mutisme inhabituel de son ancien professeur. Quant à Tsunade, elle acceptait la tasse tendue avec le sourire. Hinata y joignait toujours un petit rouleau de parchemin où elle avait méticuleusement retranscrit ses rêves.
- Je suis heureuse de voir que tout va bien, disait Tsunade. Ton fiancé te traite-t-il comme il faut ?
- Oui. Neji est très gentil avec moi.
- Bien, bien.
Et elle lui tendait en douce une fiole de médicament qu'elle avait préparé spécialement à son intention. Hinata la prenait et la cachait bien soigneusement dans son obi, tandis que Kurenai lui lançait des regards emplis de douleur. La jeune fille lui faisait alors un sourire tout doux, tout doux, et la jeune femme repartait avec le Hokage, l'esprit hanté par le visage triste de son ancienne élève.
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Sasuke pouvait se montrer étonnamment tendre lorsque l'envie lui en prenait. C'était assez rare, mais Naruto chérissait ces moments comme autant de cadeaux précieux. Le soir du combat contre le Tsuchigumo, par exemple, il l'avait tendrement enlacé durant toute la nuit, murmurant dans son oreille des mots réconfortants, censés apaiser son humeur démente. Depuis sa confrontation avec ses anciens camarades, Naruto était tiraillé par le remord. L'image d'Ino baignant dans son sang, celle de Hinata qui se tordait de douleur dans les bras de Neji, Sakura qui s'était évanouie... Il n'avait rien pu faire. Il était capable d'affronter un monstre géant à mains nues mais sauver ses amies, c'était au-dessus de ses forces ! Surtout quand Sasuke était impliqué. Et son compagnon qui les regardait comme autant d'obstacles gênants sur la route de sa vengeance personnelle...
Il se blottit un peu plus contre la poitrine chaude qui l'avait accueilli, se demandant combien de temps encore cela durerait. Cela ne faisait que quelques mois mais il avait l'impression que de longues années s'étaient déjà écoulées. Konoha était si loin... Plus que jamais, le murmure du village lui manquait. Beaucoup de choses, en fait. Le ramen exquis qu'il goûtait avec délectation à Ichiraku Ramen. La voix mélodieuse de Sakura lorsqu'elle le grondait sur son idiotie. Les bêtises de Konohamaru, la présence de ses amis d'académie, le sourire doux du professeur Iruka quand celui-ci le voyait.
Iruka ! Il ne lui avait même pas dit au revoir. C'était son regret le plus vif. Après tout, le professeur d'académie était son sauveur, la personne qui lui avait révélé qu'il n'était pas si indésirable à Konoha. La première personne qui lui avait jamais dit qu'il était important, que sa vie comptait autant pour lui que celle de toutes les autres et même davantage. Iruka. Il était sûr que même avec sa trahison, il l'accueillerait encore à bras ouverts. Il aurait bien voulu pouvoir lui envoyer un message pour lui dire qu'il allait bien, qu'il reviendrait bientôt avec Sasuke... Une goutte glacée tombant du plafond lui remit les idées en place. Il grelotta, malgré la chaleur inhumaine qui se dégageait du corps de Sasuke.
Ils dormaient dans une grotte emménagée par les soins de son ami, aussi loin que possible de Hotaru. Le sol était froid, mais le garçon brun avait étalé quelques peaux de bêtes diverses qu'ils avaient tués plus tôt. Leur viande se trouvait à présent dans des écuelles en bois fabriquées à la main, bien cuite et assaisonnée. Naruto n'y avait pas touché. Comment aurait-il pu manger en sachant ce qui était arrivé ?
- Qu'est-ce que nous avons fait ? soupira-t-il. Ino, Hinata, Sakura...
- Shh, fit doucement son ami. Elles n'auraient pas dû se trouver là. C'est de leur faute, non de la nôtre.
- Et Ino ! Pourquoi l'as-tu attaquée ? Elle était... elle était...
Elle était étendue à terre, et son sang s'écoulait de la main de Sasuke... Il n'avait pas voulu en croire ses yeux, au départ. Lorsqu'ils étaient partis, après qu'il ait supplié Shikamaru de s'en aller avec elles, Sasuke avait essuyé sa main sur un bout de toile en tissu qui s'était détaché avec le choc, laissant une traînée rouge au milieu des bibelots éparpillés au sol.
- Ce n'était pas elle que je voulais atteindre, chuchota-t-il avec malice. Enfin, ce n'est pas grave. Ce n'est que partie remise.
Naruto ouvrit de grands yeux effarés à ces mots. Avec peine, il quitta les bras de Sasuke pour se lever. Ce dernier gardait une mine impassible, mais ses doigts, des doigts qui avaient caressé avec tendresse ses cheveux, des doigts qui avaient failli tuer une amie... Naruto fixa ses doigts avec une colère sourde.
- Tu... Sakura ! C'est Sakura que tu voulais attaquer, n'est-ce pas ? Ne mens pas !
Sa pose tendue fit ricaner son interlocuteur.
- Et si c'était le cas ?
Naruto serra les poings, prêt à bondir. Sasuke n'avait pas bougé.
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Le plat préféré de Neji était les onigiri. Hinata s'en était étonnée, ce n'était pas vraiment un plat mais il lui avait dit que ça lui était égal. Nourrissant et sain, facile à préparer et à emporter : en mission, c'était l'idéal. Le riz froid pouvait se conserver un certain temps sans que le goût en soit terni. La jeune fille s'était donc ingénié à trouver de nouvelles recettes pour lui, toutes plus délicieuses les unes que les autres. Elle était d'ailleurs devenue une experte dans la préparation du riz. En fait, elle avait découvert qu'il aimait le riz en général. Son cousin avait des goûts assez classiques : la nourriture japonaise et la musique traditionnelle lui plaisaient, ainsi que les vêtements de coupe plus ancienne et les livres de guerre. Mais comme Hiashi montrait les mêmes préférences, il s'était résolu à porter des vêtements un peu plus proches de sa tranche d'âge pour ne pas lui ressembler. Avec le temps, il s'était un peu réconcilié avec son oncle ; il avait donc petit à petit troqué sa garde-robe habituelle avec celle qu'il avait toujours voulu mettre.
En plus, Hinata lui avait dit que ses nouveaux vêtements lui allaient mieux... Il avait été sincèrement heureux. Sa Hinata était si mignonne... Elle avait accepté de porter des kimono assortis aux siens, comme il l'avait rêvé depuis leur première rencontre. Par la suite, les événements tragiques de sa famille lui avaient embrouillé les idées, mais il n'avait jamais pu oublier vraiment la forme tremblante de la petite fille timide qui avait fait battre son coeur de manière inexpliquée, son joli kimono bleu lui enserrant la taille. Il lui avait acheté le même que ce jour-là, et elle le portait toujours lorsqu'il revenait de mission, pour lui faire plaisir.
Hinata, elle, aimait mettre un peu d'exotisme dans ses repas en préparant plutôt des plats étrangers. Elle appréciait particulièrement la cuisine un peu épicée du pays du Vent. Elle écoutait des groupes de musique moderne en cachette et sans sa timidité maladive et son manque total de confiance en soi, elle aurait porté les vêtements qu'affectionnaient d'ordinaire les jeunes filles de son âge, à la coupe sexy et mignonne à la fois... Mais elle trouvait sa silhouette affreuse et la cachait sous une énorme veste et un pantalon inesthétique. Pas la peine de montrer son corps ingrat au monde, et surtout pas à Naruto ! Elle était sûre qu'il aurait détourné les yeux en voyant sa silhouette. A la place, elle lisait des romans à l'eau-de-rose, où l'héroïne un peu maladroite mais pleine de bons sentiments et de volonté finissait toujours par l'emporter sur les ennuis qui lui tombaient dessus. Elle trouvait l'amour, se mariait avec l'homme qu'elle avait choisi, fondait une famille heureuse. Fin.
Ce n'était pas sa fin à elle.
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Sasuke avait voulu tuer Sakura. Cette révélation était comme une douche froide pour Naruto. Il savait que son ami était prêt à tout pour accomplir sa vengeance, mais de là aller jusqu'à attenter à la vie de leur ancienne camarade, leur amie... La fille qui l'aimait jusqu'à vouloir le suivre dans sa quête ! Mais il pouvait parler, lui. Il était bien là, avec Sasuke, cherchant un moyen de le rendre sans cesse plus puissant... Et ils l'avaient trouvé, puisque Naruto avait accepté de mettre son corps et surtout ce qu'il renfermait à la disposition de son nouveau maître. Il appartenait à Sasuke aussi sûrement que ses cheveux étaient blonds... La proposition qu'il lui avait faite, les promesses qu'ils avaient échangées, tout était de son fait. Il ne le niait pas. Mais il refusait que des innocents aient à pâtir de son choix, et surtout pas ceux qu'ils aimait !
- Tu... tu es... ignoble ! Comment tu as pu ?
Sasuke ne répondit pas. A la surprise de son ami, il se mordit la lèvre jusqu'au sang.
- Je m'en doutais. Tu l'aimes encore.
- Quoi ?
- Sakura.
- Je...
Il détourna ses yeux de ceux de son compagnon. Sasuke les gardait baissés, de toute manière. Il refusait de montrer la moindre émotion à son ami. Ca le rendait dingue ! Pourquoi ne pouvait-il pas le laisser partager ses peines, comme Naruto le faisait ? Il avait suivi Sasuke pour essayer de l'aider, pas pour qu'il se referme comme une huître à chaque difficulté qu'ils rencontraient ! Mais il n'arrivait pas à atteindre son coeur, même après tous ces mois passés à ses côtés.
- Et si c'était le cas ? fit-il en raillant ses mots de tantôt, espérant le faire réagir.
- Alors qu'est-ce que tu fais là ?
- Quoi ? Tu le sais très bien !
- Mensonges ! hurla son ami.
Et d'un geste violent, il avait frappé contre la paroi de pierre de la grotte. Naruto vit avec horreur que le choc avait ouvert une plaie conséquente sur sa main. Le sang coulait à grosses gouttes sur le sol et avait même taché certaines fourrures, mais son vis-à-vis semblait ne rien sentir.
- Sasuke ! Tu saignes !
- Qu'est-ce que ça peut te faire ? Je ne suis pas Sakura ! répliqua-t-il avec amertume.
- Saloperie !
Et Naruto lui asséna un formidable coup de poing qui le projeta au fond de la grotte.
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La tasse avait percuté le sol en émettant un bruit de clochette. Hinata contempla avec consternation les éclats qui jonchaient le sol. Quelle maladroite elle faisait ! C'était la tasse préférée de Neji, et elle était à présent en miettes. Elle sortit la tête de sa chambre, mais aucun serviteur n'était dans les parages. Comment allait-elle nettoyer ce désastre ?
Elle n'avait pas le choix. Prenant son courage à deux mains, elle sortit dans le couloir, à la recherche d'une aide ou d'un balai et d'une pelle. Elle tremblait néanmoins un peu en marchant. Cela faisait si longtemps qu'elle n'était pas sortie toute seule...
- Qu'est-ce que tu fais là ? fit une voix vaguement hostile.
Hanabi la fixait de ses yeux vides, identiques aux siens. Hinata émit un sourire crispé. Malgré leur lien, elle n'avait jamais été très proche de sa soeur qu'elle savait plus douée qu'elle. Hanabi était l'héritière parfaite du clan Hyuuga, tandis que Hinata n'était qu'un fardeau inutile... La jeune fille baissa la tête.
- Je... commença-t-elle d'une toute petite voix.
- Je n'entends rien. Parle plus fort... grande soeur, et son ton était bien un peu railleur.
Hinata se mit à frissonner, de plus en plus fort. Elle avait toujours aimé sa petite soeur, même si celle-ci ne l'appréciait guère. C'était compréhensible. Hanabi était l'enfant méritante des Hyuuga, fière de ses origines et de sa manière de vivre. Elle vouait en outre une admiration sans bornes à leur père et au reste de la famille. Alors si tous disaient que Hinata n'était qu'une bouche inutile à nourrir, elle n'avait aucune raison de ne pas les croire. La jeune fille secoua la tête.
- Ce n'est pas grave, dit-elle avec à peine un peu plus de force.
- Pour quoi ? Tu n'as encore rien dit ! Exprime-toi !
- Je...
Elle était sur le point de pleurer. Que sa petite soeur, le bébé qu'elle avait tenu dans ses bras à la naissance, le bébé que lui avait confiée leur mère avant de mourir en couches, lui parle avec tant de hargne...
- Hinata ?
La voix grave de Neji lui apporta tout le réconfort dont elle avait besoin. Elle se tourna vers lui, reconnaissante. Hanabi s'était tue.
- Qu'est-ce que tu fais là, dans les couloirs ?
- Je...
Il se rapprocha d'elle et lui prit la main, doucement, tendrement. Elle sentit ses joues s'empourprer de sa hardiesse. Et Hanabi qui était encore là !
- Je... je suis désolée, j'ai cassé ta tasse... je voulais juste... chercher un balai et enlever les débris...
Elle avait baissé les yeux, s'attendant à entendre la voix déçue de Neji lui adresser des remontrances. Celui-ci se contenta de pousser un soupir rassuré.
- Ce n'est que ça ? Je vais t'aider à nettoyer, ne t'en fais pas. Mais tu ne devrais plus te promener toute seule.
Et ce faisant, il adressa un regard appuyé à Hanabi qui détourna la tête. Etrangement, la petite fille semblait mécontente et frustrée ; Hinata aurait pu jurer qu'elle avait vu quelques fines gouttes brillantes au coin de ses yeux...
- Hanabi... s'inquiétait juste de me voir seule, murmura-t-elle.
- Je n'en doute pas.
Neji commençait déjà à s'éloigner en direction de la chambre, la main de Hinata bien fermement agrippée par la sienne. La jeune fille fut un peu surprise ; d'habitude, il ne se permettait un tel étalage de possessivité qu'en présence de son père et de ses amis...
- Vous viendrez au Conseil, Neji ? fit la voix claire de Hanabi dans leur dos. Je serai présente. Père m'a enfin permis d'y assister.
Neji s'arrêta, mais sans se retourner. Hinata fut la seule à voir la grimace méprisante qu'il avait sur le visage. Elle se jura de faire davantage d'efforts.
- Peut-être.
Et il continua son chemin en traînant sa cousine. Hanabi resta seule dans le couloir. L'expression haineuse qu'elle avait était toute entière fixée sur la silhouette de sa soeur.
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Naruto avait fini par soigner et bander les mains de Sasuke, malgré la mine boudeuse du jeune garçon. Il ne fit rien pour le bleu qu'il s'était récolté suite à son coup de poing ; celui-là, il l'avait bien mérité. Il fallait vraiment qu'ils discutent.
- Et d'abord, qu'est-ce que tu as fait à Ino ? demanda-il en fronçant les sourcils.
Sasuke fixa les pansements de sa main gauche qui commençaient à partir un peu partout. Naruto aurait fait un très mauvais médico-nin. Il les délia un à un et les remit en place, de la bonne manière cette fois. Son compagnon s'impatientait.
- Réponds-moi !
- C'est une technique interdite, fit Sasuke d'une voix morne. Je l'ai trouvée dans le même livre que l'invocation du monstre. Elle aspire les réserves de chakra de la victime et empêche celle-ci de les utiliser. Je voulais voir si elle était efficace.
- Et tu as voulu la tester sur Sakura !
- On l'aurait emmenée avec nous. Je l'aurais soignée. Mais Ino...
- Tu n'es qu'un salopard ! hurla Naruto.
- Ce n'est pas mon affaire. Elle n'avait qu'à ne pas s'interposer.
- Elle voulait sauver Sakura, c'est normal ! C'est toi qui... Attends un peu, qu'est-ce que tu voulais dire par l'emmener avec nous ?
Sasuke ne répondit pas.
- Sasuke !
- Elle te manque, non ? fit-il si doucement que Naruto dut tendre l'oreille. Ta Sakura.
- MA Sakura ? C'est de toi dont elle est amoureuse, je te rappelle, tête de piaf !
Sasuke gardait les yeux obstinément baissés. Naruto poussa un cri frustré.
- Aaargh ! Tu me rends dingue !
Il marchait de long en large dans la grotte, agité, impatient... Il finit par se planter devant Sasuke d'un air décidé.
- Comment on fait pour la guérir ? Ino, je veux dire.
- Tu... quelle importance, elle ne pourra plus jamais utiliser de chakra.
- C'est pas vrai ? C'est si terrible ?
- Sauf si j'en décide autrement. Mais pour ça, il faudrait retourner au village, où elle se trouve...
- Ouais. C'est pas possible, quoi.
- Mais un bon médico-nin peut bloquer la perte intempestive de son chakra.
- Hein ?
- On peut empêcher qu'elle ne meure à petit feu.
- Alors fais-le !
Sasuke avait détourné les yeux, encore une fois. Naruto en avait marre de ses... ses... aargh, il n'arrivait même pas à trouver de mot à son comportement !
- Tu me le demandes ? fit doucement Sasuke, et Naruto crut détecter une pointe de jalousie dans sa voix.
- OUI !
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Ino était venue lui rendre visite. Hinata était si heureuse de voir qu'elle allait mieux ! Le message de Naruto était donc bien arrivé à temps. Elles passèrent leur après-midi à discuter de choses et d'autres, comme deux jeunes filles ordinaires. Aucune des deux ne voulait aborder les événements de cette journée si elles pouvaient l'éviter. Ino aussi s'était inquiétée du sort de Hinata. A son réveil, Tsunade lui avait donné à lire le rapport de Shikamaru. D'ailleurs, elle ne l'avait pas encore vu, ce nullard... Où se cachait-il ? Il était donc si paresseux qu'il ne pouvait pas venir la voir un peu ?
- J'ai appris pour tes fiançailles, fit Ino en regardant autour d'elle.
La décoration de la chambre était exquise. Hinata avait dû choisir elle-même les éléments qui la composaient. La touche était celle d'une jeune fille, même si l'atmosphère traditionnelle était un peu étouffante. Certainement, cette estampe de fleurs, cette vaisselle mignonne, c'était le fait de son amie. En outre, aucun garçon normalement constitué n'aurait pu choisir de mettre un miroir si joli et une commode qui sentait bon la fraise et le jasmin.
- Oui. Neji est très gentil.
- Mais tu ne le regrettes pas ? C'est quand même ton cousin... et puis il y a...
Mais elle n'arrivait pas à dire son nom. Elle avait remarqué qu'elle subissait un blocage à ce niveau-là. Quant à son béguin précédent pour Sasuke, il était bel et bien fini depuis qu'il avait essayé d'attenter à sa vie. Pourtant, elle n'arrivait pas vraiment à lui en vouloir.
- J'essaie de ne pas trop y penser. Je suis aussi heureuse que je pourrais l'être, ne t'inquiète pas.
- Ah oui ? Et combien de fois tu as répété ces mêmes mots à tout le monde sans y penser ?
Hinata lui adressa un regard surpris, mais Ino n'était pas dupe. S'il y avait une chose qu'elle connaissait au moins aussi bien que les fleurs, c'était le coeur des jeunes filles. Il y en avait assez qui passaient à sa boutique en révélant leurs sentiments les plus profonds à travers les fleurs qu'elles achetaient. Chaque pétale, chaque tige étaient empreinte d'une partie de leur coeur. Son père lui avait dit un jour que leur petite boutique avait vu passer bien plus d'émotion que tous les lieux de rendez-vous de Konoha. C'était là que les sentiments naissants ancraient leur emprise sur leur créateur. Ino était fière de son travail. Et même si elle ne pouvait plus réaliser son rêve et devenir une kunoichi, la vision du visage rayonnant de ses clients, surtout les plus jeunes, quand elle leur tendait le bouquet qui exprimait le mieux leurs sentiments, était amplement suffisant pour calmer sa déception.
- Je suis heureuse, répéta Hinata en versant des larmes aussi pures qu'elle.
Ino lui présenta un mouchoir parfumé au tilleul. Les effluves apaisantes calmèrent un peu son amie, mais elle n'osait plus regarder son amie dans les yeux. Ino fronça les sourcils.
- Neji te traite mal ?
- Non ! Non, pas Neji...
- Ta famille alors ? Je jure que s'ils t'ont fait quoi que ce soit...
- Ino ! Je vais bien, je t'assure.
Elle ne semblait pas convaincue. Ino décida de ne pas l'importuner davantage. Si son amie voulait parler, elle serait heureuse de l'écouter, même si elle ne pouvait pas faire grand-chose à vrai dire... Sauf être là pour elle. Elle ne l'abandonnerait pas.
- Si tu le dis...
Elle finit son thé en silence et partit, non sans avoir promis à Hinata de revenir. Comme elle était plutôt inoffensive, les Hyuuga la laissaient volontiers lui tenir compagnie. Ino usa et abusa de ce droit, et elle apportait régulièrement avec elle un bouquet de sa composition dans lequel elle mettait tout son coeur. En voyant le regard pétillant de Hinata à chaque fois qu'elle posait les yeux dessus, elle ne regrettait aucun effort qu'elle avait mis dans sa fabrication.
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Naruto vit s'éloigner le faucon qui portait le message qu'il avait écrit à Tsunade. Il espérait seulement qu'elle réussirait à sauver Ino à temps. Il ne doutait pas des capacités de la médico-nin légendaire, mais Sasuke avait tellement tardé à lui communiquer les bonnes informations...
- Nous devons partir, avait dit son ami. Il leur sera très facile de suivre la piste de l'oiseau.
Naruto s'était contenté de hocher la tête et de ranger leurs affaires. Sasuke évitait son regard depuis le coup de poing qu'il lui avait donné. Il lui en voulait encore ? C'était frustrant et épuisant, d'essayer de deviner ce que pensait son ami... Naruto laissait couler la plupart du temps. Qu'il boude si l'envie lui en prenait ! Il n'était pas une fille, il ne savait pas comment le consoler. Comment aurait-il pu d'ailleurs, s'il ne savait pas pourquoi Sasuke faisait la gueule ?
- Ca t'arrive, de penser à elle ? fit brusquement la voix de son compagnon, alors qu'ils faisaient une pause dans un arbre.
Naruto regarda les hautes branches au-dessus d'eux. Elles s'enchevêtraient avec élégance ; il ne savait pas sur quelle sorte d'arbre ils étaient perchés mais il fallait avouer qu'il était assez imposant. Il lui rappelait un peu celui de la cour de l'académie. Iruka lui avait révélé qu'il avait été planté par le premier Hokage, des dizaines d'années auparavant. Qu'il ait mis autant de temps pour devenir un tel colosse... Il braqua ses yeux sur Sasuke qui attendait anxieusement sa réponse.
- Quelquefois, dit-il doucement, mais alors je te regarde.
- Et ? demanda Sasuke, la voix tremblante.
Naruto lui caressa la joue du dos de la main, doucement.
- Je suis là, fit-il avec émotion. Et cela me suffit.
A suivre...
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C'était... euh... émotionnel ? J'avoue que c'est pas vraiment ma spécialité, tout ce flot de sentiments... Bon, la prochaine fois, je refais de la baston, au moins j'ai moins honte en écrivant !
